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09/04/2024 | FRANCE | N°23NC01528

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 09 avril 2024, 23NC01528


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 30 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n°2206232 du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la

cour :



Par une requête, enregistrée le 16 mai 2023, Mme B... A..., représentée par Me Andreini, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 30 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°2206232 du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mai 2023, Mme B... A..., représentée par Me Andreini, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 novembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2022 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour et subsidiairement de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la décision de rejet de la demande de titre de séjour :

- la décision en litige méconnaît l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la circulaire du 28 novembre 2012 ;

- la décision en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision fixant le pays de destination ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité de la décision fixant le pays de destination.

La procédure a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 2 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante kosovare, est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 2 janvier 2020. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. L'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a rejeté sa demande par une décision du 26 mars 2020. Le 4 février 2021, l'intéressée a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 30 mai 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Mme A... fait appel du jugement du 29 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée en France récemment à la date de la décision en litige. Si elle fait valoir qu'elle a épousé, le 24 septembre 2019, au Kosovo, un compatriote, titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " vie privée et familiale " valable jusqu'au 14 mars 2022, dont il avait sollicité le renouvellement, la requérante ne l'a rejoint qu'en janvier 2020. La communauté de vie est ainsi établie depuis moins de deux ans et demi à la date du refus de titre de séjour contesté. Par ailleurs, eu égard à la durée de présence régulière de son époux en France, elle entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial. Si elle fait valoir qu'elle bénéficie d'un suivi pour une procréation médicalement assistée depuis 2020 que son éloignement interromprait, les pièces médicales démontrent seulement une assistance médicale par un médecin-gynécologue consistant dans la prise de médicaments de stimulation hormonale dont il n'est pas établi qu'elle ne pourrait pas continuer à les prendre au Kosovo. La présence régulière, en France, de l'ensemble de la famille de son époux ne constitue pas une considération humanitaire ou une circonstance exceptionnelle de nature à lui ouvrir droit à un titre de séjour à titre exceptionnel. En outre, elle n'établit pas la régularité de la présence en France de sa mère et de son frère. Elle ne justifie pas d'une insertion particulière dans la société française, ni même de la maitrise de la langue française, ainsi que cela ressort de l'attestation du médecin qui la suit. Enfin, la requérante ne peut utilement se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2018 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, qui ne comporte que des orientations générales adressées aux préfets. Dans ces conditions, eu égard à l'ensemble de ces éléments, Mme A... ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées, la préfète du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme A... se prévaut de la durée de sa présence en France, de son mariage avec un compatriote, résidant régulièrement avec sa belle-famille sur le territoire français, et avec lequel elle a engagé un processus de procréation médicalement assistée, de la présence de sa mère et de son frère et de risques d'isolement dans son pays d'origine. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3, ces circonstances ne sont pas de nature à établir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, la préfète du Bas-Rhin aurait porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus a été décidé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la préfète du Bas-Rhin n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation de Mme A... au regard de son pouvoir de régularisation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision portant fixant le pays de destination :

7. Il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Il s'ensuit que ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie de l'arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 19 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente assesseure,

- M. Barteaux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2024.

Le rapporteur,

Signé : S. BARTEAUX

Le président,

Signé : C. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 23NC01528 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01528
Date de la décision : 09/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : ELEOS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-09;23nc01528 ?
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