Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions prises par le préfet de Meurthe-et-Moselle le 23 mai 2023 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour en France pour une durée de vingt mois ainsi que l'arrêté du 23 mai 2023 par lequel la préfète du Bas-Rhin l'a assigné à résidence dans le département du Bas-Rhin pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 2303637 du 26 juin 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé ces deux arrêtés préfectoraux du 23 mai 2023, a enjoint à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et enfin, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 juillet 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 26 juin 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a annulé son arrêté préfectoral du 23 mai 2023 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt mois ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a annulé son arrêté pris à l'encontre de M. B... au motif que celui-ci n'aurait pas été mis à même de présenter ses observations préalablement à la décision d'éloignement litigieuse ;
- au surplus, il n'était pas tenu, dans son arrêté, de mentionner le passé militaire de M. B... d'autant que celui-ci n'a pas allégué courir des risques pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine ;
- aucun des autres moyens présentés en première instance par M. B... n'est fondé.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Perez, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à titre subsidiaire, à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 23 mai 2023 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de vingt mois ;
- à ce qu'il soit enjoint à l'autorité préfectorale de réexaminer sa situation dans un délai de sept jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
- à ce qu'une somme de 1 500 euros HT soit mise à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- son droit à être entendu a été méconnu ;
. il n'a pas été en mesure de faire valoir préalablement à l'arrêté préfectoral litigieux les éléments relatifs à sa situation personnelle et ses craintes en cas de retour en Géorgie ;
.on ne lui a pas demandé au cours de son audition du 22 mai 2023 s'il souhaitait solliciter l'asile ;
sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui a pris à son encontre un arrêté stéréotypé et n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- la décision litigieuse est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; sa situation répond à des considérations humanitaires et à des motifs exceptionnels car il risque d'être emprisonné en cas de retour en Géorgie et il exerce le métier de maçon, lequel est à ce jour en tension, et son employeur souhaite le conserver dans ses effectifs ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
sur la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :
- la décision attaquée est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement sur laquelle elle se fonde ;
- le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ; celle-ci aurait dû conduire le préfet à lui accorder un délai de départ volontaire ;
sur la décision fixant le pays de renvoi :
- la décision attaquée est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement sur laquelle elle se fonde ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; au soutien de sa demande d'asile lors de son arrivée en France, il n'a jamais fait état de son statut de militaire, ni de ses services dans le Donbass contre les Russes, de sorte que ces éléments n'ont jamais été examinés ni par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ni par la Cour nationale du droit d'asile ;
sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de 20 mois :
- la décision attaquée est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement sur laquelle elle se fonde ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- il justifie de circonstances humanitaires ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant géorgien né en 1981, est entré en France en février 2019 aux fins de solliciter l'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 août 2019 et par la Cour nationale du droit d'asile le 12 novembre suivant. Le préfet du Bas-Rhin a alors pris à son encontre un arrêté le 28 octobre 2019 lui faisant obligation de quitter le territoire français. Il s'est maintenu en France sous l'identité d'un ressortissant roumain. Le 23 mai 2023, il a fait l'objet d'une vérification d'identité à Toul, qui a révélé son défaut de droit au séjour. Par un arrêté du même jour, le préfet de la Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de 20 mois. La préfète du Bas-Rhin l'a assigné à résidence dans le département du Bas-Rhin pour une durée de quarante-cinq jours, par un arrêté distinct du même jour. M. B... a alors demandé au tribunal administratif de Strasbourg l'annulation de ces arrêtés. Le préfet de Meurthe-et-Moselle relève appel du jugement du 26 juin 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a annulé son arrêté préfectoral du 23 mai 2023 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de renvoi et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt mois.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité de son séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Dans l'hypothèse où il aurait été porté atteinte au droit d'être entendu, il appartient au juge national chargé de l'appréciation de la légalité de la décision affectée de ce vice d'apprécier dans chaque cas d'espèce si cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
3. Il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement du procès-verbal d'audition du 22 mai 2023 de la gendarmerie nationale, produit à hauteur d'appel par le préfet de Meurthe-et-Moselle, que M. B... a été mis à même de présenter ses observations préalablement à la mesure d'éloignement prise à son encontre. En effet, la question lui a été posée de savoir s'il s'engageait à exécuter volontairement la mesure d'éloignement dans le cas où le préfet prendrait à son encontre une telle décision. Le droit d'être entendu ne pouvait impliquer que l'on questionne le requérant sur son passé militaire ou ses craintes en cas de retour en Géorgie qu'il lui appartenait d'exposer s'il le jugeait utile, ni qu'on lui demande expressément s'il entendait demander l'asile, ce qui l'aurait pu faire de lui-même. Dans ces conditions le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas méconnu le principe général du droit à être entendu.
4. Ainsi, c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg s'est fondée sur ce moyen pour annuler la décision du 23 mai 2023 du préfet de Meurthe-et-Moselle, pris à l'encontre de M. B..., portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant le pays de destination et par voie de conséquence, celle lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français pour une durée de vingt mois.
