La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2024 | FRANCE | N°23NC02171

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 08 octobre 2024, 23NC02171


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... A... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du 28 mars 2023 par lesquels la préfète de l'Aube leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2300837 - 2300839 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande.





Procédure deva

nt la cour :



I. Par une requête enregistrée le 5 juillet 2023, sous le n° 23NC02171, M. B..., représenté pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du 28 mars 2023 par lesquels la préfète de l'Aube leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2300837 - 2300839 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 5 juillet 2023, sous le n° 23NC02171, M. B..., représenté par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 31 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de réexaminer sa demande d'admission au séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de leur conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier et approfondi de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2023, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 5 juillet 2023, sous le n° 23NC02172, Mme A..., représentée par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 31 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de réexaminer sa demande d'admission au séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de leur conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen particulier et approfondi de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2023, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 4 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 5 octobre 2023 à midi.

Mme A... et M. B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 14 septembre 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lusset, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., de nationalité nigériane, et M. B..., de nationalité ghanéenne, déclarent être entrés sur le territoire français le 15 octobre 2020 et le 21 décembre 2020 avec leurs enfants. Ils ont sollicité des autorités françaises leur admission au séjour au titre de l'asile en raison de craintes en cas de retour dans leur pays d'origine par des demandes en date du 10 novembre 2020 et du 19 janvier 2021. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 avril 2022 et du 22 avril 2022 confirmées par des décisions de rejet par la Cour nationale du droit d'asile en date du 14 décembre 2022 et du 16 février 2023. Par arrêtés du 28 mars 2023, la préfète de l'Aube les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé leurs pays de destination. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, les requérants relèvent appel du jugement n° 2300837 - 2300839 du 31 mai 2023 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 28 mars 2023.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, les arrêtés en litige comportent un exposé suffisamment détaillé des circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement et sont, ainsi, suffisamment motivés. Cette motivation, non stéréotypée et qui fait état de la situation personnelle des requérants, révèle également que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de M. B... et de Mme A.... Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de ces arrêtés et du défaut d'examen particulier de la situation des intéressés doivent être écartés.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... et Mme A... sont présents sur le territoire français depuis moins de trois ans à la date des décisions contestées. Les requérants ne se prévalent pas de liens amicaux ou familiaux d'une intensité et d'une stabilité caractérisées qu'ils auraient tissés sur le territoire français. Ils ne justifient pas davantage d'une intégration particulière. Enfin, s'ils se prévalent de la présence de leurs enfants en France, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans un de leurs pays d'origine. Dans ces conditions, au regard de la durée et des conditions de séjour des requérants, les décisions les obligeant à quitter le territoire français consécutivement aux rejets de leurs demandes d'asile ne portent pas une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale. Par suite, elles ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ne sont pas davantage, pour les mêmes motifs, entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :

5. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

6. Si les requérants soutiennent qu'ils encourent des risques de traitements inhumains ou dégradants, ils n'établissent pas la réalité des risques personnels auxquels ils seraient exposés en cas de retour dans leurs pays d'origine respectifs. D'ailleurs, et ainsi qu'il a été dit au point 1, leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des 21 et 22 avril 2022, confirmées par des décisions de rejet par la Cour nationale du droit d'asile en date du 14 décembre 2022 et du 16 février 2023. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés de la préfète de l'Aube du 28 mars 2023. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. B... et Mme A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et Mme C... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Gaffuri.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- M. Barteaux, président assesseur,

- M. Lusset, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : A. LussetLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

N° 23NC02171, 23NC02172


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02171
Date de la décision : 08/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: M. Arnaud LUSSET
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-08;23nc02171 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award