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16/05/2024 | FRANCE | N°23NC00307

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 16 mai 2024, 23NC00307


Vu la procédure suivante :



Procédures contentieuses antérieures :



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2021 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement no 2107469 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédures devant la co

ur :



Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2023, M. B... C..., représenté par Me Berry, demande...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2021 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement no 2107469 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédures devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2023, M. B... C..., représenté par Me Berry, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 janvier 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 juillet 2021 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et subsidiairement de réexaminer sa situation, dans les mêmes conditions, et, dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 400 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision de refus de titre de séjour :

- la décision en litige méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision en litige doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il peut bénéficier d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2023, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant kosovien, né en 2002, est entré en France, selon ses déclarations, le 1er août 2018, avec ses parents et sa sœur, née en 2005. Le 10 juillet 2021, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 21 juillet 2021, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... fait appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 18 janvier 2022 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

3. M. C..., qui était présent depuis seulement trois ans à la date de la décision en litige, n'établit pas avoir tissé des liens stables et intenses en France en dehors de ses parents qui font également l'objet d'une mesure d'éloignement. Il est célibataire et sans enfant et ne justifie pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 15 ans et où la cellule familiale a normalement vocation à se reconstituer, avec sa sœur, encore mineure à la date de l'arrêté contesté, et dont l'état de santé, qui est stabilisé d'après un certificat médical du 4 novembre 2021, implique un suivi qui peut être assuré, selon un avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 28 mai 2021, au Kosovo. Si le requérant, qui s'est engagé dans un contrat d'apprentissage en cuisine qu'il a dû interrompre en l'absence de titre de séjour, a ponctuellement travaillé dans le bâtiment, ces circonstances ne sont pas suffisantes pour établir son intégration professionnelle. La promesse d'embauche du 31 janvier 2022 dans un restaurant de Colmar est postérieure à la décision en litige. Par suite, la décision contestée ne porte pas au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, dès lors, être écarté. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ".

5. Les motifs exposés au point 3 invoqués par M. C... au soutien de son admission exceptionnelle au séjour ne constituent ni des considérations humanitaires, ni des motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L.435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Haut-Rhin a commis une erreur de droit, ni une erreur manifeste d'appréciation en refusant son admission exceptionnelle au séjour.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

7. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

8. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C... n'a pas établi qu'un titre de séjour de plein droit aurait dû lui être délivré. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur de droit en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français.

Sur la décision fixant le pays de destination :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

10. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Berry.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

Délibéré après l'audience du 16 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Marc Agnel, président,

- M. Barteaux, premier conseiller,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024

Le rapporteur,

Signé : S. BarteauxLe président,

Signé : M. A...La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

No 23NC00307 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00307
Date de la décision : 16/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-16;23nc00307 ?
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