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23/01/2024 | FRANCE | N°19NC03663

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 23 janvier 2024, 19NC03663


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Lingolsheim a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner in solidum, sinon conjointement, la société Couvrest, la société ATEC Est, la SARL DWPA Architectes, la société Qualiconsult, la société Olry Ernest et Cie, la société ISO 3B et la SARL Serrurerie Scheibel à lui verser une somme de 900 000 euros TTC en réparation des désordres affectant le groupe scolaire Elias Canetti.



Par un jugement n° 1703742 du 24 octobre 2

019, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la société Couvrest à verser à la commune de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Lingolsheim a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner in solidum, sinon conjointement, la société Couvrest, la société ATEC Est, la SARL DWPA Architectes, la société Qualiconsult, la société Olry Ernest et Cie, la société ISO 3B et la SARL Serrurerie Scheibel à lui verser une somme de 900 000 euros TTC en réparation des désordres affectant le groupe scolaire Elias Canetti.

Par un jugement n° 1703742 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la société Couvrest à verser à la commune de Lingolsheim la somme de 318 413,14 euros TTC en réparation des désordres affectant le groupe scolaire Elias Canetti, ainsi que la somme de 14 376 euros TTC au titre des frais d'expertise, rejeté les conclusions d'appel en garantie présentées par la société Couvrest contre la société ATEC Est comme étant portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et rejeté les autres conclusions à fin d'appel en garantie présentées par la société Couvrest, ainsi que les conclusions à fin d'appel en garantie présentées par les sociétés DWPA Architectes, Qualiconsult, Serrurerie Scheibel et ISO 3B. Le tribunal a mis à la charge de la société Couvrest la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Lingolsheim et a mis à la charge de cette dernière deux sommes de 1 000 euros, à verser respectivement à la SARL Serrurerie Scheibel et à la société Olry Ernest et Cie, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête enregistrée sous le n° 19NC03663 le 18 décembre 2019 et un mémoire enregistré le 27 mai 2020, la SAS Couvrest, représentée en dernier lieu par Me Dhonte, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement, en tant qu'il la condamne à verser des sommes à la commune de Lingolsheim et qu'il rejette ses conclusions d'appel en garantie :

2°) de condamner les société DWPA Architectes, Qualiconsult, SIB Etudes, RB Economie, ISO 3B et Serrurerie Scheibel à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

3°) de rejeter les conclusions dirigées à son encontre ;

4°) de mettre à la charge de toute partie perdante le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la résiliation de son marché étant irrégulière, elle n'a pas à supporter les conséquences onéreuses des travaux de substitution ; le litige relatif à la résiliation n'ayant pas été jugé, la cour doit surseoir à statuer ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que les désordres étaient réservés, pour retenir que sa garantie de parfait achèvement était engagée, et sa responsabilité contractuelle n'est pas davantage engagée ;

- elle ne conteste pas le jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre son sous-traitant comme présentées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

- elle ne saurait être condamnée au paiement d'une indemnité d'un montant supérieur aux estimations expertales ; c'est à tort que les premiers juges ont pris en considération la prestation de la société Soprema, pour un montant aussi important ; il y a eu enrichissement du maître d'ouvrage ; elle ne saurait être condamnée à régler les travaux d'électricité, qui ne relèvent pas de son lot, alors qu'il n'est pas démontré qu'ils auraient été impactés par des désordres qui lui seraient imputables ; la commune doit justifier des frais de maîtrise d'œuvre sur les travaux réalisés ; la commune doit justifier de la réalité de l'intervention de son personnel et de son affectation spécifique à des tâches en lien avec les désordres ;

- la fin de non-recevoir opposée par la commune et tirée de ce que c'est l'exemplaire du jugement qui a été notifié à son conseil qui a été joint à sa requête d'appel doit être écartée ;

- il y a lieu de joindre ce dossier avec l'instance n° 19NC03715 ; la commune n'est pas recevable, dans son appel incident, à demander la somme de 900 000 euros TTC, alors que dans son appel principal elle se borne à demander le versement de 318 413,14 euros TTC ;

- le montant sollicité par la commune n'est pas justifié ;

- la créance de la ville n'est née qu'à la date du jugement, il n'y a pas lieu de faire courir les intérêts dès la date de saisine du tribunal ;

- seuls les travaux dont le maître d'ouvrage lui-même sollicite la réalisation sont susceptibles d'engager la garantie de parfait achèvement ; les ouvrages d'étanchéité n'ont pas fait l'objet d'une réserve générale ; la décision de réception ne précise pas les réserves à lever, de sorte qu'elle doit être regardée comme une réception sans réserve ; la mise en demeure du 23 novembre 2015 ne concernait pas le bâtiment des maternelles, pour lequel les réserves devaient être regardées comme levées ; il doit être déduit de l'indemnité accordée à la commune la somme de 55 894,56 euros correspondant au coût de réfection des édicules ; la reprise de l'étanchéité de la toiture des bâtiments des maternelles ne peut davantage relever de la garantie de parfait achèvement, tout comme les désordres consécutifs, de sorte qu'il y a lieu de déduire 228 724,81 euros ; la réalisation des travaux susceptibles de relever de la garantie de parfait achèvement ne nécessite pas le recours à une maîtrise d'œuvre ;

- sa garantie contractuelle ne saurait être engagée, compte tenu de ce qui précède ;

- c'est à tort que ses conclusions d'appel en garantie ont été rejetées au motif que la responsabilité des constructeurs, telle que recherchée par le maître d'ouvrage, n'était pas engagée ; elle reprend les arguments de la commune sur les fautes de la maîtrise d'œuvre ; la société DWPA Architectes a manqué à son obligation, au titre de sa mission OPC, en laissant l'entreprise Serrurerie Scheibel poser l'escalier avant que l'étanchéité du palier soit assurée et sans faire réintervenir cette entreprise pour déposer son ouvrage ; il appartenait à l'architecte, titulaire des missions EXE et DET, de s'assurer de la création d'un joint de dilatation, notamment en toiture, et du traitement des joints de dilation existants ; il lui appartenait aussi de s'assurer de la conception de l'ouvrage, y compris après substitution du procédé initialement envisagé ; l'absence de pare-pluie derrière le bardage, de seuil sous la porte du local CTA ou de bavettes sur les portillons dénote un manquement de l'architecte à sa mission DET ; le bureau de contrôle a également commis une faute en validant les plans des édicules et les plans sur lesquels étaient mentionnés les joints de dilatation ; c'est à la société SIB Etudes qu'il appartenait de vérifier si les joints de dilatation avaient été prévus, exécutés et traités ; la société ISO 3B a manqué aux règles du DTU en ne posant pas de pare-pluie derrière son ouvrage, la société RB Economie aurait dû le prévoir dans le CCTP ; les désordres imputables à la société Serrurerie Scheibel engagent sa responsabilité, qu'elle a reconnue, alors qu'ils relevaient de la garantie décennale ; les infiltrations liées au défaut d'étanchéité du palier sont imputables à cette société.

Par trois mémoires enregistrés les 26 mars 2020, 26 mai 2020 et 10 juillet 2020, la commune de Lingolsheim, représentée par MetA... associés, conclut :

- au rejet de la requête de la société Couvrest ;

- par le biais de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il rejette ses conclusions présentées sur le fondement de la responsabilité contractuelle et dirigées contre la société DWPA Architectes, le groupement de maîtrise d'œuvre et la société Qualiconsult et en tant qu'il omet de statuer sur ses conclusions relatives aux intérêts et à leur capitalisation ;

- à la condamnation des sociétés Couvrest, DWPA Architectes, Qualiconsult, Olry Ernest et Cie, ISO 3B et Serrurerie Scheibel à lui verser une somme de 900 000 euros TTC à parfaire, ainsi que les frais de l'expertise ;

- à ce qu'il soit mis à la charge de ces sociétés le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de la société Couvrest est irrecevable, dès lors qu'elle n'a pas joint à son appel la copie du jugement qui lui a été notifiée, mais celle qui a été adressée à son conseil ;

- la circonstance qu'elle a formé un appel principal est sans incidence sur la recevabilité de ses conclusions d'appel incident ; ses conclusions d'appel incident ne relèvent pas d'un litige distinct par rapport à l'appel principal ;

- ses conclusions à l'égard de la société Serrurerie Scheibel ne présentent pas le caractère de conclusions d'intimé à intimé, la mise en cause de cette société résultant de l'appel de la société Couvrest ;

- il n'y a pas lieu de surseoir à statuer dans le présent litige, la requérante ne pouvant se prévaloir d'une mise en régie irrégulière ;

