La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/10/2024 | FRANCE | N°21NC02951

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 31 octobre 2024, 21NC02951


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale du centre hospitalier régional (CHR) de Metz-Thionville a rejeté sa demande de rémunération au tarif majoré de nuit des heures supplémentaires effectuées et de la rétablir dans ses droits en lui versant une somme de 2 035,76 euros.



Par un jugement n° 2001701 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a

condamné le CHR de Metz-Thionville à verser à Mme A... une somme de 143,48 euros au titre des heure...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale du centre hospitalier régional (CHR) de Metz-Thionville a rejeté sa demande de rémunération au tarif majoré de nuit des heures supplémentaires effectuées et de la rétablir dans ses droits en lui versant une somme de 2 035,76 euros.

Par un jugement n° 2001701 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné le CHR de Metz-Thionville à verser à Mme A... une somme de 143,48 euros au titre des heures supplémentaires effectuées de nuit et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 novembre 2021, Mme A..., représentée par la SELARL Cabinet Coudray, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 septembre 2021 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale du centre hospitalier régional de Metz-Thionville a rejeté sa demande de rémunération au tarif majoré de nuit des heures supplémentaires effectuées ;

3°) de condamner le centre hospitalier régional de Metz-Thionville à lui verser la somme de 2 049,61 euros au titre de l'indemnisation de ses heures supplémentaires avec intérêt au taux légal et capitalisation de ces intérêts à compter du 25 novembre 2019 ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional de Metz-Thionville le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en raison d'une notification irrégulière du jugement, l'ayant privé du droit à un recours effectif ;

- au titre des mois de novembre et décembre de l'année 2019, le tribunal a commis une erreur de fait ;

- les indemnités figurant sur ses bulletins de paie des mois de novembre et décembre de l'année 2019 correspondent à l'indemnisation d'heures supplémentaires réalisées et non à une régularisation ;

- le jugement est entaché d'une erreur de droit dès lors que les premiers juges ne pouvaient, en l'absence de mémoire en défense du centre hospitalier, déduire des mentions figurant dans les bulletins de paie que les sommes en cause correspondaient à une régularisation, sans alors diligenter des mesures d'instruction ;

- elle a subi une moins-value de traitement en méconnaissance de dispositions des articles 7 et 8 du décret n° 2002-598 du décret du 25 avril 2002 ;

- en application de ces dispositions, elle a droit au paiement d'une somme de 2 049,61 euros au titre de l'indemnisation de ses heures supplémentaires de travail nocturne.

La requête a été communiquée le 17 novembre 2021 au centre hospitalier régional de Metz-Thionville, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par Mme A... devant la cour tendant à ce que l'indemnité réclamée soit portée à la somme de 2 049,613 euros, en tant qu'elles constituent une demande nouvelle en appel.

Des observations, enregistrées le 2 octobre 2024, en réponse au moyen d'ordre public, qui ont été présentées par Mme A... ont été communiquées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2002-598 du 25 avril 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... exerce comme infirmière en unité de soins intensifs de cardiologie au sein du centre hospitalier régional (CHR) de Metz-Thionville. Elle travaille exclusivement de nuit sur une base horaire hebdomadaire de 32 heures et 30 minutes. Par un courrier du 25 novembre 2019, elle a sollicité auprès de la directrice des ressources humaines du CHR de Metz-Thionville l'indemnisation de ses heures supplémentaires en tenant compte de la majoration pour travail nocturne. A la suite du rejet implicite de cette demande, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite par laquelle la directrice générale du CHR de Metz-Thionville a rejeté sa demande de rémunération au tarif majoré de nuit des heures supplémentaires effectuées et de la rétablir dans ses droits en lui versant une somme de 2 035,76 euros. Par un jugement du 15 septembre 2021, le tribunal a condamné le CHR de Metz-Thionville à verser à Mme A... une somme de 143,48 euros au titre des heures supplémentaires effectuées de nuit. Mme A... relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de sa demande de paiement.

Sur la recevabilité des conclusions de la requête :

2. La cour a informé les parties de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par Mme A... devant la cour tendant à ce que l'indemnité réclamée soit portée à la somme de 2 049,61 euros, en tant qu'elles constituent une demande nouvelle en appel. En réponse à ce moyen relevé d'office, la requérante soutient qu'elle avait sollicité devant les premiers juges, contrairement aux visas du jugement, non une somme de 2 035,76 euros mais la somme de 2 098,54 euros en produisant à l'appui une copie d'écran. Toutefois, contrairement à ce que fait valoir la requérante, il résulte des pièces du dossier de première instance communiqué à la cour que Mme A... a demandé la condamnation du CHR de Metz-Thionville à lui allouer une indemnité d'un montant de 2 035,76 euros, la copie d'écran versée en appel ne correspondant aucunement à la demande introductive d'instance enregistrée le 5 mars 2020 par le greffe du tribunal administratif de Strasbourg. Par suite, les conclusions présentées par l'intéressée devant la cour administrative d'appel tendant à ce que cette somme soit portée à 2 049,61 euros, constituent une demande nouvelle et ne sont, dès lors, pas recevables.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Mme A... soutient que le jugement est irrégulier au motif que la notification de ce jugement a indiqué de manière erronée que cette décision était susceptible de recours devant le Conseil d'Etat, la privant alors d'un droit à un recours effectif. Toutefois, l'indication erronée des voies et délais de recours dans la notification d'un jugement qui rend inopposable au destinataire de cette décision le délai de recours mentionné, est sans incidence quant à la régularité du jugement.

