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16/05/2024 | FRANCE | N°23NC02780

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 16 mai 2024, 23NC02780


Vu la procédure suivante :



Procédures contentieuses antérieures :



M. E... C... et Mme D... A... épouse C... ont chacun demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 20 juillet 2022 par lesquels la préfète du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement nos 2300081 et 2300082 du 22 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leu

rs demandes.



Procédures devant la cour :



I.) Par une requête et un mémoire, enr...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

M. E... C... et Mme D... A... épouse C... ont chacun demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 20 juillet 2022 par lesquels la préfète du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 2300081 et 2300082 du 22 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédures devant la cour :

I.) Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 août 2023 et le 31 octobre 2023, sous le n° 23NC02780, M. E... C..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour et subsidiairement de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision en litige méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision en litige méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision en litige doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle doit être annulée dès lors qu'il doit disposer d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2023, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II.) Par une requête, enregistrée le 29 août 2023, sous le n° 23NC02781, Mme D... A... épouse C..., représentée par Me Chebbale, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de lui délivrer un titre de séjour et subsidiairement de réexaminer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision en litige méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision en litige méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision en litige doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle doit être annulée dès lors qu'il doit disposer d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2023, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 7 août 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., ressortissants kosoviens, nés respectivement en 1955 et 1959, sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 7 avril 2019, en vue de solliciter l'asile. A la suite du rejet de leurs demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Cour nationale du droit d'asile, les intéressés ont sollicité le 1er juillet 2020 un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des arrêtés du 20 juillet 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 23NC02780 et 23NC02781, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un arrêt unique, M. et Mme C... relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 22 mai 2022 qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur les décisions de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, les décisions en litige, après avoir visé les textes dont elles font application, mentionnent les considérations de fait sur lesquelles la préfète du Bas-Rhin s'est fondée. S'il est regrettable que cette dernière a mentionné, à tort, que le fils des requérants, présent en France, était en situation irrégulière alors qu'il dispose d'un titre de séjour et que l'un de leurs quatre autres enfants résidait encore au Kosovo alors qu'ils sont tous en Allemagne, ces erreurs sont sans incidence sur l'existence d'une motivation. En outre, ces seules inexactitudes, eu égard à l'ensemble de la motivation précise et détaillée des arrêtés, ne sont pas de nature à révéler un défaut d'examen particulier de la situation des requérants.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) ".

4. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

5. Pour refuser de délivrer à M. et Mme C... un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète du Bas-Rhin s'est fondée sur les avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 28 octobre 2021, dont elle s'est appropriée les motifs. Il résulte de ces avis que l'état de santé des requérants nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont ils sont originaires, ils peuvent y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et peuvent voyager sans risque. M. C..., qui a levé le secret médical, fait valoir qu'il souffre d'hypertension et d'hyperthyroïdie nécessitant des médicaments et un suivi. Il se prévaut également de son admission aux urgences le 1er juin 2022 pour tachycardie. Quant à Mme C..., elle fait valoir qu'en 2020, elle a été opérée d'un adénocarcinome du cardia, puis a bénéficié d'une chimiothérapie et que désormais elle est régulièrement suivie. Elle ajoute qu'elle souffre également d'une hypertension artérielle. Toutefois, les certificats médicaux produits par les requérants, mentionnant que M. C... souffre d'un état dépressif lié à l'état de santé de son épouse et de problèmes cardiaques nécessitant un suivi, que Mme C... présente depuis trois ans un stress consécutif à son cancer de l'estomac, pour lequel elle est suivie tous les six mois, et enfin qu'ils ont tous les deux besoin de soins en France ainsi que d'un rapprochement familial, ne sont pas de nature, eu égard à leur caractère descriptif, à remettre en cause l'appréciation du collège de médecins de l'OFII sur la possibilité pour eux de bénéficier d'un traitement et d'un suivi effectifs au Kosovo. Il en va de même des documents généraux relatifs à la situation du système de santé au Kosovo, notamment du rapport de l'organisation suisse d'aide aux réfugiés du 6 mars 2017 ainsi que du rapport du centre de liaisons européennes et internationales de sécurité sociale de 2019 dont il ressort une prise en charge des soins pour les personnes bénéficiant de l'aide sociale lorsqu'elles n'ont pu cotiser au système d'assurance obligatoire. De plus, les intéressés ne produisent aucun élément sur leur situation financière. Si les requérants invoquent également les défaillances du système de santé au Kosovo, cette circonstance n'est pas de nature à entacher d'illégalité les décisions en litige dès lors qu'il offre un accès à des soins appropriés à leur état de santé, même s'ils ne sont pas d'un niveau équivalent à ceux de la France. Enfin les requérants n'établissent pas que la présence de leur fils à leur côté serait indispensable au regard de leur état de santé. Dans ces conditions, sans qu'il soit nécessaire de solliciter de pièces complémentaires de l'OFII ou du préfet, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige méconnaissent les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

