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05/11/2024 | FRANCE | N°22NC02123

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 05 novembre 2024, 22NC02123


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'association Segel Club Saar a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2020 du maire de la commune de Rémering-lès-Puttelange portant interdiction de toutes activités nautiques, subaquatiques et de baignade dans les eaux de l'étang communal dit " étang des marais " ainsi que la décision du 29 décembre 2020 par laquelle le maire de cette commune lui a ordonné le retrait de son local de stockage de son matériel ainsi que du ponton s

itué dans le prolongement de son emplacement avant le 28 février 2021.



Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Segel Club Saar a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2020 du maire de la commune de Rémering-lès-Puttelange portant interdiction de toutes activités nautiques, subaquatiques et de baignade dans les eaux de l'étang communal dit " étang des marais " ainsi que la décision du 29 décembre 2020 par laquelle le maire de cette commune lui a ordonné le retrait de son local de stockage de son matériel ainsi que du ponton situé dans le prolongement de son emplacement avant le 28 février 2021.

Par un jugement n° 2101291 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 8 août 2022, le 1er février 2023 et le 27 septembre 2023, l'association Segel Club Saar, représentée par Me Gorgol, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2101291 du 14 juin 2022 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 43/2020 du 29 décembre 2020 du maire de la commune de Rémering-lès-Puttelange portant interdiction de toutes activités nautiques et subaquatiques et de baignade dans les eaux de l'" étang des marais " ;

3°) d'annuler la décision du 29 décembre 2020 du maire de la commune de Rémering-lès-Puttelange lui ordonnant le retrait de son local de stockage de son matériel et du ponton situé dans le prolongement de son emplacement avant le 28 février 2021 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Rémering-lès-Puttelange la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

sur l'arrêté municipal n° 43/2020 du 29 décembre 2020 :

- l'arrêté est illégal car il est insuffisamment motivé ;

- le maire a commis une erreur de droit en méconnaissance de l'étendue de ses pouvoirs de police et de ceux du préfet en matière de baignade et d'activités nautiques et subaquatiques ;

- le maire a commis des erreurs de faits en fondant l'arrêté d'interdiction des activités nautiques sur l'absence d'aménagement et de surveillance de l'étang et sur la circonstance que les prélèvements d'eaux réalisés les dernières années ont révélé des non-conformités bactériologiques ;

- le maire a commis une erreur manifeste d'appréciation des faits en prenant une mesure d'interdiction générale et absolue des activités nautiques et subaquatiques ;

- le maire a commis un détournement de pouvoir car l'arrêté n'est motivé que par des motifs politiques et par la volonté de satisfaire les intérêts privés de la société Capfun, gestionnaire du camping en vertu d'un bail commercial signé avec la commune de Rémering-lès-Puttelange;

sur la décision du maire du 29 décembre 2020 :

- le juge administratif est incompétent pour connaitre de la décision ordonnant le retrait de ses installations car celles-ci sont situées sur le domaine privé de la commune ;

- la décision est illégale car elle est insuffisamment motivée ;

- en ordonnant le retrait de ses installations, le maire a méconnu l'intérêt général attaché à ces activités en tant qu'elles contribuent à l'attractivité du domaine public de l'étang des marais et à la pratique de la voile par de nombreux passionnés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2022, la commune de Rémering-lès-Puttelange, représentée par Me Guiso, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'association Segel Club Saar la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

sur l'arrêté du 29 décembre 2020 :

- l'arrêté du 29 décembre 2020 constitue une décision réglementaire et est donc hors du champ d'application de l'obligation de motivation fixée à l'article L. 211-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il n'est pas entaché d'erreur de droit : le maire de la commune était compétent pour prendre, au titre de la police des baignades visée à l'article L2213-23 du code général des collectivités territoriales, des mesures restrictives quand bien même le préfet disposerait de compétences aux termes de l'article L. 4241-2 du code des transports et de l'article L. 214-12 du code de l'environnement ;

- il n'est pas entaché d'erreurs de faits en l'absence de plage aménagée, de surveillance de l'étang par la commune et compte tenu des prélèvements d'eau alarmants ;

- il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation : la commune n'est pas en mesure d'assurer la sécurité et la surveillance des baigneurs et l'étang connaît une prolifération des bactéries diverses ;

- le détournement de pouvoir n'est pas avéré : l'arrêté proscrivant les activités de baignades et les activités nautiques, de nature réglementaire, s'applique tout autant au club qu'à l'opérateur privé exploitant le camping ;

sur la décision du 29 décembre 2020 :

