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27/02/2024 | FRANCE | N°23NC02138

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 27 février 2024, 23NC02138


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'association Alsace Nature a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 14 août 2019 portant autorisation environnementale au titre des articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, pour la réalisation des travaux de déviation de Châtenois, dans le cadre de l'aménagement de la RN 59 entre Saint-Dié-des-Vosges et Sélestat, ainsi que l'arrêté de la préfète de Bas-Rhin du 22 décembre 2020 portant modification d

e l'arrêté du 14 août 2019.



Par un jugement nos 1909706, 2100700 du 12 mai 2023,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Alsace Nature a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 14 août 2019 portant autorisation environnementale au titre des articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, pour la réalisation des travaux de déviation de Châtenois, dans le cadre de l'aménagement de la RN 59 entre Saint-Dié-des-Vosges et Sélestat, ainsi que l'arrêté de la préfète de Bas-Rhin du 22 décembre 2020 portant modification de l'arrêté du 14 août 2019.

Par un jugement nos 1909706, 2100700 du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à cette demande et a annulé les décisions contestées.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2023 et un mémoire du 26 juillet 2023, la Collectivité européenne d'Alsace, prise en la personne de son président en exercice, représentée par Me Blaise Eglie-Richters, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 mai 2023 ;

2°) à ce que soit mis à la charge de l'association Alsace Nature, le versement d'une somme de 6 000 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens tirés de ce que c'est à tort que le tribunal a estimé que les arrêtés en litige méconnaissent les dispositions du I de l'article L. 163-1 du code de l'environnement, au motif que la Collectivité européenne d'Alsace ne justifiait pas de l'équivalence fonctionnelle, qu'il a commis une erreur de droit, une erreur de fait et une erreur d'appréciation des faits, que c'est à tort que le tribunal a estimé que le projet ne répondait pas à une raison impérative d'intérêt public majeur, justifiant l'octroi de la dérogation à l'interdiction de porter atteinte aux espèces protégées constituent des moyens sérieux au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, mais également des moyens de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions accueillies par ce jugement, en application des dispositions de l'article R. 811-15 du même code ;

- l'exécution du jugement contesté engendrera des conséquences difficilement réparables sur le plan économique pour la Collectivité et les entreprises, sur celui de la sécurité publique, ainsi que sur celui des enjeux socio-environnementaux portés par le projet.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 juillet 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires invite la cour à faire droit à la demande de la Collectivité européenne d'Alsace.

Il soutient que :

- les moyens de sa requête d'appel doivent être regardés comme sérieux dès lors qu'ils établissent d'une part que le tribunal s'est mépris en estimant que le projet de déviation ne répondait pas à une raison impérative d'intérêt public majeur au sens de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, d'autre part, que le tribunal a commis une erreur manifeste d'appréciation dans la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 163-1 du code de l'environnement en estimant qu'il n'était pas justifié, par les seuls éléments produits au dossier que les pertes fonctionnelles associées à la destruction définitive de la zone humide dans l'emprise du projet seraient compensées par les gains fonctionnels des mesures de compensation prescrites par l'arrêté en litige ;

- ces moyens sont en outre de nature à justifier le rejet de la demande présentée en première instance ;

- l'exécution du jugement dès lors qu'il fait obstacle à la poursuite de la réception des travaux ainsi qu'à la mise en service de l'infrastructure avant l'intervention de la décision au fond entraîne des conséquences difficilement réparables.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 16 juillet 2023 et le 19 juillet 2023, l'association Alsace Nature, représentée par Me Zind, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la Collectivité européenne d'Alsace, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requérante ne démontre pas que l'exécution du jugement entraînerait des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens soulevés par l'appelante ne paraissent pas sérieux en l'état de l'instruction.

Par une correspondance du 20 juillet 2023, le président de la 1ère chambre a proposé à la Collectivité européenne d'Alsace, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à l'association Alsace nature de mettre en œuvre une médiation dans le cadre de ce litige.

Par une ordonnance du 17 août 2023, le président de la 1ère chambre a désigné M. C... A... en qualité de médiateur et lui a confié la mission d'expliquer aux parties le principe, le but et les modalités d'une mesure de médiation, de recueillir par écrit leur consentement ou leur refus de cette mesure et en cas d'accord des parties, de définir avec elles, un protocole et un calendrier d'échanges.

Par des correspondances enregistrées respectivement le 8 août 2023, le 7 septembre 2023 et le 8 septembre 2023, les parties ont donné leur accord à la proposition de médiation.

Par une ordonnance du 11 septembre 2023, le président de 1ère chambre a procédé à la désignation d'un médiateur et ordonné la suspension de l'instruction des affaires.

