La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2023 | FRANCE | N°21NC00895

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 09 novembre 2023, 21NC00895


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) RM Constructions a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n°1900056 du 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Besançon a prononcé un non-lieu à statuer à concurrences des dégrèvements opérés par l'administration pour un montant de

66 022 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) RM Constructions a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n°1900056 du 26 janvier 2021, le tribunal administratif de Besançon a prononcé un non-lieu à statuer à concurrences des dégrèvements opérés par l'administration pour un montant de 66 022 euros et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mars 2021, la SARL RM Constructions, représentée par Me Baroche, doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 janvier 2021 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière en ce que la réunion de synthèse qui s'est déroulée à l'issue de la procédure a été faite conjointement avec deux sociétés en méconnaissance des principes du contradictoire et de l'indépendance des procédures ;

- le montant du dégrèvement est insuffisant, la somme de 44 516 euros relative à la taxe sur la valeur ajoutée relative aux dépenses liées aux terrains à bâtir aurait dû être déduite du montant de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge s'élevant à 84 504 euros conduisant à un dégrèvement de 77 454 euros et non de 76 973 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL RM Constructions ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2016 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mosser,

- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL RM Constructions, qui exerce une activité de marchand de biens et de lotisseur, a fait l'objet au cours de l'année 2017 d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. A l'issue de ce contrôle, la société a fait l'objet d'une procédure de rectification contradictoire et les impositions supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée ont été mises en recouvrement le 30 mars 2018 à hauteur de 202 733 euros en droit et pénalités au titre de la période susmentionnée. La SARL RM Constructions a contesté les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge dans une réclamation du 30 janvier 2018 qui n'a été admise que partiellement par l'administration le 12 novembre suivant, laquelle a prononcé un dégrèvement à hauteur seulement de 52 355 euros en droits et pénalités. Postérieurement à l'introduction de la requête devant le tribunal, le directeur départemental des finances publiques du Doubs a prononcé un second dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence de la somme de 66 022 euros, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés. La société doit être regardée comme relevant appel du jugement du 26 janvier 2021 du tribunal administratif de Besançon, en tant qu'il a, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements opérés par l'administration par une décision du 14 novembre 2018 pour un montant de 66 022 euros, rejeté le surplus de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat. En outre, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au vérificateur de donner au contribuable, avant l'envoi de la proposition de rectification, une information sur les rectifications qu'il pourrait envisager.

3. En l'espèce, il résulte de l'instruction que les opérations de contrôle qui ont débuté le 7 septembre 2017 au siège social de la SARL RM Constuctions en présence de M. B..., l'un des deux gérants de la société, de la comptable et d'un comptable externe, se sont poursuivies à plusieurs reprises, à savoir les 12, 19 et 25 septembre et 24 octobre 2017. La SARL RM Constructions ne démontre pas que la vérification aurait été conduite dans des conditions qui n'aurait pas offert à ses gérants la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec la vérificatrice. Alors que cette dernière n'était pas tenue de donner aux gérants de la société une information " de synthèse " sur les rappels d'impôts qu'elle envisageait de mettre à sa charge, une réunion de synthèse a été organisée le 14 décembre 2017, au siège social de la SARL RM Constructions en présence des deux gérants de la société, M. B... et M. A..., et de la comptable pour la SARL. Si cette réunion s'est déroulée simultanément avec celle de la société Ankaro dont M. A... est également le gérant, qui exerce la même activité, a le même siège social et faisait également l'objet d'une vérification de comptabilité menée par une seconde vérificatrice, la société n'allègue pas que ses gérants se seraient opposés à une telle réunion conjointe et ne démontre pas que le fait qu'elle partageait l'assistance de son conseil avec la société Ankara l'a empêchée de discuter utilement les rectifications envisagées. Dans ces conditions, la SARL RM Constructions n'établit pas que cette réunion conjointe a été de nature à affecter le débat oral et contradictoire et à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition.