- la société Couvrest était tenue de réparer tous les désordres signalés par le maître d'ouvrage dans le cadre de la garantie de parfait achèvement, qu'il s'agisse de ceux dont elle est personnellement responsable ou de ceux commis par son sous-traitant ; les désordres ont été signalés dans le délai de parfait achèvement ; la réception a été prononcée avec réserves ; subsidiairement, les réserves n'étaient pas levées concernant l'accueil des classes maternelles, sa responsabilité est engagée sur un fondement contractuel, dès lors qu'il y a eu manquement à son obligation de résultat ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la responsabilité de la société DWPA Architectes, mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, n'était pas engagée ; la maîtrise d'œuvre était contractuellement tenue de s'assurer que les travaux soient réalisés par le corps d'état s'étant vu confier les travaux, il y a eu défaut de coordination en raison de la réalisation par la société Couvrest de travaux qui devaient être effectués par la société Serrurerie Scheibel ; le maître d'œuvre a également manqué à son devoir de conseil en ne conseillant pas au maître d'ouvrage d'assortir la réception de réserves s'agissant de ces travaux ; contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'absence de joints de dilation et le mauvais traitement des joints existants ont contribué à l'apparition des infiltrations constatées, la responsabilité de la maîtrise d'œuvre est engagée en raison de l'absence de certains détails d'exécution significatifs ; l'architecte a laissé la société Couvrest réaliser des interventions foraines et s'est contenté de lui adresser des mises en demeure, sans vérifier le respect des règles de l'art par cette dernière et sans s'assurer du respect de ses directives ; la société DWPA Architectes a validé la réalisation d'édicules à la géométrie trop complexe pour que ces ouvrages soient rendus étanches ; le maître d'œuvre devait imposer un pare-pluie, s'assurer de sa réalisation et alerter le maître d'œuvre sur les conséquences de l'absence de ce dispositif, les manquements de la société RB Economie engagent la responsabilité du mandataire ; la société DWPA Architectes était tenue de vérifier que l'entreprise en charge de la réalisation des appuis et seuils n'avait pas oublié d'exécuter ces prestations prévues par le marché ; l'architecte ne justifie pas avoir relancé les entreprises durant la période de parfait achèvement ; la société SIB Etudes, membre du groupement de maîtrise d'œuvre, a commis des fautes dont le mandataire du groupement doit répondre, en s'abstenant de faire des remarques sur la non-réalisation des joints de dilatation sur la toiture bois, les joints ne figuraient pas sur les plans PRO ; la société René Breitfelder, membre du groupement de maîtrise d'œuvre, a manqué à son obligation de conseil en n'émettant pas de prescription quant à la pose d'un pare-pluie au droit du bardage bois, cette absence aurait dû être signalée lors des opérations de réception ;

- il doit lui être alloué le bénéfice de ses écritures de première instance ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu la responsabilité de la société Qualiconsult, dès lors que le contrôleur technique, sur qui pèse une obligation de résultat à l'encontre du maître d'ouvrage, a validé le concept d'étanchéité retenu pour les édicules techniques et accepté la non-réalisation de joints de dilatation au droit du local technique R+2 ; si le contrôleur technique avait initialement émis un avis suspendu, il n'a pas rendu d'avis défavorable dans son rapport final ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu la responsabilité de la société Serrurerie Scheibel, chargée du lot métallerie ; sa responsabilité décennale est engagée, les désordres ayant contribué aux infiltrations affectant l'ouvrage, qui compromettent la solidité et la destination de l'ouvrage, privant les usagers à nombreuses reprises de salles de classe ; sa responsabilité contractuelle est engagée dès lors qu'elle n'a pas respecté les règles de l'art en ne réalisant pas le seuil de la porte métallique donnant accès au local CTA et la bavette basse rejet d'eau au droit des portillons d'accès du local technique R+2 ; elle a également manqué à son obligation de conseil en n'émettant pas de réserve après l'intervention de la société Couvrest, chargée de la réalisation de l'escalier hélicoïdal ;

- les travaux de reprise sont estimés provisoirement par l'expert à 450 000 euros TTC, mais ce montant est susceptible d'évoluer, de sorte qu'elle sollicite 900 000 euros ; les constructeurs doivent être condamnés solidairement, ou à défaut conjointement ; les infiltrations ont concerné tout le bâtiment ; il n'est pas justifié que les travaux de reprise n'auraient pas nécessité le recours à une maîtrise d'œuvre ;

- la condamnation doit aussi porter sur les frais d'expertise, de 14 376 euros, ainsi que la somme de 1 976,66 euros taxée par l'ordonnance du 4 septembre 2018 ;

- le tribunal a omis de statuer sur ses conclusions au titre des intérêts et de leur capitalisation.

Par trois mémoires enregistrés les 2 mars 2020, 30 avril 2020 et 20 mai 2020, la SARL Serrurerie Scheibel, représentée par Me Lounes, de la SELARL Dôme Avocats, conclut :

- au rejet de la requête ainsi que des conclusions de la commune de Lingolsheim et à ce que le versement d'une somme de 5 000 euros soit mis à la charge de la société Couvrest et de la commune de Lingolsheim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- subsidiairement, à ce que sa condamnation au paiement des frais d'expertise soit limitée, à ce que les sociétés Couvrest, DWPA Architectes, Qualiconsult, Olry Arkedia, RB Economie et ISO 3 B soient condamnées in solidum à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre et à ce que le versement d'une somme de 5 000 euros soit mis à leur charge in solidum au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'appel incident de la commune est irrecevable, au regard de l'objet limité de son appel principal, en ce qu'elle n'est pas recevable à rechercher sa responsabilité et à augmenter le montant de ses prétentions indemnitaires ; son appel incident relève d'un litige distinct ; les conclusions que la commune présente à son encontre sont des conclusions d'intimé à intimé, elles sont tardives ;

- c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté les conclusions dirigées à son encontre, que ce soit au titre de la garantie décennale, sur un fondement contractuel ou au titre des appels en garantie ; aucun désordre ne lui est imputable, ainsi que l'a retenu l'expert ; les désordres ne présentent pas de caractère décennal, elle conteste sa responsabilité ; il faut, pour qu'un appel en garantie puisse prospérer, que la responsabilité de ce constructeur soit retenue vis-à-vis du maître de l'ouvrage ; aucune faute qui lui est imputable n'est démontrée ; les travaux de reprise pris en compte par la commune et retenus par la commune ne concernent pas des ouvrages qu'elle a réalisés ; sa responsabilité contractuelle ne peut plus être engagée vis-à-vis de la commune dès lors qu'il y a eu réception sans réserve ;

- à titre subsidiaire, la commune ne justifie pas du montant réclamé, les travaux en cause étant terminés ;

- les conclusions relatives aux frais d'instance dirigées à son encontre ne sauraient prospérer, les sommes demandées étant disproportionnées ;

- le cas échéant, elle ne pourrait être condamnée à prendre en charge les frais d'expertise qu'à hauteur de sa part de responsabilité, qui serait limitée à 1,12 % ; sa condamnation devrait être limitée aux seuls désordres susceptibles de lui être imputés, soit la non-réalisation du seuil de la porte métallique d'accès au local CTA et l'absence de bavette basse de rejet d'eau au droit des portillons d'accès au local technique R+2, pour un montant, au regard de la répartition de responsabilité retenue par l'expert, de 660 euros et 1 188 euros ;

- elle est fondée à appeler les autres constructeurs à la garantir, au regard de leur responsabilité retenue par le rapport d'expertise.

Par deux mémoires enregistrés les 23 mars 2020 et 2 juin 2020, la SARL DWPA Architectes, représentée par Me André, du cabinet Monheit-André-Mai, conclut :

- à titre principal, au rejet de la requête ainsi que des conclusions formées à son encontre et à ce que le versement de sommes de 5 000 euros soit mis à la charge de la société Couvrest, de la commune de Lingolsheim ou de tout appelant en garantie ;

- subsidiairement, à ce que les montants sollicités soient limités et à ce que les sociétés Couvrest, ATEC Est, Qualiconsult, Olry Ernest et Cie, ISO 3B, Serrurerie Scheibel, SIB Etudes et RB Economie soient condamnées solidairement ou in solidum à la garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre, en totalité ou selon la répartition proposée dans ses écritures et de mettre à leur charge une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

- la garantie de parfait achèvement ne concerne que les entrepreneurs ;

- elle a émis de nombreuses réserves sur les prestations, attiré l'attention du maître d'ouvrage et a ainsi rempli sa mission de conseil et d'assistance au maître d'ouvrage, s'agissant de l'étanchéité de la couverture ;

- elle a émis de nombreuses réserves sur l'étanchéité des édicules ; la solution d'étanchéité des édicules a été modifiée en raison de l'incapacité de la société Couvrest à réaliser la solution initiale ; elle a alerté le contrôleur technique, dont les réserves sur ce point ont disparu ; l'expert n'a pu démontrer de lien de causalité entre les édicules et les infiltrations ;

- le lien de causalité entre les joints de dilatation et les infiltrations n'est pas démontré ; les joints de dilatation avaient été reportés sur les plans PRO et EXE 1 ; c'est à la société SIB Etudes qu'il appartenait de se prononcer ; il est contradictoire de soutenir que les infiltrations seraient dues à une absence de joints alors que les infiltrations constatées étaient dues à la présence de joints préexistants ;

- aucune infiltration n'a été constatée en raison de la non-conformité du pare-pluie ; la société RB Economie était responsable de la conception du pare-pluie ; ce désordre lui est imputable ; la convention de répartition des honoraires permet de déterminer la part respective de responsabilité de chacun des membres du groupement de maîtrise d'œuvre, et fait obstacle à sa condamnation solidaire ; la réception sans réserve fait obstacle à ce que la commune se retourne contre la maîtrise d'œuvre, la société Couvrest ne peut demander à être garantie ;

