Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée, d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour valable durant l'attente de ce titre de séjour ou à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour valable durant ce réexamen.
Par un jugement n° 2207831-2207832 du 17 janvier 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 juillet 2023, Mme A... représentée par Me Badoc demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 17 janvier 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur le refus de séjour :
- la décision contestée méconnaît l'article L. 423-23 et l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français.
Sur la fixation du pays de renvoi :
- l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français prive de base légale la décision fixant le pays de destination.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 septembre 2023, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante albanaise née le 6 mai 1986, est entrée sur le territoire français le 20 mars 2017. Sa demande d'asile ayant été rejetée, le préfet du Haut-Rhin a obligé Mme A... à quitter le territoire français le 26 juillet 2018. Le 14 octobre 2019, il lui a à nouveau fait obligation de quitter le territoire français à la suite du rejet de sa demande de titre de séjour fondée sur son état de santé. Le 19 mai 2022, elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 27 septembre 2022, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Mme A... fait appel du jugement du 17 janvier 2023 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance." et de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
3. Mme A..., présente en France depuis mars 2017, s'y est maintenue de manière irrégulière en dépit de deux obligations de quitter le territoire français auxquelles elle ne s'est pas conformée. Les seules attaches familiales dont elle se prévaut en France sont la présence de son mari, également en situation irrégulière, et de leurs trois enfants mineurs nés en 2011, 2014 et 2021 alors qu'il ressort des pièces du dossier que sa mère, son frère et ses deux sœurs ainsi que sa belle-famille résident en Albanie. Ainsi, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue dans son pays d'origine et à ce que ses enfants y poursuivent leur scolarité qui n'est à ce stade qu'au niveau élémentaire et maternelle. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont écartés. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de Mme A... est écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
5. Même si elle a fait l'effort d'intégration d'apprendre le français, cette circonstance est insuffisante pour justifier son admission exceptionnelle au séjour. Ainsi, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
- Mme Barrois, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025.
La rapporteure,
Signé : M. BarroisLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : I. Legrand
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
I. Legrand
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N° 23NC02210