Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 29 février 2024 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.
Par une ordonnance n° 2401569 du 20 mars 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2024, M. B..., représenté par Me Roilette, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 février 2024 portant obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'annuler l'arrêté du 29 février 2024 portant assignation à résidence ;
4°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours et dans l'attente, de lui remettre une autorisation provisoire de séjour, le tout sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la régularité de l'ordonnance attaquée :
- la demande devant le tribunal administratif était recevable dès lors qu'il a envoyé des fax au tribunal administratif pour contester l'arrêté du 29 février 2024 dans le délai de recours et a ensuite formé une demande d'aide juridictionnelle ;
S'agissant de la légalité externe des arrêtés en litige :
- ils sont entachés d'incompétence de leur signataire ;
S'agissant de la légalité du refus de titre de séjour :
- la décision en litige est entachée d'insuffisance de motivation ;
- elle est entachée de défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
S'agissant de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision en litige est illégale compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la légalité des décisions fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français :
- il n'est pas justifié des conditions dans lesquelles il a pu présenter ses observations ;
S'agissant de la légalité de l'assignation à résidence :
- la décision en litige est illégale compte tenu de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'insuffisance de motivation et de défaut d'examen de sa situation personnelle, s'agissant du principe de l'assignation comme des modalités de contrôle imposées ;
- elle est entachée d'erreur d'appréciation de sa situation familiale, qui est établie à Sarcelles ;
- elle est entachée d'erreur de droit ;
- elle est entachée d'erreur de fait ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2024, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que la demande formée devant le tribunal administratif était tardive.
Par une lettre du 2 décembre 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt de la cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions nouvelles en appel tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 février 2024 portant assignation à résidence.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mai 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Brodier a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant turc né en 1996, est entré irrégulièrement en France le 4 mars 2022, selon ses déclarations, pour rejoindre son épouse, de nationalité turque, qui réside à Villiers-le-Bel. A la suite de son interpellation alors qu'il se rendait en train en Allemagne, la préfète du Bas-Rhin a, par deux arrêtés du 29 février 2024, d'une part, prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant une durée d'un an et, d'autre part, décidé de l'assigner à résidence dans le Bas-Rhin. M. B... relève appel de l'ordonnance du 20 mars 2024 par laquelle le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français.
Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 février 2024 portant assignation à résidence :
2. M. B... n'ayant demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation que du seul arrêté du 29 février 2024 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, les conclusions de sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du même jour ordonnant son assignation à résidence sont, dès lors, nouvelles en appel et, par suite, irrecevables.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
3. Aux termes de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. (...) ". Aux termes de l'article L. 614-8 du même code : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français est notifiée avec une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 731-1 ou une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 741-1, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de ces mesures ". Enfin, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".
4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 29 février 2024 portant obligation de quitter le territoire français a été notifié par voie administrative à M. B... le jour-même à 16h15. Cet arrêté comporte la mention des voies et délais de recours. La demande présentée par M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Strasbourg le 5 mars 2024, soit au-delà du délai de 48 heures dont il disposait, lequel expirait le samedi 2 mars à 16h15.
5. Le requérant soutient avoir cherché en vain à adresser son recours par télécopie le vendredi 1er mars 2024. Il produit des documents établissant l'envoi, à 11h puis 16h20 vers le numéro de fax du tribunal administratif de Strasbourg, depuis une adresse mail " wanadoo ", par un émetteur " PBDS " non identifié, d'un document au format PDF. Il produit également des documents adressés en réponse par le service clients d'Orange faisant état d'un " échec lors de l'envoi : le 0388364466 n'a pas reçu le fax ". Toutefois, ces seuls éléments ne permettent d'établir ni que cette tentative d'envoi concernait le recours de M. B... ni la régularité de cet envoi depuis une adresse-mail dont il est constant qu'elle n'est pas celle indiqué par le requérant sur son recours. Par ailleurs, compte tenu du délai de 48 heures imparti, il ne peut être tenu compte de la date d'expédition du recours par voie postale le 2 mars 2024 pour apprécier la recevabilité de celui-ci. Ainsi, le recours présenté par M. B... pour obtenir l'annulation de l'arrêté du 29 février 2024 lui faisant obligation de quitter le territoire français a été enregistré au-delà du délai de recours de 48 heures dont il disposait pour ce faire. Est sans incidence à cet égard que l'avocate de M. B... ait, le 2 avril 2024, sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle pour contester l'ordonnance attaquée du 20 mars 2024.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté, sur le fondement de l'article R. 776-15 du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 février 2024.
7. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Roilette et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président,
M. Agnel, président-assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.
La rapporteure,
Signé : H. Brodier Le président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
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N° 24NC01812