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24/10/2024 | FRANCE | N°22NC01778

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 24 octobre 2024, 22NC01778


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 11 février 2021 par lequel le maire de la commune de Sermamagny a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur un terrain cadastré section D, parcelle n° 617, situé au lieudit des Grandes Verronnes et de mettre à la charge de la commune de Sermamagny la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par un

jugement n° 2100599 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... et Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 11 février 2021 par lequel le maire de la commune de Sermamagny a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur un terrain cadastré section D, parcelle n° 617, situé au lieudit des Grandes Verronnes et de mettre à la charge de la commune de Sermamagny la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2100599 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 juillet 2022 et le 8 mars 2024, M. et Mme C..., représentés par Me Woldanski, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 5 mai 2022 ;

2°) d'annuler la décision de préemption du maire de la commune de Sermamagny du 11 février 2021 ;

Ils soutiennent que :

- l'arrêté attaqué n'est motivé par aucun projet d'aménagement réel à la date de la décision de préemption ;

- la mise en œuvre du droit de préemption urbain par la commune ne répond pas à un intérêt général suffisant ;

- compte tenu du classement de la parcelle aux deux tiers en zone A, la commune de Sermamagny n'avait pas compétence pour préempter au-delà de la partie de parcelle classée en zone UD.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 septembre 2022 et le 31 juillet 2024, la commune de Sermamagny, représentée par Me Kern, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les vendeurs ont demandé à la commune de se porter acquéreuse de l'intégralité de la parcelle ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthou,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Woldanski, représentant M. et Mme C... et D..., représentant la commune de Sermamagny.

Une note en délibéré, présentée pour M. et Mme C..., a été enregistrée le 7 octobre 2024 et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. En septembre 2020, M. et Mme C..., propriétaires d'un immeuble à usage d'habitation sur le territoire de la commune de Sermamagny, dans le département du Territoire de Belfort, ont conclu avec Mmes B..., Chenus et Tritsch, qui sont nus-propriétaires de la parcelle de terrain cadastrée section D, n° 617, située au lieudit des Grandes Verrones, qui jouxte leur propriété, un accord tacite en vue de son acquisition. Les parties ont alors convenu d'un rendez-vous chez le notaire, fixé au 23 décembre 2020, afin de réaliser la vente de ce terrain au profit des époux C.... A la suite de la réception de la déclaration d'intention d'aliéner portant sur ce terrain, le maire la commune de Sermamagny a décidé, par un arrêté du 11 février 2021, d'exercer le droit de préemption urbain sur la parcelle en cause. M. et Mme C... ont sollicité l'annulation de cette décision. Par un jugement du 5 mai 2022, dont les intéressés relèvent appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'urbanisme : " Les communes dotées d'un plan d'occupation des sols rendu public ou d'un plan local d'urbanisme approuvé peuvent, par délibération, instituer un droit de préemption urbain sur tout ou partie des zones urbaines et des zones d'urbanisation future délimitées par ce plan, dans les périmètres de protection rapprochée de prélèvement d'eau destinée à l'alimentation des collectivités humaines définis en application de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique, dans les zones et secteurs définis par un plan de prévention des risques technologiques en application de l'article L. 515-16 du code de l'environnement, dans les zones soumises aux servitudes prévues au II de l'article L. 211-12 du même code, sur tout ou partie des espaces urbains et des secteurs occupés par une urbanisation diffuse délimités conformément aux articles L. 5112-1 et L. 5112-2 du code général de la propriété des personnes publiques, ainsi que sur tout ou partie de leur territoire couvert par un plan de sauvegarde et de mise en valeur rendu public ou approuvé en application de l'article L. 313-1 du présent code lorsqu'il n'a pas été créé de zone d'aménagement différé ou de périmètre provisoire de zone d'aménagement différé sur ces territoires. (...) " ; Aux termes de l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme : " Lorsque la réalisation d'une opération d'aménagement le justifie, le titulaire du droit de préemption peut décider d'exercer son droit pour acquérir la fraction d'une unité foncière comprise à l'intérieur d'une partie de commune soumise à un des droits de préemption institué en application du présent titre. / Dans ce cas, le propriétaire peut exiger que le titulaire du droit de préemption se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière. ".

3. Il résulte de l'article L. 211-1 du code de l'urbanisme que le droit de préemption d'une commune dotée d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan local d'urbanisme (PLU) ne peut s'exercer que dans les zones urbaines et dans les zones d'urbanisation future délimitées par ce plan dans lesquelles elle a institué un droit de préemption urbain. Si l'article L. 213-2-1 du même code permet à la commune, lorsque la réalisation d'une opération d'aménagement le justifie, d'exercer son droit de préemption urbain sur la fraction de l'unité foncière mise en vente qui est comprise dans une zone soumise à ce droit, et précise qu'en ce cas le propriétaire peut exiger de la commune qu'elle se porte acquéreur de l'ensemble de cette unité foncière, il n'autorise pas la commune à préempter ceux des éléments d'un ensemble immobilier faisant l'objet d'une déclaration d'intention d'aliéner unique qui sont situés dans une zone où le droit de préemption ne peut pas s'exercer.

4. M. et Mme C... soutiennent, sans être contredits par la commune de Sermamagny, qui, malgré une mesure d'instruction en ce sens, n'a pas produit la délibération du 4 mai 2001, applicable à la date de la décision attaquée, instaurant le droit de préemption dans les seules zones urbaines de la commune, que la parcelle litigieuse, cadastrée section D, n° 617 et située dans sa majeure partie en zone A du PLU alors en vigueur, n'était en conséquence pas incluse dans son intégralité dans le périmètre du droit de préemption instauré en application des dispositions précitées de l'article L. 211-1 du code de l'urbanisme. Il est ainsi constant que la décision litigieuse du 11 février 2021, qui porte sur la totalité de la parcelle, préempte des éléments d'un ensemble immobilier faisant l'objet d'une déclaration d'intention d'aliéner unique qui sont situés dans une zone où le droit de préemption ne peut pas s'exercer. Par ailleurs, la seule attestation des vendeurs, largement postérieure à la préemption, ne suffit pas à établir que la commune aurait initialement manifesté une intention de ne préempter que la seule portion de parcelle soumise au droit de préemption et que les propriétaires auraient alors, en application des dispositions précitées de l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme, exigé qu'elle se porte acquéreuse de l'ensemble. Le moyen, soulevé pour la première fois en appel, tiré de ce que la commune ne pouvait pour ce motif préempter l'intégralité de la parcelle doit donc être accueilli.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Sur les frais de l'instance :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme C..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Sermamagny demande à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 11 février 2021 par lequel le maire de la commune de Sermamagny a décidé d'exercer le droit de préemption urbain sur un terrain cadastré section D, parcelle n° 617, situé au lieudit des Grandes Verronnes est annulé.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Sermamagny présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à

Mme E... C... et à la commune de Sermamagny.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOULa présidente

Signé : S. BAUERLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet du Territoire de Belfort en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 22NC01778 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01778
Date de la décision : 24/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : EARTH AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-24;22nc01778 ?
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