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25/02/2025 | FRANCE | N°23NC02066

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 5ème chambre, 25 février 2025, 23NC02066


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... H... et M. C... F... G... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 1er juin 2022 par lesquelles la préfète du Bas-Rhin a refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n°s 2207179, 2207180 du 2 mars 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.



Procédure devant la cour :



I. Par une requête enregistrée le 26 juin 2023 sous le n° 23NC02066, Mme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... H... et M. C... F... G... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 1er juin 2022 par lesquelles la préfète du Bas-Rhin a refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°s 2207179, 2207180 du 2 mars 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 26 juin 2023 sous le n° 23NC02066, Mme H..., représentée par Me Thalinger, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2) d'annuler les décisions du 1er juin 2022 de la préfète du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, subsidiairement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de condamner l'État à lui verser une somme de 1500 € au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- M. G... a toujours séjourné régulièrement sur le territoire français ;

- la communauté de vie entre M. G... et Mme H... existe depuis 2018 ;

- le refus de titre de séjour porte atteinte à son droit au respect de leur vie privée et familiale ;

- la décision de refus de séjour est contraire aux dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, sa fille n'ayant jamais résidé ailleurs qu'en France ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire a été signée par une personne n'ayant pas reçu régulièrement délégation de compétence à cet effet ;

- cette décision est contraire aux stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination a été signée par une personne n'ayant pas reçu régulièrement délégation de compétence à cet effet ;

- cette décision est contraire à l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par courrier en date du 29 novembre 2024, une mise en demeure a été adressée à la préfète du Bas-Rhin aux fins de produire des observations dans le délai d'un mois.

Mme H... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2023.

II. Par une requête enregistrée le 26 juin 2023 sous le n° 23NC02068, M. G..., représenté par Me Thalinger, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2) d'annuler les décisions du 1er juin 2022 de la préfète du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, subsidiairement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de condamner l'État à lui verser une somme de 1500 € au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il a toujours séjourné régulièrement sur le territoire français ;

- la communauté de vie entre M. G... et Mme H... existe depuis 2018 ;

- le refus de titre de séjour porte atteinte à son droit au respect de leur vie privée et familiale ;

- la décision de refus de séjour est contraire aux dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, sa fille n'ayant jamais résidé ailleurs qu'en France ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire a été signée par une personne n'ayant pas reçu régulièrement délégation de compétence à cet effet ;

- cette décision est contraire aux stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination a été signée par une personne n'ayant pas reçu régulièrement délégation de compétence à cet effet ;

- cette décision est contraire à l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Par courrier en date du 29 novembre 2024, la préfète du bas Rhin a été mise en demeure de produire des observations dans le délai d'un mois.

M. G... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2023.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... F... G..., né le 30 janvier 1992, de nationalité nigériane, est entré sur le territoire français le 4 août 2018. Il a sollicité l'asile qui lui a été refusé par décision de l'Office français des réfugiés et apatrides par décision du 26 novembre 2021. Il s'est marié le 1er juin 2019 avec Mme B... H..., née le 8 septembre 1984, de nationalité camerounaise, entrée sur le territoire français en 2017, dont la demande d'asile a été rejetée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 26 novembre 2021. Ils sont les parents d'une enfant, prénommée Glory Biss, née en France le 6 octobre 2019. Par deux arrêtés en date du 1er juin 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Ils relèvent appel du jugement n°s 2207179, 2207180 du 2 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes dirigées contre ces arrêtés.

2. Les requêtes susvisées n°s 23NC02066 et 23NC02068 présentées respectivement par Mme H... et M. G... présentent à juger des questions identiques. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

En ce qui concerne les décisions portant refus de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étrangers ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Et, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Mme H..., ressortissante camerounaise née en 1984, et M. G..., ressortissant nigérian né en 1992, sont entrés irrégulièrement sur le territoire français respectivement le 25 août 2017 et le 4 août 2018, se seraient mariés religieusement, le 1er juin 2019 et sont les parents d'une enfant née en France le 6 octobre 2019. Cependant, les intéressés ont vécu dans leurs pays d'origine respectivement jusqu'à l'âge de 33 ans et 26 ans et n'ont vu leur séjour se prolonger, comme l'ont justement relevé les premiers juges, qu'au bénéfice du temps nécessaire à l'instruction de leurs demandes d'asile et de titre de séjour. S'il ressort des pièces du dossier qu'ils sont investis dans les activités d'une association confessionnelle à Strasbourg et que deux des sœurs de Mme H... sont de nationalité française, ces seules circonstances ne suffisent pas à démontrer qu'ils ont fait de la France le centre de leurs intérêts privés et familiaux et que leur intégration sur le territoire français imposerait légalement que leurs soient délivrés des titres de séjour. Par ailleurs, la circonstance que les requérants sont de nationalité différente est sans incidence sur la légalité des décisions leur refusant le séjour, celle-ci ne rendant pas impossible, contrairement à leurs allégations, la reconstitution de la cellule familiale en dehors du territoire français. Dans ces conditions, M. G... et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que la préfète du Bas-Rhin aurait méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 "

6. Eu égard à ce qui a été énoncé au point 4, M. G... et Mme H... ne peuvent pas être regardés comme justifiant de circonstances humanitaires ou d'un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1. Par suite, la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, n'a pas méconnu les dispositions de cet article.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, par un arrêté du 4 mars 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, la préfète du Bas-Rhin a donné délégation à M. A... E..., directeur des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer tous actes et décisions relevant des attributions dévolues à la direction des migrations et de l'intégration, à l'exception de certaines décisions au nombre desquelles ne figurent pas les décisions portant obligation de quitter le territoire. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions attaquées auraient été signées par une autorité incompétente.

8. En second lieu, il résulte, d'une part, de ce qui a été dit aux points 4 et 6 du présent arrêt et, d'autre part, de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'impose pas aux requérants de vivre dans des pays différents en raison de leur nationalités respectives, que M. G... et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français seraient contraires aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du §1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant.

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :

9. Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

10. En premier lieu, par un arrêté du 4 mars 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, la préfète du Bas-Rhin a donné délégation à M. A... E..., directeur des migrations et de l'intégration, à l'effet de signer tous actes et décisions relevant des attributions dévolues à la direction des migrations et de l'intégration, à l'exception de certaines décisions au nombre desquelles ne figurent pas les décisions fixant le pays de renvoi. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions attaquées auraient été signées par une autorité incompétente.

11. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que les décisions portant obligation de quitter le territoire ne sont pas entachées d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination devraient être annulées par voie de conséquence de l'annulation de ces décisions doit être écarté.

12. En dernier lieu, les requérants n'établissent pas n'être légalement admissibles que dans leur seul pays d'origine respectif. Par ailleurs, il ressort des termes mêmes des arrêtés attaqués qu'ils ne pourront être éloignés qu'à destination d'un pays qui garantisse que la cellule familiale qu'ils forment avec leur enfant ne soit pas séparée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du § 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. G... et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

14. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. G... et Mme H....

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de sommes à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes Mme H... et M. G... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... H..., à M. C... F...

G..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Thalinger.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Antoine Durup de Baleine, président,

- M. Axel Barlerin, premier conseiller,

- Mme Nolwenn Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 février 2025.

Le rapporteur,

Signé : A. D...Le président,

Signé : A. Durup de Baleine

Le greffier,

Signé : A. Betti

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Betti

2

N°s 23NC02066, 23NC02068


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02066
Date de la décision : 25/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DURUP DE BALEINE
Rapporteur ?: M. Axel BARLERIN
Rapporteur public ?: Mme BOURGUET
Avocat(s) : L'ILL LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-25;23nc02066 ?
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