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05/12/2024 | FRANCE | N°23NC03395

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 05 décembre 2024, 23NC03395


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 3 mars 2023 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter dans un délai de trente jours le territoire national et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.



Par un jugement n° 2300956 du 19 septembre 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.


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Par une requête enregistrée le 20 novembre 2023, M. B..., représenté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 3 mars 2023 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter dans un délai de trente jours le territoire national et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2300956 du 19 septembre 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Jeannot, demande à la cour :

1) d'annuler ce jugement ;

2) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3) d'enjoindre à la préfète de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de séjour : est insuffisamment motivé ; est entaché d'erreur de droit en l'absence d'examen de sa situation ; est entaché d'erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 9 de la convention franco-togolaise du 13 juin 1996 ; méconnaît l'article 9 de la convention franco-togolaise en ce que son diplôme d'éducateur sportif lui donne ainsi droit au séjour ; méconnaît les article L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il remplit les conditions ; méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; est entachée d'erreur de droit en ce que l'autorité préfectorale s'est crue liée par le refus de séjour ; repose sur une appréciation manifestement erronée de ses conséquences de toute nature sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 décembre 2023, la préfète de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle par une décision du 12 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention franco-togolaise du 13 juin 1996 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Agnel ;

- et les observations de Me Gravier, substituant Me Jeannot, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant togolais né le 11 septembre 1991, est entré en France le 28 août 2016 muni d'un visa de long séjour valant titre de séjour " étudiant ", valable jusqu'au 27 août 2017. Ce titre a été renouvelé à plusieurs reprises, le dernier titre étant valable jusqu'au 20 janvier 2023. Le requérant en a sollicité le renouvellement le 20 novembre 2022. Par un arrêté du 3 mars 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de renouveler ce titre de séjour, a fait obligation au requérant de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 19 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de séjour :

2. L'arrêté attaqué mentionne de manière suffisante et non stéréotypée les considérations de droit et de fait sur lesquelles l'autorité préfectorale s'est fondée afin de prendre à l'encontre de M. B... les décisions qu'il comporte. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

3. Il ressort des pièces du dossier, notamment des motifs de l'arrêté litigieux, que l'autorité préfectorale ne s'est pas refusée à examiner l'ensemble de la situation de M. B.... Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut qu'être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le présent code régit, sous réserve (...) des conventions internationales, l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers en France (...) ". Aux termes de l'article 9 de la convention franco-togolaise relative à la circulation et au séjour des personnes signée le 13 juin 1996 : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation dans des disciplines spécialisées qui n'existent pas dans l'État d'origine sur le territoire de l'autre État doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants ". Aux termes de l'article 13 de la même convention : " Les points non traités par la présente convention sont régis par la législation interne de chaque État ". Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / (...) ". Le droit au séjour des ressortissants togolais en France en qualité d'étudiant est intégralement régi par les stipulations de l'article 9 de la convention signée entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République du Togo le 13 juin 1996. La décision en litige ne peut ainsi être fondée sur les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. C'est par suite à juste titre que les premiers juges ont estimé que la décision portant refus de renouvellement du titre de séjour de M. B... trouvait son fondement légal non dans les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne sont pas applicables aux ressortissants togolais, mais dans les stipulations de l'article 9 de la convention franco-togolaise du 13 juin 1996 et ont pu, dès lors, substituer ce fondement à celui initialement retenu par l'administration.

5. Pour l'application de ces stipulations, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", d'apprécier, sous le contrôle du juge administratif de l'excès de pouvoir, la réalité et le sérieux des études poursuivies. À cet égard, le caractère réel et sérieux de ces études est subordonné à une progression régulière de l'étudiant et à la cohérence de son parcours.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est inscrit, au titre de l'année universitaire 2016/2017, en licence " Économie " au sein de l'université de Lorraine. Il a validé la première année de ce cursus, après avoir redoublé, en 2018. Il a ensuite redoublé la deuxième année de cette licence à trois reprises, a abandonné ses études au cours du second semestre de l'année universitaire 2021/2022 et n'a ainsi validé à l'issue de l'année universitaire 2021/2022 que quatre unités d'enseignement sur douze. Si M. B..., alors âgé de trente-deux ans, a décidé de réorienter ses études en 2022 en vue de la préparation du brevet professionnel de la jeunesse et de l'éducation populaire et des sports dans la spécialité " haltérophilie-musculation ", il ne justifie pas suffisamment de la cohérence de son parcours universitaire en se bornant à alléguer avoir eu le projet, dès le début de son cursus universitaire en économie, de créer une salle de sport ou de devenir formateur sportif alors en particulier qu'il n'a choisi de suivre une formation en sport que six ans après le début de ses études en France. Il ressort au demeurant des pièces du dossier que le diplôme d'éducateur sportif ne nécessite aucune compétence académique et ne saurait être regardé, dans le cas d'espèce, comme constitutif d'une réorientation dans des études universitaires. La circonstance que cette formation d'éducateur sportif n'existerait pas au Togo, en l'admettant établie, ne saurait attester le sérieux de cette réorientation. Dans ces conditions, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que le caractère réel et sérieux des études de l'intéressé n'était pas démontré et que ses choix d'orientation manquaient de cohérence et constituaient une régression dans son parcours universitaire.

7. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

8. Dès lors que le titre de séjour portant la mention " étudiant " ne donne pas vocation à s'installer durablement en France, que M. B... n'invoque aucun motif sérieux expliquant l'absence de progression dans ses études de 2018 à 2022 et qu'il n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales ou personnelles au Togo où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de renouveler le titre de séjour qui lui avait été délivré en sa qualité d'étudiant, le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait, en dépit de l'investissement associatif de l'intéressé, méconnu les normes ci-dessus reproduites ou aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à invoquer par la voie de l'exception, l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire.

10. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité préfectorale se serait crue en situation de compétence liée et se serait illégalement refusée à examiner l'ensemble de la situation de l'intéressé avant de prendre la mesure d'éloignement litigieuse.

11. Par les mêmes motifs que ci-dessus, l'obligation de quitter le territoire n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne repose pas sur une appréciation manifestement de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Jeannot et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera transmise à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 23NC03395

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC03395
Date de la décision : 05/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme MOSSER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-05;23nc03395 ?
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