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05/11/2024 | FRANCE | N°21NC01639

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 05 novembre 2024, 21NC01639


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Guessling-Hemering a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement la SARL Toit Idéal, M. A... B..., maître d'œuvre, et la société Bureau Véritas à lui verser une somme de 36 197,16 euros TTC au titre de la responsabilité décennale des constructeurs, assortie des intérêts et de la capitalisation, la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice de jouissance, la somme de 5 000 euros en réparation du coût des désordres préc

ontentieux supportés par la commune et enfin les frais d'expertise.



Par un jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Guessling-Hemering a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner solidairement la SARL Toit Idéal, M. A... B..., maître d'œuvre, et la société Bureau Véritas à lui verser une somme de 36 197,16 euros TTC au titre de la responsabilité décennale des constructeurs, assortie des intérêts et de la capitalisation, la somme de 12 000 euros en réparation du préjudice de jouissance, la somme de 5 000 euros en réparation du coût des désordres précontentieux supportés par la commune et enfin les frais d'expertise.

Par un jugement n° 1901121 du 7 avril 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné solidairement la SARL Toit Idéal et M. A... B..., maître d'œuvre, à verser à la commune de Guessling-Hemering une indemnité de 36 197,16 euros, avec intérêts à compter

du 13 février 2019 outre les intérêts échus au 13 février 2020 qui seront comptabilisés pour produire eux-mêmes intérêts. Il a également mis à la charge solidaire de la SARL Toit Idéal et de M. A... B... la somme de 4 114,40 euros TTC au titre des frais d'expertise. Enfin, il a condamné la SARL Toit Idéal à garantir M. A... B... à hauteur de 70% des sommes mises à leur charge solidaire.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 4 juin 2021, 19 mai 2022, 21 juin 2022, 4 août 2022 et 26 août 2022, la SARL Toit Idéal et la MAAF Assurances SA, en sa qualité d'intervenant volontaire en tant qu'assureur de la SARL Toit Idéal, représentées par Me Schwartz, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) à titre principal, de réformer le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 avril 2021 en tant qu'il n'a pas prononcé la condamnation in solidum de la société Bureau Véritas Construction ;

2°) de juger que les parts de responsabilité de la SARL Toit Idéal, de la société Bureau Véritas Construction et de M. A... B... doivent être réparties selon les termes du rapport d'expertise et par conséquence de condamner M. A... B... et la société Bureau Véritas Construction à payer à la commune de Guessling-Hemering respectivement les sommes de 12 669,60 euros et de 10 857,96 euros, soit 35 % et 30 % de la somme de 36 197,16 euros ;

3°) subrogées de plein droit dans les droits de la commune de Guessling-Hemering, de condamner M. A... B... et la société Bureau Véritas Construction SAS à leur payer une somme de 12 668, 14 euros assortie du taux d'intérêt légal à compter du 14 juin 2021 ;

4°) en cas de condamnation in solidum, de condamner M. A... B... et la société Bureau Véritas Construction à les garantir, subsidiairement pour la compagnie MAAF Assurances SA, à hauteur respectivement de 35 % et de 30 %, soit à hauteur de 65 % au total, de toute condamnation qui dépasserait le taux de responsabilités retenue à l'encontre de la SARL Toit Idéal ;

5°) de débouter la société Bureau Véritas Construction, venant aux droits de la société Bureau Véritas, et M. A... B... de toutes prétentions, fins et moyens dirigés à leur encontre ;

6°) de mettre à la charge de M. A... B... et de la société Bureau Véritas Construction la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu la condamnation solidaire de la société Bureau Véritas Construction et n'ont pas examiné sa situation à l'aune de l'article R. 111-40 du code de la construction et de l'habitation : il entre bien dans les missions du contrôleur technique d'assurer les vérifications techniques qui incombent à chaque constructeur tels qu'énumérées à l'article 1792-1 (1°) du code civil et sa responsabilité peut être engagée au titre de la garantie décennale ;

sur la responsabilité de la société Bureau Véritas Construction en sa qualité de bureau de contrôle :

