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01/02/2024 | FRANCE | N°23NC01190

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 01 février 2024, 23NC01190


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de reta

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification du jugement et de réexaminer sa situation sous la même astreinte et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2208352 du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 23NC01190 le 17 avril 2023, Mme B..., représentée par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 mars 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt et de réexaminer sa situation sous la même astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a entaché son jugement d'un défaut d'examen de sa situation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle remplit les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions compte tenu de la durée de son séjour en France et de ses attaches personnelles en France ;

- la décision de refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale ; elle est insuffisamment motivée ; elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale ;

- la décision fixant le pays de renvoi est fondée sur une obligation de quitter le territoire français illégale.

Par des mémoires en défense enregistrés les 24 mai et 21 juillet 2023, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Guidi, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante sénégalaise, est entré en France en 2016 selon ses déclarations. Par un arrêté du 7 novembre 2022, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a obligé l'intéressée à quitter le territoire français dans délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 16 mars 2023, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., qui a présenté une demande de titre de séjour le 21 juillet 2022 en faisant valoir la présence régulière de membres de sa famille sur le territoire français, a fondé sa demande sur les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 435-1 du même code. Elle ne justifie toutefois pas avoir invoqué des motifs humanitaires ou des circonstances exceptionnelles à l'appui de sa demande, ni au soutien de sa requête en annulation devant le tribunal administratif de Strasbourg. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Strasbourg a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exerce de ce droit que pour autant cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique est nécessaire à la sécurité nationale et à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. ". Aux termes des stipulations de l'article 3 de cette même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

5. Mme B... soutient être entrée en France en 2016 à l'âge de 19 ans pour rejoindre ses parents et ses frères et sœurs en situation régulière sur le territoire français. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le père de Mme B... est entré en France en 1990, sa mère en 2001 et que ses frères et sœurs sont nés entre 2002 et 2015, tandis que la requérante a vécu au Sénégal auprès de sa grand-mère depuis l'âge de quatre ans jusqu'à son arrivée en France. Si Mme B... fait valoir que son père a fait une demande de regroupement familial en 2013, cette demande a été refusée par l'autorité administrative au motif que le lien de filiation n'était pas établi. Mme B... n'établit en outre pas qu'elle aurait entretenu des liens avec ses parents et ses frères et sœurs avant son entrée en France en 2016. Enfin, si elle fait également valoir l'aide qu'elle apporte à ses parents pour s'occuper de ses frères et sœurs en France depuis son arrivée, cette circonstance n'est pas de nature à lui ouvrir un droit au séjour. Mme B... n'établit par ailleurs pas qu'elle serait dépourvue d'attaches personnelles et familiale dans son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour prise à son encontre par le préfet du Haut-Rhin ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision, invoquée par Mme B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

7. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision doit être écarté.

8. En troisième lieu pour les mêmes motifs que ceux développés au point 5 du présent arrêt, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme B... porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision sur sa situation personnelle doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

9. Les moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision, invoquée par Mme B... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2022.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

11. Le présent arrêt qui rejette la requête de Mme B... n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.

La rapporteure,

Signé : L. GuidiLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 23NC01190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01190
Date de la décision : 01/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-01;23nc01190 ?
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