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12/03/2024 | FRANCE | N°23NC02839

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 12 mars 2024, 23NC02839


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. F... E... et Mme G... E... née D... ont demandé au tribunal administratif de Nancy, chacun en ce qui le concerne, d'annuler les arrêtés du 26 juillet 2023 du préfet de Meurthe-et-Moselle portant, d'une part, refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai, désignation du pays de renvoi et interdiction de retour d'une durée de dix-huit mois, et d'autre part assignation à résidence.



Par un jugement nos 2302329, 2302

330, 2302331, 2302333 du 8 août 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... et Mme G... E... née D... ont demandé au tribunal administratif de Nancy, chacun en ce qui le concerne, d'annuler les arrêtés du 26 juillet 2023 du préfet de Meurthe-et-Moselle portant, d'une part, refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai, désignation du pays de renvoi et interdiction de retour d'une durée de dix-huit mois, et d'autre part assignation à résidence.

Par un jugement nos 2302329, 2302330, 2302331, 2302333 du 8 août 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy, après avoir renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre les refus de délivrance d'un titre de séjour, les a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée le 6 septembre 2023, sous le n° 23NC02839, M. E..., représenté par Me Blanvillain, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 août 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 26 juillet 2023 le concernant ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige a été signé par une autorité incompétente ;

- il est insuffisamment motivé ;

- sa situation n'a pas été correctement examinée ;

- l'arrêté est entaché d'erreur de droit car sa demande de titre de séjour a été rejetée comme irrecevable ; le premier juge n'a pas statué sur ce moyen ;

- l'obligation de quitter le territoire sans délai et la décision fixant le pays de renvoi méconnaissent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il ne représente pas de risque pour l'ordre public et ne présente aucun risque de fuite ;

- la durée de l'interdiction de retour est disproportionnée ;

- l'interdiction de retour est entachée d'erreur de droit, en l'absence d'examen de sa demande de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'assignation à résidence est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, au regard de ses garanties de représentation et de sa situation personnelle ;

- l'assignation à résidence et les modalités de présentation aux services de police qu'elle prévoit sont disproportionnées.

II) Par une requête enregistrée le 6 septembre 2023, sous le n° 23NC02840, Mme E..., représentée par Me Blanvillain, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 août 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 26 juillet 2023 la concernant ;

3°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle invoque les mêmes moyens que ceux analysés au titre de la requête n° 23NC02839.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 octobre 2023, dans les deux instances, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet des requêtes.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

M. et Mme E... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 12 octobre 2023 dans les deux instances.

Par un courrier du 6 février 2024, adressé dans les deux instances, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre les refus de titre de séjour présentées devant la cour, dès lors que le jugement attaqué les a renvoyées à une formation collégiale du tribunal.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Samson-Dye a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E..., ressortissants de Macédoine du Nord nés respectivement le 21 décembre 1991 et le 23 mai 1987, sont entrés en France, le 7 août 2017 selon leurs déclarations, pour y solliciter le statut de réfugiés. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 25 septembre 2018 et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 15 mars 2019. Ils ont chacun fait l'objet d'une décision d'éloignement en date du 9 décembre 2019 édictée par le préfet de Meurthe-et-Moselle. Par deux arrêtés du 1er juillet 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé d'admettre au séjour M. et Mme E..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être reconduits d'office. En dernier lieu, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pris à leur encontre des refus de titre de séjour assortis d'obligations de quitter le territoire sans délai, de décisions désignant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français, par arrêtés du 26 juillet 2023, et il les a assignés à résidence, par des décisions du même jour. M. et Mme E... relèvent appel du jugement par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy, après avoir renvoyé devant une formation collégiale les conclusions dirigées contre le refus de délivrance d'un titre de séjour, a rejeté le surplus de leurs conclusions.

Sur les conclusions tendant à l'annulation des refus de titre de séjour :

2. Il résulte des dispositions des articles L. 614-8 et L. 614-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 776-17 du code de justice administrative, qu'en cas de placement en rétention ou d'assignation à résidence du requérant, il appartient au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de se prononcer sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et assignant à résidence, dont il pourrait être saisi. Toutefois, il ne lui appartient pas de se prononcer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision relative au séjour.

