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16/05/2024 | FRANCE | N°23NC01889

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 16 mai 2024, 23NC01889


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... B... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 26 juillet 2022 par lesquels le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer des titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits et leur a interdit tout retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet des Vosges de le

ur délivrer un titre de séjour et, subsidiairement, de réexaminer leur situation, dans l'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 26 juillet 2022 par lesquels le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer des titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits et leur a interdit tout retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet des Vosges de leur délivrer un titre de séjour et, subsidiairement, de réexaminer leur situation, dans l'attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n°s 2203054 et 2203055 du 26 janvier 2023, le tribunal administratif de Nancy a rejeté les demandes de M. B... et Mme C....

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée le 13 juin 2023, sous le n° 23NC01889, M. B..., représenté par Me Géhin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 26 janvier 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Vosges de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- son droit d'être entendu, de présenter des observations orales et de se faire assister par un avocat a été méconnu ;

- la décision méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- son droit d'être entendu, de présenter des observations orales et de se faire assister par un avocat a été méconnu ;

- la décision est fondée sur une décision de refus de séjour elle-même illégale ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur de qualification juridique des faits ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors que sa fille aînée est majeure et a demandé un titre de séjour ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination

- elle est fondée sur une décision portant obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est entachée d'un défaut de motivation ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2023, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2023.

II - Par une requête enregistrée le 13 juin 2023, sous le n° 23NC01890, Mme C..., représentée par Me Géhin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 26 janvier 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 juillet 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Vosges de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement de réexaminer sa situation, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 48 heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- son droit d'être entendu, de présenter des observations orales et de se faire assister par un avocat a été méconnu ;

- la décision méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- son droit d'être entendu, de présenter des observations orales et de se faire assister par un avocat a été méconnu ;

- la décision est fondée sur une décision de refus de séjour elle-même illégale ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur de qualification juridique des faits ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors que sa fille aînée est majeure et a demandé un titre de séjour ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est fondée sur une décision portant obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est entachée d'un défaut de motivation

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2023, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relatives aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peton, première conseillère,

- et les observations de M. B... et de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... et Mme C..., ressortissants albanais, nés respectivement en 1980 et 1984, déclarent être entrés en France le 8 octobre 2016 accompagnés de leurs deux enfants mineurs. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions du 22 janvier 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), lesquelles ont été confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 12 juillet 2017. Le 9 juillet 2018, le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer des titres de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français. Par un courrier du 28 juin 2021, M. B... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour qui lui a été refusée par un arrêté du 23 août 2021 portant également obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Un second arrêté pris le même jour, a fait obligation à Mme C... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Ces arrêtés ont été annulés par un jugement du 27 janvier 2022 du tribunal administratif de Nancy et injonction a été faite au préfet des Vosges de réexaminer la situation de M. B... et de Mme C.... M. B... et Mme C... ont ensuite sollicité la délivrance de titres de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par des arrêtés du 26 juillet 2022, le préfet des Vosges a refusé de leur délivrer un titre de séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays à destination duquel ils pourraient être éloignés et en prononçant à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. B... et Mme C... relèvent appel du jugement du 26 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Nancy rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés.

2. Les requêtes n° 23NC01889 et 23NC01890 concernent la situation des membres d'une même famille et on fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par le même arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions portant refus de séjour et aux décisions portant obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ".

4. M. B... et Mme C... ont présenté des demandes écrites de titre de séjour, assorties de pièces justificatives, par la voie de leur conseil. Ils soutiennent que préfet aurait dû leur laisser la possibilité de présenter des observations orales, dès lors qu'ils avaient sollicité un entretien, et leur permettre de rencontrer l'instructeur en charge de leur dossier, avec l'assistance de leur avocat.

5. Toutefois, M. B... et Mme C... ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration dès lors que la procédure contradictoire qu'elles prévoient ne trouve pas à s'appliquer lorsqu'il est statué sur une demande telle qu'une demande de titre de séjour d'une part. D'autre part, il ressort des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français.

6. Par ailleurs, si M. B... et Mme C... entendent se prévaloir d'un droit à rencontrer l'instructeur en charge de leur demande de régularisation, aucune stipulation ou disposition ne peut être regardée comme consacrant un tel droit. Le défaut de rendez-vous permettant d'expliquer oralement sa situation ne saurait, en tout état de cause, être regardé comme méconnaissant le droit de l'étranger à être assisté par un avocat, une telle assistance pouvant prendre la forme, comme en l'espèce, de la rédaction d'un document au soutien de la demande de titre de séjour.

