Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 16 février 2023 par lequel la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné.
Par un jugement n° 2300584 du 20 octobre 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 19 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Mainnevret, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2300584 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 20 octobre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Aube du 16 février 2023 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour, ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 431-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 avril 2024, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Lusset, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant gabonais né le 27 octobre 2004, est entré en France le 11 avril 2022 sous couvert d'un visa de court séjour valable du 30 mars
au 30 avril 2022, date à compter de laquelle s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français. Il a sollicité, le 3 octobre 2022, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté en date du 16 février 2023, la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer le titre sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné en cas d'exécution contrainte. M. B... relève appel du jugement n° 2300584 du 20 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus d'admission au séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
3. M. B... se prévaut de ce qu'il réside chez sa tante depuis
son arrivée en France le 11 avril 2022. Il soutient entretenir avec celle-ci une relation privilégiée, puisqu'elle l'a recueilli à la séparation de ses parents de 2011 à 2015, alors qu'elle demeurait au Gabon. Il indique également avoir subi des violences de la part de son père et de la compagne de celui-ci, rendant impossible son retour au domicile paternel dans son pays d'origine. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, à la date de l'édiction de la décision attaquée, M. B... ne résidait sur le territoire français que depuis 10 mois. En outre, s'il a pu débuter une scolarité en France, il est constant qu'il était régulièrement scolarisé au Gabon. Par ailleurs, le requérant n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 17 ans, et où résident ses deux parents. Enfin, et à cet égard, le requérant n'apporte aucun élément à l'appui de son allégation selon laquelle il aurait été exposé à des violences au sein du domicile paternel durant son enfance, alors que, au demeurant, il est désormais majeur. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas établi que M. B... ne pourrait pas poursuivre sa scolarité au Gabon, la décision portant refus d'admission au séjour n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité, la préfète de l'Aube n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat ".
5. Le requérant invoque les mêmes arguments que ceux évoqués au point 3 du présent arrêt. Toutefois, ces seuls éléments ne peuvent être regardés comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels permettant la délivrance d'un titre de séjour au sens des dispositions précitées. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète de l'Aube aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / ".
7. Pour refuser de délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant " à M. B..., la préfète de l'Aube s'est fondée sur les motifs tirés de l'absence de ressources suffisantes et de son entrée sous couvert d'un visa " touristique " qui a été détourné de son objet. Le requérant fait valoir qu'il est inscrit en classe de terminale générale à Troyes et qu'il est hébergé par sa tante et son concubin, qui subviennent à ses besoins. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment des avis d'imposition sur le revenu versés à l'instance par le requérant, que sa tante et son compagnon ont perçu au total 1 014 euros en 2021, et 6 010 euros en 2022. M. B..., qui n'allègue pas percevoir d'autres revenus par ailleurs, ne justifie ainsi pas disposer de moyens d'existence suffisants pour se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant". Par suite, la préfète de l'Aube pouvait légalement se fonder sur ce motif pour opposer un refus sur le fondement de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen correspondant ne peut, dès lors, qu'être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'étant pas illégale, M. B... n'est pas fondé à demander, par voie de conséquence, l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Aube du 16 février 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des frais d'instance, doivent être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- M. Barteaux, président assesseur,
- M. Lusset, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : A. LussetLa présidente,
Signé : V. Ghisu-Deparis
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
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N° 23NC03747