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15/02/2024 | FRANCE | N°22NC00005

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 15 février 2024, 22NC00005


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1901899 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :


> Par une requête et un mémoire enregistrés le 3 janvier 2022 et le 5 août 2022, M. et Mme A..., représentés par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2015, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1901899 du 9 novembre 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 3 janvier 2022 et le 5 août 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Ehrismann, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de condamner l'Etat à leur restituer les sommes indument perçues, assorties des intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 6 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que c'est à tort que l'administration a remis en cause le bénéfice du régime d'exonération de plus-value prévu par les dispositions de l'article 238 quindecies du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi du 28 avril 1816 ;

- le décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourguet-Chassagnon,

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un contrôle sur pièces, par une proposition de rectification en date du 29 mai 2018, le service a procédé, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, à des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2015 à raison de la remise en cause de l'exonération d'une plus-value de 47 551 euros dont avait bénéficié Me B... A... sur le fondement de l'article 238 quindecies du code général des impôts. Les suppléments d'imposition mis à la charge de M. et Mme A... ont été maintenus par le service dans la réponse aux observations du contribuable. Les compléments d'imposition en résultant, assortis de l'intérêt de retard et de pénalités, ont été mis en recouvrement le 31 janvier 2019 pour un montant total de 16 969 euros en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2015. M. et Mme A... ont présenté le 29 mars 2019 une réclamation visant à obtenir la décharge de ces impositions supplémentaires. Cette réclamation a fait l'objet d'une décision de rejet du 27 septembre 2019. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 9 novembre 2021, par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations ainsi mises à leur charge.

2. D'une part, aux termes de l'article 39 quindecies du code général des impôts : " I. 1. Sous réserve des dispositions des articles 41, 151 octies et 210 A à 210 C, le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 16 % (...) ". Aux termes de l'article 238 quindecies du même code : " I.-Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies et réalisées dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole à l'occasion de la transmission d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité autres que celles mentionnées au V sont exonérées pour : / 1° La totalité de leur montant lorsque la valeur des éléments transmis servant d'assiette aux droits d'enregistrement mentionnés aux articles 719,720 ou 724 (...) est inférieure ou égale à 300 000 € ; (...) II.- L'exonération prévue au I est subordonnée aux conditions suivantes : / 1 L'activité doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans ; / 2 La personne à l'origine de la transmission est : / a) Une entreprise dont les résultats sont soumis à l'impôt sur le revenu ou un contribuable qui exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu ; (...) III (...) Lorsqu'il est satisfait aux conditions prévues aux 1 à 3 du II, les plus-values réalisées à l'occasion de la transmission de droits ou parts mentionnés au premier alinéa du présent III sont exonérées pour : / 1° La totalité de leur montant lorsque la valeur vénale des droits ou parts transmis est inférieure ou égale à 300 000 € (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 91 de la loi du 28 avril 1816 modifiée, dans sa rédaction applicable : " Les (...) notaires (...) pourront présenter à l'agrément (...) des successeurs, pourvu qu'ils réunissent les qualités exigées par les lois. Cette faculté de présenter des successeurs ne déroge point, au surplus, au droit de réduire le nombre (...) des notaires (...) ". Aux termes de l'article 4 du décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 relatif aux créations, transferts et suppressions d'office de notaire, à la compétence d'instrumentation et à la résidence des notaires, à la garde et à la transmission des minutes et registres professionnels des notaires, dans sa rédaction applicable : " Les suppressions d'offices ne peuvent intervenir qu'à la suite du décès, de la démission, de la destitution de leur titulaire (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret, dans sa rédaction applicable : " (...) Les indemnités qui peuvent être dues à l'ancien titulaire d'un office supprimé par les notaires bénéficiaires de la suppression sont évaluées et réparties en fonction du bénéfice résultant, pour chacun d'eux, de cette suppression ". L'article 6 du décret, dans sa rédaction applicable, dispose que " Le montant et la répartition des indemnités prévues à l'article 5 sont fixés par accord entre les parties qui en avisent le procureur général et la chambre des notaires du ressort où est établi l'office (...) ". Aux termes de l'article 13 de ce décret dans sa version applicable : " Les minutes, répertoires et autres registres professionnels d'un notaire remplacé, les documents comptables relatifs à l'office ainsi que les grosses, expéditions et dossiers de clients qu'il détient sont remis par lui (...) au nouveau titulaire de l'office (...) ". Aux termes de l'article 14 dudit décret, dans sa rédaction applicable : " En cas de suppression d'un office de notaire, les minutes, pièces et documents énumérés à l'article 13 sont attribués, à titre provisoire ou définitif, à un ou plusieurs notaires. (...) La désignation des notaires ou des sociétés civiles professionnelles attributaires et la répartition des minutes, pièces et documents sont fixées par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis de la ou des chambres départementales des notaires ".