- la mission OPC était confiée à la société RB Economie, à laquelle est imputable le désordre relatif à l'escalier hélicoïdal ; c'est le non-respect des directives données à la société Couvrest qui l'a contrainte à envisager la pose de l'escalier avant la pose de l'étanchéité ;

- le défaut de reprise des appuis et des seuils de trappe de visite du local technique R+2 résulte d'un oubli de l'entreprise Serrurerie Scheibel qui ne lui est pas imputable ;

- sa responsabilité n'est pas retenue par l'expert pour les autres postes évoqués ;

- le montant de 450 000 euros retenu par l'expert demeure une pure estimation ;

- les travaux d'électricité ne sont pas justifiés ;

- les travaux de reprise ayant déjà eu lieu, les frais de maîtrise d'œuvre ne sont pas justifiés ; sa part de responsabilité doit être limitée pour les honoraires de maîtrise d'œuvre et les travaux de recherche et d'investigation ;

- l'intervention des fonctionnaires de la commune ne constitue pas un préjudice indemnisable ;

- elle est fondée, à titre subsidiaire, à appeler en garantie les entreprises responsables de la survenue des désordres, au regard des fautes commises ;

- elle appelle en garantie les sociétés SIB Etudes et RB Economie, sur un fondement contractuel, au regard de la répartition de leurs missions respectives dans la convention, subsidiairement sur un fondement quasi-délictuel ;

- elle est également fondée à appeler en garantie le bureau de contrôle Qualiconsult et les entreprises chargées de l'exécution des travaux ;

- l'appel incident de la commune ne peut prospérer car elle a formé un appel principal et ne peut demander deux fois l'indemnisation d'un même préjudice ; le montant de 900 000 euros réclamé par le maître d'ouvrage n'est pas justifié.

Par un mémoire enregistré le 13 juillet 2020, la SAS Qualiconsult, représentée par Me Freeman-Hecker, conclut :

- au rejet de la requête ;

- subsidiairement à ce que sa part de responsabilité soit limitée conformément à ce qu'a retenu l'expert et à ce que les sommes sollicitées soient réduites à de plus justes proportions ;

- à ce que les sociétés DWPA Architectes, Couvrest, ATEC Est, Olry Arkedia, ISO 3B, Serrurerie Scheibel soient condamnées à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;

- à ce que le versement d'une somme de 5 000 euros soit mis à la charge de la société Couvrest et de la commune de Lingolsheim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les désordres ayant fait l'objet de réserves lors de la réception, sa responsabilité décennale ne peut plus être engagée ;

- le contrôleur technique n'est pas soumis à la garantie de parfait achèvement ;

- sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée ; la matérialité des infiltrations au droit des joints de dilatation du local technique et des édicules n'est pas établie ; elle n'a pas commis de faute, elle a effectué sa mission de contrôle et a émis un avis suspendu sur l'étanchéité des édicules, qu'elle n'avait pas à réitérer ; la commune n'établit pas le lien de causalité avec le dommage ;

- les autres intervenants sont responsables des désordres ;

- subsidiairement, il y a lieu, le cas échéant, de limiter sa responsabilité aux montants retenus par l'expert ;

- le montant des travaux retenus par l'expert est excessif ; la reconstruction des édicules en zinc pré-patiné n'est pas justifiée, elle représente une amélioration et un enrichissement ; les travaux d'électricité sont surévalués ; la réfection totale de l'étanchéité et de l'isolation ne se justifie pas, en raison du caractère ponctuel des infiltrations ;

- elle est fondée à appeler en garantie la société DWPA Architectes, la société Couvrest, la société ATEC Est, la société Olry Arkedia, la société ISO 3B et la société Serrurerie Scheibel, dès lors que le rapport d'expertise a retenu leur responsabilité pour divers manquements.

Par des mémoires enregistrés les 6 août 2020, 28 janvier 2022 et 31 janvier 2022, Me Jean-Denis Mauhin, en qualité de liquidateur de la SARL ISO 3B, représenté par Me Freeman-Hecker, du cabinet Amadeus avocats, conclut au rejet de la requête et des conclusions dirigées à son encontre et à ce que le versement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de la commune de Lingolsheim.

Il soutient que :

- la commune a renoncé à toute demande contre la société en question, elle n'a pas contesté le jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions à son encontre ;

- au titre de la garantie décennale, si l'expert a retenu sa responsabilité pour certains aspects mineurs, la preuve de lien de causalité entre les désordres et un manquement à son devoir de conseil n'est pas rapportée, plusieurs entreprises étant intervenues sous la direction d'un maître d'œuvre compétent qui devait attirer leur attention sur les travaux à compléter ; la part prépondérante de responsabilité s'agissant de l'absence de pare-pluie revient au maître d'œuvre, et la société Olry Arkedia qui a réalisé la structure bois servant de support au bardage a manqué à son devoir de conseil ; ses travaux ne sont pas à l'origine des infiltrations, aucune faute d'exécution dans la réalisation de ses ouvrages n'est retenue par l'expert ;

- la demande de 900 000 euros présentée par la commune est disproportionnée et infondée, elle n'a pas été réactualisée à l'issue du dépôt du rapport définitif par l'expert ; sa condamnation ne saurait excéder le montant de 1 785,34 euros ;

- s'agissant de la responsabilité contractuelle de droit commun, le manquement au devoir de conseil retenu par l'expert n'est pas étayé et sa responsabilité ne pourrait être retenue que dans la part retenue par l'expert.

Par un mémoire enregistré le 31 janvier 2022, la société SIB Etudes et la société RB Economie, représentées par Me Le Discorde, concluent :

- au rejet de l'appel principal de la société Couvrest et de l'appel incident de la commune de Lingolsheim et à ce que des sommes de 4 000 euros soient mises à leur charge au titre des frais d'instance ;

- subsidiairement, en cas d'infirmation du jugement, au rejet des conclusions d'appel en garantie dirigées à leur encontre et à ce que le versement d'une somme de 4 000 euros soit mis à la charge in solidum des sociétés Couvrest, DWPA Architectes et Serrurerie Scheibel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- très subsidiairement, à ce que l'obligation de garantie soit limitée à 5 % des travaux de reprise du désordre n° 5 pour la société SIB Etudes et à 10 % des travaux de reprise pour le désordre n° 6 pour la société RB Economie et à ce que la charge des frais d'expertise soit répartie au prorata du quantum des condamnations prononcées.

Elles soutiennent que :

- la société Couvrest n'est pas fondée à contester sa condamnation sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;

- les conclusions d'appel en garantie de la société Couvrest à l'encontre de la société RB Economie sont irrecevables car présentées pour la première fois en appel ;

- la société Couvrest n'a pas contesté, dans sa requête, le jugement en tant qu'il rejette les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société SIB Etudes, dans le délai d'appel, mais seulement dans son mémoire du 28 mai 2020, de sorte que les conclusions à l'encontre de cette société sont également irrecevables ;

- ses conclusions d'appel en garantie sont, en tout état de cause, mal fondées ; elles ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

- la faute reprochée à la société SIB Etudes, liée à l'absence de joint de dilatation, a causé un préjudice limité, à hauteur de 2 500 euros HT, et dans lequel elle n'a joué qu'un rôle mineur, limité à 5 % d'après l'expert ;

- l'absence de pare-pluie au droit du bardage bois, que l'expert a retenue à l'encontre de la société RB Economie à hauteur de 10 % et qui représente un coût de reprise de 1 500 euros HT, n'a entraîné aucun désordre selon le tableau des coûts retenus par l'expert ;

- les conclusions d'appel incident de la commune sont irrecevables, au regard de l'objet de son appel et de l'expiration du délai d'appel ;

- le montant sollicité par la commune est excessif ; eu égard à la nature solidaire du groupement de maîtrise d'œuvre, la société DWPA Architectes n'est pas fondée à l'appeler en garantie ; le tableau de répartition des honoraires ne permet pas de connaître les missions respectives des membres du groupement ;

- la société DWPA Architectes ne démontre pas les manquements qu'elles aurait commis ;

- la seule faute reprochée à la société RB Economie, à savoir l'absence de pare-pluie, n'est pas à l'origine des désordres imputés à la société Serrurerie Scheibel, dont l'appel en garantie doit être rejeté ;

- subsidiairement, au regard des parts de responsabilité retenues par l'expert, l'obligation de réparation ne saurait excéder 150 euros TTC pour la société SIB Etudes et 165 euros TTC pour la société RB Economie.

Par un mémoire enregistré le 21 février 2022, la société Olry Ernest et Cie, représentée par Me Hager, conclut au rejet des conclusions dirigées à son encontre, à ce que la commune de Lingolsheim et tous les appelants en garantie soient condamnés aux dépens et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à leur charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que selon l'expert, aucun désordre ne lui est imputable, le joint de dilatation qui avait été mentionné comme manquant dans le pré-rapport ayant été constaté sur site, et l'absence de joint de dilatation étant sans incidence sur les désordres.

