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11/07/2024 | FRANCE | N°23NC00663

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 11 juillet 2024, 23NC00663


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel la préfète des Vosges a procédé au retrait de son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination duquel elle pourra être reconduite.



Par un jugement n° 2203683 du 9 février 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administ

ratif de Nancy a, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu d'admettre Mme A... au bénéfice de l'aid...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2022 par lequel la préfète des Vosges a procédé au retrait de son attestation de demande d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination duquel elle pourra être reconduite.

Par un jugement n° 2203683 du 9 février 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a, après avoir décidé qu'il n'y avait pas lieu d'admettre Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, annulé la décision du 24 novembre 2022 fixant la Côte d'Ivoire comme pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé, mis à la charge de l'Etat le versement à Me Jeannot de la somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par ailleurs, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2023 par lequel la préfète des Vosges a, après que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a réexaminé la demande d'asile de l'intéressée, de nouveau fait obligation à celle-ci de quitter le territoire français, dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant une durée d'un an.

Par un jugement n° 2303050 du 19 décembre 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a, d'une part, suspendu l'exécution de l'arrêté du 21 septembre 2023 jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si la CNDA est saisie, jusqu'à la date de lecture en audience publique de sa décision et, d'autre part, rejeté les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 28 février 2023 sous le n° 23NC00663, la préfète des Vosges demande à la cour d'annuler les articles 2 et 3 du jugement du 9 février 2023 et de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif tendant à l'annulation de la décision du 24 novembre 2022 fixant le pays de destination.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché de défaut d'examen et de défaut de motivation ;

- la décision fixant le pays de destination ne méconnaît ni l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2023, Mme A..., représentée par Me Jeannot, demande à la cour de :

1°) rejeter la requête du préfet des Vosges ;

2°) confirmer le jugement du 9 février 2023 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que c'est à bon droit que la première juge a annulé la décision fixant le pays de destination et ajoute que :

- cette décision est entachée d'erreur de droit, faute pour la préfète d'avoir examiné la situation de ses enfants sur le terrain de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur de fait.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision de la présidente du bureau d'aide juridictionnelle du 2 mai 2023.

II.) Par une requête, enregistrée le 6 mars 2024 sous le n° 24NC00548, Mme A..., représentée par Me Jeannot, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 du jugement n° 2303050 du 19 décembre 2023 rejetant le surplus de sa demande devant le tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2023 ;

3°) d'enjoindre à la préfète des Vosges de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision en litige est intervenue en violation du droit d'être entendue qu'elle tire d'un principe général du droit de l'Union européenne et de l'article 41, paragraphe 2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle est entachée de défaut d'examen de sa situation, notamment de la vulnérabilité particulière de sa famille ;

- elle est entachée d'erreur de fait ;

- elle est entachée d'erreur de droit, la préfète s'étant estimée liée par la décision de la Cour nationale du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que la décision de l'OFPRA n'est pas définitive ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;

- elle méconnaît son droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale compte tenu de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée de défaut de motivation en droit et en fait ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur de droit, faute pour le préfet d'avoir procédé à l'examen de sa situation au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales tandis qu'il s'est estimé lié par les décisions rendues en matière d'asile ;

- elle méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants, tel que protégé par les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :

- cette décision est illégale compte tenu de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'insuffisance de motivation en droit et en fait ;

- elle est entachée d'erreur de droit, à défaut d'examen des quatre critères prévus par la loi ;

- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors que la préfète, s'étant estimée en situation de compétence liée pour prendre cette décision, n'a pas procédé à l'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2024, la préfète des Vosges conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision de la présidente du bureau d'aide juridictionnelle du 1er février 2024.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Brodier, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante ivoirienne née en 1998, est entrée irrégulièrement sur le territoire français en octobre 2020 selon ses déclarations, accompagnée de sa fille mineure, afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugiée. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 18 mai 2022, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 18 octobre 2022. Par un arrêté du 24 novembre 2022, le préfet des Vosges lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement n° 2203683 du 9 février 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé la décision fixant le pays à destination duquel Mme A... serait éloignée d'office. Par sa requête n° 23NC00663, la préfète des Vosges relève appel partiel du jugement du 9 février 2023 en tant que le tribunal administratif de Nancy a annulé cette décision.