- ses missions sont contractuellement fixées par la " convention de contrôle technique " du 30 septembre 2010 qui prévoit un " contrôle sur le chantier des ouvrages et éléments d'équipements " et la mission L " relative à la solidité des ouvrages et éléments d'équipements indissociables " ainsi que par les articles L. 111-23 et R. 111-40 du code de la construction et de l'habitation ;

- la société a manqué à sa mission de contrôle et de surveillance alors qu'elle a fait quinze visites sur place et qu'elle est garante des directives techniques unifiées (DTU) ;

- l'expert a relevé que le suivi technique n'a pas été correctement effectué par la société Bureau Véritas Construction, que la mauvaise mise en place des vélux et la pente inadaptée de la couverture en zinc étaient facilement visibles, que cette impossibilité de réalisation aurait dû être signalée au maître d'ouvrage et que les travaux n'auraient jamais dû être acceptés ;

- si la société Bureau Véritas Construction se prévaut de ce que le maître d'ouvrage ne lui aurait pas adressé la note de calcul et les plans d'exécution du lot n° 2 " charpente -couverture " sollicités à plusieurs reprises et de ce qu'elle aurait rendu un avis négatif, ce dernier avis ne porte pas sur les désordres litigieux mais sur les jonctions entre les anciens ouvrages en tuiles et les nouveaux ouvrages en joint debout en zinc ;

- la société Bureau Véritas Construction n'est pas fondée à faire valoir une cause étrangère exonératoire tenant en l'absence de réaction du maître d'ouvrage, lequel est dépourvu de service technique qualifié ;

sur la responsabilité de M. B..., maître d'œuvre :

- il a manqué à son obligation générale de surveillance de chantier et n'a pas communiqué ses plans et notes de calcul à la société Bureau Véritas Construction ;

en ce qui concerne le dommage n°1 infiltrations d'eau au droit des vélux :

- il résulte en partie d'un défaut de conception relevant de la maîtrise d'œuvre ;

- alors que la maçonnerie n'a pas été réalisée en respectant les plans, le maître d'œuvre a accepté un support non adapté à la pente pour l'exécution d'une couverture en joint debout ;

en ce qui concerne le dommage n° 2 infiltrations d'eau à l'égout de la couverture neuve en bac acier sur le local sanitaire : le maître d'œuvre a commis un défaut de conception, de surveillance de chantier d'un point de vue de la conception critique et de direction du chantier ;

en ce qui concerne le dommage n° 3 phénomène de condensation :

- le dommage lié à l'absence d'isolant thermique sous le chéneau résulte d'un défaut de prescription de la maîtrise d'œuvre dans le cahier des charges ;

- la SARL Toit Idéal est intervenue en amont du plâtrier et n'a donc pas pu voir les ouvrages d'isolation exécutés postérieurement à son intervention ;

sur la responsabilité de l'ensemble des constructeurs en ce qui concerne plus généralement les trois désordres :

- le dommage n° 1 infiltrations d'eau au droit des vélux, résulte d'un défaut de conception relevant de la maîtrise d'œuvre, d'un défaut de réalisation de l'ouvrage par la SARL Toit Idéal et d'un défaut de contrôle de la société Bureau Véritas Construction laquelle ne s'est jamais véritablement prononcée sur cet ouvrage alors que le vice était facilement visible ;

- le dommage n° 2 infiltrations d'eau à l'égout de la couverture neuve en bac acier sur le local sanitaire, résulte de la responsabilité de l'architecte qui a commis une faute de conception, de direction et un défaut de contrôle de l'exécution des travaux ; alors que le maître d'œuvre qui a conçu le bâtiment prévoyait une pente de 5,78 % en toiture zinc à joint debout , la pente réalisée est de 1,7 % et 0,9 % ; la société Bureau Véritas Construction n'a pas exercé de contrôle véritable sur ces travaux ;

