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15/05/2025 | FRANCE | N°24NC00515

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 15 mai 2025, 24NC00515


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.



Par un jugement no 2400006 du 2 février 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administrati

f de Strasbourg a, d'une part admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par un jugement no 2400006 du 2 février 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et, d'autre part, rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mars 2024, Mme B..., représentée par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de sa demande ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de l'admettre provisoirement au séjour, dans un délai de quinze jours suivant l'intervention de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, en cas de rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, à elle-même sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision en litige est illégale compte tenu de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ;

S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision en litige est illégale compte tenu de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 21 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Brodier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante arménienne née en 1987, est entrée sur le territoire français le 22 août 2022 selon ses déclarations, afin d'y solliciter l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 30 août 2023. Par un arrêté du 13 décembre 2023, la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Mme B... relève appel du jugement du 2 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir admis la demandeuse au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Mme B... résidait, à la date de la décision en litige, depuis seulement quinze mois en France. Son mari fait également l'objet d'une décision portant éloignement du territoire français. Elle n'établit pas que ses trois enfants ne pourraient pas poursuivre leur scolarisation dans leur pays d'origine. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la courte durée de son séjour en France, la décision faisant obligation à Mme B... de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

4. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui ne fixe pas le pays de destination.

5. En dernier lieu, si Mme B... se prévaut de son état de grossesse, qui datait de moins de deux mois à la date de la décision en litige, elle n'établit pas que celle-ci faisait obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement à son encontre. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale compte tenu de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2023. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, en ce compris les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Airiau et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Martinez, président,

- M. Agnel, président-assesseur,

- Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2025.

La rapporteure,

Signé : H. BrodierLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

No 24NC00515


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00515
Date de la décision : 15/05/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme MOSSER
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-05-15;24nc00515 ?
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