Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2022 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2204593 du 27 septembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Marguet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du Strasbourg du 27 septembre 2023 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 7 janvier 2022 pris à son encontre par le préfet de la Moselle ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour a été prise par une autorité incompétente ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation familiale et professionnelle ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que son comportement présentait une menace pour l'ordre public ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions des articles L. 423-1, L. 423-2 et L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 août 2024, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il s'en remet à ses écritures de première instance.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant turc, né en 1988, est entré régulièrement en France le 5 avril 2017 sous couvert d'un visa de long séjour valant titre de séjour, valable du 15 mars 2017 au 15 mars 2018, en qualité de conjoint d'une ressortissante française, renouvelé jusqu'au 18 mars 2020. A la suite de sa demande de renouvellement de ce titre au mois de mai 2021, le préfet de la Moselle, par un arrêté du 7 janvier 2022, a refusé de lui délivrer un titre de séjour. M. B... relève appel du jugement du 27 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, par un arrêté du 31 décembre 2020, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 4 janvier 2021, le préfet de la Moselle a donné délégation à M. Olivier Delcayrou, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions prises en matière de séjour des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté.
3. En deuxième lieu, la décision contestée, après avoir notamment visé les articles L. 423-1 et L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'avis émis par la commission du titre de séjour le 8 septembre 2021, précise les éléments de fait relatifs à la situation de M. B..., et est ainsi suffisamment motivée.
4. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes de la décision contestée que le préfet de la Moselle n'aurait pas procédé à un examen particulier de la demande de renouvellement de titre de séjour de séjour de M. B... en qualité de conjoint de ressortissante française.
5. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité de parent d'enfants français. Par ailleurs, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de la Moselle aurait examiné d'office si l'intéressé était susceptible de bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. En outre, la situation de M. B... n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 423-2 du même code dès lors que son mariage n'a pas été célébré sur le territoire français. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 423-7 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés comme inopérants.
6. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; / 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; / 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". Aux termes de l'article L. 432-1 de ce code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 412-5 du même code : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident et de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE " ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été condamné en 2018 à un suivi socio-judiciaire par le tribunal correctionnel de Nancy d'une durée de cinq ans pour des faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours par une personne ayant qualité de conjoint, mise en danger d'autrui par violation manifestement délibérée d'une obligation règlementaire de sécurité et dégradation du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes. Par ailleurs, l'intéressé a été condamné à deux mois d'emprisonnement avec sursis le 11 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Nancy pour des faits de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance et conduite de ce véhicule sous l'empire d'un état alcoolique. En outre, M. B... a été condamné le 12 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Sarreguemines pour récidive de conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique à 120 jours-amende à cinq euros. Eu égard à la gravité de ces faits et aux conditions dans lesquelles elles ont été commises, le préfet de la Moselle a pu estimer, sans erreur d'appréciation, que le comportement d'ensemble de M. B... constituait une menace pour l'ordre public. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
8. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. M. B... soutient qu'il est inséré professionnellement en France, pays dans lequel il vit depuis 2017 avec son épouse et leurs deux enfants, tous trois de nationalité française. Toutefois, ainsi qu'il a été exposé au point 7 ci-dessus, le comportement de l'intéressé constitue une menace à l'ordre public. Par suite, la décision de refus de titre de séjour en litige n'a pas porté pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts d'intérêt public en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. En sixième lieu, aux termes des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". La décision en litige n'a ni pour objet ni pour effet de séparer M. B... de ses enfants. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I DE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Marguet et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
- M. Michel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mai 2025.
Le rapporteur,
Signé : A. MichelLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
I. Legrand
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N° 24NC00143