Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2023 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a obligé sans délai à quitter le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois.
Par un jugement n° 2302370 du 7 septembre 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 20 septembre 2023, M. A..., représenté par Me Amehi, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy du 7 septembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2023 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;
3°) d'enjoindre à la préfète de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour, au besoin sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros HT à verser à son conseil en application des dispositions combinées du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- le préfet ne pouvait pas prendre une telle décision à son encontre sans lui refuser préalablement le séjour et il lui appartenait d'attendre jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile pour prendre une telle mesure ;
- elle est illégale car elle a été prise par le préfet de Meurthe-et-Moselle sans que ce dernier ne soit au courant du rejet par la Cour nationale du droit d'asile de sa demande d'asile ;
- le préfet a fait une appréciation erronée de sa situation car il justifie de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à permettre sa régularisation ;
- la décision portant refus de délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation alors qu'il ne constitue pas une menace à l'ordre public, le préfet lui a refusé un délai de départ volontaire au seul motif d'une usurpation d'identité ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2024, la préfète de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 6 juin 1990, a déclaré être entré en France le 13 février 2021 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 31 mai 2021 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), puis par une décision du 22 juin 2023 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). A la suite de ces rejets, par un arrêté du 24 juillet 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourra, le cas échéant, être reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois. M. A... relève appel du jugement du 7 septembre 2023 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 24 juillet 2023.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 juillet 2023 :
2. En premier lieu, M. A... reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau ni critiquer utilement les motifs de rejet du jugement contesté, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 24 juillet 2023. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, au point 2 par le premier juge.
3. En deuxième lieu, et alors que l'arrêté litigieux reprend le parcours de l'intéressé, sa situation personnelle et familiale, le moyen tiré du défaut d'examen de sa situation personnelle doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) "
5. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par M. A..., a été rejetée par une décision du 31 mai 2021 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 22 juin 2023. Il ressort de la fiche TelemOfpra produite par le préfet en première instance que les décisions de l'OFPRA et de la CNDA lui ont été respectivement notifiées les 24 juin 2021 et 29 juin 2023. Ainsi, à la date de la décision contestée, la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à M. A... qui ne bénéficiait plus du droit de se maintenir sur le territoire français. Les circonstances que la mesure d'éloignement ait été prise peu de temps après la notification de la décision de la CNDA et que le requérant a toujours travaillé sont sans incidence sur la légalité de la mesure d'éloignement prise sur le fondement de l'article L. 611-1, 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet ne pouvait prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
6. En quatrième lieu, si le requérant fait valoir qu'il justifie de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à permettre sa régularisation, ce moyen n'est pas assorti des précisions utiles permettant d'en apprécier le bien-fondé.
7. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) ".
8. Le préfet de Meurthe-et-Moselle, pour refuser d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire, a considéré que le comportement de l'intéressé constitue une menace à l'ordre public. Le requérant qui a été interpellé le 18 juillet 2023 pour usurpation d'identité et travaille irrégulièrement sous le nom de cette personne, n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait, au regard de son comportement, légalement décider de ne pas lui accorder de délai de départ volontaire. Pour les mêmes motifs, la décision portant refus de délai de départ volontaire n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
9. Enfin, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
10. M. A... soutient qu'en cas de retour au Sénégal, il serait exposé à des traitements contraires à ces stipulations. Les éléments qu'il produit ne permettent toutefois pas d'établir la réalité des risques ainsi allégués. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonctions, au besoin sous astreinte, et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- M. Barteaux, président assesseur,
- Mme Roussaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.
La rapporteure,
Signé : S. RoussauxLa présidente,
Signé : V. Ghisu-Deparis
La greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
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N° 23NC02951