Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2014 à raison de deux plus-values immobilières.
Par un jugement n° 1903333, 1903334 du 23 décembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a partiellement fait droit à ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 24 février 2022 et le 26 avril 2023, Mme B... A..., représentée par Me Ferretti, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 décembre 2021 en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses demandes ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2014, restées à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant du bien situé au 26 bis rue Claude Barrès à Charmes :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qu'il ne répond pas aux moyens tirés d'une part, de ce que l'administration a renversé la charge de la preuve en lui demandant de prouver que cet immeuble était bien sa résidence principale jusqu'à sa cession, d'autre part, de ce que le service n'a pas eu une appréciation objective de sa consommation d'eau en se basant sur une seule facture d'eau et enfin, de ce qu'elle avait remboursé à son compagnon les frais d'acquisition de 7,5 % du terrain suite à la vente de la maison ;
- les droits de communication exercés par le service sont irréguliers en ce qu'ils auraient dû être réalisés sur place ; le service a fondé son analyse sur des informations obtenues auprès de la caisse d'allocation familiale (CAF) des Vosges, de l'éducation nationale et de la préfecture du Doubs, qui n'ont pas été soumises au débat contradictoire dès lors qu'elles ont été recueillies postérieurement aux opérations de contrôle et à l'envoi des deux propositions de rectification du 15 décembre 2017, ce qui méconnaît les articles L. 76 B et L. 55 du livre des procédures fiscale ; l'administration a méconnu sa propre doctrine BOI-CF-PGR-30-10 du 12 septembre 2012 qui indique que cette information doit être effectuée au stade de la proposition de rectification ; les impositions établies sur le fondement des renseignements recueillis dans l'exercice des droits de communication sont irrégulières dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 81-1 du livre des procédures fiscales, les courriels du 19 décembre 2017, du 12 juillet 2018 et du 25 mai 2018 de l'administration ne permettent pas d'identifier l'identité, le grade et le degré d'habilitation de l'agent ayant exercé le droit de communication ; cette irrégularité ne saurait être régularisée par la communication tardive de ces informations par l'administration fiscale devant les premiers juges ; il est impossible de connaître avec exactitude les renseignements, informations et documents sollicités par l'administration, dans le cadre des droits de communication, dès lors que les copies qui lui ont été transmises ont été altérées par de nombreuses griffes manuscrites destinées à masquer les renseignements qu'elles contiennent sans que l'administration démontre en quoi le secret professionnel est opposable ;
- l'immeuble en litige et ses dépendances constituaient bien sa résidence principale jusqu'à sa cession, elle pouvait donc bénéficier de l'exonération prévue à l'article 150 U du code général des impôts ; à cet égard, c'est à tort que l'administration a considéré que sa consommation d'eau indiquée sur une seule facture révélait qu'elle ne résidait pas de manière effective et habituelle dans l'immeuble en litige alors qu'elle travaille à l'extérieur de son domicile ; la comparaison avec la consommation totale journalière des habitants français est subjective et ne prend pas en considération ses habitudes de consommation ; l'immeuble en litige a été mis en vente fin 2013 alors qu'elle y résidait toujours, qu'elle entreprenait les démarches pour sa mise en vente et qu'elle effectuait des allers/retours vers Toul où résidait son compagnon ; en vertu de la jurisprudence administrative, un immeuble ne perd pas sa qualité de résidence principale du seul fait que son propriétaire aurait libéré les lieux peu de temps avant la date de sa cession ; c'est à tort que le service a considéré, de manière subjective, qu'elle n'avait aucun intérêt familial ou économique à fixer sa résidence à Charmes ;
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle n'était pas fondée à demander que le prix d'acquisition du terrain soit majoré des frais d'acquisition de 7,5 % au motif qu'elle ne justifiait de leur paiement dès lors que c'est son compagnon qui a réglé ces frais dans le cadre d'un prêt familial qu'elle a remboursé lors de la vente de la maison ;
- à titre subsidiaire, c'est à tort que le service et les premiers juges ont refusé de prendre en compte dans le calcul de la plus-value nette les dépenses de construction ainsi que l'abattement exceptionnel de 25 % dès lors qu'elle les a effectivement et personnellement supportées grâce à ses économies placées sur un plan épargne logement et un prêt familial consenti par son compagnon qu'elle a remboursé suite à la vente de la maison ; c'est à tort que l'administration et les premiers juges ont écarté les factures de la société CMC Touloise, détenue par son compagnon, au motif que ce dernier a refusé de répondre à un droit de communication dès lors que ces factures n'ont pas été remises en cause par le service dans le cadre de la procédure de contrôle de cette société ;
- elle démontre, par une attestation de la banque Crédit Mutuel, qu'elle a remboursé le 4 mars 2014, le prêt familial de 160 000 euros que lui avait consenti son compagnon, pour la réalisation de son projet personnel ;
- elle démontre, par une attestation de la banque Crédit Mutuel, qu'elle a remboursé le 7 novembre 2012 son crédit relais.