5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif et devant la cour.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il ne ressort pas des termes mêmes de la décision attaquée, qui mentionne de façon circonstanciée les éléments relatifs à la situation personnelle et familiale de M. B..., que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'aurait pas procédé à un examen attentif et particulier de la situation personnelle de l'intéressé.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est présent sur le territoire français depuis 2019 et qu'il a donc vécu l'essentiel de sa vie hors de France. Il est célibataire et sans enfant et il n'établit pas l'existence de liens personnels ou familiaux intenses et stables sur le territoire français. Dans ces conditions, et quand bien même M. B... dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée en tant que maçon, au demeurant sans autorisation de travail, il n'est pas fondé à soutenir que cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté contesté sur sa situation personnelle doit être écarté.
9. En troisième lieu, lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français. Tel n'est pas le cas de la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lesquelles ne prescrivent pas la délivrance d'un titre de plein droit mais laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels dont l'intéressé se prévaut. Le législateur n'a ainsi pas entendu imposer à l'administration d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article. Il en résulte qu'un étranger ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 à l'encontre d'une obligation de quitter le territoire français alors qu'il n'avait pas présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de cet article et que l'autorité compétente n'a pas procédé à un examen d'un éventuel droit au séjour à ce titre.
10. Compte tenu de ce qu'il vient d'être dit, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dirigé à l'encontre de l'arrêté contesté, qui comporte uniquement une décision portant obligation de quitter le territoire français et non le refus de délivrance d'un titre de séjour, doit être écarté comme inopérant.
En ce qui concerne la décision refusant de lui accorder un délai de départ de volontaire :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de délai de départ volontaire serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
12. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants :1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ;2° L'étranger s'est vu refuser la délivrance ou le renouvellement de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour au motif que sa demande était manifestement infondée ou frauduleuse ; 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet(...) " Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :(...) 7° L'étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d'identité ou de voyage ou a fait usage d'un tel titre ou document ; (...) "
13. En l'espèce, pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire à M. B..., il ressort des termes de la décision litigieuse que le préfet s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé a fait usage de faux documents et après avoir examiné sa situation personnelle, a considéré que ce comportement justifiait qu'aucun délai ne soit accordé. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation personnelle avant de prendre à son encontre une telle décision.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
15. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
16. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile de M. B... a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. M. B..., qui n'a pas invoqué son statut de militaire devant ces instances et ne soutient pas avoir été empêché de le faire, n'établit pas encourir un risque personnel et actuel en cas de retour dans son pays d'origine en raison de ses services, à les supposer établis, dans le Donbass contre les Russes. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur, doit être écarté.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
18. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) ".
19. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, le préfet assortit, en principe et sauf circonstances humanitaires, l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour. La durée de cette interdiction doit être déterminée en tenant compte des critères tenant à la durée de présence en France, à la nature et l'ancienneté des liens de l'intéressé avec la France, à l'existence de précédentes mesures d'éloignement et à la menace pour l'ordre public représentée par la présence en France de l'intéressé.
20. Les décisions contestées, qui rappellent les dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionnent que M. B... est entré sur le territoire français depuis deux ans, qu'il s'est maintenu irrégulièrement en France, qu'il n'a aucune attache particulière en France et qu'il a fait usage de faux documents et qu'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt mois est justifiée. La décision contestée comporte ainsi l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constitue le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.
21. Au regard des motifs de la décision attaquée non contestés, la durée de vingt mois de l'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas entachée d'erreur d'appréciation et le moyen tiré du défaut réel et sérieux de sa situation doit être écarté.
22. Enfin, si M. B... se prévaut des risques encourus en cas de retour en Georgie, lesquels ne sont au demeurant pas établis, et de son contrat à durée indéterminée, ces éléments ne constituent pas des circonstances humanitaires faisant obstacle au prononcé d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, au regard de la situation personnelle de M. B..., le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas entaché la décision contestée d'une erreur manifeste d'appréciation.
23. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Meurthe-et-Moselle est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté préfectoral du 23 mai 2023 portant obligation de quitter le territoire français, sans délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de vingt mois et par voie de conséquence a enjoint à l'autorité préfectorale de réexaminer la situation de M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.
24. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par M. B... d'annulation de l'arrêté préfectoral du 23 mai 2023, d'injonction et celles tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Les articles 2 et 4 du jugement n° 2303637 du 26 juin 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Strasbourg sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Strasbourg ainsi que les conclusions de sa requête devant la cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. B... et à Me Perez.
Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle et à la préfète du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- Mme Roussaux, première conseillère,
- M. Denizot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juin 2024.
La rapporteure,
Signé : S. RoussauxLa présidente,
Signé : V. Ghisu-Deparis
La greffière,
Signé : F. DupuyLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
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N° 23NC02470