Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la réduction de leur cotisation d'impôt sur le revenu établie au titre de l'année 2018.
Par un jugement n° 2200062 du 17 octobre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 décembre 2022 et un mémoire enregistré le 27 février 2025, M. et Mme C..., représentés par Me Briclot, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la réduction des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que l'administration a entendu taxer au taux de 30 % la plus-value de cession de ses bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise dans la société Voodoo, en lui refusant le bénéfice du taux de 12,8 % prévu par l'article 163 bis G du code général des impôts alors qu'il exerce son activité au sein de cette société depuis l'année 2013 en tant que programmeur et a été nommé directeur général délégué le 1er octobre 2013 ce qui lui confère un statut de salarié ; la circonstance qu'il n'a pas été rémunéré est sans incidence sur l'existence de son activité au sein de la société ;
- la seule qualité de directeur général délégué lui confère le bénéfice du statut de salarié sans exigence d'une rémunération pour l'appréciation de la durée de son activité en application de l'instruction administrative BOI-RSA-ES-20-40 au 12 août 2014.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 juin 2023, ainsi qu'un mémoire enregistré le 17 avril 2025, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
- si la cour devait considérer que l'intéressé remplit la condition de durée d'activité d'au moins trois ans au sein de la société Voodoo, le taux d'imposition serait de 19 % et non pas 12,8 % comme demandé dès lors que les dispositions applicables sont celles issues de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 compte tenu du fait que l'attribution des bons de souscription est antérieure au 1er janvier 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Agnel ;
- les conclusions de Mme Mosser, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Briclot, représentant les requérants.
Une note en délibéré, enregistrée le 2 mai 2025, a été présentée pour M. et Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Par des actes du 15 mai 2018, M. et Mme C... ont cédé à une société Stan Holding les 21 600 et 2 400 actions qu'ils détenaient respectivement dans le capital de la société Voodoo. La plus-value de cession réalisée à cette occasion a été régulièrement déclarée par les contribuables dans leur déclaration des revenus de l'année 2018 et soumise aux contributions sociales, à la contribution sur les hauts revenu ainsi qu'à l'impôt sur le revenu au taux forfaitaire de 12,8 % prévu au 1° du B de l'article 200 A du code général des impôts. Par une réclamation du 23 avril 2020, les contribuables ont demandé que soit imputée sur la plus-value imposable réalisée par Mme C... la valeur d'origine des actions ressortant d'une donation antérieure et que soit prise en compte la cession de 2 400 actions en exercice de bons de souscription de parts de créateur d'entreprise sous le bénéfice du régime de faveur prévu par l'article 163 bis G du code général des impôts. Par une décision d'admission partielle du 29 novembre 2021 l'administration fiscale a fait droit à cette demande, réduisant à 9 euros la plus-value imposable au nom de Mme C..., a modifié le prix d'acquisition des 2 400 actions cédées en exercice des bons de souscription de créateur d'entreprise, arrêtant ainsi la base imposable correspondante à 984 586 euros, mais a en revanche décidé, par voie de compensation, que la plus-value ainsi recalculée sur la cession de ces 2 400 actions serait imposée à l'impôt sur le revenu au taux de 30 % au lieu de 12,8 %. M. et Mme C... ont alors saisi le tribunal administratif de Strasbourg afin que la plus-value litigieuse, issue de la cession des 2 400 actions en exercice de bons de souscription de parts de créateur d'entreprise, soit soumise au taux de 12,8 % résultant du régime de faveur de l'article 163 bis G du code général des impôts. Par la requête ci-dessus visée, M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 17 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à la réduction dans cette mesure de leur cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2018.
2. Aux termes de l'article 163 bis G du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Le gain net réalisé lors de la cession des titres souscrits en exercice des bons attribués dans les conditions définies aux II à III est imposé dans les conditions prévues à l'article 150-0 A et au taux de 19 %. / Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, le taux est porté à 30 % lorsque le bénéficiaire exerce son activité dans la société dans laquelle il a bénéficié de l'attribution des bons depuis moins de trois ans à la date de la cession. / (...) II. - Les sociétés par actions peuvent attribuer des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise, incessibles et émis dans les conditions prévues aux articles L. 228-91 et L. 228-92 du code de commerce, aux membres de leur personnel salarié et à leurs dirigeants soumis au régime fiscal des salariés ".