2. A la suite de l'annulation de la décision du 24 novembre 2022 fixant le pays de destination, Mme A... a, le 27 juin 2023, saisi l'OFPRA d'une demande de réexamen de sa demande d'asile. Par une décision du 5 juillet 2023, l'OFPRA a rejeté cette demande comme étant irrecevable. Par un arrêté du 21 septembre 2023, la préfète des Vosges a, de nouveau, fait obligation à Mme A... de quitter le territoire français, dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant une durée d'un an. Par sa requête n° 24NC00548, Mme A... relève appel partiel du jugement n° 2303050 du 19 décembre 2023 en tant que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 septembre 2023.

3. Les deux requêtes n° 23NC00663 et n° 24NC00548, introduites par la préfète des Vosges et pour Mme A..., présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la légalité de la décision du 24 novembre 2022 fixant le pays de destination :

En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par la première juge :

4. Aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

5. Mme A... soutient qu'elle craint que ses deux filles mineures, âgées de deux ans et demi et d'un an respectivement à la date de la décision en litige, soient soumises à la pratique de l'excision en cas de retour en Côte d'Ivoire. Elle indique avoir elle-même quitté son pays pour fuir un mariage forcé et se soustraire elle-même à l'excision. Elle produit des documents d'ordre général, notamment un rapport de l'OFPRA de février 2017, dont il ressort qu'en dépit de l'interdiction de cette pratique en Côte d'Ivoire, le taux de prévalence au sein du groupe ethnique auquel elle appartient demeure important, en particulier pour l'ethnie Koyaka dont il n'est pas contesté qu'elle est issue. Toutefois, alors que la requérante a déclaré que sa mère l'avait aidée à échapper, à l'âge de 16 ans, à un mariage forcé et à l'excision qui l'aurait précédé, en la confiant à une connaissance dans une autre région, il ressort de son récit que ce sont les mauvais traitements subis de la part de la femme à laquelle sa mère l'avait confiée, et du fils de celle-ci, qui l'ont amenée à quitter la Côte d'Ivoire en août 2017 en compagnie de son compagnon de confession chrétienne et à s'installer en Tunisie où elle a donné naissance à sa première fille. La requérante déclare que, lorsqu'elle a appris à sa mère la naissance de son enfant hors mariage, cette dernière l'a alors menacée de représailles, ce qui aurait conduit le couple à se rendre en Lybie puis en Europe. Mme A... ne produit néanmoins aucun élément pour établir la réalité des menaces qu'elle subirait de la part de sa famille, ni des risques qu'elle courrait à titre personnel en cas de retour dans son pays d'origine, alors que sa propre mère aurait fait en sorte, selon ses déclarations, de la protéger contre la pratique de l'excision après le décès de sa sœur d'une hémorragie en 2010. Par ailleurs, et alors que le père de sa deuxième fille est opposé, tout comme elle, à la pratique de l'excision, la requérante n'établit pas non plus que ses deux filles seraient exposées au risque de subir cette mutilation, ni que le père de son deuxième enfant et elle ne pourraient pas protéger ses enfants contre ce risque. Le récit fait par la requérante tant devant l'OFPRA que la CNDA est d'ailleurs apparu peu vraisemblable notamment quant à la menace de représailles de la part de sa famille. Ainsi, il n'est pas établi par les pièces du dossier que Mme A... et ses filles courraient des risques de subir des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Côte d'Ivoire, emportant méconnaissance de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et portant atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants.

6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, la préfète des Vosges est fondée à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a, pour annuler la décision du 24 novembre 2022 fixant le pays de destination, retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

7. Il y a lieu toutefois pour cette cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens invoqués devant le tribunal administratif de Nancy et les moyens soulevés à hauteur d'appel à l'appui des conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination.

