Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2300488 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 mai 2023, Mme A..., représentée par Me Yahi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 mai 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard du pouvoir de régularisation de la préfète ; elle est entrée en France à l'âge de 15 ans et a été scolarisée dès son arrivée en classe de 3ème ; elle a obtenu plusieurs diplômes et exerce une activité salariée depuis le 12 juillet 2021 dans le cadre de missions d'intérim ; elle subvient à ses besoins ; sa mère et son père résident sur le territoire français ; elle parle le français et est parfaitement intégrée sur le territoire où elle a développé des relations sociales ; elle respecte les lois et ne constitue pas une menace à l'ordre public ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'illégalité par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est entachée d'irrégularité en raison de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.
La préfète du Bas-Rhin n'a pas produit.
La demande d'aide juridictionnelle de Mme A... a été rejetée par une décision du 7 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bauer a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante kosovare née le 4 mars 2001, est entrée en France régulièrement le 10 juin 2016 avec sa mère et y a sollicité l'octroi du statut de réfugié à sa majorité. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 30 septembre 2019 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 17 janvier 2020. Elle a bénéficié, en 2019 et 2020, d'autorisations provisoire de séjour d'une durée identique à celles délivrées à sa mère pour raisons de santé. Le 2 juin 2020, l'intéressée a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 décembre 2022, la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 9 mai 2023, dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de ces décisions.
Sur la légalité des décisions contestées :
En ce qui concerne le refus de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. Il ressort des mentions de l'arrêté en litige que la préfète du Bas-Rhin, après avoir examiné les conditions d'entrée en France de la requérante et rappelé les différentes décisions prises à la suite de sa demande d'asile, a examiné l'ensemble de sa situation personnelle et a notamment pris en compte la circonstance qu'elle avait bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour alignée sur le titre de séjour provisoire octroyé à sa mère pour raisons de santé. Alors que l'autorité administrative n'est pas tenue de mentionner tous les éléments relatifs à la situation de l'étranger, la décision portant refus de séjour comporte ainsi les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Ces dispositions ne garantissent pas à l'étranger le doit de choisir le lieu qui lui paraît le plus approprié pour y développer une vie privée et familiale.
5. En l'espèce, si Mme A... se prévaut de sa présence en France depuis 2016, de sa scolarisation en France et de son insertion professionnelle, les autorisations provisoires de séjour, qui lui ont été délivrées au seul motif des titres de séjour pour raisons de santé délivrés à sa mère, n'avaient pas vocation à lui ouvrir un droit pérenne au séjour. La circonstance qu'elle ait pu, à ce titre, effectuer des missions d'intérim ne suffit pas à justifier de la qualité de son intégration. L'intéressée ne justifie pas avoir développé des liens privés ou familiaux d'une particulière intensité en France, alors que sa mère fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et qu'elle ne démontre pas la réalité de ses liens avec son père présent sur le territoire national, qui a épousé une ressortissante française en 2021. Mme A... n'établit pas davantage être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu jusqu'à l'âge de 15 ans. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour a porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ni qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard du pouvoir de régularisation de la préfète.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
6. Il résulte de ce qui précède que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité, de sorte que le moyen tiré, par voie d'exception, de son illégalité ne peut qu'être écarté.
7. Pour les mêmes motifs que ceux qui sont exposés au point 5, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision litigieuse au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- Mme Bauer, présidente-assesseure,
- M. Berthou, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2024.
La rapporteure,
Signé : S. BAUER Le président,
Signé : Ch. WURTZ Le greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
F. LORRAIN
N° 23NC01630 2