II) Par une requête enregistrée sous le n° 19NC03715 le 23 décembre 2019, et des mémoires enregistrés les 26 mai 2020, 10 juillet 2020 et 26 janvier 2022, la commune de Lingolsheim, représentée par MetA... associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement attaqué, en tant qu'il rejette ses conclusions présentées sur le fondement de la responsabilité contractuelle et dirigées contre la société DWPA Architectes, le groupement de maîtrise d'œuvre et la société Qualiconsult et en tant qu'il omet de statuer sur ses conclusions relatives aux intérêts et à leur capitalisation ;

2°) de condamner in solidum ou à défaut conjointement la société Couvrest, la société DWPA Architectes et la société Qualiconsult à lui verser une somme de 318 413,14 euros TTC en réparation des désordres affectant le groupe scolaire Elias Canetti, ainsi que d'une somme de 14 376 euros TTC au titre des frais d'expertise, ces sommes portant intérêt au taux légal à compter de la saisine du tribunal, avec capitalisation ;

3°) de mettre à la charge solidaire ou conjointe des sociétés Couvrest, DWPA Architectes et Qualiconsult le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas signé ;

- les opérations d'expertise ont été régulières, contrairement à ce que soutient la société Qualiconsult ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la responsabilité de la société DWPA Architectes, mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, n'était pas engagée ; la maîtrise d'œuvre était contractuellement tenue de s'assurer que les travaux soient réalisés par le corps d'état s'étant vu confier les travaux, il y a eu défaut de coordination en raison de la réalisation par la société Couvrest de travaux qui devaient être effectués par la société Serrurerie Scheibel ; le maître d'œuvre a également manqué à son devoir de conseil en ne conseillant pas au maître d'ouvrage d'assortir la réception de réserves s'agissant de ces travaux ; contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'absence de joints de dilation et le mauvais traitement des joints existants ont contribué à l'avènement des infiltrations constatées, la responsabilité de la maîtrise d'œuvre est engagée en raison de l'absence de certains détails d'exécution significatifs ; l'architecte a laissé la société Couvrest réaliser des interventions foraines et s'est contenté de lui adresser des mises en demeure, sans vérifier le respect des règles de l'art par cette dernière et sans s'assurer du respect de ses directives ; la société DWPA Architectes a validé la réalisation d'édicules à la géométrie trop complexe pour que ces ouvrages soient rendus étanches ; le maître d'œuvre devait imposer un pare-pluie, s'assurer de sa réalisation et alerter le maître d'œuvre sur les conséquences de l'absence de ce dispositif, les manquements de la société RB Economie engagent la responsabilité du mandataire ; la société DWPA Architectes était tenue de vérifier que l'entreprise en charge de la réalisation des appuis et seuils n'avait pas oublié d'exécuter ces prestations prévues par le marché ; l'architecte ne justifie pas avoir relancé les entreprises durant la période de parfait achèvement ; la société SIB Etudes, membre du groupement de maîtrise d'œuvre, a commis des fautes dont le mandataire du groupement doit répondre, en s'abstenant de faire des remarques sur la non-réalisation des joints de dilatation sur la toiture bois, les joints ne figuraient pas sur les plans PRO ; la société René Breitfelder, membre du groupement de maîtrise d'œuvre, a manqué à son obligation de conseil en n'émettant pas de prescription quant à la pose d'un pare-pluie au droit du bardage bois, cette absence aurait dû être signalée lors des opérations de réception ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu la responsabilité de la société Qualiconsult, dès lors que le contrôleur technique, sur qui pèse une obligation de résultat à l'encontre du maître d'ouvrage, a validé le concept d'étanchéité retenu pour les édicules techniques et accepté la non-réalisation de joints de dilatation au droit du local technique R+2 ; si le contrôleur technique avait initialement émis un avis suspendu, il n'a pas rendu d'avis défavorable dans son rapport final ;

- le tribunal a omis de statuer sur ses conclusions au titre des intérêts et de leur capitalisation ;

- la société DWPA Architectes ne saurait contester les montants retenus au regard de l'importance et du nombre des désordres constatés ; les montants retenus par l'expert font foi ;

- l'appel incident de la société Couvrest est irrecevable dès lors qu'il porte sur un litige distinct ; c'est à bon droit que le tribunal a retenu que sa garantie de parfait achèvement était engagée ; la responsabilité contractuelle de la société Couvrest était en tout état de cause engagée.

Par un mémoire enregistré le 27 mai 2020, la société Couvrest, représentée par Me Dhonte, conclut :

- au rejet de la requête de la commune et des conclusions dirigées à son encontre ;

- à la réformation du jugement, en tant qu'il la condamne à verser des sommes à la commune de Lingolsheim et qu'il rejette ses conclusions d'appel en garantie ;

- à la condamnation des sociétés DWPA Architectes, Qualiconsult, SIB Etudes, RB Economie, ISO 3B et Serrurerie Scheibel à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

- à ce qu'il soit mis à la charge de toute partie perdante le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il y a lieu de joindre ce dossier avec l'instance n° 19NC03663 ; la commune a acquiescé au jugement, s'agissant du montant qui lui a été accordé par les premiers juges, il y a lieu de lui en donner acte ;

- la créance de la ville n'est née qu'à la date du jugement, il n'y a pas lieu de faire courir les intérêts dès la date de saisine du tribunal ;

- seuls les travaux dont le maître d'ouvrage lui-même sollicite la réalisation sont susceptibles d'engager la garantie de parfait achèvement ; les ouvrages d'étanchéité n'ont pas fait l'objet d'une réserve générale ; la décision de réception ne précise pas les réserves à lever, de sorte qu'elle doit être regardée comme une réception sans réserve ; la mise en demeure du 23 novembre 2015 ne concernait pas le bâtiment des maternelles, pour lequel les réserves devaient être regardées comme levées ; il doit être déduit de l'indemnité accordée à la commune la somme de 55 894,56 euros correspondant au coût de réfection des édicules ; la reprise de l'étanchéité de la toiture des bâtiments des maternelles ne peut davantage relever de la garantie de parfait achèvement, tout comme les désordres consécutifs, de sorte qu'il y a lieu de déduire 228 724,81 euros ; la réalisation des travaux susceptibles de relever de la garantie de parfait achèvement ne nécessite pas le recours à une maîtrise d'œuvre ;

- sa garantie contractuelle ne saurait être engagée, compte tenu de ce qui précède ;

- c'est à tort que ses conclusions d'appel en garantie ont été rejetées au motif que la responsabilité des constructeurs, telle que recherchée par le maître d'ouvrage, n'était pas engagée ; elle reprend les arguments de la commune sur les fautes de la maîtrise d'œuvre ; la société DWPA Architectes a manqué à son obligation, au titre de sa mission OPC, en laissant l'entreprise Serrurerie Scheibel poser l'escalier avant que l'étanchéité du palier soit assurée et sans faire réintervenir cette entreprise pour déposer son ouvrage ; il appartenait à l'architecte, titulaire des missions EXE et DET de s'assurer de la création d'un joint de dilatation, notamment en toiture, et du traitement des joints de dilation existants ; il lui appartenait aussi de s'assurer de la conception de l'ouvrage, y compris après substitution du procédé initialement envisagé ; l'absence de pare-pluie derrière bardage, de seuil sous la porte du local CTA ou de bavettes sur les portillons dénote un manquement de l'architecte à sa mission DET ; le bureau de contrôle a également commis une faute en validant les plans des édicules et les plans sur lesquels étaient mentionnés les joints de dilatation ; c'est à la société SIB Etudes qu'il appartenait de vérifier si les joints de dilatation avaient été prévus, exécutés et traités ; la société ISO 3B a manqué aux règles du DTU en ne posant pas de pare-pluie derrière son ouvrage, la société RB Economie aurait dû le prévoir dans le CCTP ; les désordres imputables à la société Serrurerie Scheibel engagent sa responsabilité, alors qu'ils relevaient de la garantie décennale ; les infiltrations liées au défaut d'étanchéité du palier sont imputables à cette société.

Par deux mémoires enregistrés les 2 mars 2020 et 11 janvier 2022, la SARL Serrurerie Scheibel, représentée par Me Lounes, de la SELARL Dôme Avocats, conclut :

- au rejet de la requête ainsi que des conclusions dirigées à son encontre et à ce que le versement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de la société Couvrest et de la commune de Lingolsheim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- subsidiairement, à ce que sa condamnation au paiement des frais d'expertise soit limitée, à ce que les sociétés Couvrest, DWPA Architectes, Qualiconsult, Olry Arkedia, RB Economie et ISO 3B soient condamnées in solidum à la garantir de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre et à ce que le versement d'une somme de 5 000 euros soit mis à leur charge in solidum au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la commune ne conteste pas le jugement en tant qu'il rejette les conclusions présentées à son encontre ;

- c'est à juste titre que les premiers juges ont rejeté les conclusions dirigées à son encontre, que ce soit au titre de la garantie décennale, sur un fondement contractuel ou au titre des appels en garantie ; aucun désordre ne lui est imputable, ainsi que l'a retenu l'expert ; c'est le non-respect des directives données à la société Couvrest qui l'a contrainte à envisager la pose de l'escalier avant la pose de l'étanchéité ; les désordres susceptibles de relever de sa propre intervention ne présentent pas de caractère décennal ; il faut, pour qu'un appel en garantie puisse prospérer, que la responsabilité de ce constructeur soit retenue vis-à-vis du maître de l'ouvrage ; aucune faute qui lui est imputable n'est démontrée ; les travaux de reprise pris en compte par la commune et retenus par l'expert ne concernent pas des ouvrages qu'elle a réalisés ; sa responsabilité contractuelle ne peut plus être engagée vis-à-vis de la commune dès lors qu'il y a eu réception sans réserve ;

- le cas échéant, elle ne pourrait être condamnée qu'à indemniser les désordres qui lui sont imputables, soit pour des montants de 660 euros et 1 188 euros TTC ; elle n'aurait à prendre en charge les frais d'expertise qu'à hauteur de sa part de responsabilité, qui serait limitée à 1,12 % ; sa condamnation devrait être limitée aux seuls désordres susceptibles de lui être imputés, soit la non-réalisation du seuil de la porte métallique d'accès au local CTA et l'absence de bavette basse de rejet d'eau au droit des portillons d'accès au local technique R+2, pour un montant, au regard de la répartition de responsabilité retenue par l'expert, de 660 euros et 1 188 euros ;

- elle est fondée à appeler les autres constructeurs à la garantir, au regard de leur responsabilité retenue par le rapport d'expertise.