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté l'exception d'incompétence, soulevée curieusement par l'auteur même de la requête :

. en ce qui concerne l'étang, le déclassement intervenu par délibération du 22 septembre 2020 concerne exclusivement les parcelles expressément visées dans cette délibération et au surplus les eaux de l'étang ont été affectées directement à l'usage du public depuis 1970 ;

. en ce qui concerne les berges de l'étang : elles ont toujours constitué une promenade publique, sont affectées à l'usage du public ; la commune a réalisé en 2018 des aménagements indispensables tendant à améliorer les " voies douces " autour de l'étang ; la circonstance que le camping attenant ait par ailleurs été désaffecté et déclassé ne traduit pas la volonté de la commune de fermer les promenades publiques ;

- la décision n'était pas soumise à une quelconque obligation de motivation au sens de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'à défaut de démontrer l'existence d'un titre d'occupation, le Segel Club Saar ne peut se prévaloir de ce que la commune retirerait ou abrogerait une décision créatrice de droit ou refuserait un avantage dont l'attribution contribue un droit ;

- l'occupation du domaine pour le Segel Club Saar ne fait l'objet d'aucune autorisation d'occupation du domaine public : aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques et de la jurisprudence, une simple tolérance ne peut être assimilée à un titre d'occupation du domaine public et en tout état de cause, une telle autorisation, toujours précaire, peut être résiliée pour un motif d'intérêt général.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- et les conclusions de M. Denizot, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté en date du 29 décembre 2020, le maire de la commune de Rémering-lès-Puttelange a interdit toutes les activités nautiques et subaquatiques, ainsi que la baignade, dans les eaux de " l'étang des marais " à partir du 1er janvier 2021. Par une lettre en date du même jour, il a ordonné à l'association Segel Club Saar le retrait de son local de stockage, de son matériel ainsi que du ponton situé en prolongement de son emplacement avant le 28 février 2021. L'association Segel Club Saar a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler ces deux actes. Cette dernière relève appel du jugement n° 2101291 du tribunal administratif de Strasbourg du 14 juin 2022 qui a rejeté sa demande

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. La présentation de l'action par un avocat, qui n'a pas lui-même à justifier de sa propre qualité de mandataire, ne dispense pas la juridiction de s'assurer, le cas échéant, que le représentant de la personne morale justifie de sa qualité pour engager cette action.

3. En l'absence dans les statuts d'une association, de stipulation réservant expressément à un autre organe la capacité de décider d'intenter une action devant le juge administratif, celle-ci est régulièrement engagée par l'organe tenant des mêmes statuts le pouvoir de représenter en justice cette association. En revanche, dans le silence des statuts sur ce point, l'action ne peut être régulièrement engagée que par une délibération de l'assemblée générale.

4. Il ressort des pièces du dossier et plus particulièrement de l'article 8 de ses statuts que les organes décisionnels de l'association Segel Club Saar sont l'assemblée des membres et le comité directeur. L'article 10 des statuts prévoit que l'assemblée des membres est compétente pour prendre des " décisions concernant les oppositions et les litiges ". Il en résulte que c'est l'assemblée de l'association Segel Club Saar qui décide des actions en justice. Par suite, la seule production de la copie du registre du tribunal d'instance de Homburg précisant que M. A..., qui est un des deux membres du comité directeur, exerce les fonctions " de représentation et de représentation spéciale ", ne permet pas de justifier que ce dernier dispose de la qualité pour représenter l'association dans le litige qui l'oppose à la commune de Rémering-lès-Puttelange.

5. Dès lors, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Rémering-lès-Puttelange en première instance et tirée de ce que le représentant légal ne justifie pas de sa qualité pour représenter l'association en justice doit être accueillie.

6. Il résulte de ce qui précède que l'association Segel Club Saar n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Rémering-lès-Puttelange, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'association Segel Club Saar demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Segel Club Saar le versement de la somme que la commune de Rémering-lès-Puttelange demande sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association Segel Club Saar est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Rémering-lès-Puttelange présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêté sera notifié à l'association Segel Club Saar et à la commune de Rémering-lès-Puttelange.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre,

- M. Barteaux, président assesseur,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

La rapporteure

Signé : S. RoussauxLa présidente

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

No 22NC02123


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02123
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : GORGOL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;22nc02123 ?
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