- le dommage n° 3 phénomène de condensation, lié à l'absence d'isolant thermique sous le chéneau, résulte entièrement d'un défaut de prescription du maître d'œuvre dans le cahier des charges du lot n° 2 ;

sur la contribution à la dette :

- le tribunal administratif aurait dû retenir le partage de responsabilité tel que retenu par l'expert judiciaire, à savoir 35 % pour la SARL Toit Idéal, 35 % pour M. B... et 30 % pour la société Bureau Véritas Construction ;

- les désordres engagent la responsabilité in solidum de l'entrepreneur, de l'architecte et du bureau de contrôle qui ont contribué de manière indissociable à la réalisation de l'entier dommage ;

- la responsabilité de la société Toit Idéal ne saurait donc être engagée à plus de 35 % et sa condamnation ne saurait donc être supérieure à 12 669,06 euros ;

- en cas de condamnation solidaire, elles, subsidiairement la MAAF Assurances SA, sont fondées à appeler en garantie M. B... et la société Bureau Véritas Construction à hauteur de 65 % de toute condamnation qui dépasserait le taux de responsabilité retenue à leur encontre ;

- elles ont déjà payé à la commune la somme de 25 338,01 euros, soit une somme qui dépasse la quote-part de responsabilité de la société Toit Idéal ; elles sont donc subrogées de plein droit dans les droits de la commune à l'encontre de M. B... et de la société Bureau Véritas Construction à hauteur de ce montant en application des articles 1251 et suivants du code civil.

Par des mémoires enregistrés les 9 septembre 2021, 2 mars 2022, 13 avril 2022 et 1er août 2022, la SAS Bureau Véritas Construction, venant aux droits de la SA Bureau Véritas, représentée par la Selarl GBV, conclut dans le dernier état de ses écritures :

1°) à titre principal, au rejet des conclusions de la SARL Toit Idéal et de la compagnie MAAF Assurances SA dirigées à son encontre et au rejet des conclusions d'appel en garantie de M. B... dirigées à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire, à écarter le principe de toute condamnation solidaire et pour le tout à son égard ; à ce que soient condamnés solidairement la SARL Toit Idéal, la MAAF Assurances SA et M. B... à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle et au rejet des appels en garantie dirigés contre elle ;

3°) à la condamnation de la SARL Toit Idéal, de la MAAF Assurances SA ou tout autre succombant à payer les dépens ainsi qu'à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que la SARL Toit Idéal et son assureur invoquent comme fondement légal les articles 1792 et suivants du code civil pour engager sa responsabilité : compte tenu de la nature particulière de la mission du contrôleur technique qui n'est pas réputé constructeur au sens de l'article 1792-1 du code civil, il n'est pas soumis directement à la responsabilité de plein droit de l'article 1792 du code civil et est régi par le seul article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation; un dommage ne peut lui être imputable que si le désordre se rattache à un aléa technique qu'il aurait dû contribuer à prévenir ou s'il est imputable à une exécution défaillante de sa mission ;

- le contrôleur technique a pour mission de contribuer à la prévention des aléas techniques susceptibles d'être rencontrés dans la réalisation des ouvrages tels que définis par le maître de l'ouvrage au titre des missions particulières retenues ;

- il n'a pas à se substituer aux autres constructeurs : il n'est pas un maître d'œuvre en charge de la conception, de la surveillance et de la direction des travaux, ni une entreprise chargée de l'exécution des travaux ;

- il n'est pas assujetti aux obligations d'un constructeur dans la mesure où il ne participe pas à la conception et à l'exécution de l'ouvrage ;

- sa mission de contribution à la prévention ne porte pas sur la vérification de la conformité de l'ouvrage avec les documents contractuels mais exclusivement avec des textes législatifs et réglementaires en vigueur ;