Sur la demande de paiement :

4. Aux termes de l'article 1er du décret du 25 avril 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires : " Les personnels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée peuvent percevoir, dès lors qu'ils exercent des fonctions ou appartiennent à des corps, grades ou emplois dont les missions impliquent la réalisation effective d'heures supplémentaires, des indemnités horaires pour travaux supplémentaires dans les conditions et suivant les modalités fixées par le présent décret ". Aux termes de l'article 7 du même décret, dans sa rédaction alors applicable : " A défaut de compensation sous la forme d'un repos compensateur, les heures supplémentaires sont indemnisées dans les conditions ci-dessous. La rémunération horaire est déterminée en prenant pour base le traitement brut annuel de l'agent concerné, au moment de l'exécution des travaux, augmenté, le cas échéant, / de l'indemnité de résidence, le tout divisé par 1820. / Cette rémunération est multipliée par 1,25 pour les 14 premières heures supplémentaires et par 1,27 pour les heures suivantes ". Et, selon l'article 8 du même décret : " L'heure supplémentaire est majorée de 100 % lorsqu'elle est effectuée de nuit et des deux tiers lorsqu'elle est effectuée un dimanche ou un jour férié ".

5. Il résulte de ces dispositions que le montant des indemnités dues à un agent au titre des heures supplémentaires accomplies la nuit, le week-end et les jours fériés doit être déterminé en combinant les majorations mentionnées à l'article 8, correspondant à ces périodes, avec celles prévues, selon que le nombre d'heures comptabilisées excède ou non quatorze, à l'article 7.

6. Au titre du bulletin de paie de Mme A... du mois de novembre 2019, l'administration a versé à l'agent, d'une part, des indemnités supplémentaires de nuit pour une somme de 753,48 euros correspondant à 18 heures (code de paiement 1454) et portant l'indication " M-1 ", et, d'autre part, une indemnité supplémentaire de nuit correspondant à 3 heures (code de paiement 1451) et portant également l'indication " M-1 ". En outre, au titre du bulletin de paie de l'agent du mois de décembre 2019, l'administration a versé à l'agent, d'une part, une indemnité supplémentaire de nuit pour une somme de 1 130,22 euros correspondant à 27 heures (code de paiement 1454) et portant l'indication " M-1 ", et, d'autre part, des indemnités supplémentaires de nuit correspondant à 27 heures (code de paiement 1451, 1452) et portant également l'indiction " M-1 ".

7. Selon les affirmations non contestées de Mme A..., corroborées par le planning annuel versé au dossier par la requérante ainsi que par les indications figurant dans ses bulletins de paie, chacune de ces indemnités rémunèrent une activité de l'agent au titre de son travail nocturne au-delà de son volume horaire mensuel réglementaire pour les mois d'octobre et de novembre 2019 et pour lesquelles Mme A... est ainsi susceptible de bénéficier de la majoration prévue par les dispositions précitées de l'article 8 du décret du 25 avril 2002.

8. En application des dispositions précitées des articles 7 et 8 du décret du 25 avril 2002, la rémunération des heures supplémentaires effectuées de nuit par Mme A... correspondant à 18 heures au titre du mois d'octobre 2019 (code de paiement 1454) s'élève, compte tenu des trois premières heures supplémentaires par ailleurs effectuées, à la somme de 758,10 euros (41,86 x 11) + (42,52 x 7). Et, en application des mêmes dispositions, la rémunération des heures supplémentaires effectuées de nuit par Mme A... correspondant à 27 heures au titre du mois de novembre 2019 (code de paiement 1454) s'élève à la somme de 1 148,04 (42,52 x 27). Il s'ensuit que l'indemnité au titre de ces heures supplémentaires de travail nocturne s'élève à la somme de 1 906,14 euros.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a fixé l'indemnité due à l'agent au titre des heures supplémentaires effectuées de nuit à une somme totale de 143,48 euros sans avoir retenu les indemnités supplémentaires de nuit au titre des mois d'octobre et de novembre 2019 pour un montant de 1 906,14 euros.

10. Si Mme A... demande en appel à ce que l'indemnité soit alors portée d'une somme de 143,48 euros à une somme de 2 049,61 euros, la requérante, ainsi qu'il a été exposé au point 2 ci-dessus, avait limité devant les premiers juges ses conclusions à l'allocation d'une indemnité d'un montant de 2 035,76 euros et n'est, ainsi, pas recevable à demander devant la cour à ce que cette indemnité soit portée à une somme supérieure.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à demander à ce que l'indemnité due par le centre hospitalier de Metz-Thionville soit portée à la somme de 2 035,76 euros.

Sur les intérêts et la capitalisation :

12. Mme A... a droit au versement des intérêts au taux légal sur la somme de 2 035,76 euros, à compter du 28 novembre 2019, date de réception de sa demande de versement d'indemnité au titre des heures supplémentaires effectuées de nuit auprès du centre hospitalier régional de Metz-Thionville.

13. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 15 novembre 2021. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 15 novembre 2021, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais liés à l'instance :

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier régional de Metz-Thionville le versement à Mme A... d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 143,48 euros à laquelle le centre hospitalier régional de Metz-Thionville a été condamné à verser à Mme A... par l'article 1er du jugement n° 2001701 du 15 septembre 2021 du tribunal administratif de Strasbourg est portée à la somme de 2 035,76 euros.

Article 2 : La somme de 2 035,76 euros portera intérêts au taux légal à compter du 28 novembre 2019. Les intérêts échus à la date du 15 novembre 2021 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le jugement n° 2001701 du 15 septembre 2021 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le centre hospitalier régional de Metz-Thionville versera à Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au centre hospitalier régional de Metz-Thionville.

Copie en sera adressée à l'agence régionale de santé Grand Est et à la direction départementale des finances publiques de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- M. Michel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : A. MichelLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de l'accès aux soins, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

V. Firmery

2

N° 21NC02951


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02951
Date de la décision : 31/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : CABINET COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-31;21nc02951 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award