S'agissant du bien situé au 26 ter rue Claude Barrès à Charmes :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle n'était pas fondée à demander que le prix d'acquisition du terrain soit majoré des frais d'acquisition de 7,5 % au motif qu'elle ne justifiait de leur paiement dès lors que c'est son compagnon qui a réglé ces frais dans le cadre d'un prêt familial qu'elle a remboursé lors de la vente de la maison ;
- contrairement à ce qu'ont estimé le service et les premiers juges, elle a supporté les dépenses de construction, à hauteur de 112 905 euros, en utilisant ses économies réalisées depuis de nombreuses années, placées sur un plan épargne logement ; elle a remboursé les avances faites par son compagnon pour la prise en charge de ces dépenses, dans le cadre de leurs dépenses de vie courante et suite à la vente de l'immeuble en litige ; c'est à tort que l'administration et les premiers juges ont écarté les factures de la société CMC Touloise, détenue par son compagnon, au motif que ce dernier a refusé de répondre à un droit de communication dès lors que ces factures n'ont pas été remises en cause par l'administration dans le cadre de la procédure de contrôle de cette société ; c'est à tort que l'administration a exclu du calcul de la plus-value plusieurs factures de travaux, pour un montant total de 60 737 euros, au motif qu'elles présentaient des anomalies relatives à l'adresse du chantier ou au nom ou à l'adresse du destinataire.
Par deux mémoires en défense, enregistrés le 7 juillet 2022 et le 12 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Laurence Stenger, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Cyrielle Mosser, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par deux actes notariés du 26 février et du 4 juillet 2014, Mme A... a vendu deux maisons dont elle était propriétaire, situées au 26 bis et 26 ter de la rue Claude Barrès à Charmes dans le département des Vosges. A la suite d'un contrôle sur pièces, par deux propositions de rectification du 15 décembre 2017, notifiées à la requérante dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, l'administration fiscale l'a informée qu'elle envisageait de mettre à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu assorties des pénalités correspondantes résultant de la remise en cause du régime d'exonération sous lequel la requérante s'était placée au titre de la plus-value réalisée lors de la vente de l'immeuble et des dépendances situés au 26 bis de la rue Claude Barrès, au motif qu'ils ne constituaient pas sa résidence principale au jour de la cession. Elle l'informait également qu'elle modifiait le montant de la plus-value immobilière réalisée lors de la vente de l'immeuble situé 26 ter de la rue Claude Barrès en raison de l'exclusion de plusieurs dépenses de construction que la requérante ne justifiait pas avoir réglées ou dont les justificatifs étaient considérés comme non probants. A la suite des observations présentées par la requérante les 14 et 15 février 2018, ces impositions ont été maintenues dans les réponses aux observations du contribuable du 28 février 2019. Les impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement le 4 avril 2019. Mme A... a présenté une réclamation préalable le 21 juin 2019 qui a fait l'objet de deux décisions de rejet du 16 septembre 2019. Mme A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 décembre 2021 en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses demandes tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes.
Sur la régularité du jugement :
2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments développés par la requérante, ont suffisamment motivé les raisons pour lesquelles ils ont estimé, selon le régime de la preuve objective, que l'immeuble situé au 26 bis de la rue Claude Barrès n'était pas, à la date de sa cession, la résidence principale de Mme A... compte-tenu, notamment, de sa consommation d'eau sur l'année 2013/2014 telle que résultant de la seule facture d'énergie produite par l'intéressée et que cette dernière ne justifiait avoir remboursé à son compagnon les frais d'acquisition de 7,5 % du terrain. Ils ont par ailleurs suffisamment motivé les raisons pour lesquelles ils refusaient d'admettre, pour le calcul de la plus-value réalisée à l'occasion de la vente de l'immeuble situé au 26 ter de la rue Claude Barrès, certaines dépenses de construction dont les justificatifs n'étaient pas probants ou dont il n'était pas prouvé qu'elles avaient été réglées par Mme A.... Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L.81 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige : "Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette, le contrôle et le recouvrement des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées (...) Le droit prévu au premier alinéa s'exerce sur place ou par correspondance, y compris électronique, et quel que soit le support utilisé pour la conservation des documents. Les agents de l'administration peuvent prendre copie des documents dont ils ont connaissance en application du premier alinéa (...) ". Aux termes de l'article R. 81-1 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication défini à l'article L. 81 est exercé par les fonctionnaires titulaires ou stagiaires appartenant à des corps de catégorie A ou B ou par des fonctionnaires titulaires appartenant à des corps de catégorie C agissant sur l'ensemble du territoire métropolitain et des départements et régions d'outre-mer, pour l'exercice de leurs missions d'établissement de l'assiette, de contrôle et de recouvrement des impôts, droits et taxes ".
