La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2024 | FRANCE | N°22NC01300

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 20 juin 2024, 22NC01300


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Vipico II venant aux droits de la SAS Fininterlo a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2015 à 2017.



Par un jugement n° 2005783 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :
<

br>

Par une requête enregistrée le 19 mai 2022 sous le n°22NC01300 et un mémoire enregistré le 21 novembre 2022, la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Vipico II venant aux droits de la SAS Fininterlo a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2015 à 2017.

Par un jugement n° 2005783 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 mai 2022 sous le n°22NC01300 et un mémoire enregistré le 21 novembre 2022, la SAS Vipico II venant aux droits de la société absorbée Fininterlo, représentée par Me Dumont, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société Fininterlo et la société Pleiade Investissement sont des sociétés liées au sens du 12 de l'article 39 du code général des impôts en ce que la société Fininterlo se trouvait dans des liens de dépendance vis-à-vis de Pleiade Investissement alors même que cette dernière n'y exerçait pas un pouvoir de décision de fait ou ne détenait pas la majorité du capital ; qu'en effet, au cours de la période vérifiée, Pleiade Investissement était l'associée majoritaire de référence avec pour vocation de devenir actionnaire majoritaire en cas de conversion des obligations et elle exerçait le mandat de présidente du conseil de surveillance, mandat qualifié de celui de dirigeant social par l'article L. 227-8 du code de commerce tel qu'interprété par la jurisprudence commerciale ;

- que cette interprétation des liens de dépendance est celle retenue par la doctrine administrative par la réponse ministérielle B... AN 11-11-1972, p 5042, n° 25677 qui est toujours opposable à l'administration.

Par des mémoires enregistrés les 9 août 2022 et 27 janvier 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Agnel ;

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Dias, représentant la société requérante.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Vipico II venant aux droits de la SAS Fininterlo est la société holding du groupe Divalto, spécialisé dans l'édition et la distribution de suites logicielles de gestion d'entreprises. Le 25 juillet 2014, la SAS Fininterlo a émis 3 104 468 obligations convertibles en actions (OCA) productives d'un intérêt fixe au taux de 5,40 %. Le même jour, la société Pléiade Investissement a apporté à la SAS Fininterlo 1 713 535 actions d'une société Interlogiciel. En contrepartie de cet apport, la société Pléiade Investissement a reçu 1 989 087 actions de la SAS Fininterlo et 2 997 300 OCA. Au titre des années 2015, 2016 et 2017, la SAS Fininterlo a déduit de ses bénéfices imposables le montant des intérêts afférents aux OCA détenues notamment par la société Pléiade Investissement. La société Fininterlo a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er avril 2015 au 31 décembre 2017 à l'issue de laquelle le service a indiqué, par proposition de rectification du 22 octobre 2018, qu'il envisageait, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, de n'admettre la déduction des intérêts ayant grevé les obligations que dans la limite prévue au 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts. Les rectifications envisagées ont été refusées par la société le 19 novembre 2018. Le service a confirmé sa position par lettre du 5 décembre 2018 ainsi qu'à la suite d'un entretien avec le supérieur hiérarchique puis l'interlocuteur interrégional par lettres des 30 janvier et 5 mars 2019. La commission départementale des impôts directs a émis un avis favorable aux rectifications le 30 septembre 2019. Les suppléments d'impôt sur les sociétés ont été mis en recouvrement le 29 novembre 2019. La réclamation préalable de la société a été rejetée par l'administration fiscale le 20 juillet 2020. La SAS Vipico II, venant aux droits de la société Fininterlo pour avoir absorbé cette dernière, relève appel du jugement du 22 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. D'une part, aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / (...) 3° Les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu'ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des prêts à taux variable aux entreprises, d'une durée initiale supérieure à deux ans ". D'autre part, aux termes de l'article 212 du même code : " I. - Les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise par une entreprise liée, directement ou indirectement, au sens du 12 de l'article 39, sont déductibles : / a) Dans la limite de ceux calculés d'après le taux prévu au premier alinéa du 3° du 1 du même article 39 ou, s'ils sont supérieurs, d'après le taux que cette entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues ". Le 12 de l'article 39 de ce code dispose que : " Des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises : / a- lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ; / b- lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les conditions définies au a, sous le contrôle d'une même tierce entreprise ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition d'une entreprise par une entreprise qui en détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social ou y exerce en fait le pouvoir de décision, ou qui est placée sous le contrôle d'une même tierce entreprise que la première, sont déductibles dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises d'une durée initiale supérieure à deux ans ou, s'il est plus élevé, au taux que l'entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d'établissements ou d'organismes financiers indépendants dans des conditions analogues.

4. Il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que la société Pleiade Investissement ne détenait pas directement ou par personne interposée la majorité du capital social de la société Fininterlo, tandis qu'il n'est pas allégué que ces deux sociétés étaient placées sous le contrôle d'une même tierce entreprise. La société requérante soutient, toutefois, afin de s'affranchir, sur le fondement de l'article 212 du code général des impôts, de la limite de déduction du 3° du 1 de l'article 39 du même code, que la société Pleiade Investissement et la société Fininterlo se trouvaient dans des liens de dépendance en ce que la première était l'associé le plus important de la seconde avec une vocation à devenir son actionnaire majoritaire en cas de conversion des obligations et en ce qu'elle était la présidente de son conseil de surveillance. De tels éléments ne sauraient toutefois caractériser des liens de dépendance dont la définition est donnée par les règles rappelées au point 3 ci-dessus. Il résulte au demeurant de l'instruction, notamment de l'article 2-1 du pacte d'associés du 25 juillet 2014, que la société Fininterlo était dirigée par un président qui disposait seul des pouvoirs de direction et d'administration, sous le contrôle d'un comité de surveillance conformément aux dispositions des statuts, tandis que l'article 13-5 de ces statuts stipulait que les décisions de ce comité de surveillance étaient prises à la majorité simple des membres présents ou représentés, excluant par là-même l'exercice d'un pouvoir de décision de la seule société Pleaide Investissement. Dès lors, alors même que le président du conseil de surveillance est un dirigeant social au sens du code de commerce, la société Pleiade Investissement n'a pas exercé en fait le pouvoir de décision au sein de la société Fininterlo au sens du 12 de l'article 39 du code général des impôts précité. Il suit de là que les dispositions de l'article 212 du même code ne sont pas applicables à l'espèce en tant qu'elles prévoient des dispositions plus favorables que celles du 3° du 1 de l'article 39.

Sur le bénéfice de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. Si la SAS Vipico II devait être regardée comme se prévalant de la réponse ministérielle à M. B... (A... 11-11-1972 p. 5042 n° 25677), laquelle a été reprise dans la documentation administrative sous référence 4 B-4-7, puis 4 B-2311, n° 62, concernant l'application du 1 bis de l'article 39 terdecies du code général des impôts lequel a été abrogé en 2002, cette réponse ministérielle n'a pas été reprise dans les instructions sous référence 4 B-2221, n° 45 au 7 juin 1999 puis BOI-BIC-PVMV-20-20-30 n°180 au 04 juillet 2018. Par suite, cette doctrine se rapportant à d'autres dispositions de la loi fiscale que celles applicables dans le présent litige et n'étant plus en vigueur au titre des années litigieuses, la société requérante, à supposer qu'elle ait entendu invoquer l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne saurait, en tout état de cause, s'en prévaloir.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Vipico II n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SAS Vipico II est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Vipico II et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 22NC01300

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01300
Date de la décision : 20/06/2024
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : CABINET BEYLOUNI, CARBASSE, GUENY, VALOT, VERNET (AARPI)

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-20;22nc01300 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award