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26/11/2024 | FRANCE | N°24NC00819

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 26 novembre 2024, 24NC00819


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2024 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence sur le territoire de la métropole du Grand Nancy pour une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois, et l'a obligé à se présenter tous les mardis et jeudis, y compris les jours fériés, à 15h00, auprès des services de police.



Par un jugement n° 2400238 du 8 février 2024, le ma

gistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.





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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2024 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence sur le territoire de la métropole du Grand Nancy pour une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois, et l'a obligé à se présenter tous les mardis et jeudis, y compris les jours fériés, à 15h00, auprès des services de police.

Par un jugement n° 2400238 du 8 février 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 avril 2024, M. A..., représenté par Me Lebon-Mamoudy, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 février 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 janvier 2024 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence sur le territoire de la métropole du Grand Nancy pour une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois, et l'a obligé à se présenter tous les mardis et jeudis, y compris les jours fériés, à 15h00, auprès des services de police ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que les modalités de l'assignation à résidence sont incompatibles avec son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2024, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 18 juin 2024, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Lebon-Mamoudy, conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens que la requête.

Par une ordonnance du 3 juin 2024, la clôture d'instruction a été reportée au 20 juin, à 12 heures.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 29 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant géorgien, né en 1961, est entré en France irrégulièrement, selon ses déclarations, en 2018. Le 4 février 2022, l'intéressé a sollicité un titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Par un arrêté du 3 mars 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Le recours en annulation présenté par l'intéressé contre cet arrêté a été rejeté par un jugement du tribunal administratif de Nancy du 15 juin 2023, dont l'intéressé a fait appel. En vue de s'assurer de l'exécution de cet arrêté, le préfet de Meurthe-et-Moselle a, par un arrêté du 26 janvier 2024, assigné M. A... à résidence. Par un jugement du 8 février 2024, dont l'intéressé fait appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : / 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (... ) ". Aux termes de l'article L. 731-1 du même code : " L'étranger assigné à résidence en application du présent titre se présente périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 733-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative qui a ordonné l'assignation à résidence de l'étranger en application des articles L. 731-1, L. 731-3, L. 731-4 ou L. 731-5 définit les modalités d'application de la mesure : / 1° Elle détermine le périmètre dans lequel il est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence ; / 2° Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'elle fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si l'obligation de présentation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés ; / 3° Elle peut lui désigner une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside ".

4. L'article 2 de l'arrêté en litige oblige M. A... à se présenter tous les mardis et jeudis, y compris les jours fériés, à 15h00, auprès des services de police, situés Boulevard Lobau, à environ 5 kilomètres du centre d'accueil des demandeurs d'asile, avenue du 69ème régiment d'infanterie à Essey-Lès-Nancy, où il est hébergé. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment d'un certificat médical du 1er mars 2024, qui bien que postérieur à la décision en litige, révèle une situation préexistante à la date de son édiction, que le requérant, âgé de soixante-deux ans, souffre d'une insuffisance rénale chronique terminale, qui nécessite trois séances d'hémodialyse par semaine, de difficultés cardiaques pour lesquelles il bénéficie d'un suivi régulier ainsi que d'une coxarthrose droite évoluée associée à une impotence fonctionnelle rendant la marche difficile pour laquelle une prothèse de hanche totale était d'ailleurs programmée le 27 février 2024. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, M. A... est fondé à soutenir qu'en lui imposant de se présenter deux fois par semaine, y compris les jours fériés, au commissariat, le préfet de Meurthe-et-Moselle a adopté une mesure disproportionnée. Il s'ensuit, dès lors que ces modalités de présentation sont divisibles de l'assignation à résidence, que cette illégalité n'entraîne que l'annulation de l'article 2 de l'arrêté qui fixe ses obligations de présentation au commissariat.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en tant que par son article 2 il lui a imposé de se présenter les mardis et jeudis, y compris les jours fériés, à 15 heures au commissariat.

Sur les frais de l'instance :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 2400238 du tribunal administratif de Nancy du 8 février 2024 en tant qu'il n'a pas annulé l'article 2 de l'arrêté du 26 janvier 2024 est annulé.

Article 2 : L'article 2 de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 26 janvier 2024 est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie de l'arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- M. Barteaux, président assesseur,

- M. Lusset, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. Barteaux

La présidente,

Signé : V. Ghisu-DeparisLa greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

N° 24NC00819 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00819
Date de la décision : 26/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : LEBON-MAMOUDY

Origine de la décision
Date de l'import : 01/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-26;24nc00819 ?
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