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05/11/2024 | FRANCE | N°24NC00522

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 05 novembre 2024, 24NC00522


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 par lequel le maire de Saint-Loup-Sur-Semouse a rapporté la délégation de fonctions qui lui avait été accordée ainsi que la décision du 16 février 2022 rejetant son recours gracieux.



Par un jugement n° 2200558 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :
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Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mars 2024 et le 23 juillet 2024, Mme C..., représentée par Me Suissa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 par lequel le maire de Saint-Loup-Sur-Semouse a rapporté la délégation de fonctions qui lui avait été accordée ainsi que la décision du 16 février 2022 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2200558 du 9 janvier 2024, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mars 2024 et le 23 juillet 2024, Mme C..., représentée par Me Suissa de la société DSC Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 9 janvier 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2021 par lequel le maire de Saint-Loup-Sur-Semouse a rapporté la délégation de fonctions qui lui avait été accordée ainsi que la décision du 16 février 2022 rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Loup-sur-Semouse la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige est intervenu en méconnaissance du contradictoire et est entaché d'un défaut de motivation ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il n'est pas fondé sur l'intérêt du service ; elle n'a jamais été en situation de conflit d'intérêts en raison de sa délégation ; la situation entre l'association et la commune s'est dégradée postérieurement au retrait de sa délégation et à son licenciement par l'association.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 mai 2024, le 28 juin 2024 et le 29 juillet 2024, la commune de Saint-Loup-sur-Semouse, représentée par Me Kern de la société Aedilys Avocats, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barteaux,

- les conclusions de M. Denizot, rapporteur public,

- les observations de Me Clément, pour Mme C... et Me Bauchart, pour la commune de Saint-Loup-Sur-Semouse.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 8 décembre 2021, le maire de la commune de Saint-Loup-Sur-Semouse a rapporté l'arrêté du 23 mai 2020, par lequel il avait accordé une délégation à Mme C..., 6e adjointe, dans le domaine du développement social et solidaire. Par une décision du 16 février 2021, le maire a rejeté le recours gracieux présenté par Mme C... contre cet arrêté. Par un jugement du 9 janvier 2024, dont Mme C... fait appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 23 mai 2020 et de la décision de rejet de son recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 100-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Le présent code régit les relations entre le public et l'administration en l'absence de dispositions spéciales applicables. / Sauf dispositions contraires du présent code, celui-ci est applicable aux relations entre l'administration et ses agents ". Aux termes de l'article L. 100-3 du même code : " Au sens du présent code et sauf disposition contraire de celui-ci, on entend par : / 1° Administration : les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales (...). / 2° Public : a) Toute personne physique ; (...) ". D'autre part, l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales dispose : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints (...). / (...) Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions ".

3. La décision par laquelle le maire rapporte la délégation qu'il a consentie à l'un de ses adjoints est une décision à caractère réglementaire qui a pour objet la répartition des compétences entre les différentes autorités municipales. Une telle décision, quand bien même elle pourrait être considérée comme prise en considération de la personne de l'élu, ne relève pas du champ défini par les dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration.

4. Il en résulte que l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui prévoit qu'exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 de ce code, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable, ne s'applique pas à la décision par laquelle le maire rapporte la délégation qu'il a consentie à l'un de ses adjoints. La requérante ne se prévaut d'aucune autre disposition qui imposerait spécifiquement la motivation de la décision par laquelle le maire procède au retrait de la délégation qu'il a donnée à l'un de ses adjoints. Enfin, contrairement à ce que soutient l'intéressée, si le maire n'est pas tenu de motiver la décision par laquelle il rapporte la délégation accordée à un adjoint, cette circonstance ne le dispense pas de justifier, en cas de contestation, du motif qui justifie cette abrogation. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation et du non-respect de la procédure contradictoire ne peuvent qu'être écartés.

5. En deuxième lieu, il résulte des dispositions précitées de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales qu'il est loisible au maire d'une commune, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par un motif étranger à la bonne marche de l'administration communale, de mettre un terme, à tout moment, aux délégations de fonctions qu'il avait données à l'un de ses adjoints. Dans ce cas, il est tenu de convoquer sans délai le conseil municipal afin que celui-ci se prononce sur le maintien dans ses fonctions de l'adjoint auquel il a retiré ses délégations.

6. Mme C... soutient que la décision rapportant sa délégation de fonctions dans le domaine du développement social et solidaire est inspirée par des considérations étrangères à la bonne marche de l'administration dès lors notamment que sa délégation ne lui permettait pas d'intervenir dans les décisions concernant l'association Mosaïque Lupéenne au sein de laquelle elle a été salariée et qu'en tout état de cause, dans les situations de conflits d'intérêts, elle se déporte. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette association, au sein de laquelle la commune de Saint-Loup-sur-Semouse est représentée, conformément à ses statuts, était en charge, en vertu d'une convention pluriannuelle d'objectifs conclue avec la commune, de la gestion et de l'animation du centre socio-culturel, de la fourniture de services extrascolaires aux familles dans le cadre du relais jeunesse et ludothèque ainsi que de la déclinaison d'actions relevant du contrat de ville. Contrairement à ce que fait valoir Mme C..., si un autre adjoint au maire dispose d'une délégation pour la vie associative et sportive, cette circonstance, eu égard à l'objet de sa propre délégation, n'exclut pas tout risque d'interférence avec les projets que l'association Mosaïque Lupéenne a vocation à porter dans le cadre de son partenariat avec la commune. Cette situation, qui compromet nécessairement l'exercice de la délégation de fonctions de l'intéressée, est de nature à perturber la bonne marche de l'administration communale. Si Mme C... se déporte lorsque l'association Mosaïque Lupéenne est concernée par les décisions prises par le conseil municipal, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé de l'arrêté contesté. Il en est de même de la dégradation, postérieurement à l'abrogation de la délégation, des relations entre l'association et la commune. Dans ces conditions, l'arrêté en litige ne peut être regardé, comme l'a relevé le tribunal, comme ayant été inspiré par des motifs étrangers à la bonne marche de l'administration communale.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2021 par lequel le maire de Saint-Loup-Sur-Semouse a rapporté la délégation de fonctions qui lui avait été accordée ainsi que la décision du 16 février 2022 rejetant son recours gracieux.

Sur les frais de l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Loup-Sur-Semouse, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme C... à l'occasion du litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme au titre des frais exposés par la commune de Saint-Loup-Sur-Semouse et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Loup-Sur-Semouse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune de Saint-Loup-Sur-Semouse.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- M. Barteaux, président assesseur,

- Mme Roussaux, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2023

Le rapporteur,

Signé : S. Barteaux

La présidente,

Signé : V. Ghisu-DeparisLa greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au préfet du Doubs, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

N° 24NC00522 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00522
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : CABINET AEDILYS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;24nc00522 ?
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