Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 2 février 2023 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter dans un délai de trente jours le territoire national et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.
Par un jugement n° 2301323 du 17 août 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Jeannot, demande à la cour :
1) d'annuler ce jugement ;
2) d'annuler l'arrêté attaqué ;
3) d'enjoindre à la préfète de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de séjour : est irrégulier en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour ; est entaché d'erreur de droit en l'absence d'examen de sa situation au regard du fondement de sa demande ; méconnaît les article L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il remplit les conditions ; méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; repose sur une appréciation manifestement erronée de ses conséquences de toute nature sur sa situation personnelle ; a été prise en méconnaissance du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de renvoi : est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire ; est insuffisamment motivée ; méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme compte tenu des risques encourus en cas de retour en Sierra Leone.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 décembre 2023, la préfète de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle par une décision du 12 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Agnel ;
- et les observations de Me Gravier, substituant Me Jeannot, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité sierra-léonaise, est entré en France le 17 juillet 2011, en vue d'y solliciter l'asile. Après le rejet de sa demande par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 9 février 2012, puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 3 septembre 2012, puis le rejet de sa demande de réexamen par l'OFPRA le 27 novembre 2012, le préfet de Meurthe-et-Moselle a, le 24 mars 2014, délivré à M. A... un titre de séjour en raison de son état de santé, reconduit jusqu'au 28 juillet 2016. En revanche, par arrêté du 31 octobre 2017, le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté la demande de renouvellement de titre de séjour présenté par M. A... ainsi que le recours gracieux formé contre ce rejet et la nouvelle demande d'admission formée par l'intéressé. Par un jugement n° 1803541 et 1900516 du 11 février 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté les recours formés par M. A... contre ces décisions. Par un arrêt de cette cour n° 20NC02885 du 14 octobre 2021, le jugement du 11 février 2020 a été confirmé. Le 18 juillet 2022, l'intéressé a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 2 février 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle a décidé de lui refuser le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 17 août 2023 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du refus de séjour :
En ce qui concerne la régularité de la procédure :
2. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ". Aux termes de l'article L. 432-13 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / (...) / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 ".
3. Par les pièces qu'il produit M. A... justifie de sa présence habituelle jusqu'en l'année 2017. A compter de l'année 2018, il n'établit pas une présence continue en France alors qu'il a fait l'objet de mesures d'éloignement en particulier en 2017 et en 2022. Par suite, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision attaquée et le moyen tiré du vice de procédure doit, dès lors, être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne :
4. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité préfectorale se serait refusée à examiner la situation de M. A... au regard des fondements de sa demande de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit sera écarté.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'a été admis à résider en France sous couvert d'un titre de séjour qu'afin de bénéficier de soins médicaux lesquels ont produit leurs effets. Ce titre de séjour ne lui a donc pas donné vocation à s'établir en France. M. A... a travaillé durant son séjour régulier sur le territoire et a obtenu un titre d'agent polyvalent de restauration par le biais d'une entreprise d'insertion. Toutefois cette expérience et cette qualification ne sont pas telles que le refus de l'admettre exceptionnellement au séjour en qualité de salarié serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Il n'est pas contesté que l'épouse et les trois enfants de M. A... se trouvent en Sierra Leone et que rien ne fait obstacle à ce qu'il poursuive sa vie familiale à leurs côtés. M. A... n'a aucune attache en France et ne peut y faire valoir aucune intégration particulière en dehors de l'apprentissage de la langue française. Dans ces conditions, le refus de séjour attaqué n'a pas méconnu les normes ci-dessus reproduites et ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée de sa situation.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de destination :
7. M. A... reprend en appel sans précision nouvelle, les moyens qu'il avait invoqués devant le tribunal administratif à l'encontre de ces décisions. Il y a lieu de les écarter par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par les premiers juges.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Jeannot et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera transmise à la préfète de Meurthe-et-Moselle.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Stenger, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : M. AgnelLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 23NC033377
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