Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (ci-après SARL) Optique des moissons a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2015 et en 2016 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016.
Par un jugement no 2001951 du 23 juin 2022, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 juillet 2022 et 23 février 2023, la SARL Optique des moissons, représentée par Me Rolland, doit être regardée comme demandant à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la réduction des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la remise en cause du passif injustifié de 96 000 euros à la clôture de l'exercice 2015, correspondant aux honoraires dus à sa société mère au titre des années 2013 et 2014, n'est pas motivée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- la réintégration dans ses bases imposables de cette somme de 96 000 euros est dépourvue de fondement, en l'absence de demande par l'administration des justificatifs relatifs aux années 2013 et 2014 ;
- les honoraires déduits au titre des années en litige correspondent à des interventions de M. A... réalisées dans le cadre de la convention d'animation et de prestations signée avec sa société mère, et non dans le cadre du contrat de franchise ;
- la matérialité des prestations rendues étant établie et se rattachant à la convention d'animation, la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 février 2023 et 12 mars 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et économique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Optique des moissons ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Brodier,
- les conclusions de Mme Mosser, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Optique des moissons, dont le siège social se situe à Saint-Parres-aux-Tertres dans l'Aube et dont le capital est détenu par la SARL Optical Store Holding (OSH), exerce une activité d'opticien dans le cadre d'un contrat de franchise conclu avec la SAS Alain Afflelou franchiseur. Elle a fait l'objet d'un examen de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, à l'issue de laquelle, par une proposition de rectification du 24 mai 2018, notifiée dans le cadre de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, le service a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2015 et 2016 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016. La société Optique des moissons a expressément accepté le rehaussement portant sur la remise en cause de l'application du taux réduit d'impôt sur les sociétés de 15 %. Elle a en revanche contesté les autres rectifications, qui procèdent de la remise en cause par le service de la déductibilité en tant que charges des prestations d'assistance facturées par sa société mère, de la taxe sur la valeur ajoutée déduite en conséquence et du profit réalisé sur le Trésor. Toutes les rectifications ont été maintenues par le service en réponse aux observations de la société puis à l'issue de l'examen de son recours hiérarchique, ainsi qu'après l'avis favorable émis le 19 septembre 2019 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis en recouvrement le 30 octobre 2019 pour un montant total de 123 065 euros en droits et pénalités. La SARL Optique des moissons a formé une réclamation préalable pour contester ces impositions, à l'exception de la rectification qu'elle avait déjà expressément acceptée. L'administration fiscale a rejeté sa réclamation par une décision du 29 juillet 2020. La société requérante relève appel du jugement du 23 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la réduction de ces impositions.
Sur la régularité de la procédure :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". L'article R. 57-1 de ce livre dispose : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.
3. Il ressort de la proposition de rectification du 24 mai 2018 que l'administration fiscale a réintégré dans les bases imposables de la société Optique des moissons à l'impôt sur les sociétés des montants de 40 000 euros au titre des années 2015 et 2016 compte tenu de la remise en cause de la déductibilité, en tant que charges, des honoraires facturés par sa société mère. L'administration a également réintégré, après correction fiscale du bilan à la clôture de l'exercice 2015, un passif injustifié de 96 000 euros correspondant à la dette de la société à l'égard de sa société mère s'agissant des honoraires facturés au titre des années 2013 et 2014 qui n'ont été réglés qu'en 2016. Il ressort de la proposition de rectification en litige que ces rehaussements sont tous fondés sur les mêmes motifs, à savoir l'absence de preuve de la réalité des prestations réalisées par la société OSH au profit de la société Optique des moissons, ainsi que, à titre subsidiaire, sur le fait que les prestations visées par la convention d'animation sont censées être exercées par le gérant de la société vérifiée. Les motifs du rehaussement résultant de la remise en cause du passif injustifié étaient ainsi énoncés de manière suffisamment précise pour permettre à la société requérante de les contester. Si la société requérante soutient que le raisonnement tenu pour rejeter les charges déduites au cours des années 2015 et 2016 ne peut pas être étendu aux années 2013 et 2014, dès lors que l'administration n'avait pas sollicité, au cours des opérations de contrôle, de justificatifs de la matérialité des prestations réalisées en 2013 et 2014, son argumentation se rapporte à la contestation du bien-fondé des impositions et est sans incidence sur leur motivation. Au demeurant, il ressort de la proposition de rectification du 24 mai 2018 que l'administration a sollicité les différents éléments concernant les factures de management fees, le détail des prestations effectués par la société mère au bénéfice de la société vérifiée, et les moyens de preuve matériels de ces prestations et que des échanges ont eu lieu au sujet des éléments produits par la société. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la déduction des charges de prestations d'animation :
S'agissant du cadre juridique et notamment la charge de la preuve :
4. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés ". Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'œuvre (...). / Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais ".
