La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/10/2023 | FRANCE | N°20NC03629

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 10 octobre 2023, 20NC03629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et M. F... C... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté n° BFC-2018-04-23-007 du 23 avril 2018 du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté en tant qu'il leur a refusé l'autorisation d'exploiter les parcelles agricoles cadastrées ZA n° 4, B n° 201, B n° 204, B n° 205, B n° 454 et ZC n° 34, situées sur le territoire des communes de Chamesol, Pierrefontaine-lès-Blamont et Villars-lès-Balmont ainsi que la décision du 6 août 2018 rejetant leur recours gra

cieux.

Par un jugement n° 1801801 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et M. F... C... ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté n° BFC-2018-04-23-007 du 23 avril 2018 du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté en tant qu'il leur a refusé l'autorisation d'exploiter les parcelles agricoles cadastrées ZA n° 4, B n° 201, B n° 204, B n° 205, B n° 454 et ZC n° 34, situées sur le territoire des communes de Chamesol, Pierrefontaine-lès-Blamont et Villars-lès-Balmont ainsi que la décision du 6 août 2018 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1801801 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2020, MM. C..., représentés par la Selas Legi Conseil Bourgogne, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 15 octobre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté n° BFC-2018-04-23-007 du 23 avril 2018 du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté en tant qu'il leur a refusé l'autorisation d'exploiter les parcelles agricoles cadastrées ZA n° 4, B n° 201, B n° 204, B n° 205, B n° 454 et ZC n° 34, situées sur le territoire des communes de Chamesol, Pierrefontaine-lès-Blamont et Villars-lès-Balmont ainsi que la décision du 6 août 2018 rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté préfectoral litigieux est insuffisamment motivé ;

- il est intervenu au terme d'une procédure irrégulière au regard des articles D. 331-4-1 et R. 331-4 du code rural et de la pêche maritime car la demande concurrente du GAEC Farey de Lomont a été présentée tardivement ;

- la consultation de la commission départementale d'orientation de l'agriculture est irrégulière car il y a eu détournement de pouvoir ;

- la décision de refus d'autorisation d'exploiter s'analyse en un retrait tardif de l'autorisation d'exploiter dont ils étaient bénéficiaires depuis la décision du 24 avril 2016 ;

- l'arrêté préfectoral est entaché d'une erreur de droit ou d'appréciation car ils n'étaient pas soumis à autorisation d'exploiter ; depuis la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006, une autorisation d'exploiter n'est plus nécessaire en cas de diminution du nombre des exploitants de sorte que le décès de leur père n'a eu aucun impact sur la possibilité de poursuivre l'exploitation des parcelles ;

- c'est à tort que l'arrêté les a classés en rang de priorité n° 8 au motif qu'ils ne remplissaient pas les conditions de capacité professionnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2022, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 29 décembre 2017, MM. D... et F... C... ont présenté une demande d'autorisation pour exploiter un ensemble de parcelles, situées sur le territoire des communes de Chamesol, Pierrefontaine-lès-Blamont, Abbevillers, Pont de Roide et Villars-lès-Balmont d'une superficie totale de 85 ha 92 a 22 ca, qui était auparavant mis en valeur par leur père, M. A... C..., décédé le 18 septembre 2017. Le GAEC Farey du Lomont a présenté une demande, partiellement concurrente, tendant à obtenir une autorisation d'exploiter une superficie de 15 ha 92 a 10 ca correspondant aux parcelles cadastrées section ZA n° 4, section B n°s 201, n° 204, n° 205, n° 454 et section ZC n° 34, situées sur le territoire des communes de Chamesol, Pierrefontaine-lès-Blamont et Villars-lès-Balmont. Par un arrêté n° BFC-2018-04-23-008 du 23 avril 2018, le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté a autorisé le GAEC Farey du Lomont à exploiter cette superficie de 15 ha 92 a 10 ca. Par un arrêté du même jour, n° BFC-2018-04-23-007, le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté, d'une part, n'a pas autorisé MM. C... à exploiter cette superficie de 15 ha 92 a 10 ca et, d'autre part, a accordé son autorisation pour l'exploitation des autres parcelles demandées. Le 17 mai 2018, MM. C... ont exercé un recours gracieux contre ce dernier arrêté que le préfet a rejeté par une décision du 6 août 2018. Les requérants ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler cet arrêté n° BFC-2018-04-23-007 du 23 avril 2018, en tant qu'il leur est défavorable ainsi que la décision du 6 août 2018 rejetant leur recours gracieux. MM. C... relèvent appel du jugement du 15 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime : " (...) II. -La décision d'autorisation ou de refus d'autorisation d'exploiter prise par le préfet de région doit être motivée au regard du schéma directeur régional des exploitations agricoles et des motifs de refus énumérés à l'article L. 331-3-1. Lorsque l'autorisation n'est que partielle, la décision précise les références cadastrales des surfaces dont l'exploitation est autorisée et celles des surfaces pour lesquelles cette autorisation n'est pas accordée. (...) ". Aux termes de l'article L. 331-3-1 du même code : " L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : 1° Lorsqu'il existe un candidat à la reprise ou un preneur en place répondant à un rang de priorité supérieur au regard du schéma directeur régional des structures agricoles mentionné à l'article L. 312-1 ; (...) ".

