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29/06/2023 | FRANCE | N°22NC02444

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 29 juin 2023, 22NC02444


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 9 mai 2022 par lequel la préfète de la Haute-Marne a prolongé d'une année supplémentaire la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 27 octobre 2021 par le préfet de Meurthe-et-Moselle.

Par un jugement n° 2201500 du 23 août 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 septembre 2022, M. A.

.., représenté par Me Couronne, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 9 mai 2022 par lequel la préfète de la Haute-Marne a prolongé d'une année supplémentaire la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 27 octobre 2021 par le préfet de Meurthe-et-Moselle.

Par un jugement n° 2201500 du 23 août 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 septembre 2022, M. A..., représenté par Me Couronne, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 août 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 mai 2022 par lequel la préfète de la Haute-Marne a prolongé d'une année supplémentaire la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 27 octobre 2021 par le préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Haute-Marne de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) d'enjoindre à la préfète de la Haute-Marne de retirer le signalement aux fins de non admission dans le système Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens et la somme de 2 000 euros sur le fondement combiné des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision n'est pas suffisamment motivée quant à son principe et quant à sa durée ;

- en l'absence des quatre critères prévus par la loi, la décision est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2022, la préfète de la Haute-Marne conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant albanais né le 20 avril 1978, marié à Mme C... A... avec qui il a eu quatre enfants, B... née en 2007, Artemisa née en 2009, Juljana née en 2012 et Romelia née en 2016, est entré sur le territoire français une première fois le 1er avril 2013. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) puis la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) et il a ensuite fait l'objet le 14 novembre 2014 d'une décision de refus d'admission au séjour et d'une obligation de quitter le territoire français. Le 24 janvier 2017, il a également fait l'objet d'une interdiction de retour sur le territoire français et a été éloigné par voie aérienne le 14 avril 2017. A la suite de son retour en France le 5 mars 2019, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour le 18 juin 2020 qui lui a été implicitement refusée le 18 octobre 2020. Le 26 octobre 2021, il a été interpellé par les services de la police aux frontières. Par deux décisions du 27 octobre 2021, la préfète de la Haute-Marne l'a, d'une part, obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois, et, d'autre part, l'a assigné à résidence au sein de la Métropole du Grand Nancy pour une durée de quarante-cinq jours renouvelables avec une obligation de présence au domicile de 7 h à 10 h du matin et une obligation de pointage au commissariat tous les jeudis à 15 h. La légalité de ces décisions a été confirmée par un arrêt de la présente Cour du 17 novembre 2022. Par un arrêté du 9 mai 2022, la préfète de la Haute-Marne a prolongé d'une année supplémentaire la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée le 27 octobre 2021. Par la présente requête, M. A... fait appel du jugement du 23 août 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut prolonger l'interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans dans les cas suivants : / 1° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français alors qu'il était obligé de le quitter sans délai (...) Compte tenu des prolongations éventuellement décidées, la durée totale de l'interdiction de retour ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, sauf menace grave pour l'ordre public. " et de l'article L. 612-10 de ce même code, " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ". En application des dispositions des articles L. 612-11 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut, dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels et des principes généraux du droit, prolonger une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans, en se fondant pour en justifier tant le principe que la durée, sur la durée de la présence de l'intéressé en France, sur la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, sur la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et sur la menace à l'ordre public que représenterait sa présence en France. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision de prolonger une interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

3. En premier lieu, il ressort des termes de la décision contestée que pour décider de prolonger l'interdiction de retour sur le territoire français prise à l'encontre de M. A..., la préfète de la Haute-Marne, après avoir cité les dispositions du 1° de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a indiqué qu'il a fait l'objet de mesure d'éloignement à laquelle il s'est soustrait, qu'il se maintient irrégulièrement sur le territoire français, que sa femme et ses enfants se trouvent en situation irrégulière et que la cellule familiale peut se reconstituer dans le pays d'origine et qu'ainsi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est respecté. Il en résulte que la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de ce que le préfet n'a pas fait mention des quatre critères prévus par l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont écartés.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A.... Par suite, le moyen est écarté.

5. En troisième lieu, même si M. A... se prévaut de l'intégration de ses enfants mineurs en France, de sa volonté de s'insérer au sein de la société française et de la durée de leur séjour sur le territoire français avec l'ensemble de leur famille, il ressort toutefois des pièces du dossier que sa famille se trouve également en situation irrégulière et que son maintien sur le territoire français résulte du non-respect de la mesure d'éloignement. En outre, il n'établit pas qu'ils seraient dans l'impossibilité de reconstituer leur cellule familiale dans leur pays d'origine, où ses enfants mineurs ont vocation à le suivre et où il n'est pas démontré que ces derniers ne pourraient poursuivre leur scolarité. Enfin, il ne fait mention d'aucune autre relation en France. Dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est écarté.

6. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être énoncés, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant prolongation des interdictions de retour sur le territoire français est entachée d'une erreur d'appréciation dans son principe ou dans sa durée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Haute-Marne.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 juin 2023.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : E. DelorsLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC02444


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02444
Date de la décision : 29/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : AARPI BDF AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-06-29;22nc02444 ?
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