5. En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
6. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.
7. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.
S'agissant de la réalité des prestations d'assistance facturées :
8. Il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause les honoraires de prestations d'animation facturés à la société Optique des moissons par sa société mère OSH à raison d'un montant forfaitaire annuel de 40 000 euros hors taxes, au motif que ces prestations avaient un caractère fictif. Elle a ainsi réintégré dans le bénéfice imposable de la SARL requérante la somme de 40 000 euros hors taxes au titre de chacun des exercices clos en 2015 et en 2016. Il résulte de l'instruction que la société Optique des moissons a présenté, au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, la convention d'animation et de prestation de services, signée le 20 juillet 2013 entre les deux sociétés, qui prévoit que, pour un montant forfaitaire annuel de 40 000 euros hors taxes, la société OSH s'engage à effectuer d'une part, des prestations de pilotage stratégique du groupe qu'elle anime, dans l'intérêt de sa filiale, par exemple déterminer et conduire la stratégie générale et les orientations fondamentales de celle-ci, définir la politique des achats du groupe ou encore les meilleures méthodes de gestion et de suivi de leur application, et, d'autre part, qu'elle effectue des prestations de services telles que la mise en place d'un système d'informations correspondant aux besoins de sa filiale pour la gestion du personnel, la gestion des stocks, la gestion des achats ou encore une assistance en matière juridique ou dans les relations avec les banques. Les factures établies par la société mère portant uniquement le libellé " honoraires de gestion selon convention d'animation ", sans détail des prestations qui auraient été assurées au profit de la société Optique des moissons au cours de chacun des exercices concernés.
9. D'une part, il ressort de l'article 4 de cette convention que, pour la réalisation de ces missions, la société OSH " dispose des moyens humains et matériels qui lui sont propres, notamment la présence de M. B... ", à savoir son gérant, et qu'elle peut en outre recourir à tous les services, entreprises ou expertises extérieurs au groupe qu'elle juge utiles pour accomplir sa mission. Toutefois, et contrairement à ce que cet article stipule, l'administration a constaté que la société OSH ne comptabilisait ni immobilisation corporelle ni salaires. Par ailleurs, il n'est pas allégué que son gérant, qui est aussi celui de la société requérante, serait intervenu dans le cadre de l'exécution de la convention d'animation. Si la société Optique des moissons soutient que les interventions prévues par cette convention ont été réalisées par un certain M. A..., qui en serait indirectement associé, elle ne justifie pas, ainsi que l'administration fiscale le lui a opposé, que la société OSH aurait confié un tel mandat à cette personne en vue de la réalisation de l'objet de la convention.
10. D'autre part, s'agissant de la matérialité des prestations que M. A... aurait réalisées, et pour lesquelles les factures produites ne comportent aucune précision, l'administration a estimé que les justificatifs produits par la société Optique des moissons ne se rattachaient pas à l'exécution de cette convention. Elle a écarté les documents présentés par la société Optique des moissons, qu'il s'agisse de tableaux de bord, de plaquettes de formation, de suivi des ventes ou encore de courriels, au motif qu'ils ne caractérisaient pas des prestations individualisées entre la société mère et sa filiale et qu'ils traduisaient plutôt une gestion globale du groupe Afflelou dont la société requérante est une franchise. Les quelques courriels produits par la société requérante établissent que M. A... intervenait notamment pour encadrer la responsable de la boutique quant aux objectifs de vente à réaliser, aux offres commerciales à mettre en place, aux procédures de saisie informatique s'y rapportant ainsi qu'aux techniques de vente à favoriser. S'il ne peut être exclu que certaines de ces actions recoupent partiellement le champ d'application de la convention d'animation, il n'est en revanche pas établi que M. A... aurait réalisé celles-ci dans le cadre de l'exécution de cette convention. A supposer même que la société requérante puisse établir que les documents qu'elle a produits ne se rattachent pas à l'exécution du contrat de franchise, cette circonstance n'est pas de nature à justifier de la réalité des prestations assurées par la société OSH au profit de la société Optique des moissons conformément à la convention d'animation. Sont ainsi sans incidence la circonstance que M. A... n'était plus directeur général de la SAS Alain Afflelou après le 29 septembre 2015 ou encore la circonstance qu'il ne gérait, dans ce cadre, que les succursales et non les magasins franchisés.