Par deux mémoires enregistrés les 23 mars 2020 et 3 janvier 2022, la SARL DWPA Architectes, représentée par Me André, du cabinet Monheit-André-Mai, conclut :

- à titre principal, au rejet de la requête ainsi que des conclusions formées à son encontre et à ce que le versement de sommes de 5 000 euros soit mis à la charge de la commune de Lingolsheim ou de tout appelant en garantie ;

- subsidiairement, à ce que les montants sollicités soient limités et à ce que les sociétés Couvrest, ATEC Est, Qualiconsult, Olry Arkedia, ISO 3B, Serrurerie Scheibel, SIB Etudes et RB Economie soient condamnées solidairement ou in solidum à la garantir de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre, en totalité ou selon la répartition proposée dans ses écritures et de mettre à leur charge une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

- la garantie de parfait achèvement ne concerne que les entrepreneurs ;

- elle a émis de nombreuses réserves sur les prestations, attiré l'attention du maître d'ouvrage et a ainsi rempli sa mission de conseil et d'assistance au maître d'ouvrage, s'agissant de l'étanchéité de la couverture ;

- elle a émis de nombreuses réserves sur l'étanchéité des édicules ; la solution d'étanchéité des édicules a été modifiée en raison de l'incapacité de la société Couvrest à réaliser la solution initiale ; elle a alerté le contrôleur technique, dont les réserves sur ce point ont disparu ; l'expert n'a pu démontrer de lien de causalité entre les édicules et les infiltrations ;

- le lien de causalité entre les joints de dilatation et les infiltrations n'est pas démontré ; les joints de dilatation avaient été reportés sur les plans PRO et EXE 1 ; c'est à la société SIB Etudes qu'il appartenait de se prononcer ; il est contradictoire de soutenir que les infiltrations seraient dues à une absence de joints alors que les infiltrations constatées étaient dues à la présence de joints préexistants ;

- aucune infiltration n'a été constatée en raison de la non-conformité du pare-pluie ; la société RB Economie était responsable de la conception du pare-pluie ; ce désordre lui est imputable ; la convention de répartition des honoraires permet de déterminer la part respective de responsabilité de chacun des membres du groupement de maîtrise d'œuvre, et fait obstacle à sa condamnation solidaire ; la réception sans réserve fait obstacle à ce que la commune se retourne contre la maîtrise d'œuvre ;

- la mission OPC était confiée à la société RB Economie, à laquelle est imputable le désordre relatif à l'escalier hélicoïdal ; c'est le non-respect des directives données à la société Couvrest qui l'a contrainte à envisager la pose de l'escalier avant la pose de l'étanchéité ;

- l'absence de reprise des appuis et des seuils de trappe de visite du local technique R+2 résulte d'un oubli de l'entreprise Serrurerie Scheibel qui ne lui est pas imputable ;

- sa responsabilité n'est pas retenue par l'expert pour les autres postes évoqués ;

- le montant de 450 000 euros retenu par l'expert demeure une pure estimation ;

- les travaux d'électricité ne sont pas justifiés ;

- les travaux de reprise ayant déjà eu lieu, les frais de maîtrise d'œuvre ne sont pas justifiés ; sa part de responsabilité doit être limitée pour les honoraires de maîtrise d'œuvre et les travaux de recherche et d'investigation ;

- l'intervention des fonctionnaires de la commune ne constitue pas un préjudice indemnisable ;

- elle est fondée, à titre subsidiaire, à appeler en garantie les entreprises responsables de la survenue des désordres, au regard des fautes commises ;

- elle appelle en garantie les sociétés SIB Etudes et RB Economie, sur un fondement contractuel, au regard de la répartition de leurs missions respectives dans la convention, subsidiairement sur un fondement quasi-délictuel ;

- elle est également fondée à appeler en garantie le bureau de contrôle Qualiconsult et les entreprises chargées de l'exécution des travaux ;

- l'appel incident de la commune ne peut prospérer car elle a formé un appel principal et ne peut demander deux fois l'indemnisation d'un même préjudice ; le montant de 900 000 euros réclamé par le maître d'ouvrage n'est pas justifié.

Par des mémoires enregistrés les 13 juillet 2020, 6 août 2020, 28 janvier 2022 et 31 janvier 2022, Me Jean-Denis Mauhin, en qualité de liquidateur de la SARL ISO 3B, représenté par le cabinet Amadeus avocats, conclut au rejet de la requête et des conclusions dirigées à son encontre et à ce que le versement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de la commune de Lingolsheim.

Il soutient que :

- la commune n'a pas contesté le jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions à son encontre ;

- au titre de la garantie décennale, si l'expert a retenu sa responsabilité pour certains aspects mineurs, la preuve de lien de causalité entre les désordres et un manquement à son devoir de conseil n'est pas rapportée, plusieurs entreprises étant intervenues sous la direction d'un maître d'œuvre compétent qui devait attirer leur attention sur les travaux à compléter ; la part prépondérante de responsabilité s'agissant de l'absence de pare-pluie revient au maître d'œuvre, et la société Olry Arkedia qui a réalisé la structure bois servant de support au bardage a manqué à son devoir de conseil ; ses travaux ne sont pas à l'origine des infiltrations, aucune faute d'exécution dans la réalisation de ses ouvrages n'est retenue par l'expert ;

- la demande de 900 000 euros présentée par la commune est disproportionnée et infondée, elle n'a pas été réactualisée à l'issue du dépôt du rapport définitif par l'expert ; sa condamnation ne saurait excéder le montant de 1 785,34 euros ;

- s'agissant de la responsabilité contractuelle de droit commun, le manquement au devoir de conseil retenu par l'expert n'est pas étayé et sa responsabilité ne pourrait être retenue que dans la part retenue par l'expert.

Par des mémoires enregistrés les 13 juillet 2020 et 28 janvier 2022, la SAS Qualiconsult, représentée par Me Freeman-Hecker, conclut :

- au rejet de la requête ;

- subsidiairement à ce que sa part de responsabilité soit limitée conformément à ce qu'a retenu l'expert et à ce que les sommes sollicitées soient réduites à de plus justes proportions ;

- à ce que les sociétés DWPA Architectes, Couvrest, ATEC Est, Olry Arkedia, ISO 3B, Serrurerie Scheibel soient condamnées à la garantir de toute condamnation prononcée son encontre ;

- à ce que le versement d'une somme de 3 000 euros soit mis à la charge de la commune de Lingolsheim au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les désordres ayant fait l'objet de réserves lors de la réception, sa responsabilité décennale ne peut plus être engagée ;

- le contrôleur technique n'est pas soumis à la garantie de parfait achèvement ;

- sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée ; la matérialité des infiltrations au droit des joints de dilatation du local technique et des édicules n'est pas établie ; elle n'a pas commis de faute, elle a effectué sa mission de contrôle et a émis un avis suspendu sur l'étanchéité des édicules, qu'elle n'avait pas à réitérer ; la commune n'établit pas le lien de causalité avec le dommage ;

- les autres intervenants sont responsables des désordres ;

- subsidiairement, il y a lieu, le cas échéant, de limiter sa responsabilité aux montants retenus par l'expert ;

- le montant des travaux retenus par l'expert est excessif ; la reconstruction des édicules en zinc pré-patiné n'est pas justifiée, elle représente une amélioration et un enrichissement ; les travaux d'électricité sont surévalués ; la réfection totale de l'étanchéité et de l'isolation ne se justifie pas, en raison du caractère ponctuel des infiltrations ;

- elle est fondée à appeler en garantie la société DWPA Architectes, la société Couvrest et la société ATEC Est, la société Olry Arkedia, la société ISO 3B et la société SARL Scheibel, dès lors que le rapport d'expertise a retenu leur responsabilité pour divers manquements.

