La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/07/2024 | FRANCE | N°23NC02507

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 23 juillet 2024, 23NC02507


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 mai 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours avec une astreinte de 150 euros par jour de retard.



Par un jugement n

2303639 du 30 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 3 mai 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours avec une astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2303639 du 30 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 juillet 2023, et des mémoires enregistrés les 12 et 27 octobre 2023, Mme B..., représentée par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 mai 2023

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous peine d'une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle dès lors que sa fille souffre de graves problèmes de santé et a obtenu une autorisation provisoire de séjour ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors que sa fille est majeure et que son état de santé empêche tout retour dans son pays d'origine ;

- la préfète avait connaissance de l'état de santé de sa fille et de l'avis rendu par le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration ;

- en considérant que sa fille était mineure, la préfète du Bas-Rhin la privée d'une garantie ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- l'annulation de cette décision s'impose comme la conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 octobre 2023, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Peton, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante géorgienne née en 1967, est entrée en France le 11 mars 2022 accompagnée de sa fille alors mineure. Elle a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides dont la décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 31 janvier 2023. Par un arrêté du 3 mai 2023, la préfète du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 30 juin 2023, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 3 mai 2023 :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ; (...) ".

3. Mme B... soutien que les motifs de la décision en litige, qui ne fait aucunement référence à l'état de santé de sa fille, révèlent un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle. Toutefois, ainsi que le rappelle l'arrêté en litige, la demande d'asile présentée par Mme B... a été rejetée par l'OFFPRA le 29 juillet 2022 et cette décision a été confirmée par la CNDA le 31 janvier 2023. Ensuite, il ne ressort pas des pièces du dossier que, préalablement à l'édiction de la mesure d'éloignement litigieuse, la requérante aurait présenté une demande d'admission au séjour en qualité d'accompagnant de sa fille malade. S'il ressort des pièces du dossier que la fille de Mme B... a obtenu une autorisation provisoire de séjour le 23 août 2023, cette autorisation a été délivrée postérieurement à la décision en litige. Par suite, et alors qu'il résulte des motifs des décisions en litige que la préfète du Bas-Rhin a procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de Mme B..., compte tenu des éléments portés à sa connaissance, le moyen ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, en mentionnant que la fille de Mme B... était mineure au moment de l'enregistrement de sa demande d'asile le 22 avril 2022, la préfète du Bas-Rhin n'a pas commis d'erreur de fait. Par ailleurs, la seule circonstance que sa fille, devenue majeure en août 2022, contrairement à ce qui est mentionné, a sollicité un titre de séjour et a obtenu une autorisation provisoire de séjour postérieurement à la décision en litige ne constitue pas une erreur de fait susceptible d'avoir une incidence sur la légalité de la décision.

5. En dernier lieu, Mme B..., de nationalité géorgienne, est entrée en France à l'âge de 55 ans accompagnée de sa fille alors mineure. Elle vit seule sur le territoire, sans ressources pérennes ni logement stable et ne justifie pas d'autres liens personnels ou familiaux particuliers. Si sa fille désormais majeure a, postérieurement à la décision en litige, obtenu une autorisation provisoire de séjour en qualité d'étranger malade, la requérante ne justifie par les seules pièces qu'elle produit, ni avoir sollicité un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade, ni qu'elle serait la seule personne à être en mesure d'assister sa fille. L'intéressée n'établit pas ne plus avoir de liens personnels ou familiaux dans son pays d'origine qu'elle a quitté récemment, ni ne justifie d'une intégration particulière en France dont, entre autres, elle ne maitrise pas la langue. La promesse d'embauche dont elle se prévaut, au demeurant non datée, ne suffit pas à démontrer son intégration. Dans ces conditions, la décision en cause n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante à mener une vie privée et familiale normale et n'a ainsi pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, pour les mêmes motifs, n'est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

6. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par Mme B....

Sur les frais liés à l'instance :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juillet 2024.

La rapporteure,

Signé : N. PetonLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 23NC02507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02507
Date de la décision : 23/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Nolwenn PETON
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-23;23nc02507 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award