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14/11/2023 | FRANCE | N°21NC00530

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 14 novembre 2023, 21NC00530


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la fiche de poste du 9 juillet 2019 valant affectation pour l'année scolaire 2019/2020 et d'enjoindre à l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA) du Bas-Rhin de l'affecter sur un poste correspondant à ses compétences professionnelles.

Par un jugement n° 1905535 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

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Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 23 février 2021, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la fiche de poste du 9 juillet 2019 valant affectation pour l'année scolaire 2019/2020 et d'enjoindre à l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA) du Bas-Rhin de l'affecter sur un poste correspondant à ses compétences professionnelles.

Par un jugement n° 1905535 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 23 février 2021, le 13 février 2023, le 21 avril 2023 et le 21 mai 2023, M. A..., représenté par Me Rosenstiehl, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 janvier 2021 ;

2°) d'annuler la fiche de poste du 9 juillet 2019 valant affectation pour l'année scolaire 2019/2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole du Bas-Rhin une somme de 3 000 euros en application de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du tribunal est irrégulier à défaut de production de la minute de la décision dûment signée par le président de chambre, le rapporteur et le greffier d'audience ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré l'acte attaqué comme une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours ;

- elle porte atteinte à ses droits et prérogatives dans la mesure où elle prévoit que l'intéressé devra réaliser des heures au centre de formation des apprentis (CFA) alors qu'il a été embauché par contrat en 2005 au centre de formation professionnelle et de promotion agricole (CFPPA) ; ces deux centres sont bien des entités distinctes dans leur mission, leur fonctionnement et leur financement au sens de l'article 4 du décret n°2014-940 du 20 août 2014, de sorte que son accord était nécessaire pour intervenir dans un autre centre et l'EPLEFPA aurait dû justifier de l'absence d'heures d'enseignements disponibles au CFPPA ; les différences de conditions de travail entre le CFA et le CFPPA sont significatives en termes de volume annuel de travail, d'horaires de travail et de pose de congés pendant les vacances scolaires ; par ailleurs, le fait de devoir partager son service entre plusieurs établissements engendre des difficultés organisationnelles, ce qui implique d'autant plus son accord ;

- elle porte atteinte à ses responsabilités et à sa rémunération ; il a perdu des attributions et des perspectives de carrière compte tenu de la perte de son poste de chargé de mission développement et de la perte de la coordination de deux diplômes, le brevet professionnel Aménagements paysagers et le brevet professionnel agricole ; l'inclusion dans la fiche de poste de missions dans les deux centres, qui ne disposent pas des mêmes quotités de travail, a pour conséquence de créer une différence de rémunération des heures réalisées ;

- la mesure contestée traduit une sanction à son encontre, du fait de ses relations détériorées avec la direction, et a pour objet de l'écarter de ses responsabilités et de ses fonctions en lien avec ses compétences professionnelles.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 juin 2021, le 12 avril 2023, le 4 mai 2023 et le 9 juin 2023, l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole du Bas-Rhin, représenté par Me Zimmer, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- seule la minute du jugement doit être signée à l'exclusion de l'ampliation transmise aux parties ;

- M. A... a été recruté en qualité de formateur, fonctions auxquelles correspond parfaitement la fiche de poste contestée ; la seule circonstance qu'il intervienne à la fois devant des étudiants de CFA et de CFPPA est sans incidence et ne caractérise pas une modification de sa situation administrative ; il s'agit de deux composantes de la même entité juridique, l'EPLEFPA du Bas-Rhin, de sorte qu'ils ne peuvent être considérés comme des établissements distincts, pour lesquels l'activité de formateur est la même ; son obligation de temps de service n'a pas été modifiée, non plus que le nombre de semaines durant lesquelles il peut être amené à intervenir en face à face pédagogique, soit 40 semaines ; enfin, les périodes de congés payés sont communes entre les deux centres et la seule circonstance que le fonctionnement du service influe sur la prise des jours de congés payés par M. A..., notamment en tenant compte des périodes de congés scolaires, est sans emport sur la situation administrative de l'intéressé ;

- la fiche de poste n'emporte pas diminution de ses responsabilités ; la fonction de chargé de mission développement a été exercée uniquement de 2013 à 2018 ; l'intéressé n'a pas contesté sa nouvelle affectation de formateur pour l'année 2018/2019 qui est devenue définitive, et la fiche de poste pour l'année scolaire 2019/2020 n'a pas modifié les attributions sur cette mission ; le retrait de la mission " coordination du dispositif du brevet professionnel agricole (BPA) " n'entraîne pas de diminution des responsabilités et n'a pas d'incidence en termes de rémunération ; pour l'année 2019/2020, M. A... a été positionné sur d'autres missions pédagogiques hors face à face en lien avec l'animation et le suivi du dispositif Agrimov (public adulte en insertion) et en lien avec le suivi et l'animation de la FOAD (formation ouverte à distance) ;

- l'accomplissement d'heures de formation devant un public d'apprentis de CFA et d'adultes en formation continue rattachés au CFPPA implique exactement la même rémunération ; son contrat de travail n'a nullement été modifié sur ce point ; la critique de l'intéressé porte en réalité sur l'absence de versement de la prime affectée à la fonction de chargé de mission développement, qu'il n'exerce plus depuis l'année scolaire 2018/2019 ;