En ce qui concerne les autres moyens :

8. En premier lieu, par son jugement n° 2203683 du 9 février 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande présentée par Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 24 novembre 2022 lui faisant obligation de quitter le territoire français. La requérante, qui n'en a pas relevé appel, n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la mesure d'éloignement.

9. En deuxième lieu, il ressort de la décision en litige qu'elle vise les articles L. 721-3 et L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise qu'eu égard au rejet de la demande d'asile de Mme A... et en l'absence de tout autre élément communiqué aux services de la préfecture de nature à remettre en cause ce rejet, l'intéressée n'établit pas qu'elle serait exposée, à titre personnel, à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans tout autre pays dans lequel elle serait légalement admissible avec ses enfants, et conclut qu'en application de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle peut être éloignée notamment vers le pays dont elle est ressortissante, la Côte d'Ivoire. La décision en litige comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et doit être écarté.

10. En troisième lieu, il ressort de la motivation de la décision fixant le pays de destination que la préfète des Vosges ne s'est pas estimée liée par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA ayant rejeté la demande d'asile présentée par Mme A... et qu'elle a procédé à l'examen de la situation de l'intéressée, notamment au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.

11. En quatrième lieu, contrairement à ce que Mme A... soutient, l'arrêté du 24 novembre 2022 porte mention de ce qu'elle est accompagnée de ses deux filles mineures. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait ne peut qu'être écarté.

12. En cinquième lieu, Mme A... n'allègue ni n'établit avoir porté à la connaissance de la préfète des Vosges, avant l'intervention de la décision en litige, d'informations spécifiques relatives aux risques que ses deux filles mineures courraient en cas d'éloignement vers la Côte d'Ivoire, où ni l'une ni l'autre ne sont nées. Dans ces conditions, et alors qu'il ressort de l'arrêté du 24 novembre 2022 qu'il a été tenu compte de l'intérêt supérieur de ses filles, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait entachée de défaut d'examen au regard de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

13. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 du présent arrêt, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant la Côte d'Ivoire comme pays de destination méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

14. En dernier lieu, il résulte également de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la préfète des Vosges est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 9 février 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 24 novembre 2022 fixant le pays à destination duquel Mme A... serait éloignée d'office et a mis à la charge de l'Etat le versement à l'avocate de l'intéressé d'une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur la légalité de l'arrêté du 21 septembre 2023 :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

16. En premier lieu, d'une part, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne s'adresse pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Mme A... ne saurait ainsi utilement soutenir que la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour méconnaît ces dispositions.

17. D'autre part, il résulte de la jurisprudence de la cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, le droit d'être entendu n'implique pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu à l'occasion de l'examen de sa demande d'asile ou de sa demande de titre de séjour.

18. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que toute irrégularité dans l'exercice des droits de la défense lors d'une procédure administrative concernant un ressortissant d'un pays tiers en vue de son éloignement ne saurait constituer une violation de ces droits et, en conséquence, que tout manquement, notamment, au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.

19. Mme A..., qui ne pouvait raisonnablement ignorer qu'en cas de rejet de sa demande d'asile, elle était susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, a pu présenter, dans le cadre de l'instruction de sa demande, des observations écrites ou orales, tant devant l'OFPRA puis la CNDA, ainsi qu'à l'occasion de sa demande de réexamen de sa demande d'asile. Par ailleurs, elle n'établit pas, ni même n'allègue avoir sollicité un entretien avec les services de la préfecture. En outre, elle ne précise pas en quoi elle disposait d'autres informations pertinentes tenant à sa situation personnelle ou à celle de ses filles que l'administration n'aurait pas déjà eues et qu'elle aurait été empêchée de porter à sa connaissance avant que ne soit prise la mesure d'éloignement qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à faire obstacle à la décision l'obligeant à quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu ne peut qu'être écarté.

20. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée ".

21. Il ressort de la décision en litige qu'elle vise les dispositions du 1° b de l'article L. 542-2 et celles du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que la saisine de la Cour nationale du droit d'asile, lors d'une demande de réexamen, ne fait pas obstacle à l'édiction d'une mesure d'éloignement. Par ailleurs, la préfète des Vosges a examiné la situation familiale de Mme A... en France, prenant notamment en compte la durée de son séjour sur le territoire et la naissance en France de sa deuxième fille. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté.

