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24/10/2024 | FRANCE | N°22NC01515

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 24 octobre 2024, 22NC01515


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le compte rendu de rendez-vous de carrière de l'année scolaire 2018/2019 du 17 octobre 2019, d'annuler l'appréciation finale de la directrice académique du 4 novembre 2019 et, subsidiairement, d'enjoindre à la rectrice d'académie d'établir une nouvelle appréciation.



Par un jugement n° 2005629 du 12 avril 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

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Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 juin 2022 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler le compte rendu de rendez-vous de carrière de l'année scolaire 2018/2019 du 17 octobre 2019, d'annuler l'appréciation finale de la directrice académique du 4 novembre 2019 et, subsidiairement, d'enjoindre à la rectrice d'académie d'établir une nouvelle appréciation.

Par un jugement n° 2005629 du 12 avril 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 juin 2022 et le 10 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Mengus, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 avril 2022 ;

2°) d'annuler l'appréciation finale du compte-rendu de rendez-vous de carrière du 4 novembre 2019 et la décision de rejet de son recours gracieux du 6 juillet 2020 ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Strasbourg de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions attaquées ne sont pas motivées en fait et en droit en méconnaissance des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le compte rendu d'évaluation est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et repose sur des faits matériellement inexacts ;

- l'entretien a été conduit par M. C... dont la partialité est établie ;

- le rapport d'alerte, postérieur au rendez-vous de carrière, et qui repose sur des faits dont la matérialité n'est pas établie, ne saurait légalement fonder l'appréciation finale qui y figure.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2022, le recteur de l'académie de Strasbourg conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 171 euros soit mise à la charge de M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'insuffisante motivation est inopérant ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 90-680 du 1 août 1990 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthou,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Scarinoff, substituant Me Mengus, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., directeur de l'école Saint-Exupéry à Geispolsheim depuis 2012, a fait l'objet d'un rendez-vous de carrière le 19 mars 2019 dont le compte rendu lui a été notifié le 18 octobre 2019. L'appréciation finale a été faite le 4 novembre 2019, par la directrice académique des services de l'éducation nationale du Bas-Rhin pour la rectrice qui a retenu la plus négative, à savoir la mention " à consolider ". L'intéressé a saisi cette dernière d'une demande de révision de son appréciation le 14 novembre 2019, puis la commission administrative paritaire départementale le 8 janvier 2020. Son recours gracieux a été rejeté le 6 juillet 2020. Par un jugement du 12 avril 2022, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'appréciation finale du 4 novembre 2019.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 23-4 du décret n°90-680 du 1er août 1990 relatif au statut particulier des professeurs des écoles : " Pour les professeurs des écoles mentionnés à l'article précédent, le rendez-vous de carrière donne lieu à l'établissement d'un compte rendu / L'appréciation finale de la valeur professionnelle qui figure au compte rendu est arrêtée par le recteur d'académie. " ; aux termes de son article 23-6 : " L'enseignant peut saisir le recteur d'académie d'une demande de révision de l'appréciation finale de la valeur professionnelle dans un délai de 30 jours francs suivant sa notification. / Le recteur d'académie dispose d'un délai de 30 jours francs pour réviser l'appréciation finale de la valeur professionnelle. L'absence de réponse équivaut à un refus de révision. / La commission administrative paritaire compétente peut, à la requête de l'intéressé, sous réserve qu'il ait au préalable exercé le recours mentionné au premier alinéa, demander au recteur d'académie la révision de l'appréciation finale de la valeur professionnelle. La commission administrative paritaire compétente doit être saisie dans un délai de 30 jours francs suivant la réponse formulée par l'autorité hiérarchique dans le cadre du recours. / Le recteur d'académie notifie au professeur des écoles l'appréciation finale définitive de la valeur professionnelle. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le compte rendu de rendez-vous de carrière établi par l'inspecteur de l'éducation nationale et notifié le 18 octobre 2019 est motivé, outre par des insuffisances pédagogiques dans les enseignements dispensés par M. B... et des lacunes dans ses activités de direction, essentiellement par un motif déterminant tiré du non-respect de la posture éthique par l'intéressé qui mettrait en œuvre des pratiques humiliantes à l'égard de ses élèves.

4. L'administration se borne, pour justifier des appréciations formulées dans le compte rendu de rendez-vous de carrière et reprises dans l'appréciation finale, à produire un rapport d'alerte du 15 octobre 2019, rédigé par le même inspecteur concernant deux évènements précis survenus en 2017 et 2019, au cours desquels M. B... a, d'une part, été amené, dans un contexte de crise émotionnelle aigüe, à introduire une tétine dans le bouche d'une élève de CE1 pour la calmer, d'autre part, usé du recours à la contrainte physique à l'encontre d'un autre élève connaissant de très graves accès de violence tant envers son entourage qu'envers lui-même et difficilement contrôlables autrement que par la contention. Il ressort des pièces du dossier que ces deux faits, dénoncés par la rectrice, ont fait l'objet d'un classement sans suite par le procureur, et que leur caractère fautif a également été écarté par un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 mars 2022, qui a annulé la sanction de l'avertissement infligée en réponse par la rectrice, de sorte que leur matérialité n'est pas établie.

5. Par ailleurs, il ressort tant des deux procès-verbaux des auditions de ses collègues réalisées lors de l'enquête pénale que du courrier en sa faveur établi par les représentants des parents d'élèves que les griefs formulés à l'encontre de M. B... concernant notamment ses activités de direction, de gestion de l'équipe pédagogique, ses relations avec les élèves ou ses qualités pédagogiques sont contestés. L'intéressé se prévaut également de l'appréciation portée suite à sa dernière inspection, remontant au 1er décembre 2014, mais relevant que l'intéressé, déjà directeur d'école, " exerçait bien sa fonction, notamment sur les registres administratifs et pédagogiques, et faisait preuve de qualités certaines dans la gestion de son équipe ".

6. En l'absence d'éléments étayés de la part de l'administration qui seraient susceptibles de justifier les appréciations particulièrement sévères formulées à l'encontre de M. B... dans le compte rendu du rendez-vous de carrière, alors que le motif déterminant tiré du non-respect de la posture éthique par la mise en œuvre de pratiques humiliantes envers les élèves n'est pas établi, l'appréciation finale du 4 novembre 2019 doit être regardée comme étant entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande dirigée contre son appréciation finale au titre de l'année 2018/2019 et le rejet de son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Eu égard au motif retenu pour annuler les décisions litigieuses, il y lieu d'enjoindre à la directrice académique des services de l'éducation nationale du Bas-Rhin de réexaminer la situation de M. B... et de prendre une nouvelle décision dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais de l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par l'Etat au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros demandée au même titre par M. B....

D E C I D E :

Article 1 : L'appréciation finale du compte rendu de rendez-vous de carrière de M. B... du 4 novembre 2019 et la décision du 6 juillet 2020 rejetant son recours gracieux sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la directrice académique des services de l'éducation nationale du Bas-Rhin de réexaminer la situation de M. B... et de prendre une nouvelle décision dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et à la ministre de l'éducation nationale.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Strasbourg.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Bauer, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOULa présidente,

Signé : S. BAUERLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 22NC01515 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01515
Date de la décision : 24/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : MENGUS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-24;22nc01515 ?
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