Par un mémoire enregistré le 31 janvier 2022, la société SIB Etudes et la société RB Economie, représentées par Me Le Discorde, concluent :

- au rejet de l'appel principal de la commune de Lingolsheim et de l'appel incident de la société Couvrest et à ce que des sommes de 4 000 euros soient mises à leur charge au titre des frais d'instance ;

- subsidiairement, en cas d'infirmation du jugement, au rejet des conclusions d'appel en garantie dirigées à leur encontre et à ce que le versement d'une somme de 4 000 euros soit mis à la charge in solidum des sociétés Couvrest, DWPA Architectes et Serrurerie Scheibel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- très subsidiairement, à ce que l'obligation de garantie soit limitée à 5 % des travaux de reprise du désordre n° 5 pour la société SIB Etudes et à 10 % des travaux de reprise pour le désordre n° 6 pour la société RB Economie et à ce que la charge des frais d'expertise soit répartie au prorata du quantum des condamnations prononcées.

Elles soutiennent que :

- la commune ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que les désordres réservés à la réception résulteraient d'une faute imputable à la maîtrise d'œuvre ;

- il ne saurait y avoir lieu à condamnation in solidum s'agissant de désordres différents ;

- eu égard à la nature solidaire du groupement de maîtrise d'œuvre, la société DWPA Architectes n'est pas fondée à l'appeler en garantie ; le tableau de répartition des honoraires ne permet pas de connaître les missions respectives des membres du groupement ;

- la société DWPA Architectes ne démontre pas les manquements qu'elles auraient commis ;

- la seule faute reprochée à la société RB Economie, à savoir l'absence de pare-pluie, n'est pas à l'origine des désordres imputés à la société Serrurerie Scheibel, dont l'appel en garantie doit être rejeté ;

- subsidiairement, au regard des parts de responsabilité retenues par l'expert, l'obligation de réparation ne saurait excéder 5 % des 2 500 euros HT liés à la mise en conformité du joint de dilatation de la façade du local technique R+2 ;

- les conclusions d'appel en garantie de la société Couvrest à l'encontre de la société RB Economie sont irrecevables car présentées pour la première fois en appel ;

- la société Couvrest n'a pas contesté, dans sa requête, le jugement en tant qu'il rejette les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société SIB Etudes, dans le délai d'appel, mais seulement dans son mémoire du 28 mai 2020, de sorte que les conclusions à l'encontre de cette société sont également irrecevables ;

- ses conclusions d'appel en garantie sont, en tout état de cause, mal fondées ; elles ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

- les conclusions d'appel en garantie de la société Serrurerie Scheibel à l'encontre de la société RB Economie ne sauraient prospérer car l'unique faute susceptible d'être imputée à cette dernière n'est pas à l'origine des désordres imputés à la société Serrurerie Scheibel ;

- une éventuelle condamnation ne saurait excéder 150 euros TTC pour la société SIB Etudes et 165 euros TTC pour la société RB Economie.

Par un mémoire enregistré le 21 février 2022, la société Olry Ernest et Cie, représentée par Me Hager, conclut au rejet des conclusions dirigées à son encontre, à ce que la commune de Lingolsheim et tous les appelants en garantie soient condamnés aux dépens et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à leur charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que selon l'expert, aucun désordre ne lui est imputable, le joint de dilatation qui avait été mentionné comme manquant dans le pré-rapport ayant été constaté sur site, et l'absence de joint de dilatation étant sans incidence sur les désordres.

Dans les deux instances, la procédure a été communiquée à la société ATEC Est, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Dans ces deux instances, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par des courriers du 11 décembre 2023, que la cour était susceptible de relever d'office que la responsabilité contractuelle des constructeurs ne peut plus être recherchée par le maître d'ouvrage sur un fondement contractuel pour les désordres concernant la réalisation de l'ouvrage qui n'ont pas fait l'objet d'une réserve lors des opérations de réception.

La société Serrurerie Scheibel a présenté ses observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office par un mémoire enregistré le 11 décembre 2022, qui a été communiqué.

La société Couvrest a présenté ses observations sur le moyen susceptible d'être relevé d'office par un mémoire enregistré le 13 décembre 2023, qui a été communiqué.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code civil ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 modifié portant approbation du cahier des clauses administratives générales relatif aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Samson-Dye,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Dhonte, pour la société Couvrest, de Me Hassan, pour la commune de Lingolsheim, de Me André, pour la société DWPA Architectes, de Me Alizon, substituant Me Freeman-Hecker, pour la société Qualiconsult et pour Me Mauhin, liquidateur de la société ISO 3B, et de Me Philippeau, pour la société Serrurerie Scheibel.

Considérant ce qui suit :

1. En 2012, la commune de Lingolsheim a passé un marché public de rénovation et d'extension du groupe scolaire des hirondelles, devenu groupe scolaire Elias Canetti. La maîtrise d'œuvre a été attribuée à un groupement solidaire composé des sociétés DWPA Architectes, architecte mandataire, SIB Etudes, Cerec Ingénierie et René Breitfelder (RB Economie). La société Qualiconsult a été chargée d'une mission de contrôle technique. Le lot n° 6 " Etanchéité /végétalisation " a été attribué à la société Couvrest, qui en a sous-traité l'exécution à la société ATEC Est. Le lot n° 8 " Bardage " a été attribué à la société ISO 3B, le lot n° 5 " Ossature bois " à la société Olry Ernest et Cie et le lot n° 14 " Métallerie " à la société Serrurerie Scheibel. A la suite de la survenance de plusieurs infiltrations, la commune de Lingolsheim a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg aux fins d'obtenir la désignation d'un expert. La commune de Lingolsheim a recherché la responsabilité des sociétés Couvrest, ATEC Est et DWPA Architectes, au titre de la garantie de parfait achèvement, ou subsidiairement sur le fondement de la garantie contractuelle, pour obtenir la réparation de désordres. Elle a également demandé la condamnation de la société Qualiconsult, au titre de la responsabilité contractuelle, et celle des sociétés ISO 3B, Serrurerie Scheibel et Olry Ernest et Cie, sur le fondement de la garantie décennale ou, subsidiairement, de la responsabilité contractuelle.

2. Par un jugement du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a retenu que seule la responsabilité de la société Couvrest était engagée, sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, et l'a condamnée à verser à la commune de Lingolsheim une somme de 318 413,14 euros TTC, ainsi qu'une somme de 14 376 euros au titre des frais d'expertise. Le tribunal a rejeté les conclusions d'appel en garantie de la société Couvrest contre son sous-traitant comme présentées devant un ordre juridictionnel incompétent pour en connaître et celles dirigées contre les autres constructeurs comme étant non fondées.

3. Par deux requêtes distinctes, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un unique arrêt, la société Couvrest et la commune de Lingolsheim relèvent partiellement appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement dans son ensemble :

4. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

5. Il ressort des pièces figurant au dossier de première instance que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et la greffière d'audience, de sorte que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent manque en fait. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à la commune ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

Sur la responsabilité des constructeurs à l'égard de la commune :

En ce qui concerne la responsabilité de la société Couvrest :

6. Aux termes de l'article 44 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, dans sa version s'appliquant au marché en litige, issue de l'arrêté du 8 septembre 2009, auquel renvoie l'article 8.7 du cahier des clauses administratives particulières du marché de travaux liant la commune de Lingolsheim à la société Couvrest : " Le délai de garantie est, sauf prolongation décidée comme il est précisé à l'article 44. 2, d'un an à compter de la date d'effet de la réception. Pendant le délai de garantie, outre les obligations qui peuvent résulter pour lui de l'application de l'article 41. 4, le titulaire est tenu à une obligation dite obligation de parfait achèvement, au titre de laquelle il doit : a) Exécuter les travaux ou prestations éventuels de finition ou de reprise prévus aux articles 41. 5 et 41. 6 ; b) Remédier à tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage ou le maître d'œuvre, de telle sorte que l'ouvrage soit conforme à l'état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci ; (...) ". La garantie de parfait achèvement s'étend ainsi à la reprise d'une part des désordres ayant fait l'objet de réserves dans le procès-verbal de réception, d'autre part de ceux qui apparaissent et sont signalés dans l'année suivant la date de réception.

7. Il résulte de l'instruction que la décision de réception avec réserves du lot n° 6 par le maître d'ouvrage, en date du 29 juin 2015 et retenant une date d'achèvement au 25 mars 2015, doit être regardée comme étant assortie des réserves mentionnées dans la proposition de réception des travaux par la maîtrise d'œuvre, à laquelle elle se réfère tout en mentionnant que le titulaire doit remédier aux imperfections et malfaçons. Ces réserves étaient, selon les allégations de la commune qui ne sont pas sérieusement contredites, jointes à la décision de réception.

8. Au nombre de ces réserves, figuraient notamment celles relatives à la réalisation de l'étanchéité sous le pallier de l'escalier de secours, ainsi que sur l'extra-scolaire et le bureau du bâtiment de l'école maternelle. Il n'est pas établi que ces réserves auraient été levées. Si sont également mentionnées la réalisation d'un auto-contrôle pour l'ensemble des dispositifs d'étanchéité à l'eau et la mise en charge de la toiture pour rechercher des fuites, de telles réserves de contrôle ne sauraient être regardées comme des réserves portant sur l'étanchéité des bâtiments dans leur globalité. La décision de réception ne comprenait ainsi aucune réserve générale sur l'étanchéité ni plus spécifiquement sur l'étanchéité des édicules.