4. Par ailleurs, la SARL, qui n'a pas été induite en erreur, ne démontre pas en quoi cette seule réunion conjointe aurait entraîné une confusion des deux procédures de rectification tandis que l'administration fait valoir, sans être utilement contestée, que les dégrèvements intervenus postérieurement ne sont dus qu'à un changement doctrinal et non, comme le prétend la société requérante, à la complexité alléguée des rectifications. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'indépendance des procédures doit être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

5. D'une part, aux termes de l'article 268 du code général des impôts : " S'agissant de la livraison d'un terrain à bâtir (...), si l'acquisition par le cédant n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d'imposition est constituée par la différence entre : / 1° D'une part, le prix exprimé et les charges qui s'y ajoutent ; / 2° D'autre part, selon le cas : / a) soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du terrain ou de l'immeuble ; / b) soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu'il a effectués. (...) ".

6. D'autre part, en vertu de l'article 278 du même code, " Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée est fixé à 20 %. ". L'article 68 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012, telle que modifiée par la loi de finances pour 2014 et l'article 21 de la loi de finances rectificative pour 2013 précise que le nouveau taux s'applique " aux opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2014. Toutefois, ils ne s'appliquent pas aux encaissements pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est exigible avant cette date. " Le précédent taux était fixé, en vertu de l'article 278 dans sa version alors applicable à 19,60 %.

7. Il résulte de l'instruction que la SARL RM Constructions a acquis, le 30 août 2013, deux parcelles de terrains situées sur la commune de Foucherans pour la somme de 251 858 euros. Le vendeur a déclaré dans l'acte de vente ne pas être assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée. Après la division en lots des parcelles et la réalisation de travaux de viabilisation et d'aménagement des terrains, la société a procédé en 2014 et 2015 à la vente des différents lots du lotissement pour un montant total de 971 750 euros. A hauteur d'appel, la SARL RM Constructions ne conteste plus que cette opération entre dans le champ de l'article 268 précité fixant le régime de taxation sur la marge mais soutient que la taxe sur la valeur ajoutée déductible aurait dû être déduite du montant de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge indiquée dans la décision de rejet de la réclamation préalable et ainsi aboutir à un dégrèvement en droits de 77 454 euros au lieu de 76 973 euros.

8. Il est constant que le prix de vente toutes charges comprises s'élève à 971 750 euros duquel doit être déduit, pour calculer la marge sur laquelle s'applique la taxe sur la valeur ajoutée, les frais pour l'achat des terrains, les dépenses de viabilisation, les autres dépenses déductibles et le prix d'achat des terrains. La cession des terrains étant intervenue postérieurement au 1er janvier 2014, il y a lieu d'appliquer un taux de taxe sur la valeur ajoutée de 20 %. En revanche, pour les travaux de viabilisation qui ont été réglés en 2012 et 2013, le taux applicable s'élève à 19,6 %, le montant hors taxes de ces travaux est donc fixé à 144 502 euros. Ainsi, la marge brute toutes taxes comprises s'élève à la somme de 679 848 euros tandis que la marge brute hors taxes, calculée en retirant de la marge sur les terrains hors taxes, le montant hors taxes des travaux, s'élève à 422 038 euros et non à 422 519,43 euros comme indiqué par erreur dans la décision de rejet de la réclamation préalable. Il en résulte que la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge s'élève à 84 985 euros et non 84 504 euros comme indiqué dans la décision de rejet de la réclamation préalable. Il y a lieu de déduire de cette somme la taxe sur la valeur ajoutée sur les autres dépenses déductibles qui s'élève à la somme non contestée de 44 516 euros. Ainsi la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge due s'élève à la somme de 40 469 euros. La SARL RM Constructions ayant fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 117 442 euros en droits, les deux dégrèvements prononcés en sa faveur, d'un montant de 32 938 euros puis de 44 035 euros en droits, conduisent, comme l'a fait l'administration dans son décompte final, à ce que la taxe sur la valeur ajoutée nette restante soit mise à la charge de la société requérante à hauteur de 40 469 euros. Dans ces conditions, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait commis une erreur dans le calcul de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL RM Constructions n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté le surplus de sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée dans toutes ses conclusions y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL RM Constructions est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL RM Constructions et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Mosser, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023.

La rapporteure,

Signé : C. Mosser Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 21NC00895


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00895
Date de la décision : 09/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Cyrielle MOSSER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : BAROCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-11-09;21nc00895 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award