- en l'espèce, elle est intervenue aux termes d'une convention de contrôle technique souscrite par le maître d'ouvrage, le 24 septembre 2010 et s'est vu confier une mission de type L " relative à la solidité des ouvrages et des éléments d'équipements indissociables " ;

- au titre de la mission relative à la solidité de l'ouvrage, les aléas que le contrôleur technique doit contribuer à prévenir sont exclusivement ceux qui, découlant d'un défaut dans l'application des textes techniques à caractère réglementaire ou normatif, sont susceptibles de compromettre la solidité de la construction achevée ou celle des ouvrages et éléments indissociables qui la constituent ; elle a mentionné à plusieurs reprises l'absence de communication du plan d'exécution de la charpente ainsi que le relevé des problèmes d'étanchéité pouvant survenir à la jonction de la couverture en zinc et des éléments existants, notamment dans son compte-rendu de contrôle technique n°11 du 27 avril 2012 et dans son avis n°31 sur documents d'exécution du 7 mai 2013 ; ces observations n'ayant pas été suivies d'effets, elles ont été maintenues dans son rapport final du 28 janvier 2014 ; ainsi, elle a bien attiré l'attention du maître d'ouvrage et des autres intervenants concernés sur d'éventuels aléas pouvant survenir et a donc contribué à leur prévention ;

- les appels en garanties sont dépourvus de tout fondement ;

- elle ne saurait être condamnée solidairement : la solidarité ne se présume pas et n'est en l'espèce pas prévue dans le contrat, ni dans la loi : elle n'est pas soumise au même régime de responsabilité que les autres intervenants à l'acte de construire qui ont, eux, souscrit une obligation de résultat ;

- en tout état de cause, sa responsabilité ne saurait être que minime ;

- en cas de condamnation solidaire, elle est fondée à être garantie de toute condamnation par la SARL Toit Idéal, MAAF Assurances SAS et M. B....

Par cinq mémoires enregistrés les 7 janvier 2022, 24 mars 2022, 17 mai 2022, 25 juillet 2022 et 19 août 2022, M. A... B..., représenté par la AARPI Millot-Logier et Fontaine, conclut :

1°) à titre principal, à l'infirmation du jugement en ce qu'il n'a retenu que sa responsabilité et celle de la SARL Toit Idéal ; à ce que sa responsabilité soit réduite et à la condamnation de la société Bureau Véritas Construction et de la SARL Toit Idéal à le garantir de toutes condamnations qui dépasseraient le taux de responsabilité retenu à son encontre ;

2°) à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement et de la responsabilité retenue en première instance ; à la condamnation de la SARL Toit Idéal à le garantir de toutes condamnations qui dépasseraient le taux de responsabilité retenu à son encontre et à ce que les parties soient déboutées de leurs demandes plus amples et contraires ;

3°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire de la SARL Toit Idéal et de la société Bureau Véritas Construction en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le contrôleur technique est bien un constructeur au sens des dispositions de l'article 1792-1 du code civil, auquel l'article L. 111-24 du code de la construction et de l'habitation renvoie formellement ;

- le devoir de surveillance des travaux par le maître d'œuvre n'implique pas une présence et un contrôle permanent de celui-ci sur le chantier ;

- l'expert lui a uniquement reproché un défaut de surveillance pour l'ensemble des désordres 1, 2 et 3 mais la conception n'a nullement été incriminée : ce qui a été critiqué par l'expert, c'est la modification en cours de chantier des conditions de pose des vélux par retrait unilatéral commis par l'exécutant de la pose de costières et de la modification par l'exécutant de la charpente qui n'a pas été réalisée en respectant les plans ;

