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10/10/2023 | FRANCE | N°22NC00313

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 10 octobre 2023, 22NC00313


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Besançon, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de désigner un expert pour déterminer la nature et les causes du désordre affectant sa maison d'habitation à Le Pasquier.

Par une ordonnance du 27 novembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a fait droit à sa demande et a confié l'expertise à M. B... A....

M. E... a demandé au tribunal administratif d

e Besançon de prononcer la récusation de cet expert.

Par un jugement n° 2000939 du 10 déce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Besançon, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, de désigner un expert pour déterminer la nature et les causes du désordre affectant sa maison d'habitation à Le Pasquier.

Par une ordonnance du 27 novembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a fait droit à sa demande et a confié l'expertise à M. B... A....

M. E... a demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la récusation de cet expert.

Par un jugement n° 2000939 du 10 décembre 2021, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 février 2022 et 30 août 2022, M. E..., représenté par Me Cholet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2000939 du 10 décembre 2021 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) de récuser M. A..., expert, de la mission d'expertise qui lui a été confiée par ordonnance du 27 novembre 2020.

Il soutient que :

- sa demande de récusation est recevable ;

- l'expert a fait preuve de partialité : il refuse d'étudier les atteintes faites au mur et d'entendre la société Enedis, laquelle s'est pourtant chargée du raccordement et de l'installation du coffret d'alimentation d'énergie électrique situé contre la façade de sa maison ;

- l'expert a méconnu le principe du contradictoire : il a réalisé des constations hors de la présence des parties.

Par un mémoire enregistré le 7 avril 2022, la société Enedis, représentée par Me Orier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête de M. E... est irrecevable car son conseil n'a pas justifié d'un pouvoir spécial ni en première instance, ni en appel comme le prévoit l'article R. 621-6-1 du code de justice administrative ;

- la partialité de l'expert n'est pas démontrée :

. le requérant ne fait nullement état de circonstances de nature à établir que M. A... aurait pu favoriser une partie prenante au détriment d'une autre ;

. si le requérant critique la méthode d'expertise et les compétences de l'expert, ces griefs ne sont pas de nature à fonder une récusation ;

- le requérant ne peut utilement soulever le moyen tiré de la méconnaissance du contradictoire au soutien d'une demande de récusation d'un expert ; en tout état de cause, le moyen n'est pas fondé.

Par un mémoire enregistré le 11 avril 2022, la communauté de communes Champagnole Nozeroy Jura, représentée par Me Dravigny, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 13 avril 2022, M. A..., représenté par Me Gay, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Le syndicat mixte d'énergie, d'équipement et de e-communication du Jura, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Cholet, représentant M. E..., de Me Dravigny, représentant la communauté de communes Champagnole Nozeroy Jura et de Me Barthelemy, représentant la société Enedis.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., propriétaire d'une maison située sur le territoire de la commune de Le Pasquier a sollicité auprès du président du tribunal administratif de Besançon une expertise en vue de déterminer, d'une part, si l'affaissement d'un mur en pierre de cette maison, jouxtant la voie communale, résulte des travaux d'installation ou du fonctionnement d'une micro-station d'épuration et, d'autre part, le coût des travaux de remise en état. Par une ordonnance du 27 novembre 2020, le président du tribunal administratif de Besançon a désigné en qualité d'expert M. A... avec pour mission, notamment, de donner un avis motivé sur les causes et origines des désordres affectant le mur de la maison de M. E.... Ce dernier a demandé au tribunal administratif de Besançon de récuser cet expert. M. E... relève appel du jugement du tribunal administratif de Besançon du 10 décembre 2021 qui a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article L. 721-1 du code de justice administrative : " La récusation d'un membre de la juridiction est prononcée, à la demande d'une partie, s'il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité ". Aux termes de l'article R. 621-6 du même code : " Les experts ou sapiteurs mentionnés à l'article R. 621-2 peuvent être récusés pour les mêmes causes que les juges (...) La partie qui entend récuser l'expert ou le sapiteur doit le faire avant le début des opérations ou dès la révélation de la cause de la récusation. Si l'expert ou le sapiteur s'estime récusable, il doit immédiatement le déclarer au président de la juridiction (...) ". Aux termes de l'article R. 621-6-4 du même code : " Si l'expert acquiesce à la demande de récusation, il est aussitôt remplacé. / Dans le cas contraire, la juridiction, par une décision non motivée, se prononce sur la demande, après audience publique dont l'expert et les parties sont avertis (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées du code de justice administrative que la récusation d'un expert ne peut être prononcée que s'il existe une raison sérieuse de mettre en doute son impartialité. Il appartient au juge, saisi par une partie à l'expertise demandant qu'il soit procédé à la récusation de l'expert et à son remplacement, de rechercher si les éléments et circonstances qui sont soumis à son appréciation permettent de faire douter de l'impartialité de l'expert dans la conduite des opérations qui lui ont été confiées.

4. Pour mettre en doute l'impartialité de M. A..., le requérant fait valoir que celui-ci aurait, d'une part, refusé d'étudier les atteintes faites au mur, fournit aucune analyse réelle dans son rapport, appliqué des normes inadaptées et refusé d'entendre la société Enedis, chargée du raccordement et de l'installation du coffret d'alimentation d'énergie électrique situé contre la façade de sa maison et, d'autre part, méconnu le principe du contradictoire en se rendant sur les lieux sans la présence des parties. Toutefois, aucune de ces critiques, qui relèvent de la régularité et du bien-fondé de l'expertise, ne permettent de faire douter de l'impartialité de l'expert dans la conduite des opérations qui lui ont été confiées.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée en défense, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la récusation de M. A....

Sur les frais liés au litige :

6. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E..., les sommes demandées par la communauté de communes Champagnole Nozeroy Jura et la société Enedis, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche, de mettre à la charge de M. E..., une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : M. E... versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la communauté de communes Champagnole Nozeroy Jura et la société Enedis au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., à M. B... A..., à la communauté de communes Champagnole Nozeroy Jura, à la société Enedis et au syndicat mixte d'énergie, d'équipement et de e-communication du Jura.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 octobre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. C...

La République mande et ordonne au préfet du Jura en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. C...

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N° 22NC00313


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00313
Date de la décision : 10/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Récusation

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : CHOLET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-10-10;22nc00313 ?
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