9. En revanche, des infiltrations ont été signalées par des courriels adressés par la société DWPA Architectes à la société Couvrest les 4 et 6 janvier 2016. Le maître d'œuvre a ainsi relevé des infiltrations dans la toiture de l'école maternelle et des entrées d'eau au droit des édicules et des façades, puis demandé que l'ensemble de la toiture du bâtiment soit repris. La commune, maître d'ouvrage, a également indiqué à la société Couvrest, par lettre du 23 novembre 2015, que la toiture du bâtiment élémentaire était affectée de désordres concernant en particulier l'édicule technique à refaire entièrement (couvertine et étanchéité) ainsi que l'isolation des acrotères des terrassons à poser. Dès lors, les infiltrations affectant de manière générale les deux bâtiments ayant été signalées par le maître de l'ouvrage et le maître d'œuvre pendant le délai d'un an suivant la réception, la société Couvrest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu, sur le fondement des stipulations rappelées au point 6 du présent arrêt, que sa responsabilité pouvait être engagée au titre de la garantie de parfait achèvement.

En ce qui concerne la responsabilité de la société Qualiconsult et de la société DWPA Architectes, mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre :

10. La réception d'un ouvrage met fin aux relations contractuelles entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. A l'exception des désordres réservés lors de la réception et pour lesquels la réserve n'a pas été levée, la responsabilité des constructeurs ne peut plus être recherchée sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour des désordres qui affecteraient l'ouvrage.

S'agissant de la responsabilité contractuelle de la société Qualiconsult :

11. Ainsi qu'il a été dit au point 8, la réception des travaux du lot n° 6 n'a pas été assortie d'une réserve générale sur l'étanchéité des toitures, ou d'une réserve sur l'étanchéité des édicules, de sorte que la responsabilité du contrôleur technique ne saurait, au regard de ce qui a été dit au point 10 du présent arrêt, être recherchée à ce titre.

12. Au surplus, s'agissant en particulier de l'absence de joints de dilatation, à supposer qu'elle puisse se rattacher à des travaux relevant d'un autre lot qui n'aurait pas fait l'objet d'une réception sans réserves, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle aurait occasionné tout ou partie des désordres dont la commune sollicite la réparation, l'expert désigné par le juge des référés du tribunal relevant en particulier, dans sa réponse à un dire présenté pour la société titulaire du lot n° 5, que l'absence de joint de dilatation en toiture n'a été constitutive d'aucun dommage.

13. Il suit de là que la commune de Lingolsheim n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté ses conclusions dirigées contre le contrôleur technique sur le fondement de la responsabilité contractuelle.

S'agissant de la responsabilité de la société DWPA Architectes, mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre :

Quant aux fautes alléguées en termes de conception et de réalisation des travaux :

14. En premier lieu, en l'absence de réserve portant sur la réalisation de l'étanchéité des édicules et sur la reprise des appuis et des seuils de trappe, la réception des travaux du lot n° 6, compte tenu de ce qui est indiqué au point 10, fait obstacle à ce que la responsabilité contractuelle du maître d'œuvre soit recherchée. Pour les mêmes motifs, la commune ne peut rechercher la responsabilité du maître d'œuvre en raison de l'absence de pare-pluie sous la vêture bois de l'issue de secours dont il n'est pas contesté qu'elle se rattache aux travaux du lot n° 8, pour lequel la réception a été prononcée le 18 novembre 2015, avec levée des réserves par le maître de l'ouvrage le 2 mars 2016.

15. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point 12, il ne résulte en tout état de cause pas de l'instruction que l'absence alléguée de joints de dilatation en toiture R+2 aurait été à l'origine du préjudice dont la commune demande l'indemnisation.

16. En troisième lieu, la commune reproche au maître d'œuvre, en charge des missions EXE (études d'exécution) et OPC (ordonnancement, coordination et pilotage), d'avoir laissé la société Couvrest intervenir sur l'escalier hélicoïdal, qui a fait l'objet d'une réserve, dont la réalisation relevait d'un autre lot, confié à la société Serrurerie Scheibel, et d'avoir ainsi commis une faute dans la surveillance du déroulement du chantier et la coordination des travaux. Cependant, ainsi que l'ont retenu à juste titre les premiers juges, il ne résulte pas de l'instruction, nonobstant l'opinion de l'expert sur ce point, que le percement de l'étanchéité au droit de l'escalier de secours, qui a occasionné une partie des infiltrations litigieuses, aurait résulté de l'ordre d'intervention entre les deux intervenants. Il est imputable à la seule intervention de la société Couvrest.

17. En dernier lieu, le manquement tiré de ce que la maîtrise d'œuvre ne se serait pas assurée de la bonne application de ses directives n'est pas rattaché à un désordre précis, il n'est donc pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

Quant aux manquements allégués à l'obligation de conseil au maître d'ouvrage lors des opérations de réception :

18. En premier lieu, la commune ne saurait reprocher à la maîtrise d'œuvre d'avoir manqué à son devoir de conseil lors des opérations de réception en ce qui concerne la réalisation de l'escalier hélicoïdal, dès lors que cet aspect, concernant l'escalier de secours, a bien été réservé, ainsi qu'il a été dit au point 8.

19. En deuxième lieu, il est reproché à la société SIB Etudes, membre du groupement solidaire de maîtrise d'œuvre dont la société DWPA Architectes est mandataire, de ne pas avoir émis d'observation sur l'absence de réalisation de joints de dilatation. Toutefois, compte tenu de ce qui est précisé au point 12, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de joints de dilatation aurait été à l'origine des préjudices dont la commune demande réparation.

20. Enfin, la commune de Lingolsheim soutient que la société RB Economie, membre du groupement de maîtrise d'œuvre, a manqué à son devoir de conseil en ne recommandant pas l'édiction d'une réserve s'agissant de l'absence de pare-pluie. Cependant, il ne résulte pas des pièces soumises à l'instruction que cette société aurait été chargée d'assister le maître d'ouvrage lors des opérations de réception, alors en particulier que la répartition des paiements entre les membres du groupement ne prévoit aucun paiement à son profit pour cette mission, ni qu'elle y aurait effectivement participé. Dès lors, la commune n'est pas fondée à soutenir que cette société a commis une faute.

Quant aux manquements allégués dans l'assistance au maître d'ouvrage pendant le délai de garantie parfait achèvement :

21. La commune soutient que la société DWPA Architectes ne démontre pas avoir relancé les entreprises durant la période de garantie de parfait achèvement. Toutefois, la commune n'identifie pas les manquements qui auraient dû être signalés et ne met ainsi pas la cour à même de se prononcer sur le caractère approprié de leur suivi par le maître d'œuvre, alors en particulier que ce dernier justifie avoir effectué de multiples signalements auprès des constructeurs au cours de cette période.

22. Il résulte de ce qui précède que la commune de Lingolsheim n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de la société DWPA Architectes.

Sur le préjudice indemnisable :

23. Les premiers juges ont indemnisé la commune de Lingolsheim en condamnant la société Couvrest à lui verser une somme de 318 413,14 euros TTC, correspondant au montant des travaux de reprise, estimés nécessaires par l'expert, et dont elle a justifié le montant par la production de factures ou d'autres justificatifs, pour un montant total de 323 823,14 euros TTC, et dont ils ont déduit 1 440 euros pour la pose de panneaux par la société ISO 3B, 1 650 euros (pare-pluie), 1 000 euros (travaux de reprise de la zone issue de secours) et 1 320 euros (appuis et trappes de visite) au titre du coût TTC des travaux nécessaires à la reprise des désordres qui n'étaient pas imputables à la société Couvrest.

24. En premier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la reprise de l'étanchéité avec du zinc pré-patiné représenterait une amélioration de l'ouvrage devant justifier un abattement, dès lors qu'ainsi que l'a estimé l'expert, le recours à ce matériau était indispensable pour assurer une résorption efficace et pérenne des désordres et qu'il n'est pas établi qu'il aurait apporté une plus-value à l'ouvrage. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que l'indemnité retenue engloberait des coûts qui se rattacheraient à la résiliation du contrat de la société Couvrest, et non à la réparation des désordres pouvant être mis à sa charge au titre de la garantie de parfait achèvement.

25. En deuxième lieu, si la société Couvrest soutient que l'expert n'a pas justifié ses estimations, les sommes accordées par le tribunal l'ont été, pour l'essentiel, sur la base de factures, et la société Couvrest ne développe pas de critique précise et argumentée pour contester le montant retenu pour les différents postes ayant donné lieu à indemnisation. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que les sommes accordées par le tribunal porteraient sur la réparation de désordres qui ne sont pas imputables à la société Couvrest au titre de la garantie de parfait achèvement, alors notamment que les premiers juges ont exclu certains travaux au motif qu'ils étaient imputables à d'autres intervenants.

26. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que les désordres imputables à la société Couvrest ont occasionné des infiltrations ayant nécessité des travaux de remise en état à l'intérieur du bâtiment dont des reprises de câblage et luminaires. Dès lors, c'est à juste titre que les premiers juges ont mis à la charge de la société Couvrest le coût de ces travaux, alors même qu'elle n'était pas en charge du lot relatif à l'électricité.

27. En quatrième lieu, au regard de la nature des travaux nécessaires pour remédier aux désordres, qui ont impliqué notamment une reprise complète de l'étanchéité de l'un des bâtiments, l'assistance d'un maître d'œuvre pour réaliser ces travaux présente le caractère d'un préjudice direct et certain pour la commune, qui justifie du coût représenté par cette prestation, de sorte que la société Couvrest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que ces frais ont été mis à sa charge.

28. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que les infiltrations ont justifié un surcroît d'activité pour les personnels municipaux occasionnant un préjudice du fait des perturbations qui y sont inhérentes qui a été évalué aux sommes de 997,52 et 298,45 euros. Au regard de l'ampleur des infiltrations, la réalité de ce chef de préjudice est suffisamment établie.

29. En dernier lieu, les conclusions présentées par la commune, au titre de l'appel incident dans l'instance n° 19NC03663, et tendant à ce que l'indemnité qu'elle sollicite soit portée à la somme de 900 000 euros, ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, le maître d'ouvrage n'apportant aucun élément circonstancié pour justifier que les désordres imputables à la société Couvrest auraient généré un préjudice supplémentaire à celui retenu par les premiers juges.

30. Il suit de là que ni la société Couvrest ni la commune de Lingolsheim, par la voie de l'appel incident, ne sont fondées à contester le montant du préjudice fixé par les premiers juges à la somme de 318 413,14 euros TTC.

Sur les intérêts et la capitalisation :

31. Le tribunal a omis de se prononcer sur les conclusions de la commune de Lingolsheim tendant à ce que l'indemnité qu'elle sollicite soit assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation. Cette dernière est donc fondée à soutenir que le jugement est irrégulier dans cette mesure, et à en demander l'annulation partielle, en tant qu'il n'a pas statué sur ces conclusions. Il y a donc lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur ces conclusions.

32. D'une part, les intérêts moratoires dus en application des dispositions de l'article 1231-6 du code civil, lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. La commune a donc droit aux intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2017, date à laquelle son recours indemnitaire a été enregistré devant le tribunal.

33. D'autre part, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 25 juillet 2017, dans la demande de la commune devant le tribunal administratif de Strasbourg. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 25 juillet 2018, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les conclusions d'appel en garantie de la société Couvrest :

34. D'une part, les conclusions de la société Couvrest dirigées contre la société RB Economie ont été présentées pour la première fois en appel. Elles doivent, dès lors, être rejetées comme irrecevables.

35. D'autre part, il est vrai, ainsi que le fait valoir la société Couvrest, que la seule circonstance que la responsabilité des autres constructeurs, contre lesquels étaient dirigées ses conclusions d'appel en garantie, n'avaient pas vu leur responsabilité engagée à l'égard du maître d'ouvrage ne pouvait justifier, par elle-même, le rejet de ses propres conclusions d'appel en garantie. C'est par suite à tort que les premiers juges les ont rejetées pour ce motif. Il appartient à la cour, saisie dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, de déterminer si ces intervenants ont commis des fautes susceptibles de justifier qu'ils soient condamnés à garantir la société Couvrest en tout ou partie des condamnations prononcées à son encontre.

36. En premier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que les sociétés ISO 3B et Serrurerie Scheibel auraient commis une faute qui aurait justifié des travaux de reprise mis à la charge de la société Couvrest. S'agissant spécifiquement de la société Serrurerie Scheibel, comme il a été dit au point 16, il n'est pas démontré en quoi le percement de l'étanchéité au droit de l'escalier hélicoïdal résulterait d'un manquement de cette dernière à ses obligations, alors que le percement a été réalisé à l'occasion de travaux relevant de la société Couvrest.

37. En deuxième lieu, le fait que la société SIB Etudes n'ait pas mentionné l'absence d'un joint de dilatation ne saurait justifier qu'elle soit appelée à garantir la société Couvrest, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit au point 12, l'absence de joint n'a occasionné aucun préjudice indemnisé dans la présente instance. S'il lui est par ailleurs reproché de ne pas s'être assurée de la réalisation et du traitement de certains joints de dilatation, il n'est pas démontré que cette société aurait manqué aux obligations qui lui incombaient, ni en quoi un éventuel manquement sur ce point aurait contribué à générer les dommages que la société Couvrest a été condamnée à réparer.

38. En troisième lieu, la société Couvrest ne peut utilement soutenir que la société Qualiconsult a commis une faute en s'abstenant, lors de la validation de plans, de signaler l'absence d'un joint de dilatation, dès lors que cette absence n'a pas généré de préjudice qu'elle aurait été condamnée à indemniser. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction, en dépit de ce qu'a estimé l'expert sur ce point, que c'est la conception même des édicules présents en toiture qui aurait rendu ces éléments impossibles à étanchéifier efficacement, alors que les documents soumis à l'instruction mettent en évidence que les infiltrations occasionnées par ces dispositifs résultent d'une exécution défectueuse. Il n'est donc pas établi que le contrôleur technique aurait commis, en validant la conception des édicules, un manquement qui aurait été à l'origine des dommages que la société Couvrest a été condamnée à réparer.

39. En quatrième lieu, comme il a été dit au point 16, il ne résulte pas de l'instruction que la société DWPA Architectes aurait été à l'origine des manquements en laissant l'entreprise Serrurerie Scheibel poser l'escalier avant que l'étanchéité du palier soit assurée et sans faire réintervenir cette entreprise pour déposer son ouvrage. De même, un éventuel manquement au titre du défaut de signalement de l'absence de joints de dilatation ne peut être utilement invoqué, dès lors que cette absence n'a généré aucun préjudice dont la commune aurait demandé réparation, ainsi qu'il a été indiqué précédemment. Si la société Couvrest soutient par ailleurs que la société DPWA Architectes a commis une faute dans ses missions EXE et DET (direction de l'exécution des contrats de travaux) quant au traitement des joints de dilatation existants, elle n'établit pas le manquement de l'architecte et le lien de causalité avec les désordres d'infiltrations qu'elle a été condamnée à indemniser. De plus, ainsi qu'il a été dit au point précédent s'agissant de la conception des édicules, il n'est pas démontré en quoi l'intervention de l'architecte sur ce point aurait été à l'origine des désordres constatés. Enfin, si la société Couvrest soutient que l'absence de pare-pluie derrière bardage, de seuil sous la porte du local CTA ou de bavettes sur les portillons dénote un manquement de l'architecte à la mission DET, la réparation des malfaçons alléguées, comme il a été précisé au point 23 n'a pas été mise à sa charge, de sorte qu'elle ne saurait appeler la société DWPA Architectes à la garantir d'une condamnation inexistante.

40. Il résulte de ce qui précède que la société Couvrest n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont rejeté ses conclusions d'appel en garantie dirigés contre ces constructeurs comme non fondées.

Sur les dépens :

41. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties".

42. La société Couvrest étant la partie perdante, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les frais de l'expertise ordonnée par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg n° 1601888, liquidés et taxés à la somme de 14 376 euros TTC par ordonnance du 24 octobre 2017, ont été mis par les premiers juges définitivement à sa charge.

43. Pour sa part, la commune de Lingolsheim n'est pas fondée à demander que les frais du référé-constat réalisé à la suite de l'ordonnance n° 1804608 du 1er août 2018 de ce même juge des référés, liquidés et taxés à un montant de 1 976,66 euros par ordonnance du 4 septembre 2018, soient mis à la charge de l'une des parties, cette mesure d'instruction n'ayant présenté aucune utilité dans la présente instance.

44. Il résulte de tout ce qui précède d'une part, que la commune de Lingolsheim est uniquement fondée à demander l'annulation du jugement contesté en tant qu'il n'a pas statué sur les intérêts et à obtenir que l'indemnité à laquelle a été condamnée la société Couvrest soit assortie des intérêts ainsi que leur capitalisation dans les conditions fixées aux point 31 à 33 du présent arrêt. Le surplus des conclusions de sa requête et les conclusions d'appel incident et provoqué de la société Couvrest sont rejetés. D'autre part, la requête de la société Couvrest ainsi, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, que les conclusions d'appel incident de la commune de Lingolsheim dans cette instance sont rejetées. Le présent arrêt n'ayant pas pour effet d'aggraver la situation de la commune, ses conclusions d'appel provoqué tendant à la condamnation des sociétés ISO 3B, Serrurerie Scheibel et Olry Ernest et Cie sont irrecevables.

Sur les frais de l'instance :

45. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1703742 du tribunal administratif de Strasbourg du 24 octobre 2019 est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions de la commune de Lingolsheim relatives aux intérêts et à leur capitalisation.

Article 2 : La somme de 318 413,14 euros TTC, que la société Couvrest est condamnée à verser à la commune de Lingolsheim, est assortie des intérêts au taux légal à compter du 25 juillet 2017. Les intérêts échus à la date du 25 juillet 2018 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lingolsheim, aux sociétés Couvrest, DWPA Architectes, SIB Etudes, RB Economie, Qualiconsult, ATEC Est, Serrurerie Scheibel, Olry Ernest et Cie et à Me Mauhin, liquidateur judiciaire de la société ISO 3B. Copie en sera adressée à M. B..., expert.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Samson-Dye, présidente-assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 janvier 2024.

La rapporteure,

Signé : A. Samson-Dye

La présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. C...

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. C...

2

Nos 19NC03663, 19NC03715


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03663
Date de la décision : 23/01/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SCP GOTTLICH-LAFFON

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-23;19nc03663 ?
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