- la société Bureau Véritas Construction avait une mission de surveillance comme cela ressort du contrat conclu avec la commune qui précise qu'elle avait pour mission de réaliser des " contrôles sur chantier des ouvrages et éléments d'équipements " et de procéder à un " examen avant réception " ; le bureau de contrôle n'a pas formulé d'avis sur la capacité de la toiture à satisfaire à sa destination compte tenu des conditions dans lesquelles elle a été mise en œuvre ;

sur le dommage n° 1 infiltrations d'eau aux droits des vélux sur la couverture bac acier existantes :

- il avait prévu initialement des costières, lesquelles ont disparues : c'est donc à tort que la société Toit Idéal soutient que ce dommage résulte d'un défaut de conception, l'expert ayant au contraire relevé un manquement aux règles de l'art de l'exécutant ;

- le bureau de contrôle a failli à sa tâche dès lors que ce défaut était aisément décelable et n'a pas été signalé ;

- il s'est retrouvé placé devant le fait accompli puisque la commune exigeait que l'école puisse accueillir les enfants à la rentrée scolaire, ce qui l'a empêché d'exiger les reprises qui s'imposaient ;

- il y a lieu de procéder à un partage de responsabilité et la sienne ne pourra pas être supérieure à 15 % ;

sur le dommage n°2 infiltrations d'eau à l'égout de la couverture en bac acier neuve sur local sanitaire :

- c'est bien la SARL Toit Idéal qui a accepté le support et posé la couverture joint debout en zinc sur une très faible pente en ne respectant pas les pentes minimales exigées ; sa responsabilité est prépondérante ;

- le contrôleur technique était garant du respect des documents techniques unifiés ;

- l'expert a précisé que les plans réalisés par l'architecte étaient corrects et que leur non- respect est à l'origine du désordre : ce n'est que de manière subsidiaire que sa responsabilité pourra donc être retenue ;

- la responsabilité de la SARL Toit idéal doit donc être retenue à hauteur de 75 %, la sienne à hauteur de 15 % et celle de la société Bureau Veritas Construction à hauteur de 10 % ;

- s'il n'y a pas de partage de responsabilité avec la société Bureau Véritas construction, la SARL Toit Idéal devra le garantir ;

sur le dommage n°3 phénomène de condensation en sous face du chéneau en zinc :

- ce désordre est lié à un manque d'isolant en sous-face du chéneau : cette absence d'isolant relève d'une faute d'exécution à la charge de l'entreprise ;

- la responsabilité de la SARL Toit Idéal est prépondérante.

La commune de Guessling-Hemering, à qui la procédure a été communiquée n'a pas produit.

Par une ordonnance du 29 août 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 26 septembre 2022 à 12h00.

Les parties ont été informées, le 27 août, le 10 et 16 septembre 2024, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office les moyens d'ordre public suivants :

- irrecevabilité des conclusions de la SARL Toit Idéal tendant à la condamnation de M. B... et de la société Bureau Véritas Construction à la garantir sur le fondement de la responsabilité délictuelle, non invoquée en première instance, de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre dès lors qu'elles sont nouvelles en appel ;

- irrecevabilité des conclusions d'appel en garantie de la société Bureau Véritas Construction dirigées à l'encontre de la compagnie MAAF Assurances SA dès lors qu'elles sont nouvelles en appel ;

- irrecevabilité des conclusions de la SARL Toit Idéal demandant à la cour une détermination des quotes-parts des responsabilités entre les constructeurs, au cas où elle serait condamnée, dès lors que de telles conclusions sont nouvelles en appel ainsi que par voie de conséquence les conclusions de la SARL Toit Idéal et de la société MAAF Assurances SA tendant à se faire indemniser par les différents constructeurs ;

- irrecevabilité des conclusions de la société Toit Idéal et de la société MAAF Assurances SA tendant à la condamnation in solidum de la société Véritas, en l'absence de conclusions en ce sens présentées par la commune de Guessling-Hemering en appel.