Par des mémoires enregistrés le 31 janvier 2024, la Collectivité européenne d'Alsace, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et l'association Alsace Nature demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1909706 et n° 2100700 du 12 mai 2023 jusqu'à ce que la nouvelle autorisation environnementale qui a vocation à être délivrée à la collectivité européenne d'Alsace en application du dernier paragraphe de l'article 1.1 du protocole transactionnel ait été purgée de tout recours et ait ce faisant acquis un caractère définitif ;

2°) de considérer en conséquence que la médiation prononcée par ordonnance a pris fin dans cette seule instance, étant précisé que les parties souhaitent que la médiation se poursuive dans le cadre des affaires référencées sous les numéros 23NC02137 et 23NC02270.

En outre, les parties renoncent à toutes les demandes formulées au titre des frais irrépétibles.

Les parties font valoir qu'une nouvelle autorisation a vocation à être délivrée à la collectivité européenne d'Alsace sur la base de la mise en œuvre de mesures environnementales complémentaires à celles prescrites par les arrêtés du préfet du Bas-Rhin du 14 août 2019 et 22 décembre 2020 et qu'elles entendent poursuivre la médiation dans les deux affaires référencées sous les numéros 23NC02137 et 23NC02270.

Vu :

- la requête n° 23NC02137, enregistrée au greffe de la cour, le 30 juin 2023, par laquelle la Collectivité européenne d'Alsace a demandé l'annulation du même jugement ;

- la requête n° 23NC02270 enregistrée au greffe de la cour, le 13 juillet 2023, par laquelle le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires demande à la cour l'annulation du même jugement ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Wallerich, président,

- les conclusions de Mme Antoniazi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Eglie-Richters, pour la Collectivité européenne d'Alsace ainsi que celles de M. B..., représentant le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fins de sursis :

1. Par un jugement nos 1909706, 2100700 du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé d'une part, l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 14 août 2019 portant autorisation environnementale au titre des articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, pour la réalisation des travaux de déviation de Châtenois, dans le cadre de l'aménagement de la RN 59 entre Saint-Dié-des-Vosges et Sélestat, et d'autre part, l'arrêté du 22 décembre 2020, par lequel la préfète du Bas-Rhin a modifié l'arrêté du 14 août 2019 susvisé.

2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". Aux termes de l'article R. 811-17 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction ".

3. Par ordonnance n° 23NC02868 du 11 septembre 2023, le président de la 1ère chambre de la cour administrative d'appel de Nancy a désigné un médiateur dans le cadre de la présente affaire ainsi que dans le cadre des litiges au fond référencés sous les numéros 23NC02270 et 23NC02137. Il résulte de l'instruction que plusieurs réunions de médiation ont eu lieu entre les parties sous l'égide du médiateur, à l'issue desquelles les parties sont parvenues à trouver une issue amiable à leurs différends, matérialisée par la conclusion d'un protocole d'accord transactionnel signé entre les parties les 14 et 22 décembre 2023. En application de ce protocole, la Collectivité européenne d'Alsace a déposé le 15 janvier 2024 un nouveau dossier de demande d'autorisation environnementale pour la réalisation des travaux de déviation de Châtenois dans le cadre de l'aménagement de la RD 1059 entre Saint-Dié-des-Vosges et Sélestat. L'État a produit le 25 janvier 2024 une attestation selon laquelle le dossier de demande d'autorisation environnementale déposé par la Collectivité européenne d'Alsace est entré en phase d'instruction.

4. Dans cette mesure, le moyen tiré de ce qu'une nouvelle autorisation a vocation à être délivrée à la Collectivité européenne d'Alsace sur la base de la mise en œuvre de mesures environnementales complémentaires à celles prescrites par les arrêtés du préfet du Bas-Rhin du 14 août 2019 et 22 décembre 2020 paraît en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier qu'il soit sursis à l'exécution du jugement contesté. Dans ces conditions, il y a lieu d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 mai 2023.

5. Les parties font valoir qu'elles souhaitent poursuivre la médiation dans le cadre des affaires référencées sous les numéros 23NC02137 et 23NC02270 afin de leur permettre d'assurer le suivi de l'exécution du protocole transactionnel jusqu'à ce que la nouvelle autorisation environnementale qui a vocation à être délivrée à la Collectivité européenne d'Alsace en application du dernier paragraphe de l'article 1.1 du protocole transactionnel ait été purgée de tout recours et ait ce faisant acquis un caractère définitif. En application de l'article 4 de l'ordonnance du 11 septembre 2023 du président de la 1ère chambre, l'instruction des affaires n° 23NC02137 et 23NC02270 est suspendue pendant toute la durée de la médiation. Dans cette mesure, il ne sera statué sur ces affaires qu'à la fin des opérations de médiation.

D É C I D E :

Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les requêtes formées par la Collectivité européenne d'Alsace et le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires contre le jugement nos 1909706, 2100700 du tribunal administratif de Strasbourg du 12 mai 2023 il sera sursis à l'exécution de ce jugement.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Collectivité européenne d'Alsace, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à l'association Alsace Nature.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 21 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 février 2024.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

Signé : L. Guidi

Le président-rapporteur,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaire de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

N° 23NC02138 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC02138
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : ZIND

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-27;23nc02138 ?
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