11. Il résulte de ce qui précède qu'en l'absence de toute réalité des prestations réalisées par la société OSH conformément à l'objet de la convention du 20 juillet 2013, l'administration fiscale pouvait retenir le caractère fictif des prestations facturées en 2015 et en 2016 à la société Optique des moissons. Par suite, ayant rapporté la preuve du caractère non déductible de ces dépenses, c'est à juste titre que l'administration a réintégré dans le résultat des exercices clos les 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016 de la société requérante les charges correspondant aux honoraires facturés par sa société mère.
En ce qui concerne le passif injustifié :
12. Pour l'application des dispositions du 2. de l'article 38 du code général des impôts cité ci-dessus, il y a lieu de prendre en compte, pour la détermination de l'actif net à la clôture de l'exercice, toutes les dettes qui sont mises à la charge de la société envers des tiers si ces dettes sont, à la date de la clôture de l'exercice, certaines dans leur principe et dans leur montant. Par ailleurs, aux termes de l'article 54 du même code : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration ". Il appartient au contribuable de justifier, par la production de tous éléments suffisamment précis, l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise.
13. Il résulte de l'instruction que l'administration a également réintégré dans le bénéfice imposable de la société Optique des moissons à la clôture de l'exercice 2015, via une correction fiscale par le bilan, un passif injustifié s'élevant à la somme de 96 000 euros toutes taxes comprises, qui correspond aux honoraires de prestation de gestion qu'elle avait déduits en 2013 et 2014 et qui aurait dû figurer au passif du bilan à la clôture de l'exercice 2015, la dépense n'ayant été engagée qu'en 2016.
14. Alors que, ainsi qu'il a été dit précédemment, l'administration fiscale avait sollicité de la société requérante, au cours du contrôle dont elle a fait l'objet, qu'elle produise le détail des prestations effectuées et les preuves matérielles de ces prestations, la société Optique des moissons n'a produit aucun document susceptible de justifier de la réalité et de la valeur des prestations ainsi acquises au cours des exercices clos les 31 décembre 2013 et 31 décembre 2014. Par suite, l'administration pouvait également, et pour les mêmes motifs qu'énoncés aux points 8 à 11 du présent arrêt, réintégrer ce passif injustifié à la clôture de l'exercice 2015 à raison des prestations facturées par la société OSH au titre des années 2013 et 2014.
En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :
15. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts, dans sa version applicable : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ". Il résulte de ces dispositions applicables à compter du 1er janvier 2008 que la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent n'est déductible que si ceux-ci sont utilisés pour la réalisation d'opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et que c'est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise qu'il doit être apprécié si des charges assumées par une société correspondent aux besoins de son exploitation.
16. Lorsque l'administration, sur le fondement de ces dispositions, met en cause la déductibilité de la taxe ayant grevé l'acquisition d'un bien ou d'un service, il lui appartient, lorsqu'elle a mis en œuvre la procédure de redressement contradictoire et que le contribuable n'a pas accepté le redressement qui en découle, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour soutenir que le bien ou le service acquis n'était pas nécessaire à l'exploitation.
17. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 et 14 ci-dessus, qu'en l'absence de fourniture des services facturés, l'administration fiscale a pu à juste titre, en application des règles ci-dessus rappelées, remettre en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures litigieuses émises par la société OSH.
Sur les pénalités pour manquement délibéré :
18. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration ". La majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts sanctionne la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le manquement délibéré, l'administration fiscale doit apporter la preuve de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations du contribuable, et de son intention délibérée d'éluder l'impôt.
19. Afin de justifier l'application de la pénalité pour manquement délibéré à raison de la déduction des honoraires annuels facturés par la société OSH, l'administration a notamment retenu que la société requérante n'avait pas établi que les interventions de M. A... s'inscrivaient bien dans le cadre de la convention d'animation du 20 juillet 2013, que les attestations produites ne caractérisaient aucune justification probante, tandis que la société avait entretenu la confusion relativement à l'existence de cette convention ainsi que, par extension, sur la réalité des prestations facturées par la société OSH. L'administration établit ainsi l'intention délibérée de la société d'éluder l'impôt. Par suite, en l'absence de preuve que les prestations réalisées par M. A..., dont la société se prévaut, se rattachaient à l'exécution de la convention d'annimation et de prestations, c'est à juste titre que les rectifications procédant de la remise en cause des charges déduites par la société de son résultat ont été assorties de la majoration de 40 % pour manquement délibéré.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Optique des moissons n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la réduction, en droits et pénalités, des impositions mises à sa charge. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Optique des moissons est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Optique des moissons et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Agnel, président,
Mme Stenger, première conseillère,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 avril 2025.
La rapporteure,
Signé : H. Brodier Le président,
Signé : M. Agnel
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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No 22NC02043