3. Il ressort des pièces des dossiers que par le jugement attaqué, la magistrate désignée n'a pas statué sur les conclusions des demandes des requérants tendant à l'annulation des refus de titre de séjour opposés par les arrêtés du 26 juillet 2023 mais les a renvoyées, en application des dispositions précitées, à une formation collégiale du tribunal. Les conclusions dirigées contre les refus de titre de séjour, sur lesquelles le premier juge n'a pas statué, sont donc irrecevables en appel et doivent être rejetées pour ce motif.

Sur les conclusions dirigées contre les autres décisions :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

4. Ainsi que le font valoir les requérants, le premier juge n'a pas répondu au moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en refusant de leur délivrer un titre de séjour, et en assortissant ces refus d'une obligation de quitter le territoire français, en se prononçant au regard d'une demande qu'il avait rejetée comme irrecevable en raison de son incomplétude. Ce moyen soulevé à l'appui de la contestation de la mesure d'éloignement n'était pas inopérant. Le jugement est, dès lors, irrégulier et doit être annulé. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions dont était saisi le premier juge.

En ce qui concerne la légalité des arrêtés du 26 juillet 2023 du préfet de Meurthe-et-Moselle portant, d'une part, obligation de quitter le territoire français sans délai, désignation du pays de renvoi et interdiction de retour d'une durée de dix-huit mois, et d'autre part assignation à résidence :

5. En premier lieu, les quatre arrêtés litigieux ont été signés par Mme B... A..., directrice adjointe de la direction de l'immigration et de l'intégration, à laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a, par un arrêté du 3 octobre 2022, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, délégué sa signature à l'effet de signer notamment les décisions en matière d'éloignement des étrangers et d'assignation à résidence. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés attaqués doit, dès lors, être écarté.

6. En deuxième lieu, les arrêtés en litige comportent un exposé suffisamment détaillé des circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement et sont, ainsi, suffisamment motivés. Cette motivation, qui fait état de la situation personnelle des requérants, révèle également que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de M. et Mme E.... Les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de ces arrêtés et du défaut d'examen particulier de la situation des intéressés doivent, par suite, être écartés.

7. En troisième lieu, M. et Mme E... font grief au préfet de leur avoir opposé des refus de séjour, et d'avoir assorti ces décisions de mesures d'éloignement, en se prononçant sur des demandes qu'il a regardées comme incomplètes et irrecevables, et en regardant en particulier la demande de leur conseil adressée le 8 décembre 2022 comme un complément de leur demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée le 4 juillet 2022, qui a été déclarée irrecevable par une décision du 7 juillet 2022. Ils soutiennent en outre qu'à supposer cette demande incomplète, cela permettait seulement de leur opposer un refus d'enregistrement, et non un refus de titre de séjour assorti d'une mesure d'éloignement.

8. Toutefois, il ressort des termes mêmes des arrêtés du 26 juillet 2023 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français que le préfet s'est prononcé au regard des nouvelles demandes d'admission exceptionnelle au séjour présentées par M. et Mme E... le 22 juillet 2022, pour lesquelles ils ont présenté un dossier complet après le rejet de leurs demandes initiales. Il en ressort également que le courriel de leur avocat, s'il n'était pas complet en lui-même, a été regardé comme venant ajouter des éléments à leur demande adressée le 22 juillet 2022, qui était elle-même complète. Le préfet, pour prendre le refus de séjour contesté, s'est ainsi prononcé sur la base d'une demande complète, distincte de celle qu'il avait refusée d'examiner en raison de son incomplétude. Il pouvait en conséquence assortir le refus en litige d'une mesure d'éloignement. Dès lors, le moyen invoqué manque en fait.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. Si les requérants font valoir qu'ils résident en France depuis 2017, avec leurs quatre enfants, né en Macédoine en 2013 s'agissant de l'aîné et nés sur le territoire national en 2017, 2019 et 2020 pour les trois suivants, ils ne se prévalent pas d'attaches familiales sur le territoire français, au-delà de la cellule familiale qu'ils constituent avec leurs enfants mineurs, et ne démontrent pas que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer en Macédoine, pays dont ils ont la nationalité, les craintes alléguées en cas de retour dans ce pays n'étant assorties d'aucun commencement de preuve. De plus, leur durée de présence en France s'explique par leur maintien irrégulier malgré plusieurs mesures d'éloignement qu'ils n'ont pas exécutées. S'il est vrai que M. E... justifie d'une promesse d'embauche, et si les requérants se prévalent de la scolarisation de leurs enfants, les pièces du dossier ne démontrent pas une insertion particulièrement caractérisée, à la date des arrêtés litigieux. Dès lors, au regard des conditions de séjour de M. et Mme E..., ni les obligations de quitter le territoire français, ni en tout état de cause les décisions fixant le pays de destination ne portent une atteinte disproportionnée au droit des requérants au respect de leur vie privée et familiale. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent ne sont donc pas fondés. Au regard des circonstances ainsi rappelées, les décisions litigieuses ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

11. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

12. Les arrêtés litigieux n'ont ni pour objet, ni pour effet de séparer les enfants des requérants de leurs parents et il n'est pas établi que les enfants ne pourraient reprendre leur vie familiale et leur scolarisation hors de France, et plus spécifiquement dans leur pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent doit être écarté.

13. En sixième lieu, les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir la réalité des risques personnels et actuels de traitements inhumains et dégradants, prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'ils encourraient en cas de retour dans leur pays d'origine. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit donc être écarté.

14. En septième lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".

15. Les requérants se bornent à indiquer que leur comportement ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'ils ne présentent pas de risque de fuite. Toutefois, M. et Mme E... ne contestent pas s'être soustraits à l'exécution de deux précédentes mesures d'éloignement, mentionnées au point 1. Par suite, le préfet pouvait légalement refuser de leur accorder un délai de départ volontaire.

16. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ". Il résulte de ces dispositions que lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, le préfet assortit, en principe et sauf circonstances humanitaires, l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour. La durée de cette interdiction doit être déterminée en tenant compte des critères tenant à la durée de présence en France, à la nature et l'ancienneté des liens de l'intéressé avec la France, à l'existence de précédentes mesures d'éloignement et à la menace pour l'ordre public représentée par la présence en France de l'intéressé.

17. Si M. et Mme E... invoquent leur situation familiale, telle que rappelée au point 10, ces seuls éléments ne suffisent pas à établir que le préfet ne pouvait pas légalement fixer à dix-huit mois la durée de l'interdiction de retour prononcée à leur encontre.

18. En neuvième lieu, le moyen tiré de ce que les interdictions de retour seraient entachées d'erreur de droit, en l'absence d'examen de leur demande de titre de séjour, manque en fait, compte tenu de ce qui a été indiqué au point 8.

19. En dixième lieu, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ".

20. Si M. et Mme E... soutiennent qu'ils disposent de garanties de représentation suffisantes, cette circonstance est sans incidence sur la légalité d'une assignation à résidence prononcée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait, au regard de ces garanties, commis une erreur manifeste d'appréciation doit, en conséquence, être écarté.

21. En onzième et dernier lieu, M. et Mme E... soutiennent que les modalités des décisions d'assignation à résidence, qui leur imposent à se présenter les mardis et jeudis à 9 heures 30 auprès des services de police et à se maintenir à leur domicile chaque jour de 6 heures à 9 heures, seraient disproportionnées. Cependant, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, alors que les requérants n'invoquent aucune circonstance précise pour démontrer cette disproportion.

22. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 26 juillet 2023 portant, d'une part, obligation de quitter le territoire français sans délai, désignation du pays de renvoi et interdiction de retour d'une durée de dix-huit mois, et d'autre part assignation à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

23. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions d'annulation n'appelle aucune mesure d'exécution.

Sur les frais d'instance :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par les requérants sur ce fondement, dès lors que ces derniers ont la qualité de partie perdante.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement nos 2302329, 2302330, 2302331, 2302333 du 8 août 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy est annulé en tant qu'il rejette les conclusions des arrêtés du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 26 juillet 2023 portant, d'une part, obligation de quitter le territoire français sans délai, désignation du pays de renvoi et interdiction de retour d'une durée de dix-huit mois, et d'autre part assignation à résidence ainsi que les conclusions accessoires qui s'y rattachaient.

Article 2 : Les demandes d'annulation de première instance de M. et Mme E... mentionnées à l'article 1er du présent arrêt sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E..., à Mme G... E... née D..., à Me Blanvillain et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mars 2024

La rapporteure,

Signé : A. Samson-DyeLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. C...

2

Nos 23NC02839, 23NC02840


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02839
Date de la décision : 12/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BLANVILLAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-12;23nc02839 ?
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