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
3. Il résulte de ces dispositions de l'article 163 bis G, issues de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, applicables aux plus-values de cessions de titres effectuées en exercice de bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise, attribués avant le 1er janvier 2018, que le régime de faveur qu'il institue est réservé au personnel salarié et aux dirigeants soumis au régime fiscal des salariés des sociétés remplissant les conditions prévues à ses II et II bis. Par suite, l'activité visée au deuxième alinéa du I de l'article 163 bis G du code général des impôts, de nature à exclure le bénéfice du taux réduit de 19 % si elle a été exercée durant moins de trois années à la date de la cession, doit s'entendre d'une activité ayant donné lieu, au sein de l'entreprise émettrice, à une rémunération de nature salariale ou relevant du régime fiscal des salaires.
4. Il résulte de l'instruction que M. C... a souscrit des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise antérieurement au 1er janvier 2018 à la suite d'une décision du président de la société du 20 janvier 2017 et qu'il a souscrit les actions correspondantes le 15 mai 2018. Les 2 400 actions de la société Voodoo correspondant à ces bons de souscription de parts de créateur d'entreprise ont été cédées le 15 mai 2018. Il résulte de l'instruction que si M. C... a été nommé directeur général délégué de la société Studio Cadet, devenue Voodoo, le 1er octobre 2013, il n'a commencé à percevoir des salaires de cette société qu'à compter de l'année 2016 ainsi qu'il ressort de ses déclarations de revenu. La circonstance que les fiches de paye établies par la société Voodoo mentionnent une ancienneté dans la société au 13 avril 2013 ne saurait attester, à elle seule, une activité salariée de l'intéressé au sein de cette entreprise en l'absence de la perception de rémunération ou de toute autre pièce, en particulier d'une décision de l'assemblée générale des associés décidant de le rémunérer. Dans ces conditions, la circonstance que M. C... en sa qualité d'associé fondateur aurait été chargé depuis l'origine des tâches de développeur, en l'admettant établie, ne saurait être regardée comme constitutive d'une activité ayant donné lieu à une rémunération de nature salariale au sens des dispositions ci-dessus reproduites. Par suite, c'est à juste titre qu'en l'absence d'une activité de M. C... d'au moins trois années au sein de l'entreprise à la date de la cession, l'administration a soumis la plus-value résultant de la vente de 2 400 actions de la société Voodoo en exercice de ses bons de souscription de parts de créateur d'entreprise, au taux de 30 % prévu par le deuxième alinéa du I de l'article 163 bis G du code général des impôts.
En ce qui concerne le bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :
5. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./ Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".
6. Les requérants entendent invoquer sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales les termes de l'instruction administrative sous référence BOI-RSA-ES-20-40 au 12 août 2014 selon laquelle " Conformément au premier alinéa du II de l'article 163 bis G du CGI, les BSPCE peuvent être attribués par une société éligible aux membres de son personnel salarié ainsi qu'à ses dirigeants soumis au régime fiscal des salariés. / (...) Dans les SA et les SAS, les dirigeants éligibles sont le président du conseil d'administration, les directeurs généraux, les directeurs généraux délégués et les membres du directoire ".
7. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point 1 ci-dessus que les impositions dont M. et Mme C... demandent la réduction sont des impositions primitives et ne résultent pas d'un rehaussement. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de l'instruction qu'ils invoquent sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ci-dessus reproduit.
8. D'autre part, il résulte de l'instruction que les requérants ont déclaré les plus-values litigieuses sans faire état de l'exercice de bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise et sans se prévaloir du régime correspondant de l'article 163 bis G du code général des impôts et de l'instruction administrative qu'ils invoquent. Les requérants n'ayant donc pas appliqué l'instruction dont ils se prévalent lors du dépôt de leur déclaration, ils ne sont pas fondés à soutenir que la cotisation d'impôt sur le revenu laissée à leur charge au titre de l'année 2018 aurait été établie contrairement à ses prévisions. Par suite, les requérants ne sont pas non plus fondés à se prévaloir de l'instruction qu'ils invoquent sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ci-dessus reproduit.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande. Par suite, leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 24 avril 2025, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 mai 2025.
Le rapporteur,
Signé : M. AgnelLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 22NC03173 2