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20/06/2024 | FRANCE | N°23NC02095

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 20 juin 2024, 23NC02095


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.



Par un jugement n° 2203671 du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.


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Par une requête enregistrée le 27 juin 2023 et un mémoire enregistré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2203671 du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 juin 2023 et un mémoire enregistré le 14 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Jeannot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour l'autorisant à travailler dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de cent cinquante euros par jour, à défaut de réexaminer sa situation sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat des sommes de 1 800 euros au titre des frais de première instance et de 1 800 euros au titre de l'instance d'appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de séjour : est entaché d'erreur de fait, d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'erreur de droit en ce que l'autorité administrative s'est refusée à examiner sa demande sur ce fondement ; méconnaît les articles L. 421-35, L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il remplit toutes les conditions ; viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; repose sur une appréciation manifestement erronée de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour ; est entachée d'erreur de droit en ce que le préfet s'est cru en situation de compétence liée ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation et de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire enregistré le 26 juillet 2023, la préfète de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

M. A... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par décision du 22 mai 2023.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Agnel ;

- et les observations de Me Jeannot assistant M. A....

Une note en délibéré, enregistrée au greffe le 30 mai 2024, a été présentée pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 2 octobre 2003, est entré sur le territoire français, alors qu'il était mineur, au cours du mois de juin 2019, selon ses déclarations. Il a été placé auprès des services de l'aide sociale à l'enfance. Le 1er juillet 2021, il a présenté une demande de délivrance d'un titre de séjour vie privée et familiale. Par un arrêté du 20 septembre 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant son pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 16 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la légalité du refus de séjour :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 421-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les étrangers âgés de seize à dix-huit ans qui déclarent vouloir exercer une activité professionnelle se voient délivrer l'un des titres de séjour suivants : 1° Une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " s'ils remplissent les conditions prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 ". Aux termes de l'article L. 423-22 du même code : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur son insertion dans la société française ". Aux termes de l'article L. 423-23 du même code : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 435-3 du même code : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., célibataire et sans charges de famille en France, dont la famille réside dans son pays d'origine, a été mis sous tutelle en tant que mineur, par ordonnance du 2 août 2021 et placé auprès du service d'aide sociale à l'enfance du département de Meurthe-et-Moselle. Il a ensuite été orienté vers une formation professionnelle aux métiers de la boulangerie après avoir effectué trois stages en entreprise. Inscrit auprès de la chambre des métiers et de l'artisanat afin de préparer un certificat d'aptitude professionnelle de boulanger, il a été admis en apprentissage à compter du 21 septembre 2020 sous couvert d'une autorisation de travail délivrée par la direction chargée du travail. En dépit des rapports satisfaisants de la structure d'accueil et de son maître d'apprentissage, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, l'intéressé n'a pas obtenu des résultats suffisants dans le cadre de sa formation, qu'il s'agisse des matières académiques ou des enseignements pratiques, ses performances scolaires étant en déclin au cours de son cursus, de sorte qu'il n'a pas réussi à obtenir son diplôme. Si le requérant soutient que ses difficultés s'expliquent par le fait qu'il n'avait jamais été scolarisé avant son entrée sur le territoire, ce handicap est celui de très nombreux mineurs isolés. Il ressort au demeurant des pièces du dossier que M. A... a fait preuve de manque d'assiduité dans ses études, attestant un manque de sérieux ou de constance. Dans ces conditions, le requérant, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité administrative se serait illégalement refusée à examiner sa demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", n'est pas fondé à soutenir qu'elle aurait inexactement apprécié sa situation tant familiale, personnelle que professionnelle au regard des normes ci-dessus reproduites. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la préfète de Meurthe-et-Moselle aurait apprécié de manière manifestement erronée sa situation personnelle ou les conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

4. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à invoquer par la voie de l'exception, l'illégalité du refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire.

5. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité administrative se serait crue en situation de compétence liée au moment de prendre l'obligation de quitter le territoire et se serait refusée à examiner la situation de M. A....

6. Il résulte des motifs ci-dessus que l'obligation de quitter le territoire ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée de la situation de M. A... et de ses conséquences sur sa situation personnelle.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., Me Jeannot et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie du présent arrêt sera transmise à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 23NC02095

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02095
Date de la décision : 20/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-20;23nc02095 ?
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