7. Enfin il ne ressort pas des pièces des dossiers que les requérants avaient d'autres éléments utiles à faire valoir, de nature à influer sur le sens des décisions prises à leur encontre, et qu'ils auraient été empêchés de faire valoir lors du dépôt de leurs demandes constituées avec l'aide de leur conseil. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du droit des requérants d'être entendus, principe général du droit de l'Union européenne, doit être écarté.

8. En conséquence, les moyens tirés de la méconnaissance du droit d'être entendu et du droit d'être assisté par un avocat, invoqués à l'encontre des refus de titre de séjour et des obligations de quitter le territoire français doivent être écartés, dans toutes leurs branches

En ce qui concerne les décisions portant refus de titre de séjour :

9. En premier lieu, les décisions contestées mentionnent les motifs de faits et de droit sur lesquels elles se fondent. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1... ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

11. M. B... et Mme C... soutiennent avoir en France le centre de leurs intérêts privés. A cet égard, ils se prévalent de la durée de leur séjour en France, de la présence en France de leurs cinq enfants dont trois sont nés en France, de la présence régulière de leur fille aînée, de leurs efforts d'intégration, et d'un contrat d'embauche au bénéfice de M. B.... Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... et Mme C... sont entrés en France aux âges respectifs de trente-six et trente-deux ans après avoir toujours vécu dans leur pays d'origine. Ils ne peuvent ignorer la précarité de leur situation sur le territoire national dès lors que la durée de leur séjour trouve essentiellement son origine dans leur refus répété d'exécuter les décisions d'éloignement prises à leur égard. Par ailleurs, ils ne justifient d'aucune attache familiale en France à l'exception de leur cellule familiale pour laquelle, rien ne s'oppose à ce qu'elle soit reconstituée dans leur pays d'origine où les enfants mineurs pourront poursuivre leur scolarité. Enfin, les intéressés ne démontrent pas être dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine. S'ils se prévalent de leur insertion sociale et professionnelle, les seules attestations qu'ils produisent ne suffisent pas à caractériser une intégration suffisante dans la société, justifiant qu'ils auraient désormais en France le centre de leurs intérêts personnels. Par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour des intéressés en France, et en dépit du titre de séjour d'une validité d'un an délivré à leur fille majeure, les arrêtés litigieux du 26 juillet 2022 n'ont pas porté au droit de M. B... et Mme C... au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris. Ainsi, le préfet des Vosges n'a ni méconnu les stipulations et dispositions précitées, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle des intéressés.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et tiré de l'exception d'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

13. En deuxième lieu, la circonstance que la décision du préfet mentionne que les enfants de M. B... et de Mme C... sont tous mineurs et omet de préciser que leur fille aînée est devenue majeure et a présenté une demande de délivrance d'un titre de séjour, ne saurait suffire à établir un défaut d'examen particulier de la situation des requérants.

14. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux développés au point 11, le moyen, tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

15. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

16. Les requérants soutiennent que leur fille aînée étant majeure, les mesures d'éloignement auront pour effet de séparer la fratrie. Toutefois, la circonstance que leur fille aînée soit éventuellement séparée de ses frères et sœurs ne saurait suffire à ce que les décisions d'éloignement prononcées contre ses parents soient regardées comme contraire aux stipulations précitées, dès lors qu'il n'est pas établi que la fratrie se verrait dans l'impossibilité de se rencontrer dans l'un ou l'autre de leur pays de résidence. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 précité de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :

17. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité. Par suite, les décisions fixant le pays de destination n'ont pas été prises sur le fondement de décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français illégales. Le moyen tiré d'une telle exception d'illégalité ne peut, dès lors, qu'être écarté.

18. Si les requérants soutiennent que ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales et des droits de l'homme, ils n'assortissent pas leur moyen des précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier la portée.

En ce qui concernant les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :

19. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français seraient illégales du fait de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

20. En deuxième lieu, les décisions par lesquelles le préfet des Vosges a fait interdiction de retour sur le territoire français à M. B... et Mme C..., pour une durée d'un an, comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit être écarté.

21. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces des dossiers, au regard notamment des éléments de faits rappelés au point 11, que les décisions par lesquelles le préfet des Vosges a pris à l'encontre de M. B... et Mme C... des mesures d'interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an porteraient une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale.

22. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

23. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

24. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement des sommes que M. B... et Mme C... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. B... et Mme C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Mme A... C..., à Me Géhin et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète des Vosges.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 mai 2024.

La rapporteure,

Signé : N. Peton Le président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 23NC01889-23NC01890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01889
Date de la décision : 16/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Nolwenn PETON
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : GEHIN - GERARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-16;23nc01889 ?
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