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08/10/2024 | FRANCE | N°23NC03337

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 08 octobre 2024, 23NC03337


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. Juvenal's Kennedy Debato'o a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 26 avril 2023 par lequel la préfète de l'Aube lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2301200 du 17 octobre 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.






Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 14 novembre 2023, M. De...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. Juvenal's Kennedy Debato'o a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 26 avril 2023 par lequel la préfète de l'Aube lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2301200 du 17 octobre 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 novembre 2023, M. Debato'o, représenté par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement n° 2301200 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 octobre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 26 avril 2023 de la préfète de l'Aube ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube, de lui délivrer une carte de séjour temporaire, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, le versement, à son conseil, de la somme de

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle n'est pas motivée et est dépourvue d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il ne constitue pas une menace sérieuse, actuelle et grave à l'ordre public ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

- la préfète n'a pas pris en compte son état de santé alors qu'il est diabétique ;

- il a toujours exercé une activité professionnelle dans le but de faire revenir sa famille par le biais du regroupement familial qu'il a sollicité ;

- il a déposé plusieurs demandes d'autorisation de travail conformément à la demande des services préfectoraux ;

- il démontre la présence de nombreux membres de sa famille en France ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision l'obligeant à quitter le territoire est entachée d'illégalité, du fait de l'illégalité de la décision portant refus du titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 décembre 2023, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. Debato'o n'est fondé.

M. Debato'o a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. Debato'o, de nationalité centrafricaine, né le 27 décembre 1980, est entré régulièrement sur le territoire français le 13 février 2016 sous couvert d'un visa de court séjour. Il a sollicité l'asile mais sa demande a fait l'objet d'un rejet tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. Il a bénéficié d'une carte de séjour temporaire au regard de son état de santé du 21 avril 2020 au 18 octobre 2022. Le 10 août 2022, il a sollicité un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 26 avril 2023, la préfète de l'Aube a rejeté cette demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit en cas d'exécution de la mesure d'éloignement. M. Debato'o relève appel du jugement n° 2301200 du 17 octobre 2023 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral du 26 avril 2023.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 26 avril 2023 :

En ce qui concerne le moyen commun à l'ensemble des décisions :

2. L'arrêté préfectoral, qui rappelle le parcours de l'intéressé ainsi que sa situation personnelle et familiale, comporte la mention des textes dont il est fait application et des circonstances de faits fondant les décisions qu'il contient, est suffisamment motivé.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, ni des termes de la décision litigieuse que la préfète de l'Aube n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. Debato'o.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle (...) ". Aux termes de l'article L. 423-23 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

5. Il ressort de la décision attaquée que, pour refuser de délivrer à M. Debato'o un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, la préfète de l'Aube s'est notamment fondée sur la circonstance que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public aux motifs que l'intéressé a été interpellé le 7 février 2022, le 12 octobre 2022 et le 15 décembre 2022 par les services de la police nationale pour des infractions pénales de conduite sans permis de conduire et circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance. Le 14 février 2023, il a une nouvelle fois été interpellé pour les mêmes faits et l'usage d'un permis de conduire faux ou falsifié. Ainsi, le caractère répétitif de ces faits répréhensibles est de nature à caractériser l'existence d'un comportement représentant une menace pour l'ordre public au sens des dispositions précitées. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la préfète s'est fondée sur ce motif pour rejeter sa demande de renouvellement de titre de séjour.

6. Par ailleurs, M. Debato'o se prévaut de sa présence en France depuis le 13 février 2016 et de sa bonne insertion au sein de la société française. Il fait valoir qu'il était titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée en tant que chargé de clientèle depuis le 14 février 2022 mais que son employeur a dénoncé son contrat au 18 avril 2023 en raison du non renouvellement de son titre de séjour. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'épouse du requérant réside au Maroc, avec les trois enfants mineurs du couple. S'il fait valoir qu'il a entamé en mai 2022 des démarches pour solliciter le regroupement familial afin que sa famille le rejoigne, cet élément est sans incidence sur son droit au séjour. Si le requérant fait également valoir que la préfète de l'Aube n'a pas tenu compte de son état de santé, et plus particulièrement de son diabète, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant s'en est prévalu pour solliciter le renouvellement de son titre de séjour, ni lorsque la préfète a sollicité ses observations préalables dans le cadre de la procédure contradictoire initiée le 27 février 2023, avant l'édiction de la décision litigieuse. Enfin, le requérant n'établit pas avoir noué en France des liens personnels d'une particulière intensité, de nature à justifier la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Dans ces conditions, il n'est pas plus fondé à soutenir que la préfète aurait méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point ci-dessus, il y a lieu de rejeter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celui d'une erreur manifeste de l'appréciation des conséquences de la décision de refus de titre de séjour sur la situation personnelle de l'intéressé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus de son titre de séjour.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré de l'illégalité, par la voie de l'exception, de la décision de refus de séjour soulevé à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

11. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 26 avril 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique, doivent elles aussi être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. Debato'o est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Juvenal's Kennedy Debato'o, au ministre de l'intérieur et à Me Gaffuri.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- M. Barteaux, président assesseur,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

N° 23NC03337


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC03337
Date de la décision : 08/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-08;23nc03337 ?
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