Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
M. D... B... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2024 par lequel le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.
Par un jugement n° 2401519 du 14 novembre 2024, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 24NC03072 du 9 janvier 2025, la juge des référés de la cour administrative d'appel de Nancy a suspendu l'exécution de cette décision du 19 juillet 2024 du préfet du Jura portant refus de lui délivrer un titre de séjour et a enjoint au préfet du Jura de délivrer à M. B... C... une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler valable jusqu'à la notification de l'arrêt à intervenir dans le cadre de la présente instance.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 novembre 2024, M. B... C..., représenté par Me Dravigny, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 14 novembre 2024 du tribunal administratif de Besançon ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 juillet 2024 par lequel le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'expiration de ce délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet du Jura de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " travailleur temporaire " ou " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans ce même délai et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) d'enjoindre au préfet du Jura de faire procéder à l'effacement de son signalement à fin de non-admission dans le système d'information Schengen ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros hors taxes à verser à son conseil au titre des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de l'inexacte application des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet quant à la validité des documents d'état civil produits :
. il justifie de son état civil ;
. les observations contenues dans le rapport de la police aux frontières (PAF) du 13 janvier 2023 ne permettent pas de renverser la présomption d'authenticité qui s'attache aux documents d'état civil produits ;
. le second rapport du 27 mai 2024 de la PAF ne conclut pas au caractère frauduleux des documents d'état civil ; le procureur de la République a par ailleurs classé sans suite la procédure pénale de faux documents d'identité ;
- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il remplit les conditions pour se voir accorder un titre de séjour sur ce fondement ;
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dans l'application de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 janvier 2025, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés et s'en remet également à ses écritures de première instance.
Par une ordonnance du 22 janvier 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 24 février 2025 à midi.
M. B... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Roussaux, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., se disant, B... C..., ressortissant congolais, qui déclare être né le 11 octobre 2005, est entré en France, selon ses déclarations, le 8 décembre 2022. Le même jour, l'intéressé a fait l'objet d'une ordonnance de placement provisoire auprès de l'aide sociale à l'enfance du département du Jura. Le 12 décembre 2023, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 19 juillet 2024, le préfet du Jura a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'expiration de ce délai de départ volontaire et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. B... C... fait appel du jugement du 14 novembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral du 19 juillet 2024. Parallèlement, le requérant a sollicité la suspension de l'exécution de la décision du 19 juillet 2024 portant refus de délivrance du titre de séjour. Par une ordonnance du 9 janvier 2025, la juge des référés de la présente cour a suspendu l'exécution de cette décision du 19 juillet 2024 refusant de délivrer au requérant un titre de séjour et a enjoint au préfet du Jura de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler valable jusqu'à la notification de l'arrêt à intervenir dans le cadre de la présente instance.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ".
3. Lorsqu'il examine une demande d'admission au séjour présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.
4. Pour refuser de délivrer un titre de séjour au requérant, le préfet du Jura s'est fondé, d'une part, sur le fait que l'intéressé n'établissait ni son état civil ni son identité et, d'autre part, sur l'absence de caractère réel et sérieux de sa formation.
5. Si la structure ayant accueilli le requérant a émis, dans un rapport du 10 septembre 2023, une appréciation plutôt positive sur ses efforts d'insertion et son comportement en précisant que la délivrance d'un titre de séjour lui permettrait de poursuivre son projet professionnel, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a obtenu des résultats très moyens au cours de sa scolarité. Ainsi, au cours de l'année 2022-2023, alors qu'il était inscrit en Unité Pédagogique pour Elèves Allophones nouvellement Arrivés (UPE2A), il a été absent 17 demi-journées et les appréciations de son bulletin de notes indiquent qu'il n'a pas été vu ou évalué dans certaines matières. Par ailleurs, au cours de sa première année de certificat d'aptitude professionnelle " maintenance des véhicules " au titre de l'année scolaire 2023-2024, ses résultats ont été très inégaux selon les matières et globalement moyens, malgré une légère amélioration de sa moyenne au second semestre. Dans ces conditions, à supposer même que le requérant était mineur au moment de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance et qu'il justifiait bien de son état civil, le préfet pouvait, pour ce seul motif tiré de l'absence du caractère réel et sérieux de sa formation, et sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, lui refuser le séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
6. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".
7. En application des dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut, dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels et des principes généraux du droit, assortir une obligation de quitter le territoire français pour l'exécution de laquelle l'intéressé dispose d'un délai de départ volontaire, d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans, en se fondant pour en justifier tant le principe que la durée, sur la durée de sa présence en France, sur la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, sur la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et sur la menace à l'ordre public que représenterait sa présence en France.
8. M. B... C... ne justifie pas d'attaches privées ou familiales d'une intensité particulière sur le territoire national. Dans ces conditions, en l'absence de circonstances humanitaires, et en dépit de l'absence de menace pour l'ordre public que représenterait sa présence en France et d'une précédente mesure d'éloignement, le préfet du Jura a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, prononcer à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par suite, ce moyen doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon, a rejeté sa demande.
10. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Jura.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barteaux, président,
- M. Lusset, premier conseiller,
- Mme Roussaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2025.
La rapporteure,
Signé : S. RoussauxLe président,
Signé : S. Barteaux
La greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
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N° 24NC02854