- la fiche de poste contestée ne saurait davantage s'analyser comme une sanction dès lors que les tâches qui lui sont confiées relèvent strictement et exclusivement de l'intérêt du service.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bauer,

- les conclusions de M. Marchal, rapporteur public,

- et les observations de Me Poinsignon pour M. A... et de Me Koromyslov pour l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricoles.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté par l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricoles ((EPLEFPA) du Bas-Rhin en qualité de formateur à plein temps, par un contrat à durée déterminée de droit public du 1er avril 2005 pour la période du 1er mars 2005 au 31 août 2005, régulièrement renouvelé depuis lors par avenant et transformé en contrat à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2009. Par un avenant du 1er septembre 2013, l'intéressé s'est vu confier, à titre temporaire, de nouvelles fonctions de chargé de mission pour le développement pour l'année 2013/2014, assorties d'une prime spécifique, qui ont été reconduites jusqu'à l'année scolaire 2017/2018. M. A... a ensuite refusé une proposition d'avenant par lequel, à compter de la rentrée 2018, il reprendrait son activité de formateur et, d'autre part, assurerait les fonctions spécifiques de responsable des plateformes techniques de Paysage - Horticulture - Maraîchage, et a, de ce fait, été réintégré dans ses seules missions de formateur à plein temps définies dans son contrat initial du 1er avril 2005, entraînant la perte de sa prime spécifique d'environ 900 euros par mois. Par un courrier du 21 mai 2019, l'intéressé a demandé à l'EPLEFPA de le réintégrer sur un poste correspondant à ses compétences professionnelles à la rentrée 2019/2020. Par un courrier du 9 juillet 2019, l'EPLEFPA a communiqué à l'intéressé sa fiche de poste valant affectation pour la rentrée 2019/2020, soit un poste de formateur à temps plein comme en 2018/2019. Par un jugement du 22 janvier 2021, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté comme irrecevables ses conclusions à fin d'annulation de cette fiche de poste.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ". Il résulte de ces dispositions que seule la minute du jugement est signée, à l'exclusion de l'ampliation délivrée aux parties. En l'espèce, la minute signée est conservée au dossier du tribunal et a été transmise à la cour. Par suite, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir d'une irrégularité du jugement attaqué sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou de leur contrat ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, ni n'emportent de perte de responsabilités ou de rémunération. Le recours contre de telles mesures, à moins qu'elles ne traduisent une discrimination ou une sanction, est irrecevable.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été engagé en qualité de formateur à temps complet auprès de l'EPLEFPA. Ainsi qu'il a été dit par un arrêt de la cour n° 20NC02758 de ce jour, il ne bénéficiait d'aucun droit à reconduction dans ses fonctions de chargé de mission pour le développement, ni d'aucun droit au maintien de la prime afférente. L'EPLEFPA a ainsi pu à bon droit le replacer dès la rentrée scolaire 2018/2019 dans ses seules fonctions de formateur à temps plein telles qu'elles résultaient de son contrat de travail initial du 1er avril 2005, affectation que l'intéressé n'a au demeurant pas contestée. Il est constant que la fiche de poste en litige valant affectation pour la rentrée scolaire 2019/2020 le maintient dans ces mêmes fonctions de formateur à temps plein au centre de formation professionnelle et de promotion agricole (CFPPA) et au centre de formation des apprentis (CFA).

5. Si l'article 3 de son contrat de travail initial précise qu'il exercera son activité sous l'autorité du directeur du CFPPA pour assurer les tâches liées à des formations d'insertion, il est constant que le CFPPA et le CFA sont tous deux des composantes de l'EPLEFPA dont ils ne constituent pas des entités juridiques distinctes. Dès lors, la seule circonstance que la fiche de poste litigieuse prévoit désormais que l'intéressé exercera ses fonctions de formateur dans les deux centres ne porte pas atteinte aux droits et prérogatives qu'il tient de son contrat, alors qu'il ne produit aucun élément démontrant que ce changement d'affectation entraînerait des modifications préjudiciables de ses conditions de travail, ni une diminution de ses responsabilités, de sa rémunération ou de ses perspectives de carrière. Par ailleurs, si M. A... soutient qu'il a perdu la mission de coordination du diplôme du brevet professionnel agricole, il est constant que cette suppression a été compensée par l'attribution d'autres missions pédagogiques consistant dans l'animation et le suivi du dispositif Agrimov et dans le suivi et l'animation de formations à distance, dont il n'est pas davantage établi qu'elles ne seraient pas comparables aux précédentes en termes d'attributions et de responsabilités.

6. Enfin si l'intéressé soutient que ce changement d'affectation constituerait une sanction déguisée, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait été inspiré par des considérations autres que l'intérêt du service.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a considéré que la fiche de poste valant affectation pour 2019/2020 constituait une mesure d'ordre intérieur insusceptible de recours et a ainsi rejeté sa demande comme irrecevable. Ses conclusions à fin d'annulation doivent, par suite, être rejetées, ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme sollicitée par l'EPLEFPA du Bas-Rhin en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricoles du Bas-Rhin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricoles (EPLEFPA) du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Wurtz, président,

Mme Bauer, présidente-assesseure,

M. Barteaux, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. BAUER

Le président,

Signé : Ch. WURTZ Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 21NC00530 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00530
Date de la décision : 14/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sandra BAUER
Rapporteur public ?: M. MARCHAL
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-11-14;21nc00530 ?
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