Par un mémoire enregistré le 4 septembre 2024 la Société Bureau Véritas Construction a présenté des observations aux moyens d'ordre public qui ont été communiquées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les conclusions de M. Denizot, rapporteur public,

- et les observations de Me Wiedemann, représentant M. B... et de Me Vallet, représentant la SAS Bureau Véritas Construction.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'une opération de restructuration de son groupe scolaire, la commune de Guessling-Hemering a passé un marché de maîtrise d'œuvre avec M. A... B..., architecte. Le lot n° 2 " charpente / couverture " a été attribué à la SARL Toit Idéal et une convention de contrôle technique a été passée avec la société Bureau Veritas. La réception a été prononcée le 30 septembre 2013 et le décompte général et définitif du lot n° 2 a été établi le 21 octobre 2013. A la suite d'infiltrations au niveau de la toiture, la commune a sollicité l'organisation en référé d'une expertise, dont le rapport définitif a été déposé au greffe du tribunal le 7 février 2019. La commune de Guessling-Hemering a demandé au tribunal administratif de Strasbourg la condamnation solidaire de la SARL Toit Idéal, de M. A... B... et de la société Bureau Veritas à lui verser une somme de 35 197,16 euros TTC au titre de leur responsabilité décennale, une somme de 12 000 euros en réparation du préjudice de jouissance, ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre du temps consacré à la phase précontentieuse. Par un jugement n° 1901121 du 7 avril 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné solidairement la SARL Toit Idéal et M. A... B... à verser à la commune de Guessling-Hemering une indemnité de 36 197,16 euros, avec intérêts à compter du 13 février 2019 outre les intérêts échus au 13 février 2020 qui seront comptabilisés pour produire eux-mêmes intérêts. Il a également mis à la charge solidaire de la SARL Toit Idéal et de M. A... B... la somme de 4 114,40 euros TTC au titre des frais d'expertise. Enfin, il a condamné la SARL Toit Idéal à garantir M. A... B... à hauteur de 70 % des sommes mises à leur charge solidaire. La société Toit Idéal relève appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg et sollicite la condamnation in solidum de la société Bureau Véritas Construction et à ce que sa responsabilité soit limitée à hauteur de 35 % du dommage subi par la commune de Guessling-Hemering.

Sur les conclusions de la société Toit Idéal, de la MAAF Assurances SA et de M. B... tendant à la condamnation in solidum de la société Bureau Véritas Construction :

2. La commune de Guessling-Hemering, qui n'a pas produit en appel, n'a pas présenté de conclusions tendant à ce que la société Bureau Véritas Construction soit condamnée in solidum avec la société Toit Idéal et M. B.... Dès lors, et quand bien même la commune de Guessling-Hemering avait présenté de telles conclusions en première instance, les conclusions de la société Toit Idéal, de la société MAAF Assurances SA et de M. B... tendant à la condamnation in solidum de la société Bureau Véritas Construction, en l'absence de conclusions en ce sens présentées par la commune de Guessling-Hemering en appel, sont irrecevables et doivent être pour ce motif rejetées.

Sur les conclusions de la société Toit Idéal et de la MAAF Assurances SA tendant à une détermination des quote-parts de responsabilité :

3. Les conclusions de la société Toit Idéal et de la société MAAF Assurances SA tendant à une détermination des quotes-parts des responsabilités entre les constructeurs sont nouvelles en appel et sont par suite irrecevables.

4. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions de la société Toit Idéal et de son assureur, lesquels ne sont en tout état de cause pas subrogés dans les droits de la commune, tendant à la condamnation de M. B... et de la société Bureau Véritas Construction à leur reverser une partie de la somme versée au profit de la commune de Guessling-Hemering.

5. Il résulte de ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la société Toit Idéal, solidairement avec M. B..., à verser à la commune de Guessling-Hemering une indemnité de 36 197,16 euros.

