Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2022 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2208595 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2023, Mme C..., représentée par Me Dollé, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 mai 2023 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 juillet 2022 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai déterminé et au besoin sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- la décision de refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 6-5 de l'accord
franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2024, le préfet de Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthou,
- et les observations de Me Dollé représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 25 juin 1985, est entrée régulièrement en France le 6 septembre 2017. Le 6 novembre 2017 elle a sollicité son admission au séjour en raison des soins que nécessiterait l'état de santé de son fils B.... Cette demande a fait l'objet d'un refus le 17 novembre 2017. A la suite d'une nouvelle demande, le préfet lui a opposé un deuxième refus le 27 février 2018 et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire. Le 15 avril 2021 elle a de nouveau sollicité son admission au séjour, sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et du pouvoir discrétionnaire de régularisation du préfet. Par un arrêté du 22 juillet 2022 le préfet de la Moselle a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2208595 du 9 mai 2023 dont Mme C... fait appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle n'aurait pas procédé à l'examen de la situation particulière de Mme C... avant de prendre la décision contestée. Dès lors, le moyen tiré de ce que préfet n'aurait pas procédé à un tel examen doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
4. Mme C... fait valoir que son fils, atteint de la maladie de Crouzon et présentant une malformation de Chiari, nécessite, pour son développement psycho-moteur, une prise en charge multidisciplinaire et adaptée. Toutefois, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a, dans son avis du 16 mai 2022, estimé que si l'état de santé du fils de la requérante nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut bénéficier d'un traitement approprié en Algérie et voyager sans risque vers son pays d'origine. Les éléments médicaux versés au dossier par la requérante ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII quant à la possibilité pour lui d'avoir accès à un traitement approprié à sa pathologie dans son pays d'origine. Par ailleurs, si Mme C... apporte des éléments relatifs à son intégration en France, elle n'établit pas qu'elle ne pourrait bénéficier d'une aide en Algérie, pays dans lequel résident toujours son frère et sa sœur. La décision en litige n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de ses enfants qui peuvent être rescolarisés en Algérie. Dans ces circonstances, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Moselle a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a pris le refus de séjour en litige. Elle n'est pas davantage fondée à soutenir qu'il n'a pas tenu compte de l'intérêt supérieur de ses enfants et, notamment, de son jeune fils. Par suite, le préfet de la Moselle n'a méconnu ni les stipulations précitées de l'article 6-5 de l'accord
franco-algérien du 27 décembre 1968 ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Eu égard aux circonstances qui viennent d'être analysées, il n'a pas davantage méconnu l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ou entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de son pouvoir de régularisation.
5. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour.
6. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1 : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Moselle.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- Mme Bauer, présidente-assesseure,
- M. Berthou, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.
Le rapporteur,
Signé : D. BERTHOU Le président,
Signé : Ch. WURTZ Le greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
F. LORRAIN
N° 23NC02238 2