Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 2 mars 2023, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Par un jugement n° 2302381 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 août 2023, M. A..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mai 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 mars 2023, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin à titre principal de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, subsidiairement de l'admettre provisoirement au séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une insuffisance de motivation ;
en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- sa motivation insuffisante concernant ses efforts d'intégration révèle un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle n'est pas motivée en fait ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle doit être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Par une ordonnance du 12 mars 2024, l'instruction a été clôturée le 15 avril 2024 à 12 heures.
La préfète du Bas-Rhin a produit un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2024, qui n'a pas été communiqué.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 7 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant ivoirien, né en 2000, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, au cours du mois de février 2011. Il a sollicité, le 28 février 2022, la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 2 mars 2023, la préfète du Bas-Rhin a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. M. A... fait appel du jugement du 31 mai 2023, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges ont écarté, par une motivation suffisante, contrairement à ce que soutient M. A..., au regard de l'argumentation qu'il avait développée à son soutien, le moyen tiré du défaut d'examen particulier. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, la décision contestée vise notamment les articles L. 423-21, L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles M. A... a sollicité son admission au séjour, et mentionne de manière circonstanciée les conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé en France, notamment en précisant qu'arrivé à l'âge de onze ans, il a vécu en Italie au cours de la période de mars 2015 à janvier 2017, qu'il a fait l'objet d'un précédent refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français du 23 octobre 2020 qu'il n'a pas exécutée, qu'il a été irrégulièrement embauché en qualité d'employé polyvalent en 2021 et enfin qu'il est célibataire et sans charge de famille et que sa mère est également en situation irrégulière sur le territoire français. Elle comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Une telle motivation démontre, contrairement à ce que soutient le requérant, que la préfète du Bas-Rhin, a procédé à un examen particulier de sa situation personnelle alors même qu'elle n'a pas repris l'ensemble des éléments relatifs à sa situation, et en particulier l'obtention d'un certificat d'aptitude professionnelle comme " employé de vente spécialisé option B produits d'équipement courant ". Par suite, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision en litige et du défaut d'examen de la situation personnelle de M. A... doivent être écartés.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
5. M. A... fait valoir que le centre de ses intérêts est en France où il justifie de son intégration sociale et professionnelle. Toutefois, si l'intéressé est entré en France en 2011, à l'âge de onze ans, et y a été scolarisé, il est constant qu'il a séjourné en Italie entre mars 2015 et janvier 2017. S'il a appris le français et obtenu, en 2020, un certificat d'aptitude professionnelle, ces circonstances ne suffisent pas à lui conférer un droit au séjour. Si l'intéressé se prévaut de ses liens avec sa tante, de nationalité française, qui l'héberge depuis 2021, il est, comme l'a relevé la préfète du Bas-Rhin, célibataire et sans charge de famille, et n'établit pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où sa mère, également en situation irrégulière, a vocation à retourner. Son recrutement en qualité d'employé dans le cadre d'un contrat à durée déterminée pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021 et son activité sportive en club de football ne suffisent pas à justifier d'une intégration sociale et professionnelle d'une intensité particulière. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour ne porte pas au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, la préfète du Bas-Rhin n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
7. M. A..., qui se prévaut des mêmes circonstances que celles exposés au point 5, n'est pas fondé à soutenir qu'en estimant qu'il ne justifiait pas de considérations humanitaires, ni de motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour, la préfète du Bas-Rhin aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation au regard de son pouvoir de régularisation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l'interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués ".
10. Il résulte de ce qui a été exposé au point 3 que la décision de refus de titre de séjour est suffisamment motivée en droit et en fait. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n'a pas à faire l'objet d'une motivation en fait distincte, est, contrairement à ce que soutient le requérant, suffisamment motivée. Il s'ensuit que le moyen doit être écarté.
11. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
12. Il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Il s'ensuit que ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie de l'arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- M. Barteaux, président assesseur,
- Mme Roussaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : S. Barteaux
La présidente,
Signé : V. Ghisu-DeparisLa greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
N° 23NC02739 2