4. Si en appel, la requérante persiste à soutenir que les droits de communication exercées par l'administration fiscale auprès de la caisse d'allocation familiale des Vosges, des services de l'éducation nationale et de la préfecture du Doubs ne pouvaient pas être exercés par voie de correspondance mais devaient nécessairement se dérouler sur place, il résulte toutefois clairement des dispositions précitées de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales que le droit de communication s'exerce sur place ou par correspondance, y compris par messages électroniques. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
5. Par ailleurs, la requérante soutient que les impositions établies sur le fondement des renseignements recueillis dans l'exercice des droits de communication sont irrégulières aux motifs que l'administration ne justifiait ni de l'identité, ni du grade des agents ayant exercé ce droit de communication contrairement aux exigences susvisées de l'article R. 81-1 du livre des procédures fiscales. Elle ajoute que les courriels par lesquels les droits de communication ont été exercés par le service sont altérés par de nombreuses griffes manuscrites qui ne permettent pas l'identification des documents sollicités sans que cela soit justifié par le respect du secret professionnel que l'administration lui a opposé. Cependant, il résulte de l'instruction que, devant les premiers juges, le ministre de l'action et des comptes publics établit, par la production des courriels du 19 décembre 2017, du 12 juillet 2018 et du 25 mai 2018, dépourvus de toute occultation, que ces droits de communication ont été exercés par des fonctionnaires de catégorie A ou B, à savoir, respectivement, par un contrôleur des finances publiques s'agissant de la demande effectuée auprès de la caisse d'allocations familiales, un contrôleur principal des finances publiques s'agissant de la demande adressée au rectorat et une inspectrice principale des finances publiques pour ce qui concerne le droit de communication exercé auprès de la préfecture du Doubs. En outre, et en tout état de cause, les courriels ainsi produits en première instance permettent d'identifier l'ensemble des documents et renseignement sollicités par le service dans le cadre de l'exercice de ces droits de communication. La circonstance que ces informations aient été communiquées par le service pour la première fois dans le cadre de la procédure contentieuse devant les premiers juges est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les droits de communication ont été exercés en méconnaissance de l'article R. 81-1 du livre des procédures fiscales.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.
7. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale s'est expressément prévalue, dans sa réponse aux observations de Mme A... du 28 février 2019 des renseignements qu'elle avait obtenus grâce à l'exercice du droit de communication auprès du rectorat, de la caisse d'allocation familiales des Vosges et de la préfecture du Doubs. Dans ce même document, le service a informé la requérante que, conformément aux dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, elle avait la possibilité de demander une copie des documents ainsi obtenus dans le cadre de l'exercice du droit de communication. Il est constant que par courrier du 26 mars 2019, l'intéressée a demandé à avoir communication de ces documents qui lui ont été communiqués par le service le 1er avril 2019. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dès lors que cette information lui a été communiquée par le service avant la mise en recouvrement des impositions en litige, intervenue le 4 avril 2019. A cet égard, la circonstance que les droits de communication de l'administration aient été exercés postérieurement à la notification de la proposition de rectification du 15 décembre 2017 est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition. Par suite ce moyen doit être écarté.
8. Si Mme A... se prévaut de la doctrine et en particulier le paragraphe 270 de l'interprétation administrative de la loi fiscale référencée BOI-CF-PGR-30-10, publiée au bulletin officiel des impôts du 12 septembre 2012, celle-ci, qui est relative à la procédure d'imposition, ne saurait être utilement invoquée sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la plus-value réalisée lors de la vente de l'immeuble situé 26 bis rue Claude Barrès à Charmes :
9. En premier lieu, aux termes de l'article 150 U du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession (...) ". Pour l'application de ces dispositions, la résidence principale doit s'entendre du lieu où le contribuable réside habituellement pendant la majeure partie de l'année, et il doit s'agir de sa résidence effective.
10. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération.
11. Il résulte de l'instruction que pour justifier qu'elle occupait habituellement et de manière effective l'immeuble situé 26 bis rue Claude Barrès à Charmes, Mme A... s'est bornée à produire à l'administration, ainsi d'ailleurs que dans le cadre de la présente instance, une seule facture d'eau émise par Véolia datée du 23 mai 2014, laquelle fait état d'une consommation de 20 m3 pour la période du 14 avril 2013 au 14 avril 2014, ce qui correspond à 65 litres par jour jusqu'en février 2014, date de la cession de l'immeuble, pour un foyer composé d'un adulte et de trois enfants. S'appuyant sur les données statistiques réalisées par le service public d'information sur l'eau qui fixe à environ 145 litres par jour, soit 53m3 en moyenne, la consommation d'eau pour un seul habitant, le service a pu en déduire, en l'absence de toutes autres factures d'énergie produites par la contribuable, que sa faible consommation d'eau attestait qu'elle n'occupait pas de manière habituelle et effective l'immeuble en litige. A cet égard, si la requérante fait grief à l'administration de ne pas avoir pris en compte ses " modes de consommation alternatifs ", comme par exemple l'absence de lave-linge, de lave-vaisselle, de baignoire ou de chasses d'eau, elle ne démontre pas utiliser de tels modes de consommation. En outre, l'administration a considéré, à juste titre, que les autres documents produits par la requérante, à savoir une facture Orange du 6 février 2013 qui fait état d'une consommation nulle, une attestation de pôle emploi du 6 février 2013 mentionnant l'adresse du 26 bis de la rue Claude Barrès et un document daté du 13 mars 2013 portant notification de changement de caisse d'allocations familiales ne permettaient pas de démontrer que l'immeuble litigieux constituait sa résidence principale au sens des dispositions précitées de l'article 150 U du code général des impôts. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que, dans le cadre de l'exercice des droits de communication exercés auprès du rectorat, de la caisse d'allocations familiales des Vosges et de la préfecture du Doubs, l'administration a été informée que les trois enfants de la requérante étaient, à la date de la cession de l'immeuble en litige, scolarisés à Toul, soit à 64 kilomètres de Charmes, mais à seulement 8 kilomètres de Moutrot, commune du département de Meurthe et Moselle, où l'intéressée avait sa résidence antérieurement et où elle était alors salariée à temps partiel de l'entreprise CMC Touloise qui appartenait à son compagnon. L'administration relevait également que Mme A... ne possédait pas de véhicule à son nom. A ce titre, si la requérante reproche à l'administration de ne pas avoir envisagé qu'elle ait pu utiliser un véhicule dont elle n'est pas la propriétaire, elle ne fournit aucun élément probant au soutien de cette allégation. Enfin, l'intéressée ne démontre pas, comme elle le soutient, avoir accompli les diligences nécessaires auprès d'agences immobilières pour la mise en vente du bien en litige, ce qui justifierait que ce bien ait pu être inoccupé avant sa cession, pendant un délai normal. Dans ces conditions, l'administration a pu déduire de ce faisceau d'indices que Mme A... n'avait aucun intérêt économique ou familial à établir sa résidence principale à Charmes alors que le centre de ses intérêts familiaux et économiques se situait à Moutrot où elle disposait déjà d'un logement. Aussi, il ne résulte pas de l'instruction que la contribuable résidait de manière effective et habituelle dans l'immeuble en litige, lequel ne saurait être regardé comme sa résidence principale à la date de sa cession. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause le régime d'exonération sous lequel s'était placée Mme A... et a décidé de soumettre la plus-value litigieuse à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014, en application du I de l'article 150 U du code général des impôts.
12. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article 150 V du code général des impôts : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant ", tandis qu'aux termes de l'article 150 VB du même code : " Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il a été stipulé dans l'acte. (...)II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : 1° De toutes les charges et indemnités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 683 ; 2° Des frais afférents à l'acquisition à titre gratuit définis par décret ; 3° Des frais afférents à l'acquisition à titre onéreux définis par décret, que le cédant peut fixer forfaitairement à 7, 5 % du prix d'acquisition dans le cas des immeubles à l'exception de ceux détenus directement ou indirectement par un fonds de placement immobilier mentionné à l'article 239 nonies ; 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. Lorsque le contribuable, qui cède un immeuble bâti plus de cinq ans après son acquisition, n'est pas en état d'apporter la justification de ces dépenses, une majoration égale à 15 % du prix d'acquisition est pratiquée. Cette majoration n'est pas applicable aux cessions d'immeubles détenus directement ou indirectement par un fonds de placement immobilier mentionné à l'article 239 nonies ; 5° Des frais de voirie, réseaux et distribution en ce qui concerne les terrains à bâtir ; 6° Des frais acquittés pour la restauration et la remise en état des biens meubles ".