22. En troisième lieu, il ressort également de la décision en litige que la préfète des Vosges a rappelé que le réexamen de la demande d'asile de Mme A... faisait suite à l'annulation, par un jugement du tribunal administratif de Nancy du 9 février 2023, d'une précédente décision fixant le pays de destination. Il a également été procédé à l'examen des conséquences de la mesure d'éloignement, qui n'emporte pas en tant que telle fixation du pays de destination, au regard de l'intérêt supérieur des filles de la requérante. Dans ces conditions, et eu égard à ce qui a été dit au point précédent, il a été procédé à l'examen particulier de la situation de la requérante, qui ne saurait reprocher à la préfète de ne pas avoir tenu compte de la vulnérabilité de sa famille et des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant. Par suite, le moyen tiré d'un défaut d'examen doit être écarté.

23. En quatrième lieu, il ne ressort pas de la décision portant obligation de quitter le territoire français que la préfète des Vosges se serait estimée liée par la décision de l'OFPRA du 5 juillet 2023 déclarant irrecevable la demande de réexamen de sa demande d'asile présentée par Mme A... le 26 juin 2023. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.

24. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) ; 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° ". Aux termes de l'article L. 542-1 du même code : " (...) / Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la signature de celle-ci ". Aux termes de l'article L. 542-2 de ce code : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : (...) ; b) une décision d'irrecevabilité en application du 3° de l'article L. 531-32, en dehors du cas prévu au b du 2° du présent article ; (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 531-32 : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut prendre une décision d'irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d'octroi de l'asile sont réunies, dans les cas suivants : (...) 3° En cas de demande de réexamen lorsque, à l'issue d'un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l'article L. 531-42, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article ".

25. Si Mme A... a contesté devant la CNDA la décision d'irrecevabilité opposée le 5 juillet 2023 par l'OFPRA à sa demande de réexamen de sa demande d'asile, elle ne saurait utilement invoquer, devant le juge de l'excès de pouvoir, l'illégalité de la décision d'irrecevabilité adoptée par le directeur de l'OFPRA. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu'elle se trouvait dans la situation où son droit de se maintenir sur le territoire français avait pris fin à la date de cette même décision, conformément aux dispositions du b) du 1° de l'article L. 542-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, la préfète des Vosges pouvait, sans attendre la décision de la CNDA, lui faire obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 4° de l'article L. 611-1 du même code. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

26. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

27. Mme A... résidait en France depuis un peu moins de trois ans à la date de la décision en litige. Elle doit la durée de son séjour à la procédure d'examen de sa demande d'asile, initialement en procédure " Dublin " puis devant l'OFPRA et la CNDA, et à son maintien en dépit de la mesure d'éloignement prononcée à son encontre le 24 novembre 2022. La circonstance qu'elle a, au demeurant postérieurement à la décision en litige, formé un recours devant la CNDA pour contester la décision du directeur de l'OFPRA rejetant comme irrecevable sa demande de réexamen de sa demande d'asile n'est pas de nature à considérer que l'obligation de quitter le territoire français qui lui est faite emporterait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa situation et celle de ses filles. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

28. En dernier lieu, pour les mêmes raisons, la requérante n'est pas plus fondée à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, adoptée avant que la CNDA n'ait examiné son recours contre la décision du directeur de l'OFPRA du 5 juillet 2023, méconnaîtrait son droit d'asile, ni qu'elle serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

29. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée compte tenu de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

30. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

31. Il ressort des termes de la décision en litige qu'elle vise l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et écarte une méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales après avoir indiqué qu'eu égard au rejet de sa demande d'asile et en l'absence de tout autre élément communiqué aux services de la préfecture de nature à remettre en cause ce rejet, Mme A... n'établit pas qu'elle serait exposée, à titre personnel, à des peines ou traitements contraires à cette convention en cas de retour dans son pays d'origine ou dans tout autre pays dans lequel elle serait légalement admissible avec ses enfants mineurs. La décision précise également que l'intéressée n'apporte aucun élément permettant d'établir que ses filles risquent une excision forcée en cas de retour en Côte d'Ivoire. Ainsi, la décision fixant le pays de destination comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation en droit et en fait doit être écarté.