Sur les conclusions d'appel en garantie :

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie de la société Toit Idéal et la MAAF Assurances SA à l'encontre de la société Bureau Véritas Construction et de M. B... :

6. Les conclusions de la SARL Toit Idéal et la MAAF Assurances SA tendant à la condamnation de M. B... et de la société Bureau Véritas Construction à les garantir sur le fondement de la responsabilité délictuelle, de toute condamnation qui serait prononcée, non demandées en première instance, sont nouvelles en appel et sont par suite irrecevables.

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie de M. B... :

S'agissant des conclusions d'appel en garantie de M. B... à l'encontre de la société Toit Idéal :

7. Il résulte de l'instruction et notamment des constats de l'expert que les infiltrations au droit des fenêtres de toit sont dues, d'une part, à l'omission des costières pourtant prévues au marché et, d'autre part, à la trop faible pente de la charpente de toiture par rapport aux stipulations contractuelles. Il ressort également du rapport d'expertise que les infiltrations au droit des joints de la couverture zinc sont dues au choix de la méthode d'étanchéité " à joint debout ", inadaptée en raison de la trop faible pente du support. Les désordres résultent ainsi de fautes majeures dans l'exécution des travaux et d'une méconnaissance fautive des règles de l'art de la part de l'entreprise société Toit Idéal, titulaire du lot " charpente / couverture ". Par ailleurs, M. B..., maître d'œuvre, a commis des manquements à sa mission de direction des travaux en s'abstenant d'assurer le respect des plans initiaux de l'ouvrage. M. B... n'établit pas que sa responsabilité dans la survenance des désordres serait inférieure au taux retenu par les premiers juges. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur sa recevabilité, que c'est à tort que par le jugement attaqué, la société Toit Idéal a été condamnée à le garantir à hauteur de 70% des sommes mises à leur charge solidaire.

S'agissant des conclusions d'appel en garantie de M. B... à l'encontre de la société Bureau Véritas Construction :

8. Il résulte de l'instruction que le contrôleur technique a alerté à plusieurs reprises tant le maître d'ouvrage que le maître d'œuvre sur le fait que certains documents ne lui avaient pas été communiqués et sur les problèmes d'étanchéité susceptibles d'intervenir au niveau de la charpente. Lors du compte rendu du contrôle technique du 27 avril 2012 adressé au maître d'ouvrage, et dont le maître d'œuvre a reçu copie, il a notamment rappelé que les dossiers d'exécution du lot n° 2 charpente - couverture " ne lui avaient pas été communiqués. Dans son avis n° 31 du 7 mai 2013 sur les documents d'exécution, le contrôleur technique a de nouveau sollicité le plan d'exécution de l'ensemble de la charpente bois et a précisé que " l'étanchéité doit être assurée entre la gouttière existante et le capo zinc rajouté sur boudin de gouttière ". Enfin, dans son rapport final de contrôle technique du 28 janvier 2014, il est mentionné que le plan d'exécution de l'ensemble de la charpente ne lui a pas été transmis et le contrôleur technique a alerté le maître d'ouvrage et le maître d'œuvre sur les possibles risques de défaut d'étanchéité au niveau de la charpente. Dans ces conditions, et alors que M. B... ne démontre pas de faute imputable à la société Bureau Véritas Construction, les conclusions d'appel en garantie de M. B... dirigées contre la société Bureau Véritas Construction doivent, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Bureau Véritas Construction et de M. B..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes ou les parties essentiellement perdantes, la somme demandée par la société Toit Idéal, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la société Toit Idéal la somme de 2 000 euros au profit d'une part, de la société Bureau Véritas Construction et d'autre part de M. B..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Toit Idéal et de la société MAAF Assurances SA et les conclusions de M. B... sont rejetées.

Article 2 : La SARL Toit Idéal versera à la société Bureau Véritas Construction et à M. B..., chacun, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Toit Idéal, à la société MAAF Assurances SA, à la commune de Guessling-Hemering, à M. A... B... et à la société Bureau Veritas Construction.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- M. Barteaux, président assesseur,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

N° 21NC01639


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01639
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : SELARL GVB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;21nc01639 ?
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