13. D'abord, Mme A..., qui ne justifie pas avoir effectivement acquitté les frais d'acquisition du terrain sur lequel a été édifié l'immeuble en litige ne saurait solliciter le bénéfice du taux forfaitaire de 7, 5 % prévu au 3° de l'article 150 VB du livre des procédures fiscales susvisé. En effet, le prix d'acquisition s'entend du prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il a été stipulé dans l'acte mais ne comprend pas les éléments venant en majoration du prix et en particulier les frais d'acquisition à titre onéreux que le forfait est réputé représenter. Par conséquent, la requérante ne saurait se prévaloir, pour ce qui concerne les frais d'acquisition litigieux, de ce que les premiers juges ont considéré que le prix d'acquisition du terrain, réglé par son compagnon, devait être pris en compte pour la détermination de la plus-value en litige. Si elle affirme que c'est son compagnon qui a réglé ces frais d'acquisition dans le cadre d'un prêt familial qu'elle lui a remboursé lors de la vente de la maison, elle n'en justifie pas. Il s'ensuit que ce moyen ne peut qu'être écarté.
14. Ensuite, il résulte de l'instruction que Mme A... a majoré le prix d'acquisition du terrain du montant des travaux réalisés pour construire le bien immobilier, soit 95 140 euros. Or, le service, constatant que les déclarations de revenus de la requérante faisaient état de revenus d'un montant de 10 456 euros en 2012, 9 433 euros en 2013 et 6 732 euros en 2014, a considéré que la requérante ne pouvait pas financer un tel montant de travaux, en l'absence de prêt, de don ou de succession, tel que cela ressortait notamment d'un droit de communication exercé auprès de son notaire. Si la requérante fait valoir, à titre subsidiaire, qu'elle a financé ces travaux de construction grâce aux économies qu'elle avait déposées sur un plan épargne logement, il n'est pas contesté que, comme le fait valoir l'administration en défense, il ressort de l'interrogation du fichier national des comptes bancaires que l'intéressée n'a jamais été titulaire d'un plan d'épargne logement ni même d'un livret épargne logement. Par ailleurs, si la contribuable affirme qu'elle a pu réaliser ces travaux grâce à un prêt familial consenti par son compagnon, elle ne démontre pas l'existence d'un tel prêt ni de son remboursement par les attestations du Crédit Mutuel produites dans ses dernières écritures qui sont dépourvues de tout élément probant en ce sens. En outre, Mme A..., qui ne conteste pas qu'elle était en relation d'affaires avec son concubin dès lors qu'elle était salariée de l'entreprise de ce dernier, ne saurait se prévaloir d'une présomption de prêt familial. Enfin, il n'est pas contesté que l'intéressé a refusé de répondre au droit de communication exercé par l'administration auprès de son entreprise afin de déterminer les modalités de règlement des factures de travaux que cette dernière avait émises pour des travaux réalisés au bénéfice de Mme A.... Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le prix d'acquisition à retenir pour le calcul de la plus-value de cession devrait être majoré de la somme de 95 140 euros.
15. En dernier lieu, l'abattement exceptionnel de 25 % sur les plus-values résultant de la cession de biens immobiliers bâtis ou de terrains à bâtir, régi par les dispositions du II de l'article 28 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, s'applique aux cessions réalisées du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022. Il s'ensuit que Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle pouvait bénéficier de cet abattement dès lors que la plus-value en litige a été réalisée le 26 février 2014. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne la plus-value réalisée lors de la vente du bien immobilier sis 26 ter rue Claude Barrès à Charmes :
16. En premier, lieu, pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 13 du présent arrêt, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle doit, pour le calcul de la plus-value résultant de la cession de ce bien immobilier, bénéficier du taux forfaitaire de 7, 5 % prévu au 3° de l'article 150 VB du livre des procédures fiscales. Par suite, ce moyen doit être écarté.
17. En deuxième lieu, pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 14 du présent arrêt, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le prix d'acquisition du terrain devait être majoré du montant des dépenses de travaux réalisées pour construire le bien immobilier, soit 112 905 euros.
18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy n'a que partiellement fait droit à ses demandes.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre du budget et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Stenger, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
La rapporteure,
Signé : L. StengerLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre du budget et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N°22NC00493 2
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