Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 mai 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé une carte de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.
Par un jugement n° 2308250 du 31 janvier 2024, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 mars 2024, M. B..., représenté par Me Andreini demande à la cour :
1) d'annuler ce jugement ;
2) d'annuler l'arrêté attaqué ;
3) d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, à défaut de réexaminer sa situation, sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros hors taxes (HT) sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et en cas de rejet de la demande d'aide juridictionnelle une somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de séjour : a été pris en méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation au regard des articles L. 435-1 et L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision fixant le pays de destination : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour.
La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 21 mars 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Agnel ;
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant nigérian né en 1992, déclare être entré en France en 2015. Sa demande d'asile a été rejetée le 16 septembre 2016 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et le 25 janvier 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. Il a fait l'objet, le 25 août 2015, d'une obligation de quitter le territoire français. Il a sollicité l'admission au séjour à raison de son état de santé le 2 juin 2016. Cette demande a été rejetée par une décision du 6 juillet 2016 assortie d'une obligation de quitter le territoire français. Le 12 septembre 2017, M. B... a présenté une nouvelle demande de titre de séjour pour motif médical. Cette demande a été rejetée par un arrêté du 31 août 2018, assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Le 14 février 2022, M. B... a sollicité son admission au séjour en se prévalant de ses attaches sur le territoire français. Cette nouvelle demande a été rejetée par la préfète du Bas-Rhin par une décision du 26 mai 2023, assortie d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination. Par la requête ci-dessus visée, M. B... relève appel du jugement du 31 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de séjour :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 435-2 du même code : " L'étranger accueilli par les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 265-1 du code de l'action sociale et des familles et justifiant de trois années d'activité ininterrompue au sein de ce dernier, du caractère réel et sérieux de cette activité et de ses perspectives d'intégration, peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
3. M. B... expose être entré en France le 3 avril 2015. La durée de son séjour résulte de l'instruction de sa demande d'asile puis de ses demandes de titres de séjour. Il justifie avoir pris de nombreux cours d'apprentissage du français d'octobre 2015 à juin 2021. Il démontre également être licencié dans une équipe de handi-basket et s'investir depuis 2015 dans l'association Strasbourg handisport passion aventure. Le requérant, qui a été reconnu travailleur handicapé, avec un taux d'incapacité évalué entre 50 et 79% et a bénéficié de l'allocation aux adultes handicapés à raison d'un handicap moteur faisant suite à une poliomyélite, expose enfin être hébergé et bénévole depuis décembre 2020 au sein de la communauté Emmaüs, et produit des témoignages attestant de son investissement dans cet organisme. Cependant, par ces seuls éléments, le requérant ne démontre pas entretenir des liens personnels ou familiaux d'une particulière intensité avec la France, malgré la durée de son séjour sur le territoire français, qui résulte, au demeurant, de son refus de déférer aux multiples mesures d'éloignement qui lui ont été signifiées. M. B... ne soutient pas ne plus avoir d'attaches familiales au Nigeria où vivent son épouse, ses deux enfants et ses frères et sœurs ainsi qu'il ressort du jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1806943 du 16 mai 2019. L'intéressé établit avoir été hébergé par la communauté Emmaüs de Mundolsheim et y avoir été bénévole à compter du 15 décembre 2020, avant d'être accueilli par la communauté Emmaüs de Scherwiller à compter du 17 mars 2023. Toutefois, si le requérant peut être regardé comme ayant été accueilli dans un organisme de travail solidaire depuis le 15 décembre 2020, il ne comptabilisait pas trois années d'activité dans la communauté Emmaüs à la date de la décision contestée. Il n'est, par suite, pas fondé à se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 435-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En se bornant à se prévaloir de son activité de bénévole au sein de la communauté Emmaüs depuis décembre 2020, du fait que son comportement et sa personnalité sont très appréciés par les autres membres de cette communauté et des éléments de fait précédemment évoqués concernant sa situation personnelle, M. B... ne justifie ni de considérations humanitaires particulières, ni de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le refus de séjour litigieux, à la date à laquelle il a été pris, n'a pas méconnu les normes ci-dessus reproduites et ne paraît pas reposer sur une appréciation manifestement erronée de sa situation.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
4. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
5. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... B..., à Me Andreini et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera transmise à la préfète du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Agnel, président de chambre,
Mme Stenger, première conseillère,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 avril 2025.
Le président rapporteur
Signé : M. AgnelL'assesseure la plus ancienne,
Signé : L. Stenger
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 24NC00775 2