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05/12/2024 | FRANCE | N°23NC02578

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 05 décembre 2024, 23NC02578


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 2 septembre 2021 par laquelle le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) lui a refusé les conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile ainsi que la décision implicite rejetant son recours du 1er octobre 2021.



Par un jugement n° 2108231 du 15 novembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
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Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 3 août 2023 et un mémoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 2 septembre 2021 par laquelle le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) lui a refusé les conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile ainsi que la décision implicite rejetant son recours du 1er octobre 2021.

Par un jugement n° 2108231 du 15 novembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 août 2023 et un mémoire enregistré le 16 octobre 2024, M. A..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions attaquées ;

3°) de condamner l'OFII à lui verser une somme de 629 euros lui restant due sur le montant des conditions matérielles des demandeurs d'asile au titre de la période du 1er septembre 2021 au 30 mars 2022 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 400 euros toutes taxes comprises (TTC) sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus d'octroi des conditions matérielles n'est pas motivé au regard des exigences de l'article 20 de la directive 2013/33/UE et des articles L. 522-1, L. 551-15 et D. 551-17 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatifs à l'état de vulnérabilité du demandeur d'asile ;

- la procédure est irrégulière en ce que l'avis du médecin de l'Office n'a pas été recueilli avant de répondre à son recours préalable en violation de l'article R. 522-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'erreur de droit en ce que l'administration s'est crue en situation de compétence liée pour refuser d'accorder les conditions matérielles ;

- sa situation personnelle et son état de santé établissent son état de vulnérabilité ;

- l'article L. 551-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas conforme à l'article 20 §1 et 5 de la directive 2013/33/UE ;

- les décisions attaquées ont été prises en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 septembre 2024, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me de Froment, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par M. A... n'est fondé.

M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle par décision du 15 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.

Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant syrien né le 1er mars 1970, a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié en France le 12 juin 2018. Sa demande d'asile a été rejetée par le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Il a sollicité le réexamen de sa demande d'asile le 2 septembre 2021. Par une décision du même jour, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a refusé de lui accorder le bénéfice des conditions matérielles d'accueil. Par un courriel du 1er octobre 2021, M. A... a formé le recours préalable obligatoire contre cette décision. Le silence gardé par l'autorité administrative sur ce recours a fait naître une décision implicite de rejet. M. A... relève appel du jugement du 15 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Il ressort des pièces du dossier que la décision implicite rejetant le recours préalable de M. A... s'est nécessairement substituée à la décision initiale du 2 septembre 2021. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision initiale doit être écarté comme étant inopérant.

3. Aux termes de l'article L. 551-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les conditions matérielles d'accueil peuvent être refusées, totalement ou partiellement, au demandeur dans les cas suivants : / (...) / 3° Il présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ; / (...) / La décision de refus des conditions matérielles d'accueil prise en application du présent article est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur ". Aux termes de l'article L. 522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A la suite de la présentation d'une demande d'asile, l'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de procéder, dans un délai raisonnable et après un entretien personnel avec le demandeur d'asile, à une évaluation de la vulnérabilité de ce dernier afin de déterminer, le cas échéant, ses besoins particuliers en matière d'accueil. Ces besoins particuliers sont également pris en compte s'ils deviennent manifestes à une étape ultérieure de la procédure d'asile. Dans la mise en œuvre des droits des demandeurs d'asile et pendant toute la période d'instruction de leur demande, il est tenu compte de la situation spécifique des personnes vulnérables. / Lors de l'entretien personnel, le demandeur est informé de sa possibilité de bénéficier de l'examen de santé gratuit prévu à l'article L. 321-3 du code de la sécurité sociale ". Aux termes de l'article R. 522-2 du même code : " Si, à l'occasion de l'appréciation de la vulnérabilité, le demandeur d'asile présente des documents à caractère médical, en vue de bénéficier de conditions matérielles d'accueil adaptées à sa situation, ils sont examinés par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui émet un avis ". Il résulte de ces dispositions que tout demandeur d'asile doit bénéficier, lors de la présentation de sa première demande d'asile, d'un entretien personnel destiné à évaluer sa vulnérabilité. En revanche, lorsque l'OFII statue sur une demande d'octroi des conditions matérielles d'accueil présentée à la suite d'une demande de réexamen de demande d'asile, s'il lui appartient d'apprécier la situation particulière du demandeur d'asile au regard notamment de sa vulnérabilité, les dispositions de l'article L. 522-1 du code ne lui imposent pas de mener un nouvel entretien avec le demandeur d'asile.

4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur de l'OFII se serait cru en situation de compétence liée pour refuser l'octroi des conditions matérielles d'accueil du fait de l'introduction d'une demande de réexamen et qu'en particulier il se serait refusé à examiner la situation de vulnérabilité du requérant. A cet égard, les certificats médicaux produits par le requérant à l'appui de son recours préalable se bornaient à rappeler l'intervention chirurgicale dont il avait bénéficié le 24 septembre 2021, cette situation ayant déjà été examinée au cours de l'entretien initial du 12 juin 2018, puis au cours d'un nouvel examen le 1er septembre 2021, et n'ayant pas évolué, l'administration a pu sans méconnaître les dispositions de l'article R. 522-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'abstenir de soumettre ces documents pour avis au médecin de l'Office. S'il ressort ainsi des pièces du dossier que M. A... a subi une intervention chirurgicale le 24 septembre 2021, il n'est toutefois pas établi que cette opération, dont la nature n'est au demeurant pas précisée, caractériserait une situation de particulière vulnérabilité. Par ailleurs, les certificats médicaux produits, qui attestent seulement de la réalisation de cette opération, sont insuffisants pour établir l'existence d'une situation de vulnérabilité liée à l'état de santé du requérant. Dès lors, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse méconnaîtrait les dispositions ci-dessus rappelées, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

5. Il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'incompatibilité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les dispositions de la directive n° 2013/33/UE, ci-dessus visée, par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par les premiers juges.

6. Il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par les premiers juges.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Chebbale et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Stenger, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 23NC02578

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02578
Date de la décision : 05/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme MOSSER
Avocat(s) : CHEBBALE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-05;23nc02578 ?
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