7. M. et Mme C... font valoir qu'ils résident en France chez leur fils, en situation régulière, qui leur apporte un soutien, qu'ils ont besoin de soins qui ne peuvent pas leur être dispensés au Kosovo où ils sont isolés. Toutefois, les intéressés ont vécu plus de soixante ans dans leur pays d'origine où ils n'établissent pas être dépourvus de toute attache, quand bien même leurs autres enfants résident en Allemagne. En outre, ils n'établissent pas que leur état de santé nécessiterait l'aide quotidienne de leur fils, ni d'ailleurs qu'ils ne pourront accéder à des traitements au Kosovo. Leur présence sur le territoire français est très récente et ils ne justifient, en dehors de leur fils, d'aucune attache. Dans ces conditions, les décisions en litige n'ont pas porté au droit des requérants au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste que la préfète aurait commise dans l'appréciation de la situation de M. et Mme C... doit également être écarté.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ". Aux termes de l'article L. 613-1 du même code dans sa version applicable au litige : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour ".

10. Dès lors, ainsi qu'il a été exposé au point 2, que les arrêtés en litige comportent les motifs de droit et de fait qui constituent le fondement des refus de séjour, les décisions portant obligation de quitter le territoire français, qui visent le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'avaient pas à faire l'objet d'une motivation distincte des refus de séjour. Par ailleurs, il ne ressort pas de la motivation de ces arrêtés, contrairement à ce que font valoir les requérants, que la préfète du Bas-Rhin n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation avant de prononcer la mesure d'éloignement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier doivent être écartés.

11. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Le moyen tiré de la violation de ces dispositions ne peut qu'être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5.

12. En quatrième lieu, compte tenu de ce qui a été exposé au point 5, M. et Mme C... ne peuvent pas prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit que la préfète du Bas-Rhin aurait commise en prononçant à leur encontre une mesure d'éloignement doit être écarté.

13. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

Sur les décisions fixant le pays de destination :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre des décisions fixant le pays de destination et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

15. Aux termes de l'article L. 612-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays, fixé en application de l'article L. 721-3, à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ".

16. Les décisions en litige qui mentionnent notamment que les requérants n'ont produit aucun élément permettant d'établir qu'ils seraient exposés à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale sont suffisamment motivés. En outre, il ne ressort pas de ces motifs, ni des autres pièces du dossier que la préfète du Bas-Rhin n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation des requérants avant de fixer le pays vers lequel ils pourront être éloignés.

17. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Il résulte de ce qui a été exposé au point 5 que les requérants n'ont pas établis l'impossibilité pour eux d'accéder à un traitement adapté à leur état de santé au Kosovo. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

18. En dernier lieu, et en tout état de cause, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent, pour les motifs exposés au point 7, être écartés.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par suite leurs requêtes doivent être rejetées en toutes leurs conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. E... C..., à Mme D... A... épouse C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Chebbale.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 16 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Marc Agnel, président,

- M. Barteaux, premier conseiller,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. BarteauxLe président,

Signé : M. B...La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Schramm

N°23NC02780,23NC02781 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02780
Date de la décision : 16/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : CHEBBALE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-16;23nc02780 ?
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