La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2024 | FRANCE | N°23NC00670

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 16 mai 2024, 23NC00670


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence pour une durée de six mois en l'astreignant à se maintenir quotidiennement à son domicile de 6 heures à 9 heures et en lui faisant obligation de pointer auprès des services de police de Longwy Mont-Saint-Martin chaque jeudi à 15 heures et de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.




Par un jugement n° 2103635 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Nancy a j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence pour une durée de six mois en l'astreignant à se maintenir quotidiennement à son domicile de 6 heures à 9 heures et en lui faisant obligation de pointer auprès des services de police de Longwy Mont-Saint-Martin chaque jeudi à 15 heures et de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Par un jugement n° 2103635 du 17 mars 2022, le tribunal administratif de Nancy a jugé qu'il n'y avait plus lieu de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2023, M. A..., représenté par Me Kipffer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 mars 2022 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2021 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence pour une durée de six mois en l'astreignant à se maintenir quotidiennement à son domicile de 6 heures à 9 heures et en lui faisant obligation de pointer auprès des services de police de Longwy Mont-Saint-Martin chaque jeudi à 15 heures.

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 013 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

-le jugement est irrégulier car les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire : ils se sont fondés sur l'arrêté préfectoral du 28 octobre 2020 du préfet de la Seine-et-Marne portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français qui n'a pas été produit en première instance ;

-l'arrêté préfectoral méconnaît les dispositions de l'article L. 732-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'aux termes de cet article l'assignation à résidence prise sur le fondement de l'article L. 731-1 du même code ne peut excéder quarante-cinq jours :

-les premiers juges ne pouvaient pas procéder à la substitution des dispositions du 1° de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à celles du 1° de l'article L. 731-1 du même code car les conditions de la substitution de base légale n'étaient pas réunies ;

.-l'assignation à résidence de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une mesure en faveur de l'administration prise sur une demande de l'étranger, or il n'a jamais demandé à l'administration d'être assigné à résidence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2023, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés et s'en remet également à ses écritures de première instance.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant russe né le 3 janvier 1971, a fait l'objet d'un contrôle d'identité le 12 octobre 2021 par les services de la police aux frontières de Mont-Saint-Martin et n'a pas été en mesure de présenter un document l'autorisant à circuler ou séjourner sur le territoire français. M. A... a fait l'objet, le 28 octobre 2020, d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai assorti d'une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un arrêté du 13 octobre 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a assigné à résidence dans le département de la Meurthe-et-Moselle pour une durée de six mois en l'astreignant à se maintenir quotidiennement à son domicile de 6 heures à 9 heures et en lui faisant obligation de pointer auprès des services de police chaque jeudi à 15 heures. M. A... relève appel du jugement n° 2103635 du 17 mars 2022 du tribunal administratif de Nancy qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 13 octobre 2021.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si le requérant soutient que le jugement est irrégulier car les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire en se fondant sur l'arrêté préfectoral du 28 octobre 2020 du préfet de la Seine-et-Marne portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et interdiction de retour sur le territoire français, lequel n'aurait pas été produit en première instance, il ressort des pièces de première instance que le préfet de Meurthe-et-Moselle l'a produit en pièce jointe numéro une dans son mémoire en défense enregistré au tribunal administratif le 7 mars 2022. Le moyen manque en fait et doit donc être écarté.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ". Aux termes de l'article L. 732-3 du même code, dans sa version applicable au litige : " L'assignation à résidence prévue à l'article L. 731-1 ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours. Elle est renouvelable une fois dans la même limite de durée ". Aux termes du 1° de l'article L. 731-3 : " L'autorité administrative peut autoriser l'étranger qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne pouvoir ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, à se maintenir provisoirement sur le territoire en l'assignant à résidence jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ". Enfin, aux termes des dispositions de l'article L. 732-4 du même code, dans sa version applicable au litige : " Lorsque l'assignation à résidence a été édictée en application des 1°, 2°, 3°, 4° ou 5° de l'article L. 731-3, elle ne peut excéder une durée de six mois ".

4. Les premiers juges, après en avoir informé les parties en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, ont procédé d'office à la substitution des dispositions du 1° de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à celles du 1° de l'article L. 731-1 du même code sur lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle s'était fondé pour prendre à l'encontre de M. A... une décision portant assignation à résidence d'une durée de six mois.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a fait l'objet le 28 octobre 2020 d'une décision portant obligation de quitter le territoire français pour laquelle aucun délai de départ volontaire n'a été accordé et qui n'a donc pas été exécutée à la date de l'arrêté litigieux. En outre, l'intéressé, qui ne possède aucun document d'identité, est dans l'impossibilité de regagner son pays ou de se rendre dans un autre pays. Dès lors, il entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Alors que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles L. 731-3 et L. 732-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le requérant n'a été privé d'aucune garantie par l'effet de la substitution de base légale effectuée par les premiers juges. La circonstance que l'étranger puisse, en vertu de l'article L. 731-3 du code précité, solliciter de l'administration de se maintenir provisoirement sur le territoire ne fait pas obstacle au pouvoir de l'administration de prononcer une mesure d'assignation à résidence sur ces mêmes dispositions. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse méconnaît les dispositions de l'article L. 731-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'assignant à résidence pour une durée de six mois.

6. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande dirigée. Par suite sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Kipffer.

Copie en sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 16 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Agnel, président,

- M. Barteaux, premier conseiller,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLe président,

Signé : M. Agnel

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 23NC00670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00670
Date de la décision : 16/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : KIPFFER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-16;23nc00670 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award