Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler, d'une part, le titre de perception émis le 6 juillet 2021 en vue de la récupération d'un indu d'un montant total de 17 290 euros perçu entre les mois de mars 2020 à février 2021 au titre du fonds de solidarité institué à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de Covid-19 et, d'autre part, la décision du 10 février 2022 par laquelle le directeur général des finances publiques de la Moselle a rejeté sa réclamation préalable obligatoire.
Par un jugement no 2202357 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 24 août 2023 et le 17 février 2024, M. B..., représentée par Me Gasse, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler le titre de perception émis le 6 juillet 2021 et la décision du 10 février 2022 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 10 février 2022 rejetant sa réclamation préalable est entachée d'incompétence de son signataire ;
- la procédure est irrégulière dès lors qu'il n'a jamais reçu la lettre de renseignements du 26 avril 2021, ni la décision du 11 juin 2021 l'informant d'un trop-perçu d'aide de 17 290 euros ;
- les justificatifs qu'il produit établissent qu'il remplissait les conditions de chiffre d'affaires permettant l'obtention des montants d'aide qui lui ont été versés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Par un courrier du 17 avril 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité du moyen soulevé pour la première fois en appel tiré du vice de procédure qui repose sur une cause juridique distincte de celle dont procède le moyen soulevé en première instance relatif au bien-fondé de la créance et qui a ainsi le caractère d'une demande nouvelle qui n'est pas recevable en appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le décret n° 2020-371 du 30 mars 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brodier,
- les conclusions de Mme Mosser, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui exerce une activité de photographe, a obtenu, entre mars 2020 et février 2021, le bénéfice du fonds social de solidarité institué par l'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation. Il a perçu, sur cette période, la somme totale de 18 780 euros. Le 6 juillet 2021, le directeur général des finances publiques de la Moselle a émis un titre de perception en vue du recouvrement d'un trop-perçu de cette aide à hauteur de 17 290 euros. M. B... a formé, le 10 août 2021, un recours préalable contre ce titre de perception, qui a été rejeté par une décision du 10 février 2022. Il relève appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2023 rejetant sa demande dans laquelle il a formulé des conclusions aux fins d'annulation dirigées, d'une part, contre le titre de perception et, d'autre part, contre la décision rejetant son recours préalable.
Sur les conclusions à fin d'annulation du titre de perception :
2. L'article 1er de l'ordonnance du 25 mars 2020 portant création d'un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation a institué " un fonds de solidarité ayant pour objet le versement d'aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation ". L'article 1er du décret du 30 mars 2020 pris pour l'application de cette ordonnance a prévu que le bénéfice de ce fonds serait ouvert aux personnes physiques et aux personnes morales de droit privé résidentes fiscales françaises exerçant une activité économique. Ce décret a fixé les modalités de l'aide financière, qui prend la forme d'une subvention attribuée par décision du ministre de l'action et des comptes publics.
3. En premier lieu, aux termes de l'article 3-1 de l'ordonnance du 25 mars 2020 : " I. - Les aides versées au titre du fonds le sont sur la base d'éléments déclaratifs prévus par décret. / (...) / II. - Les documents attestant du respect des conditions d'éligibilité au fonds et du correct calcul du montant de l'aide sont conservés par le bénéficiaire pendant cinq années à compter de la date de versement de cette dernière. / Les agents de la direction générale des finances publiques et les agents publics affectés dans les services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat peuvent demander à tout bénéficiaire du fonds communication de tout document relatif à son activité, notamment administratif ou comptable, permettant de justifier de son éligibilité et du correct montant de l'aide reçue pendant cinq années à compter de la date de son versement. Le bénéficiaire dispose d'un délai d'un mois pour produire ces justifications à compter de la date de la demande. / En cas d'irrégularités constatées, d'absence de réponse ou de réponse incomplète à la demande prévue au premier alinéa, les sommes indûment perçues font l'objet d'une récupération selon les règles et procédures applicables en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. / La procédure prévue au présent II ne constitue pas une procédure de contrôle de l'impôt ".
4. M. B... soutient que le titre de perception du 6 juillet 2021 a été émis à son encontre à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a reçu ni le courrier du 26 avril 2021 par lequel l'administration engageait la procédure de vérification de l'éligibilité de ses demandes d'aides ni la décision du 11 juin 2021 lui notifiant les résultats du contrôle. Toutefois, il résulte de l'instruction que M. B... n'a contesté, à l'appui de ses conclusions dirigées contre le titre de perception, que le bien-fondé de la créance de l'Etat. Le moyen, soulevé pour la première fois en appel, tiré du vice de procédure, repose sur une cause juridique distincte de celle dont procède le moyen de première instance et a ainsi le caractère d'une demande nouvelle qui n'est pas recevable en appel.
5. En deuxième lieu, il ressort des dispositions du décret du 30 mars 2020 relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, telles qu'applicables à la situation de M. B..., que le versement de l'aide implique, entre autres conditions, qu'il soit justifié d'une perte de chiffre d'affaires de plus de 50 % par rapport à la même période de l'année 2019 ou, alternativement, par rapport au chiffre d'affaires mensuel moyen de l'année 2019.
6. D'une part, il résulte de l'instruction que les chiffres d'affaires de référence déclarés par M. B... sur les formulaires de demande de bénéfice du fonds de solidarité sont systématiquement supérieurs aux chiffres d'affaires mensuels qu'il a déclarés à l'URSSAF ainsi qu'au titre de ses revenus de l'année 2019. Les montants indiqués sont, pour un certain nombre d'entre eux, non corroborés par les factures de prestations qu'il produit, au demeurant établies sans formalisme. Lorsque les chiffres d'affaires déclarés coïncident avec les factures produites, il n'est pas justifié que les sommes correspondantes ont effectivement été perçues par M. B.... D'autre part, en l'absence d'éléments de comptabilité probants corroborés par les mouvements sur les comptes bancaires, il n'est pas non plus justifié du caractère correct des montants de chiffres d'affaires réalisés au cours des mois de mars 2020 à février 2020. Dans ces conditions, le bénéficiaire du fonds de solidarité n'a pas justifié remplir la condition tenant à une perte de chiffre d'affaires d'au moins 50 % par rapport à la période de référence. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration a procédé à la récupération des montants indûment versés.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 10 février 2022 :
7. Il résulte de l'instruction que la décision par laquelle l'administration a rejeté le recours préalable obligatoire formé par M. B... contre le titre de perception, qui est intervenue le 10 février 2022, et non le 10 ou le 12 août 2021 comme indiqué à tort dans le jugement attaqué, a pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de sa demande et ne se substitue pas au titre de perception attaqué. Les vices propres dont cette décision serait le cas échéant entachée sont sans incidence sur le bien-fondé de la demande du requérant tendant à l'annulation du titre de perception en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision du 10 février 2022 ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes à fin d'annulation. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2025, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président,
M. Agnel, président-assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2025.
La rapporteure,
Signé : H. Brodier Le président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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No 23NC02754