32. En troisième lieu, contrairement à ce que Mme A... soutient, la préfète des Vosges a procédé à l'examen de sa situation et de celle de ses filles au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. D'autre part, il ne ressort pas de la décision fixant le pays de destination que la préfète se serait estimée liée par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA ayant rejeté sa demande d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

33. En quatrième lieu, pour contester la décision du 21 septembre 2023 fixant le pays de destination, Mme A... se prévaut pour l'essentiel des mêmes éléments factuels que ceux développés au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 novembre 2022. Si elle soutient que le père de sa deuxième fille ne pourra pas protéger leur enfant contre le risque qu'elle soit excisée par sa propre arrière-grand-mère, la seule transcription d'un message oral l'invitant à rentrer en Côte d'Ivoire pour faire exciser son enfant ne permet pas d'établir la réalité du risque que l'enfant courrait en cas d'installation de la famille dans le pays d'origine des parents. La demande de réexamen de l'asile présentée par Mme A... a d'ailleurs été rejetée par une décision du directeur de l'OFPRA du 5 juillet 2023 et, postérieurement à la décision en litige, par une ordonnance de la CNDA du 27 novembre 2023. Dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaît les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

34. En dernier lieu, il ressort de ce qui a été dit précédemment que Mme A... n'établit pas la réalité des menaces que sa famille et celle du père de sa deuxième fille feraient peser sur elle pour faire exciser ses deux filles, ni la réalité des risques que ses enfants subissent une telle mutilation en dépit de l'opposition de leurs parents. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

35. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français devrait être annulée compte tenu de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

36. En deuxième lieu, il ressort de la décision en litige qu'elle vise l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que, si la présence de Mme A... ne représente pas une menace pour l'ordre public, l'intéressée s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français en dépit du rejet de sa demande d'asile et de la notification d'une mesure d'éloignement, que si elle réside depuis près de trois ans en France, elle doit la durée de son séjour à son placement en procédure Dublin puis à l'examen de sa demande d'asile et au réexamen de sa demande d'asile et que l'interdiction de retour ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. La décision comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisance de motivation doit être écarté.

37. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".

38. D'une part, il ressort de la motivation de la décision en litige que la préfète des Vosges a procédé à l'examen de la situation de Mme A... avant de prononcer une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. D'autre part, il ne ressort nullement de cette décision que la préfète se serait estimée tenue de faire interdiction à l'intéressée de retour sur le territoire français. Enfin, la circonstance que la CNDA était saisie de la demande de réexamen de sa demande d'asile ne faisait pas obstacle à l'adoption de la décision en litige. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit ne peut qu'être écarté.

39. En quatrième lieu, si Mme A... se prévaut du besoin de protection de ses enfants contre tout risque d'insécurité, de la vulnérabilité de sa famille et de l'impossibilité dans laquelle elle serait de retourner dans son pays d'origine, ces éléments ne permettent pas de considérer qu'en lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant un an, la préfète des Vosges aurait fait une inexacte application des dispositions des articles L. 612-8 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

40. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 2303050 du 19 décembre 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 septembre 2023. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

Sur les frais de l'instance dans l'affaire n° 23NC00663 :

41. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par Mme A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 2203683 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy du 9 février 2023 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Nancy tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 septembre 2022 en tant qu'il fixait le pays à destination duquel elle pourrait être renvoyée d'office est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'instance n° 23NC00663 sont rejetées.

Article 4 : La requête de Mme A... enregistrée sous le n° 24NC00548 est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à Me Jeannot et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète des Vosges.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

M. Agnel, président-assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2024.

La rapporteure,

Signé : H. Brodier Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 23NC00663, 24NC00548


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00663
Date de la décision : 11/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-11;23nc00663 ?
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