3. Il ressort des termes de l'arrêté préfectoral litigieux que celui-ci cite l'article R 331-6 II précité relatif à la motivation et précise les critères des rangs de classement 6 et 8 tels que prévus par le schéma directeur régional des exploitations agricoles (SDREA) de Franche-Comté. Il mentionne que le coefficient d'exploitation du GAEC Farey du Lomont est, avant reprise, de 0,794 et, après reprise, de 0,842, de sorte qu'il est inférieur au coefficient d'exploitation fixé à 1 pour l'agrandissement d'une exploitation agricole inférieure à l'exploitation de référence avant reprise pour en déduire que le GAEC est placé en rang de priorité n° 6. Enfin, il précise que les requérants sont placés en rang de priorité n° 8 car ils ne remplissent pas les conditions de capacité professionnelle. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écartée.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 331-4 du code rural et de la pêche maritime : " La demande de l'autorisation mentionnée au I de l'article L. 331-2 est établie selon le modèle défini par le ministre de l'agriculture et accompagnée des éléments justificatifs dont la liste est annexée à ce modèle. Si la demande porte sur des biens n'appartenant pas au demandeur, celui-ci doit justifier avoir informé par écrit de sa candidature le propriétaire. (...) Après avoir vérifié que le dossier comporte les pièces requises en application du premier alinéa, le service chargé de l'instruction l'enregistre et délivre au demandeur un accusé de réception. (...) ". Aux termes de l'article D. 331-4-1 du même code : " La publicité prévue à l'article R. 331-4 précise la date de l'enregistrement de la demande et indique la date limite de dépôt des dossiers de demande d'autorisation. (...). "

5. Il ressort des pièces du dossier que la direction départementale de l'équipement a délivré le 8 mars 2018 au GAEC Farey du Lomont un accusé réception attestant que son dossier a été enregistré complet au 7 mars 2018, soit le jour de la date limite de dépôt des dossiers de demande d'autorisation fixée au 7 mars 2018 en ce qui concerne les terres litigieuses. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure au motif que la demande concurrente du GAEC Farey du Lomont aurait été présentée tardivement doit donc être écarté.

6. En troisième lieu, ni la présence d'un des parents des membres du GAEC Farey du Lomont au sein de la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDAO) du 12 avril 2018, lequel a quitté la salle pour ne pas assister aux débats relatifs à ce dossier selon le compte rendu de cette commission, ni l'envoi d'une convocation à une réunion locale le 11 avril 2018 sans lien avec cette commission, ne démontrent l'irrégularité de la procédure.

7. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la décision du 23 avril 2018 qui concerne une nouvelle demande d'autorisation d'exploiter déposée par des bénéficiaires distincts ne procède pas au retrait de la décision du 24 avril 2016 dont ont bénéficié M. A... C..., père et M. D... C..., fils. Par suite, le moyen selon lequel l'arrêté préfectoral litigieux constituerait un retrait illégal et tardif de l'autorisation d'exploitation délivrée le 24 avril 2016 doit, en tout état de cause, être écarté.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime : " I. -Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : 1° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles(...) 3° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole : a) Dont l'un des membres ayant la qualité d'exploitant ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle fixées par voie réglementaire (...) ". Enfin, l'article 5 du SDREA fixe, dans un tableau, le seuil retenu pour le déclenchement du contrôle des structures pour les exploitations agricoles pour chaque territoire classé en zonage allant de A à I.

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'installation des requérants portait sur une exploitation de 90 ha 80 a 62 ca, soit sur une installation supérieure au seuil de déclenchement du contrôle des structures agricoles du SDREA de la région Franche-Comté qui est fixé à 79 ha pour les communes du territoire " G ", dans lesquelles sont situées les parcelles concernées. Ainsi, le projet d'exploitation des consorts C... était soumis à autorisation préalable conformément au 1° de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime précité. Si les requérants font valoir que l'arrêté préfectoral serait entaché d'une erreur de droit ou d'appréciation au motif que depuis la loi du 5 janvier 2006 d'orientation agricole une autorisation d'exploiter n'est plus nécessaire en cas de diminution du nombre des exploitants, ce moyen n'est pas assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien fondé

10. En sixième lieu, aux termes de l'article 1er du SDREA de Franche-Comté : le " chef d'exploitation agricole ou associé en qualité de chef d'exploitation agricole " comme la " personne physique dont l'activité agricole atteint l'activité minimale d'assujettissement (AMA) " qui " peut exercer son activité agricole à titre principal ou secondaire, selon le poids relatif de chacune des activités " et précise que cette " qualité est vérifiée sur la base d'une attestation délivrée par la caisse de mutualité sociale agricole ". Est considéré comme " chef d'exploitation principal " " toute personne exerçant une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, qui bénéficie des prestations AMEXA·en qualité d'agriculteur à titre principal et justifie de plus de 50% du revenu du chef d'exploitation issu de son activité agricole ". A le caractère d'un " chef d'exploitation à titre secondaire " l'" agriculteur dont le revenu agricole est inférieur au revenu fiscal d'une autre activité ou l'agriculteur travaillant plus de 1 200 heures par an en dehors de l'exploitation ". Enfin, l'article 3 du SDREA intitulé " Ordre de priorités " précise que les autorisations d'exploiter sont délivrées selon un ordre de priorité décroissant allant de un à huit.

11. Si les requérants font valoir qu'ils ont précisé dans leur demande d'autorisation d'exploiter qu'ils avaient la qualité de chefs d'exploitation et que dans la fiche 1 " société " ils ont également précisé avoir la capacité professionnelle agricole, ils ne démontrent pas qu'ils auraient donné des éléments à l'administration justifiant de ces capacités, ni ne soutiennent que l'administration aurait refusé de prendre en compte des éléments qu'ils auraient produits pour justifier de cette capacité. Ils ne produisent d'ailleurs au stade contentieux aucun document permettant de justifier de leur capacité professionnelle. Dans ces conditions, ils n'établissent pas que le préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté a commis une erreur d'appréciation en les classant en rang de priorité n° 8.

12. Il résulte de ce qui précède que les consorts C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° BFC-2018-04-23-007 du 23 avril 2018 du préfet de la région Bourgogne-Franche-Comté en tant qu'il leur a refusé l'autorisation d'exploiter les parcelles agricoles cadastrées section ZA n° 4, section B nos 201, 204, 205, 454 et section ZC n° 34, situées sur le territoire des communes de Chamesol, Pierrefontaine-lès-Blamont et Villars-lès-Balmont ainsi que la décision du 6 août 2018 rejetant leur recours gracieux. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également, par voie de conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de MM. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à M. F... C... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. E...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. E...

2

N° 20NC03629


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03629
Date de la décision : 10/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : LEGI CONSEILS BOURGOGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-10-10;20nc03629 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award