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12/03/2024 | FRANCE | N°23NC00990

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 12 mars 2024, 23NC00990


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2021 par lequel le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.





Par un j

ugement n° 2200789 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.





Procéd...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 29 décembre 2021 par lequel le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2200789 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 30 mars et 15 mai 2023, M. A..., représenté par Me Géhin, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 7 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Vosges du 29 décembre 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète des Vosges, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour et à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la procédure de première instance ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la procédure d'appel.

Il soutient que :

en ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle n'est pas régulièrement motivée en fait et en droit ;

- elle a été prise aux termes d'une procédure irrégulière car elle a méconnu les articles R. 432-9 et R. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : on ne lui a pas communiqué l'avis de la commission du titre de séjour, ni mis en possession du procès-verbal de cette commission ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision sera annulée en conséquence de l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

en ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision sera annulée en conséquence de l'annulation du refus de délivrance d'un titre de séjour ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît le principe de proportionnalité.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 mai 2023, la préfète des Vosges, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les observations de Me Géhin, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 19 juin 1977, est régulièrement entré en France le 18 septembre 2009 afin de rejoindre son père malade présent en France depuis 1967. La demande d'asile qu'il a présentée en 2011 a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 mai 2012 et par la Cour nationale du droit d'asile le 31 janvier 2013. Après plusieurs refus de titre de séjour, M. A... a sollicité, le 4 août 2021, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des articles L. 421-1, L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 29 décembre 2021, le préfet des Vosges a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 7 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 29 décembre 2021.

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 29 décembre 2021 du préfet des Vosges :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet des Vosges, après avoir cité les textes applicables, rappelé le parcours de l'intéressé et sa situation personnelle et familiale et plus précisément avoir précisé qu'il est célibataire et sans enfant, qu'il s'est présenté dans un premier temps sous une fausse identité et qu'il n'est pas titulaire d'un contrat de travail visé par l'autorité compétente, a considéré qu'il n'y avait pas lieu de lui délivrer un titre de séjour. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, M. A... reprend en appel dans des termes similaires les moyens tirés de ce que la décision a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que les dispositions des articles R. 432-9 et R. 432-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le tribunal administratif aux points 4 à 8 du jugement contesté.

4. En troisième lieu, M. A... n'apporte aucun élément de fait ou de droit nouveau pour soutenir que le préfet des Vosges aurait méconnu les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le tribunal administratif aux points 9 à 12 du jugement litigieux et au regard également de ce qui va être dit au point 7 du présent arrêt.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de séjour ne peut qu'être écarté.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".

7. M. A... se prévaut de la durée de sa présence en France depuis le 18 septembre 2009 à l'âge de trente-deux ans et de ce qu'il est intégré et dispose d'une promesse d'embauche du 30 mars 2021 en qualité d'ouvrier agricole sous couvert d'un contrat à durée indéterminée. Toutefois, le requérant, célibataire et sans enfant, est hébergé chez un ami. S'il se prévaut d'une bonne intégration, il se borne à produire des attestations de proches et n'apporte aucun élément quant à ses engagements associatifs dont il se prévaut. Enfin, s'il est constant que son oncle, sa tante et ses dix cousins et cousines résident en France, le requérant n'établit pas avoir tissé en France des liens personnels d'une ancienneté, stabilité et intensité particulières. Dans ces conditions, au regard des conditions de séjour de l'intéressé, qui s'est maintenu sur le territoire irrégulièrement, le préfet des Vosges n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi par la décision attaquée. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de séjour ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

10. En application des dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut, dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels et des principes généraux du droit, assortir une obligation de quitter le territoire français pour l'exécution de laquelle l'intéressé dispose d'un délai de départ volontaire, d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans, en se fondant pour en justifier tant le principe que la durée, sur la durée de sa présence en France, sur la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, sur la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et sur la menace à l'ordre public que représenterait sa présence en France.

11. Il ressort des termes mêmes de la décision portant interdiction de retour sur le territoire que le préfet des Vosges a examiné les quatre critères mentionnés par ces dispositions, en relevant que si M. A... réside en France depuis 12 ans, il ne justifie d'aucun lien stable et intense en France, qu'il a fait l'objet de deux mesures d'éloignement, qu'il a démontré être une menace pour l'ordre public et qu'il y avait donc lieu de prononcer une interdiction de retour en France d'une durée d'un an à son encontre. La décision litigieuse, qui mentionne les dispositions juridiques sur lesquelles elle se fonde et fait état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels le préfet l'a édictée, dans son principe et dans sa durée, est, par suite, suffisamment motivée.

12. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 du présent arrêt.

13. En quatrième lieu, si le requérant soutient que l'interdiction de retour sur le territoire français d'un an ne respecte pas le principe de proportionnalité, il n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.

14. Il résulte de tout ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2021 du préfet des Vosges. Ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Géhin.

Copie en sera adressée à la préfète des Vosges.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mars 2024.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. B...

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N° 23NC00990


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00990
Date de la décision : 12/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : GEHIN - GERARDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-12;23nc00990 ?
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