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24/10/2024 | FRANCE | N°23NC02141

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 24 octobre 2024, 23NC02141


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2022 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.



Par un jugement n° 2208612 du 30 mai 2023, le tribunal admi

nistratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2022 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2208612 du 30 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2023, M. A..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2022 du préfet de la Moselle ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, subsidiairement, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans les quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée en fait ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet s'est, à tort, cru en situation de compétence liée ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée est illégale par exception d'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- la décision attaquée est illégale par exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision attaquée est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Berthou a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 26 février 2002, de nationalité arménienne, est entré en France, selon ses déclarations, le 16 juin 2016 à l'âge de 14 ans. Le 8 novembre 2021, il a sollicité une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 22 novembre 2022, le préfet de la Moselle lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 30 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, la décision attaquée comporte les considérations de fait très précises qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation en fait doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

4. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative doit d'abord vérifier si des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifient la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale ", ensuite, en cas de motifs exceptionnels, si la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " est envisageable. Dans ce dernier cas, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ".

5. D'une part, il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de la Moselle a examiné la situation personnelle de M. A... au regard de ces dispositions, prenant en compte sa situation familiale et professionnelle, notamment sa qualification, ses diplômes et les caractéristiques de l'emploi qu'il entend occuper. Par ailleurs, il ressort des termes même de la décision que le préfet ne s'est pas cru lié par l'avis défavorable de la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS).

6. D'autre part, M. A..., entré en France, selon ses déclarations, le 16 juin 2016 à l'âge de 14 ans accompagné de sa mère et de ses frères, a suivi sa scolarité en France en obtenant un certificat d'aptitude professionnelle en qualité de carrossier peintre. Après avoir réalisé un apprentissage de juillet 2019 à février 2020, il a commencé à exercer cette activité dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée conclu en juillet 2022, soit peu de temps avant l'édiction de la décision litigieuse. Sa mère a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 23 août 2021 et M. A... n'apporte aucun élément sur la fratrie. Il est célibataire, sans enfant et n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine. Ces seuls éléments ne suffisent pas à caractériser l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifient la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " au sens des dispositions précitées. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le préfet de la Moselle n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a pris la décision attaquée. Par suite, la décision attaquée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, pour les mêmes motifs, n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est illégale par exception d'illégalité du refus de titre de séjour.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La détention d'un document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour, d'une attestation de demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour (...) ". Aux termes de l'article R. 431-12 du même code : " L'étranger admis à souscrire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé qui autorise sa présence sur le territoire pour la durée qu'il précise (...) ". Aux termes de l'article R. 431-13 dudit code : " La durée de validité du récépissé mentionné à l'article R. 431-12 ne peut être inférieure à un mois. Il peut être renouvelé ". Aux termes de l'article L. 411-2 de ce code : " En cas de refus de délivrance ou de renouvellement de tout titre de séjour ou autorisation provisoire de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire ". Il résulte de ces dispositions que le récépissé délivré à l'étranger qui a demandé la délivrance d'un titre de séjour a uniquement vocation à autoriser provisoirement son séjour pour les besoins de l'instruction de sa demande et qu'il a, en conséquence, normalement vocation à cesser de produire ses effets lorsqu'il a été statué sur cette demande, l'article L. 411-2 impliquant la cessation du droit au séjour en cas de refus de délivrance du titre, sauf nouvelle décision expresse autorisant le séjour de façon définitive ou provisoire.

11. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a présenté, le 8 novembre 2021, une demande de titre de séjour et a obtenu, dans ce cadre, la délivrance d'un récépissé de demande de carte de séjour, valable jusqu'au 22 décembre 2022. En refusant de délivrer un titre de séjour dont il était saisi, le préfet de la Moselle a nécessairement rendu caduc le récépissé de demande de séjour dont bénéficiait M. A... et n'était pas tenu, dès lors que l'obligation de quitter le territoire français a été prise sur le fondement d'un refus de délivrance d'un titre de séjour, de mettre préalablement en œuvre la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

12. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de destination :

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est illégale par exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est illégale par exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

15. En deuxième lieu, il ressort des termes même de la décision attaquée que le préfet de la Moselle a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A.... Ce moyen doit donc être écarté.

16. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOU La présidente,

Signé : S. BAUER

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 23NC02141 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02141
Date de la décision : 24/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-24;23nc02141 ?
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