4. L'indemnité versée en cas de suppression d'un office notarial compense la perte d'un élément d'actif et, à ce titre, est, en principe, imposable selon le régime des plus-values professionnelles. Cette indemnité ne peut bénéficier de l'exonération qui a été prévue par l'article 238 quindecies du code général des impôts pour les cas de transmission d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité, quand bien même elle serait versée, en application des articles 5 et 6 du décret n° 71-942 du 26 novembre 1971 cités au point 3, par les notaires ayant bénéficié de la suppression de l'office notarial.

5. Il résulte de l'instruction que, par acte notarié du 14 janvier 2015, Me B... A... et la SCP Laurent Durget et Binda ont conclu une convention prévoyant le versement d'une indemnité de suppression de l'office notarial de Me A... d'un montant de 200 000 euros. Pour sa part, cette dernière s'est engagée à cesser ses fonctions de notaire dès la publication de l'arrêté du garde des sceaux prenant acte de sa démission pure et simple, prononçant la suppression de l'office notarial dont elle était titulaire à la résidence de Luxeuil-les-Bains (70300) et désignant la SCP Laurent Durget et Binda, titulaire d'un office notarial dans cette même commune, en qualité d'attributaire à titre définitif des minutes de l'office supprimé. A la suite de la levée des conditions suspensives, notamment celle relative à la publication au JORF du 10 juillet 2015 de l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, du 30 juin 2015, cette convention a été réitérée par acte authentique du 29 juillet 2015. Dans sa déclaration de résultats déposée au titre de l'exercice clos le 10 juillet 2015, Me A... a opté en faveur du régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 238 quindecies du code général des impôts s'agissant de la plus-value à long terme, d'un montant de 47 551 euros, résultant de cette indemnisation. Par une proposition de rectification du 29 mai 2018 notifiée au foyer fiscal de Me A..., le service a remis en cause le bénéfice de ce régime de faveur au motif que la convention conclue n'opérait pas de transfert économique et juridique de l'office notarial.

6. Les requérants soutiennent que, en dépit des termes de la convention, il convient d'analyser la convention du 29 juillet 2015 comme procédant au transfert économique et juridique de l'activité de notaire de Me A... dès lors qu'elle a donné lieu à la remise à la SCP Laurent Durget et Binda des minutes et des documents de son office, à la reprise de l'ensemble des salariés de l'office, au transfert des moyens matériels à l'exception des locaux, à la reprise des dossiers clients en cours et des comptes clients débiteurs et au versement, en contrepartie, d'une indemnisation correspondant, en réalité, au prix de cession de son office. Il résulte toutefois des dispositions citées au point 3 et de ce qui a été dit au point 4 que l'indemnité qui lui a été versée ne saurait être regardée comme constituant le prix de cession de l'office notarial dont elle était titulaire dès lors que la suppression de cet office par l'arrêté du 30 juin 2015 a entraîné la perte de son droit de présentation d'un successeur. L'indemnité en cause correspond ainsi seulement à l'indemnisation de la perte de cet élément essentiel de l'actif immobilisé et non au prix de sa cession, la reprise de certains moyens matériels et des salariés n'opérant qu'une transmission d'actifs accessoires de l'activité. Ainsi que l'ont pertinemment retenu les premiers juges, la remise de toutes les minutes de l'étude ainsi que des répertoires, dossiers, registres de comptabilité, copies exécutoires, copies authentiques, testaments olographes en dépôt, notes et correspondances et de tous documents comptables et dossiers clients de son étude répond à l'obligation de conservation posée aux articles 13 et 14 du décret du 26 novembre 1971 et ne saurait être regardée comme opérant un transfert de clientèle. La somme versée par la SCP Laurent Durget et Binda à Me A... présentant le caractère d'une indemnisation perçue dans le cadre de sa cessation d'activité, c'est, par suite, à bon droit qu'en l'absence de transfert de l'activité de cet office supprimé, l'administration a remis en cause l'application du régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 238 quindecies du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande en décharge. Par suite, leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tendant au paiement des intérêts moratoires, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

M. Agnel, président-assesseur,

Mme Bourguet-Chassagnon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

La rapporteure,

Signé : M. Bourguet-ChassagnonLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 22NC00005


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00005
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Mariannick BOURGUET-CHASSAGNON
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ELIDE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;22nc00005 ?
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